La Cour de cassation, Première Chambre civile, 25 février 1997

Arrêt n° 426. Cassation

Pourvoi n° 94-19.685

 

 

Sur le pourvoi formé par M. Jean-Pierre HEDREUL, demeurant…,

en cassation d'un arrêt rendu le 5 juillet 1994 par la Cour d'appel de Rennes (1re Chambre, section A), au profit :

1°/ de M. C., demeurant…,

2°/ de la société Polyclinique Sévigné, dont le siège est rue du Chêne Germain, 35510 Cesson Sévigné,

3°/ de M. T., demeurant…,

défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Moyens produits par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour M. HEDREUL.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur HEDREUL de sa demande en désignation d'un expert avec une mission similaire à celle du précédent expert désigné par les premiers juges et de son action en responsabilité à l'encontre des médecins et chirurgiens, en raison des troubles dont il est resté atteint à la suite d'une intervention chirurgicale, et pour manquement à leur devoir de conseil,

AUX MOTIFS QU

"il n'est pas contesté que Monsieur HEDREUL a eu un important accident matériel de la circulation la veille de l'expertise, l'expert d'ailleurs en page 2 de son rapport note que ce fait l'avait mis dans un "état psychique un peu perturbé",

toutefois, il n'est pas démontré que cette circonstance de même que l'absence de son avocat à ses côtés lors de ses opérations d'expertise ait pu avoir une incidence sur l'appréhension de ce dossier par l'expert, notamment celui-ci a pu faire un recensement très complet (p. 3, 4 et 5) des doléances de Monsieur HEDREUL, il n'est en rien démontré qu'un élément déterminant ait été omis ou que l'examen de Monsieur HEDREUL n'ait pu utilement être pratiqué le jour des opérations d'expertise.

Monsieur HEDREUL reproche à l'expert d'avoir commis des erreurs quant à la date des opérations en indiquant que l'exérèse du polype s'est réalisé le 16 février alors qu'elle a eu lieu le 15, de même, l'expert mentionne que le malade a pu sortir le 17 février alors que c'est le 16 qu'il a quitté la clinique, enfin, il parle des radios pratiquées le 17 février alors qu'il s'agit du 16 et de celles du 18 février alors qu'elles ont été réalisées le 17 février,

l'expert a effectivement commis une erreur de datation des différentes opérations chirurgicales subies à cette période par Monsieur HEDREUL, toutefois cette simple erreur de date est sans incidence sur la valeur de l'analyse de l'expert puisque la chronologie des diverses interventions et laps de temps les séparant a été très exactement prise en compte par l'expert, le rapport d'expertise n'a fait que décaler d'un jour l'ensemble des événements, objet du litige,

les parties ont soumis à l'expert l'ensemble des documents jugés utiles aux débats,

l'expert a procédé à un examen approfondi de ceux-ci, il n'a pas estimé nécessaire pour formuler l'avis technique qui lui était demandé d'en examiner d'autre,

Monsieur HEDREUL ne produit aucun avis médical démontrant que l'examen d'autres documents aurait pu permettre une appréciation différente de l'expert,

ne saurait être considéré comme tel l'avis établi le 27 décembre 1985 par le Docteur Roland COMTE à la demande de Monsieur HEDREUL, en effet, ainsi que l'a relevé le premier juge, ce rapport est sommaire et peu argumenté, procédant par affirmation et sans démonstration : "il y a lieu de relever un certain degré de maladresse au cours de cette intervention puisqu'il y a eu perforation... le diagnostic de cette opération a été long à poser... ce qui a entraîné une intervention tardive aboutissant à une colostomie",

au contraire le Professeur BLOCH a procédé à une discussion approfondie des différents problèmes soulevés, il a recherché de façon très minutieuse en interrogeant le Docteur C. et en examinant les documents qui lui étaient soumis si la perforation colique pouvait être en rapport avec une erreur ou une imprudence du Docteur C.,

de même, il a relaté de façon très précise la chronologie des interventions pour rechercher s'il y avait eu un retard dans le diagnostic de perforation colique et dans le traitement,

enfin c'est également après un examen très complet du dossier au regard tant des faits que des données acquises de la science médicale, que l'expert a apprécié l'opportunité des traitements.

