FÉDÉRATION FRANÇAISE DE PSYCHIATRIE

 

Conseil d’Administration :   Fédération Française de Psychiatrie le 15 janvier 2007.

 

Etat des projets 2007 : Présentation par Olivier LEHEMBRE,  Président F.F.P.

L’éditorial de Jean Charles PASCAL dans Pour la Recherche de décembre 2006 et son propos ouvrant l’Assemblée Générale ont valeur de bilan mais aussi sont un état des projets pour 2007 lesquels vont dans la continuité des projets et actions initiés.

Il parle de discontinuité nécessaire à l’alternance par le changement de Président, et en effet nous sommes confrontés à des changements importants dans notre fonctionnement par des relations évolutives avec nos mandants, mais surtout avec nos interlocuteurs institutionnels vis à vis desquels nous tentons de maintenir des relations de partenariat.

L’image de la FFP 

La FFP est souvent interpellée comme garant d’une unité menacée de la psychiatrie.

Nous sommes interpellée par nos associations, par des collègues isolés, par des usagers et d’autres associations, par nos interlocuteurs institutionnels.

La recommandation sur le diagnostic de l’autisme , l’Audition Publique sur l’expertise psychiatrique pénale sont des exemples significatifs de notre place privilégiée mais nous avons été aussi marginalisés dans diverses actions concernant la psychiatrie.

L’expertise collective sur les Troubles des Conduites chez l’enfant a été réalisée sans que nous en soyons participant ; le mouvement associatif a été critique et productif pour obtenir une journée de travail particulièrement intéressante sur ce sujet, mais qui ne devrait pas rester sans quelques rebondissements .

Pour l’Audition Publique sur la Psychopathie nous avons été associés mais peu intervenants dans le choix des experts et dans la réalisation, malgré notre participation par l’intermédiaire de Marc GROHENS au Comité d’Organisation.

Pour l’audition publique sur les polyconsommations qui se réalise les 1er et 2 février 2007 nous n’avons pas été associés explicitement.

Pour le Décret sur la formation aux psychothérapies nous n’avons été que partiellement associés à la concertation qui s’est déroulée dans une atmosphère complexe et passionnelle.

 

Nous devons prendre en compte cette évolution et nous positionner pour participer plus activement à ces travaux qui visent profondément à réformer l’exercice de la médecine, mais aussi de la psychiatrie dans ses relations avec la médecine, et peut être avec le risque de marginaliser la psychiatrie, les psychiatres et les malades.

Je vous renvoie à ce programme 2007 de la Haute Autorité de Santé pour lequel nous devons rendre ce jour des propositions de participation. Notre réponse sera favorable pour participer mais nous demandons un échange de points de vue sur nos possibilités d’intervenir dans un tel programme.

Il apparaît important que nous nous préoccupions des réponses que nous pouvons apporter mais surtout des propositions que nous pouvons faire pour infléchir vers davantage de prise en compte de la psychiatrie dans le système de soins .

Nous avons vu les réactions à la  plaquette de l’H.A.S. sur la stimulation intracérébrale dans les T.O.C.,   réactions polémiques sans doute, mais qui témoignent d’un risque de discrédit de la H.A.S. en publiant une telle plaquette.

Nous savons que l’élaboration de la R.P.C. sur la prise en charge des états dépressifs chroniques est en difficultés.

 

Avec la D.G.S. nous avons eu une rencontre récente afin de débloquer le projet de conférence de consensus sur la prise en charge des endeuillés après suicide ; nous avons vu que notre projet ne pourra être intégralement financé et que la réponse reste très incertaine.

Les incertitudes électorales mettent en suspens les projets.

Les préoccupations du Ministère sont davantage centrées sur les thèmes de Santé Publique et des thèmes éventuellement sensibles politiquement,  tels les malades mentaux en prison, la prise en charge des schizophrénie, les consommations de psychotropes …

On voit se confirmer une vision clivée de la pathologie mentale répartie en « besoins de santé mentale » qui représentent 20 % de la population, relèvent des généralistes, des psychologues et des psychothérapeutes, et  en « besoins en psychiatrie » qui représentent 5% de la population et qui sont du ressort des psychiatres et de la psychiatrie.  Le manque de psychiatres fait envisager ainsi une planification des moyens selon se schéma.

Une enquête de la DREES actuellement en cours aborde également cette question sur le contenu de la consultation du psychiatre, sur la coordination et sur la réponse à l’urgence chez les psychiatres libéraux.

 

Nous voyons que nous sommes appelés à participer à ces actions gérées par l’HAS et par la DGS, à cautionner ces travaux, à en figurer comme partenaire, mais en aucune façon à être rémunéré pour ces actions, voire même à être remboursé des frais de déplacements.

Nos financements sont donc très incertains pour 2007 et sans doute appelés à être considérablement réduits voire à disparaître, malgré ces sollicitations de l’HAS et la bienveillance affichée par la D.G.S.

 

Sur ces sujets auxquels les psychiatres sont particulièrement sensibles , les provocations ne manquent pas et nombre de nos collègues répondent avec passions mais hâtisent les querelles et radicalisent des positions associatives et institutionnelles.

