l'innommable menace
par Philippe Laborie
L'Harmattan, Préface J.Chazaud, 2002 |
LE PATIENT ABSENT DE JACQUES LACAN « S'affichant clandestinement pure, la voix ne pouvait que se faire entendre ineffable et s'imposer tragiquement à la victime. Son corps se morcelait, inexorablement, au rythme des multiples clins d'il du grand Regard pour éclater hors structure, sous les coups d'une terrifiante suggestion miroitante. Un écho déformé de son imago par une kyrielle de signifiants n'est pas sans évoquer, à sa façon, le parfum empoisonné du narcisse utilisé, pour ravir Perséphone, par Hadès, le dieu des morts, symbole des enfers, maître, impitoyable dont nul n'osait prononcer le nom de peur d'attiser son courroux ». Jamais encore un ancien membre du Sérail n'avait 'écrit un pamphlet d'une telle violence pour dénoncer d'expérience que « la psychanalyse n'a, à proprement parler, reproduit, au contact d'une de ses 'écoles officielles tout au moins que supercherie, manipulation mentale et corruption ». |
Philippe LABORIE a étudié la Philosophie, la Psychanalyse, le Droit, l'Histoire et le Cinéma. Il est l'auteur de poèmes et de nouvelles. Il travaille dans la communication et le journalisme et est actuellement Responsable de Rédaction d'un magazine. |
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"Texte Zarathoustrien vitupérant contre le dernier des hommes..." écrit Jacques Chazaud dans l'avant propos. Les ouvrages sur Lacan ne sont jamais neutres. L'expérience analytique (et plus encore dans cette Ecole si singulière) étant plus de l'ordrede la révélation ("La révélation est le ressort dernier de ce que nous cherchons dans l'expérience analytique", Séminaire I,1975, p59) que de l'expression ou de la démonstration, rend inévitable ce type de biais. On va ainsi, généralement, de l'hagiographie béate (la "Vie des Saints" dit E.Roudinesco parlant de Judith Miller) au rejet plus ou moins brutal mais souvent trés argumenté (A.Green, D.Anzieu, F.Roustang, Fr.George, J.Chazaud, Borch-Jacobsen, etc...). Les contestataires sont parfois trés techniques et très érudits (ils connaissent mieux le grec et les mathématiques, Freud, Hegel et Kojève que Lacan lui même). Ils peuvent contester sa linguistique (Mounin), son structuralisme (Piaget), ses mathématiques (Sokal et Bricmont, Petitot), sa philosophie (Ey, Ricoeur, L.Ferry et A. Renaut, Borch), etc... leur voix est couverte et bientôt étouffée par les protestations des dévots. Fut-il dévot avant de brûler sa soutane?... Peu importe de Ph.Laborie dans ce réquisitoire (inquisitoire ?), quand bien même regretterait-on chez lui l'absence d'un humour détaché qui faisait de "L'effet Yeau de poèle de Lacan et des lacaniens" de François George (Hachette 1979) un livre trés divertissant. Ici, ça grince un peu, beaucoup même...mais c'est, après tout, conforme à l'humour (l'humeur?) des lacaniens dont il se dégage avec tant de souffrance («effet de structure», sans doute). N'écrit-il pas (p91) que "le lacanisme est, avant tout, le discours du ressentiment"...Même lorsqu'il croit adopter un "ton enjoué"(cf JA.Miller et sa "Lettre à l'opinion éclairée" du 13 septembre 2001). L'auteur, interrogé, préfère qu'on dise de lui ou de son texte (il ne fait vraiment qu'un avec, comme l'explique et le devine J.Chazaud, dans la Préface) qu'il est "désenchanté". Bien au courant tout de même... C'est pour cela qu'il faut le lire. Après tout, c'est encore l'année Lacan, pour le meilleur et pour le pire. Le pire, c'est JA.Miller lui-même, dans sa Lettre, qui nous le délivre, dans le style grandiloquent de «lacanien sans-culotte», prélude à «lagit-prop dans les beaux quartiers»(J.Birnbaum in Le Monde) : «Voici un demi siècle que Paris est parcouru des vibrations de haine qu'émettent incessamment les psychanalystes, haines neuves comme au premier jour, dont chaque décennie grossit le fleuve de nouveaux affluents. L'inconscient ne connaît pas le emps, les psychanalystes non plus». RMP (sept.2001) |