Monsieur HEDREUL invoque encore la jurisprudence relative à l'absence de consentement éclairé du malade,

toutefois il lui appartient de rapporter la preuve de ce que le médecin ne l'aurait pas averti des risques inhérents à une polypectomie et notamment celui qualifié de non négligeable par l'expert d'une perforation digestive,

Monsieur HEDREUL ne produit aux débats aucun élément accréditant cette thèse,

une nouvelle expertise ne saurait être ordonnée pour suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve,"

ALORS D'UNE PART QU'aux termes de l'article 146 du nouveau Code de procédure civile, une mesure d'instruction peut être ordonnée si la partie qui la sollicite ne dispose pas d'éléments suffisants pour prouver un fait et, seule se voir opposer sa carence, la partie dont les allégations ne s'appuient sur aucun élément précis permettant de lui faire crédit si bien qu'en statuant de la sorte alors que Monsieur HEDREUL faisait valoir qu'aucun document histologique, ni compte-rendu opératoire n'avait été communiqué, ce que n'avait pas manqué de relever le Conseil de l'Ordre des Médecins de BRETAGNE, ce qui caractérisait à tout le moins l'existence d'éléments sérieux de nature à justifier une nouvelle expertise, la Cour a violé le texte susvisé,

ALORS D'AUTRE PART QU'en refusant d'ordonner une expertise, alors que les faits invoqués par Monsieur HEDREUL ne pouvaient être prouvés que par des recherches de pièces en la seule possession des médecins, document histologique et compte rendu opératoire, soit des pièces auxquelles il ne pouvait accéder, les juges ont encore violé l'article 146 du nouveau Code de procédure civile,

ALORS ENSUITE QUE le médecin est tenu à un devoir d'information et de conseil à l'égard de son patient, lequel doit être ainsi dûment informé des risques encourus, qu'en mettant dès lors à la charge de Monsieur HEDREUL, l'obligation de prouver qu'il n'avait pas été informé des risques, qualifiés par la médecine de "non négligeables", qui pouvaient survenir à la suite de l'intervention subie, la Cour a renversé le principe de la preuve et violé ainsi l'article 1315 du Code civil,

ALORS ENFIN QUE en jugeant que Monsieur HEDREUL n'apportait pas la preuve d'un défaut d'information sur les risques encourus qualifiés par la Cour de "non négligeables", tout en tenant pour acquis le fait qu'il n'avait pas bénéficié d'examen de contrôle après sa première intervention chirurgicale, et que c'est seulement le surlendemain que le diagnostic de perforation avait été établi, ce dont il résultait à l'évidence que les médecins n'avaient pas pris les mesures qui s'imposaient afin de prévenir les complications redoutées, la Cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et par suite a violé l'article 1147 du Code civil.

LA COUR, en l'audience publique du 22 janvier 1997. Sur le moyen unique pris en ses deux dernières branches :

Vu l'article 1315 du Code civil ;

Attendu que celui qui est légalement ou contractuellement tenu d'une obligation particulière d'information doit rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation ;

Attendu qu'à l'occasion d'une coloscopie avec ablation d'un polype réalisée par le Docteur C., M. HEDREUL a subi une perforation intestinale ; qu'au soutien de son action contre ce médecin,
M. HEDREUL a fait valoir qu'il ne l'avait pas informé du risque de perforation au cours d'une telle intervention ; que la Cour d'appel a écarté ce moyen et débouté M. HEDREUL de son action au motif qu'il lui appartenait de rapporter la preuve de ce que le praticien ne l'avait pas averti de ce risque, ce qu'il ne faisait pas dès lors qu'il ne produisait aux débats aucun élément accréditant sa thèse ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le médecin est tenu d'une obligation particulière d'information vis-à-vis de son patient et qu'il lui incombe de prouver qu'il a exécuté cette obligation, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 juillet 1994, entre les parties, par la Cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Angers ;

Condamne M. C. aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. T. et de la polyclinique Sévigné.

Sur le rapport de M. Sargos, conseiller, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. Hédreul, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la société Polyclinique… et de M. T., de Me Le Prado, avocat de M. C., les conclusions de M. Roehrich, avocat général. M. LEMONTEY, Président.