Nous l’avons vu au sujet de la reconnaissance du statut de psychothérapeute avec des résultats assez dévastateurs pour l’image des psychiatres, psychothérapeutes et psychanalystes.

La F.F.P. doit sauvegarder une image cohérente de la psychiatrie mais doit aussi réagir .

J’essaierai d’allier prudence mais aussi d’afficher des positions en faveur de la psychiatrie.

 

La promotion des actions de la F.F.P. et les sujets à soutenir

Nous avons réalisé des travaux importants et nous avons sans aucun doute à soutenir des travaux des associations composant la fédération ; nous avons à soutenir la promotion et le suivi de ces travaux.

 

Les suites des travaux précédents

- La prise en charge des délinquants sexuels et les insuffisances de réponses actuellement apportées dans le champ de la psychiatrie, à distance d’une conférence de consensus qui a été significative . La D.G.S. nous a interpellé au sujet de la fonction des médecins coordonnateurs. Le nouveau Collège sur la psychiatrie médico-légale pourra se saisir d’un tel sujet.

- La recommandation de pratique sur le diagnostic de l’autisme que Charles AUSSILLOUX a géré mérite des prolongements tant au  niveau de la classification qu’au niveau des prises en charge ; la question reste chargée de controverses mais nous pourrions y réfléchir.

- L’audition publique sur l’expertise psychiatrique pénale va apporter sans aucun doute des réponses bien attendues ; quels prolongements tant pour diffuser les recommandations que pour veiller à des pratiques davantage satisfaisantes dans les relations avec la Justice .

- Nous avons réalisé une conférence de consensus il y a bien longtemps sur la schizophrénie; le sujet mérite d’être réactualisé.  Nous avons réalisé une conférence de consensus sur les schizophrénies débutantes , nous savons l’intérêt de Suzanne PARIZOT sur les psychoses émergeantes , et l’H.A.S. nous demande un « référentiel sur la détection précoce des schizophrénies débutantes chez l’adolescent et l’adulte ». 

- Gérard SCHMIT a travaillé avec le Collège de pédopsychiatrie sur « le repérage précoce des manifestations de souffrance psychique et des troubles du développement chez l’enfant et l’adolescent à l’usage des médecins ».  

- Les avatars de l’expertise INSERM sur les troubles des conduites nous montrent que nous avons à communiquer sur ces sujets et à faire des propositions à nos interlocuteurs qui se préoccupent de santé publique, mais aussi « d’économie de la santé » ou de faire des économies pour la santé….

 

L’Evaluation des Pratiques Professionnelles

La journée du 3 mars 2006 sur l’E.P.P. a eu pour but d’informer, sensibiliser, et stimuler les associations pour que cette obligation de l’E.P.P. se révèle stimulante pour chacun et pour nos associations, pour que nous puissions nous approprier la méthode, la rendre intéressante et attractive avec des référentiels évolutifs correspondant à nos pratiques .

Cette journée a permis d’exprimer des réticences, mais il apparaît que la pratique de l’E.P.P. intéresse nos associations et les praticiens, que des groupes de praticiens élaborent leurs référentiels, et peuvent prétendre au fil de l’expérience les faire partager et les valider.

Nous prévoyons d’organiser courant 2007 une journée pour permettre les échanges nécessaires sur ce sujet.

 

La recherche clinique

Jean Michel THURIN a bien montré l’intérêt de soutenir cette démarche d’E.P.P. pour l’allier et la prolonger par un travail de recherche clinique.

Nous avons à développer la recherche clinique et la mise en réseau des expériences cliniques de chacun dans des protocoles de recherche. La FFP peut être opérateur dans ces projets de recherche clinique et la création d’un pôle Recherche au sein de la FFP devrait permettre de développer un champ d’activités de recherche principalement pour la psychiatrie ambulatoire.

 

Les demandes  de R.P.C. et nos relations avec l’HAS pour une démarche qualité  :

Ceci revient à aborder peut être différemment nos relations entre la psychiatrie et les autres pratiques médicales.

Nous avons à cœur de défendre la psychiatrie et promouvoir une idée humaniste de la psychiatrie pour l’ensemble de la médecine.

Pour exemple , nous avons été sollicités pour l’élaboration de la RPC sur la prise en charge des états dépressifs chroniques.

Un Comité d’organisation a été constitué où nous avons représenté la fédération lequel s’est réuni une fois pour laisser place au groupe de travail chargé d’élaborer ces recommandations.

Frédéric ROUILLON en tant que chargé de présider le groupe de travail  a été remplacé par Pierre THOMAS universitaire à LILLE .

Nous avons eu quelques difficultés à faire passer la représentation de Bernard ODIER et Antoine BESSE pouvant contribuer à soutenir le courant psychodynamique aux côtés d’Eric TANNEAU représentant les T.C.C.   L’ambiance est apparue rapidement tendue dans un conflit opposant TCC et thérapie d’inspiration psychanalytique.  Le texte de la RPC apparaît critiquable et peu convaincant , le thème trop vaste, la clinique insuffisamment précisée, et les recommandations de ce fait venant renforcer le conflit que nous connaissons entre des thérapies ainsi opposées.