La Cour de cassation, Première chambre civile, 14 octobre 1997

Arrêt n° 1564. Rejet

Pourvoi n° 95-19.609

 

 

Sur le pourvoi formé par :

1°/ M. J.-P. G., demeurant…,

2°/ M. Y. G., demeurant avec son père, …,

en cassation d'un arrêt rendu le 31 mai 1995 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre), au profit de Mme J. L., demeurant…,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils pour MM. G..

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. G. et son fils aujourd'hui majeur Yannick de leurs demandes tendant à voir déclarer le Docteur L. responsable des conséquences dommageables du décès de Mme G. et de leur demande tendant à voir condamner ledit Docteur au paiement d'indemnités ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE c'est à bon droit que les premiers juges ont dit que la preuve de l'absence d'information incombe au malade lui-même et en l'espèce à ses ayants droit ; que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le Tribunal a constaté que cette preuve n'était pas rapportée en l'espèce ; qu'en effet, la coelioscopie n'a été prescrite par le Docteur L. qu'après échec du traitement médical et à la suite de divers entretiens avec sa patiente, laissant à cette dernière le temps de la réflexion ; les hésitations de G. G. et son anxiété avant l'opération permettent au contraire de présumer que cette dernière, laborantine titulaire dans le même Centre hospitalier de Quimperlé, était parfaitement informée des risques encourus ; que les témoignages produits et émanant principalement des membres de famille sont insuffisants pour écarter cette présomption ;

ET AUX MOTIFS ENCORE QUE l'obligation d'information des risques encourus pesait à titre principal sur le praticien spécialiste ayant pratiqué la coelioscopie, information complète irréalisable en raison de l'anxiété de la patiente, ainsi qu'en a jugé la Chambre d'accusation de cette même Cour dans son arrêt du 15 décembre 1988 ; que le risque exceptionnel d'embolie gazeuse n'avait pas à faire l'objet d'une information précise par ce spécialiste, pas plus que par le médecin traitant, si bien qu'il convient de confirmer en toutes ses dispositions la décision déférée ;

ET AUX MOTIFS à les supposer adoptés des premiers juges QU'avant toute intervention chirurgicale, le médecin a l'obligation d'avertir son patient des risques encourus afin d'obtenir un consentement libre et éclairé ; qu'en l'espèce, le Docteur J. L. a conseillé à Mme G. d'effectuer une coelioscopie, ayant pour objet de rechercher les causes de la stérilité secondaire dont elle était atteinte ; que cette technique consiste à insuffler du gaz carbonique après incision de la paroi abdominale, et introduction d'un système optique permettant la visualisation de la zone ovarienne ; dans les minutes qui ont suivi cette intervention, Mme G. a été victime d'une embolie gazeuse avec brutale décompensation cardiaque, que malgré les soins prodigués, elle devait décéder le lendemain ;

 

 

ET AUX MOTIFS AUSSI des premiers juges QUE les demandeurs soutiennent que le Docteur L. n'aurait pas informé sa patiente du risque inhérent à l'acte qu'elle préconisait, sans quoi Mme G., qui était déjà mère d'un enfant, ne s'y serait pas soumise ; que l'absence d'information dont la preuve leur incombe n'est toutefois pas démontrée, dans la mesure où il résulte des pièces produites que Mme G. a eu divers entretiens avec son médecin traitant et a pris sa décision après un temps de réflexion très long ; que l'anxiété relevée chez elle par divers témoins après son admission à l'hôpital de Quimperlé n'est pas non plus révélatrice de l'absence d'un consentement éclairé ; qu'il peut au contraire s'en déduire la connaissance par Mme G., laborantine de profession, du danger potentiel de recourir à l'acte coelioscopique comme à toute investigation para-clinique ou toute anesthésie générale ; qu'en outre, si la faute du Docteur L., pour s'être abstenue d'informer complètement Mme G. de tous les risques potentiels, était démontrée, il n'en est pas pour autant justifié que Mme G. eut renoncé, eu égard au caractère tout à fait exceptionnel de la survenance d'une embolie gazeuse, que le lien de causalité entre la faute et le préjudice n'est pas non plus établie, si bien que M. G., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de son fils alors mineur, doit être débouté de l'ensemble de ses demandes ;

ALORS QUE D'UNE PART, lorsque le patient décède lors de l'examen prescrit, ce n'est pas à son ou ses ayants droit d'établir que le praticien n'a pas satisfait son obligation d'information, preuve impossible, mais au praticien lui-même de prouver qu'il a fait le nécessaire quant à ce ; qu'en décidant le contraire, la Cour viole l'article 1315 du Code civil ;

ALORS QUE D'AUTRE PART, les exigences d'un procès équitable, d'un procès à armes égales, font qu'en cas d'impossibilité d'établir la preuve d'une situation, c'est à celui qui peut normalement rapporter ladite preuve de le faire; qu'en déboutant l'ayant droit de la victime d'un examen médical au motif qu'il n'avait pas établi que le médecin n'avait pas satisfait son obligation d'information, cependant que seul le médecin pouvait rapporter la preuve d'une telle information, la Cour viole les exigences d'un procès équitable et partant viole l'article 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales ;

ALORS QUE DE TROISIEME PART et en toute hypothèse, les juges du fond doivent raisonner à partir de certitudes et non de simples présomptions ; qu'en inscrivant dans son arrêt que les hésitations de la patiente et son anxiété avant l'opération permettent de présumer que cette dernière, laborantine, était parfaitement informée des risques encourus, la Cour ne justifie pas son arrêt au regard de l'article 1147 du Code civil ;

ALORS QUE DE QUATRIEME PART, la Cour n'analyse nullement le contenu des entretiens de la patiente avec son médecin traitant, si bien qu'elle ne pouvait sans s'expliquer davantage sur ce chapitre déduire que la preuve de l'absence d'information n'était pas rapportée compte tenu de ces entretiens, d'où une méconnaissance des exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS QUE DE CINQUIEME PART, la Cour écarte les témoignages produits — douze - au seul prétexte qu'ils sont insuffisants pour écarter une présomption d'information et ce sans la moindre analyse - fût-elle succincte — desdits témoignages, d'où une nouvelle méconnaissance des dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

ALORS QUE DE SIXIEME PART, l'obligation d'information pèse indistinctement sur le médecin prescripteur et le médecin chargé de pratiquer l'examen ; qu'en affirmant que l'obligation d'information pesait essentiellement sur le médecin qui a pratiqué la coelioscopie, déchargeant d'autant le médecin prescripteur sans que l'on sache d'ailleurs dans quelle mesure, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil en introduisant une distinction qui ne ressort d'aucun texte, d'aucun principe de droit ;

 

 

ET ALORS ENFIN QUE s'il est vrai qu'en principe les risques exceptionnels n'ont pas à faire l'objet d'une information de la part du médecin à l'endroit du patient, il en va différemment lorsque l'examen médical générateur d'un tel risque pourtant parfaitement connu -fût-il exceptionnel- n'est pas imposé par une nécessité évidente ou un danger immédiat pour le patient et lorsqu'il est de surcroît totalement disproportionné avec l'objectif poursuivi par l'analyse pratiquée ; qu'en ne se prononçant pas sur ces données de nature à avoir une incidence sur la solution du litige, la Cour qui procède par affirmations ne justifie pas davantage son arrêt au regard de l'article 1147 du Code civil.

LA COUR, en l'audience publique du 1er juillet 1997. Sur le moyen unique pris en ses sept branches :

Attendu que Mme G., née en 1957, a eu un enfant en 1977 et que, ne pouvant en avoir un second, elle a subi, notamment à partir de 1982, des examens, bilans hormonaux et traitements qui n'ont pas eu de résultats ; que son médecin gynécologue, Mme L., lui a proposé de procéder à une coelioscopie destinée à rechercher si elle ne présentait pas une étiologie ovarienne expliquant sa stérilité ; qu'au cours de cette intervention, réalisée en mars 1983 par le docteur R., un anesthésiste et en présence de Mme L., est survenue une embolie gazeuse mortelle par migration du gaz d'insufflation dans les vaisseaux cérébraux ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Rennes, 31 mai 1995) a débouté le mari et le fils de la défunte de leur action engagée en 1992 contre Mme L., à laquelle ils reprochaient un défaut d'information sur le risque d'embolie gazeuse lors d'une coelioscopie ;