 

Le paradoxe apparaît dans une exigence méthodologique qui s’avère exigeante, rigide, mais non appliquée de fait ; une référence à une bibliographie excluant les publications françaises, alors qu’il s’agit bien d’une RPC pour les psychiatres et médecins français dans le système de soins français. Par ailleurs « l’accord professionnel » représentant l’opinion du groupe de travail s’avère fondé sur un groupe de dix personnes choisies selon quelques opportunités.

La représentativité d’un groupe de travail et d’un accord professionnel réclame sans doute une autre méthodologie pour parvenir à un accord de recommandations.

 

- L’expertise INSERM sur le trouble des conduites chez l’enfant pose des questions équivalentes et nous nous réjouissons de la journée du 14 novembre 2006 qui a relancé ce débat et dont le numéro de Pour la Recherche rend bien compte.

- Pour avoir participé au COPIL de l’enquête sur les besoins de soins auprès de la DGS, pour participer au COPIL d’une enquête de la DREES  sur les spécialités, sur le contenu de la consultation, sur la coordination, et les réponses aux urgences, l’expérience montre que nous devons y être présents, apporter notre éclairage , notre savoir-faire, mais qu’il est difficile de contribuer de façon constructive quand les objectifs des promoteurs sont de démontrer , d’étayer leurs options stratégiques prédéfinies.

Sur la question de la coordination, nous nous sommes aperçus que les représentants des différents services ministériels et de la sécurité sociale  sont loin d’être d’accord tant sur les textes que sur leurs applications .

Sur la question des besoins, la dissociation entre « besoins de soins en santé mentale », et « besoins de soins en psychiatrie » vient isoler la psychiatrie du champ de la médecine, et en cela est bien préjudiciable.

 

Les expériences nous montrent l’intérêt de poursuivre notre travail en commun et la nécessité d’une réflexion stratégique.

Nous ne gagnerons rien dans les querelles passionnelles entre chapelles théoriques , entre associations concurrentes.

Nous avons à représenter la psychiatrie dans son ensemble , dans le respect des diversités, et dans le souci de promouvoir les richesses de ces diversités.

Nous avons à sortir d’un certain isolement de la psychiatrie dans lequel on nous contraint.

C’est commode de dissocier besoins en santé mentale et besoins en psychiatrie dansl’esprit de planifier les moyens.

C’est commode de renforcer les conflits entre les psychiatres pour promouvoir une approche de la souffrance psychique en dehors du champ de la psychiatrie, sans mesurer le qualitatif , l’évolution des troubles, et la pertinence des interventions de chacun.

 

Face au programme de l’HAS , nous faisons une réponse d’intérêts et d’intentions , mais sommes nous prêts à nous intéresser aux prescriptions des psychotropes par l’ensemble des médecins, à aider les généralistes à prescrire à meilleur escient, au repérage des troubles par les médecins et aux moyens de prises en charge dans le contexte actuel.

On nous renvoie souvent que nous sommes de fait incapables de prendre en charge, par manque d’effectifs et de moyens, des pathologies que nous entendons faire repérer, dépister. 

 

Nous restons mobilisés sur le projet de Michel HANUS sur la prise en charge des endeuillés après suicide mais nous devons chercher des financeurs privés, nous pensons actuellement à une aide financière de la part d’assureurs et mutuelles. En effet il y a un refus net de l’HAS ; une proposition de différer et de trouver d’autres financeurs pour la DGS qui ne financerait que très partiellement dans une conjoncture politique très mouvante.

Peut on signer des conventions avec la DGS, avec l’HAS  pour des financements limités qui viseraient au moins à financer les frais engagés.

Fonctionnement interne

L’implication de chacun ici est manifeste, des associations membres sont cependant peu présentes.

Le C.A. doit être un lieu de réflexion et de débat pour des décisions soutenues par les associations ; sans doute nous avons besoin d’un temps plus important pour aborder les sujets.

Le bureau qui a été resserré depuis plusieurs années  peine aussi à trouver le temps de débats au vu de l’ampleur de la tâche.

 

Pour ma part, j’essaierai d’être à la hauteur de la tâche ; je suis provincial, je suis prêt à donner du temps mais j’ai aussi une clientèle à gérer .

J’ai sans doute un handicap d’être ainsi provincial et d’avoir un maigre carnet d’adresses ; je solliciterai sans doute chacun pour des avis et des contacts pour aborder les meilleurs interlocuteurs.

Le Conseil scientifique a tout son rôle à jouer sur les sujets qui nous mobilisent .

 

Je vous remercie pour votre confiance, je remercie Jean Charles PASCAL pour sa collaboration passée et à venir, ainsi que tous les membres du Bureau, sur lesquels je ne manquerai pas de m’appuyer pour donner à la psychiatrie française et à la FFP toute leur dimension.

 

Olivier LEHEMBRE