Attendu que les consorts G. reprochent à la cour d'appel d'avoir ainsi statué et invoquent des griefs contestant des énonciations de l'arrêt relatives, de première et deuxième part, à la charge de la preuve de l'information, de troisième, quatrième et cinquième part, aux éléments de preuve retenus ou insuffisamment analysés, de sixième part, à l'obligation d'information pesant à titre principal sur le médecin qui réalise l'examen, de septième part, à la limitation de l'obligation d'information au risque non exceptionnel ;

Mais attendu que s'il est exact que le médecin a la charge de prouver qu'il a bien donné à son patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques des investigations ou soins qu'il lui propose de façon à lui permettre d'y donner un consentement ou un refus éclairé, et si ce devoir d'information pèse aussi bien sur le médecin prescripteur que sur celui qui réalise la prescription, la preuve de cette information peut être faite par tous moyens ; que, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a constaté qu'il résultait des pièces produites que G. G., qui exerçait la profession de laborantine titulaire dans le centre hospitalier où avait eu lieu la coelioscopie, avait eu divers entretiens avec son médecin, pris sa décision après un temps de réflexion très long et manifesté de l'hésitation et de l'anxiété avant l'opération ; que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que la juridiction du second degré a retenu que cet ensemble de présomptions, au sens de l'article 1353 du Code civil, démontrait que Mme L. avait informé sa patiente du risque grave d'embolie gazeuse inhérent à la coelioscopie ; qu'ainsi, et abstraction faite des motifs critiqués par les 1°, 2°, 6° et 7° branches du moyen, l'arrêt est légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts G. aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme L..

Sur le rapport de M. Sargos, conseiller, les observations de Me Blondel, avocat des consorts G., de la SCP Richard et Mandelkern, avocat de Mme L., les conclusions de Mme Le Foyer de Costil, avocat général. M. LEMONTEY, Président.

La Cour de cassation, Première chambre civile, 7 octobre 1998

Arrêt n° 1567. Cassation.

Pourvoi n° 97-10.267.

 

 

Sur le pourvoi formé par Mme Catherine Castagnet, demeurant…,

en cassation d'un arrêt rendu le 26 septembre 1996 par la Cour d'appel de Lyon (1re Chambre), au profit :

1°/ de la Clinique du Parc, dont le siège est…,

2°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie de Vienne, dont le siège est…,

3°/ de M. L.,

4°/ de M. G.,

demeurant tous deux…,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Moyen produit par la SCP Vier et Barthélémy, avocat aux Conseils pour Mme Castagnet.

MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame CASTAGNET de l'ensemble de sa demande,

1. AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des conclusions de l'expert TOLOT qui ne sont pas sérieusement contredites par Madame CASTAGNET laquelle ne sollicite pas de contre-expertise que les soins postopératoires prodigués par les médecins ont été diligents et prudents et qu'il n'y a pas eu défaut de surveillance de la part de ces derniers ;

ET AU MOTIF ADOPTE DES PREMIERS JUGES QUE le traitement a été mis en œuvre dès la confirmation du diagnostic de la thrombose ;

ALORS QUE, D'UNE PART, viciant son arrêt d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la Cour d'appel s'est abstenue de répondre au moyen péremptoire soulevé par Madame CASTAGNET dans ses conclusions d'appel pris de ce qu'aucune investigation sur le problème à l'œil survenu dans l'après-midi n'avait été effectuée avant le début de la soirée, moment où l'atteinte du nerf optique était malheureusement irréversible et de ce que la valeur du traitement mis en place à ce moment n'est pas mise en cause, l'appréciation de la faute reposant uniquement sur la question de savoir si sa mise en œuvre immédiate aurait permis de résoudre la complication postopératoire (conclusions d'appel p. 6, alinéas 1 à 6) ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, il résulte de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile que les juges du fond sont liés par les conclusions prises devant eux et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; qu'en énonçant que Madame CASTAGNET "ne sollicite pas de contre-expertise", la Cour d'appel a dénaturé les conclusions de cette dernière qui tout au contraire sollicitait expressément une contre-expertise à la fois sur les fautes des médecins et sur le préjudice (conclusions d'appel p. 8, 9 et 10) ;

2. AUX MOTIFS PROPRES QUE l'information n'est exigée que pour des risques normalement prévisibles ; que la complication survenue est très rare ; que dès lors le chirurgien n'avait pas à en avertir Madame CASTAGNET ;

ALORS QUE, D'UNE PART, il résulte des dispositions de l'article 1147 du Code civil que l'obligation matérielle de délivrance des informations de nature à éclairer son client dans ses décisions qui pèse sur le médecin est une obligation de résultat, laquelle emporte à la fois présomption de faute et présomption de causalité entre la faute et le dommage ; que c'est donc sur le débiteur de l'obligation d'information que pèse la charge de prouver qu'il a satisfait à cette obligation en portant l'information à la connaissance de son client ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt que le chirurgien a omis d'informer sa patiente du risque de complication de thrombophlébite du sinus caverneux ; qu'en écartant néanmoins sa responsabilité dans le dommage subi par Madame CASTAGNET, la Cour d'appel a statué au mépris de la présomption de causalité entre la faute de défaut d'information et le dommage qui s'attache à l'obligation de résultat et a violé par refus d'application l'article 1147 du Code civil ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, viciant à nouveau son arrêt d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile sur ce point, la Cour d'appel a omis de répondre au moyen déterminant soulevé par Madame CASTAGNET dans ses écritures d'appel tiré de ce que "l'absence d'information sur un risque même réduit mais banal engage bien la responsabilité du Docteur L. (...) puisque Madame CASTAGNET a été privée des éléments nécessaires à une décision éclairée" et de ce que "le lien de causalité est établi à l'encontre du Docteur L. qui a omis d'informer exactement Madame CASTAGNET sur les risques encourus du fait de l'intervention chirurgicale et lui a ainsi fait perdre la chance d'un consentement éclairé" (conclusions d'appel p. 7, dernier alinéa et p. 8, alinéa 4).

LA COUR, en l'audience publique du 8 juillet 1998. Attendu que, victime le 3 avril 1985 d'une chute lui ayant causé une fracture de la deuxième vertèbre lombaire, Mme CASTAGNET a, en raison d'une cyphose lombaire persistante, subi le 3 février 1987, dans la matinée, une intervention, pratiquée par M. L., chirurgien à la Clinique du Parc, consistant en la mise en place d'un cadre de Hartchild ; que dans un deuxième temps cette intervention devait être suivie d'une greffe vertébrale ; que, dans l'après-midi, des troubles de l'œil gauche se sont manifestés ; que, dès qu'il a été averti, M. L. est venu au chevet de Mme CASTAGNET, a modifié la thérapeutique prescrite et a organisé une consultation ophtalmologique en urgence ; que le diagnostic de thrombose du sinus caverneux a été confirmé ; que cette affection a eu pour conséquence la perte fonctionnelle définitive de l'œil ; qu'invoquant une faute médicale dans la surveillance postopératoire de la part de l'anesthésiste M. G., du chirurgien, ainsi que du personnel de la clinique qui n'aurait pas provoqué l'intervention immédiate de M. L. ou de toute autre personne qualifiée, Mme CASTAGNET a recherché leur responsabilité ; qu'en cause d'appel, elle a prétendu que M. L. avait manqué à son devoir d'information en ne l'avertissant pas du risque encouru ; que l'arrêt attaqué, confirmatif du chef de l'absence de faute a débouté Mme CASTAGNET de l'ensemble de ses demandes ;

Sur le moyen unique pris en ses deux premières branches :

Attendu que Mme CASTAGNET fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, de première part, que la Cour d'appel se serait abstenue de répondre au moyen pris de ce que l'investigation sur le problème de l'œil survenu dans l'après-midi n'avait été effectuée qu'au début de la soirée, moment où l'atteinte du nerf optique était irréversible ; alors, de deuxième part, qu'en énonçant que Mme CASTAGNET "ne sollicite pas de contre-expertise", la Cour d'appel aurait dénaturé les conclusions qui sollicitaient expressément une contre-expertise à la fois sur les fautes des médecins et sur le préjudice ;

Mais attendu, d'abord, que, par motifs adoptés, la Cour d'appel a retenu que le retard invoqué par Mme CASTAGNET n'avait fait l'objet d'aucun dire adressé par elle à l'expert, alors qu'elle était assistée d'un médecin, et a estimé en se fondant sur les conclusions de l'expertise que les examens avaient été, du 3 février dans l'après-midi au 5 février, organisés rapidement ; que, par motifs propres, en considérant au vu de cette expertise que les soins pré et post-opératoires prodigués par les praticiens avaient été diligents et prudents, sans manquement aux règles de l'art et aux données acquises de la science, et que la complication post-opératoire n'était pas la conséquence d'un défaut de surveillance, la Cour d'appel a répondu, en les écartant, aux conclusions invoquées qu'elle n'a pas dénaturées, dès lors que celles-ci se bornaient à solliciter un complément d'expertise "si la Cour d'appel s'estimait cependant insuffisamment informée..." ;

D'où il suit qu'en ses deux premières branches, le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur la troisième branche du moyen :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu qu'hormis les cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, un médecin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés et qu'il n'est pas dispensé de cette obligation par le seul fait que ces risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ;

Attendu que pour débouter Mme CASTAGNET de ses demandes, l'arrêt énonce que l'information que doit donner le praticien n'est exigée que pour des risques normalement prévisibles, qu'en l'espèce, la complication de thrombophlébite du sinus caverneux bien que connue est très rare ; qu'il en déduit que le chirurgien n'avait pas à en avertir Mme CASTAGNET ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi qu'elle a fait, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la quatrième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 septembre 1996, entre les parties, par la Cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Grenoble ;

Condamne MM. L. et G. aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de MM. L. et G. ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé.

Sur le rapport de Mme Delaroche, conseiller, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de Mme Castagnet, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la Clinique du Parc, de Me Vuitton, avocat de MM. L. et G., les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général. M. LEMONTEY, Président.

La Cour de cassation, Première chambre civile, 7 octobre 1998

Arrêt n° 1568. Rejet.

Pourvoi n° 97-12.185.

 

 

Sur le pourvoi formé par M. Jean Rozec, demeurant…,

en cassation d'un arrêt rendu le 16 octobre 1996 par la Cour d'appel de Pau (1re Chambre), au profit :

1°/ de M. M., demeurant Clinique….,

2°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Pau, dont le siège est….,

défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Moyens produits par la SCP Le Bret et Laugier, avocat aux Conseils pour M. Rozec.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

- PRIS DE CE QUE l'arrêt confirmatif attaqué a débouté M. Jean ROZEC de sa demande tendant à voir déclarer le Docteur M. responsable des conséquences dommageables de l'opération pratiquée le 11 décembre 1990 ;

- AUX MOTIFS QU'il appartient, à M. ROZEC et à la CPAM de démontrer la réalité des fautes imputées à M. M. ainsi que le lien de causalité direct avec le préjudice dont la réparation est demandée et qui est constitué par l'état d'invalidité du malade actuellement inapte à tout emploi professionnel ; quant au défaut d'opportunité de l'opération litigieuse, l'expert souligne que le Docteur M. est intervenu après l'échec des thérapeutiques habituelles pour le traitement d'une gonarthrose évoluée qui se manifestait depuis de nombreux mois ; que l'intervention chirurgicale s'avérait le seul traitement possible, compte tenu du caractère évolutif de la gonarthrose et de l'intolérance du malade aux corticoïdes, le refus ou l'échec de ceux-ci étant sans influence sur l'évolution de la gonarthrose ; que l'expert judiciaire souligne l'efficacité de la thérapeuthie pratiquée par le Dr M. pour supprimer ou atténuer les troubles de la pathologie que présentait M. ROZEC ; que le grief avancé n'est pas caractérisé, la nécessité évidente du traitement étant démontrée ; que les médecins et l'obligation d'aviser leurs patients des conséquences possibles du traitement de façon à les mettre en mesure à comparer les bienfaits estimés et les risques encourus ; que cette obligation ne s'étend pas aux risques qui ne se réalisent qu'exceptionnellement ; que, selon le rapport de l'expert judiciaire, le risque survenu en l'espèce se manifeste dans 1 % des cas, et, d'habitude, la récupération se fait plus facilement et plus complètement que chez M. ROZEC ; que la complication survenue en l'espèce est d'une nature tout à fait exceptionnelle, et il n'entrait pas dans le devoir du médecin d'en aviser spécialement le patient ;

- ALORS, D'UNE PART, QUE le médecin est débiteur vis-à-vis de son malade d'une obligation de moyens, et doit lui donner des soins attentifs et consciencieux et conformes aux données actuelles de la médecine, qu'il commet une faute de nature à engager la responsabilité dans la réalisation de l'intervention si, par maladresse, il blesse un malade ; que la Cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions d'appel de M. ROZEC soutenant qu'au cours de l'opération, il avait été victime d'un hématome postopératoire compressif atteignant la branche musculo-cutanée du nerf sciatique proplité externe due à une compression par l'écarteur et que cette faute avait été confirmée tant par les attestations de plusieurs médecins versées aux débats que par le Docteur M. lui-même dans une lettre annexée au rapport d'expertise ; que l'arrêt attaqué, en l'absence de toute réponse auxdites écritures à partir desquelles il était soutenu que le Dr M. avait commis une faute en blessant son malade par maladresse lors de l'intervention, a entaché sa décision d'un défaut de motif en violation des articles 455 du nouveau Code de procédure civile et 1147 du Code civil ;

- ALORS, D'AUTRE PART, QUE le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas ; que si les risques inhérents à une opération se réalisent rarement, il n'en sont pas moins graves et obligent le médecin à en prévenir son patient afin de lui permettre de se prononcer en connaissance de cause ; que la Cour d'appel, qui a retenu le caractère exceptionnel du risque survenu chez M. ROZEC pour décharger le Dr M. de son devoir d'information, a violé les articles 1135 et 1147 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

- PRIS DE CE QUE l'arrêt confirmatif attaqué a débouté M. Jean ROZEC de sa demande tendant à voir déclarer le Docteur M. responsable des conséquences dommageables de l'opération pratiquée le 11 décembre 1990,

- AUX MOTIFS QUE l'expert judiciaire note l'amélioration due à la réaxation du membre inférieur et attribue une I.P.P. de 5 % en rapport avec les séquelles de l'intervention ; que cette appréciation est tempérée par le fait que l'incidence professionnelle de cette invalidité lui apparaît beaucoup plus relative que le sujet ne l'expose et que les activités d'agrément pratiquées par M. ROZEC ne sont pas objectivement limitées ; qu'aucune des parties ne précise quel serait l'état actuel de M. ROZEC si l'opération n'avait pas été pratiquée de sorte que l'aggravation effective de l'état du patient n'est pas démontrée ; qu'en définitive, M. ROZEC et la CPAM n'établissent pas le préjudice en relation avec cette faute ;

- ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT QUE l'état actuel du malade caractérisé par des crampes du mollet et du gros orteil, des douleurs à la face externe du cou de pied droit en position assise, ou de sensations de brûlure épisodiques, n'est pas pire que celui enduré avant l'opération ; qu'il y aurait, à tout le moins, à dresser un bilan comparatif des mérites et des inconvénients de cette opération qui, une fois dressé, ramènerait à de plus justes proportions, voire même à néant le préjudice invoqué ;

- ALORS, D'UNE PART, QUE toute victime a droit à la réparation de son préjudice, lequel doit être intégralement indemnisé ; que dès lors la Cour d'appel ayant constaté que M. ROZEC restait atteint par des séquelles constitutives d'une I.P.P. évaluée par l'expert à 5 %, n'a pu affirmer l'absence de préjudice de M. ROZEC en relation avec la faute du Dr M. à partir des autres énonciations du même expert selon lesquelles l'incidence professionnelle de cette invalidité serait beaucoup plus relative que ne l'expose la victime et que les activités d'agrément de celui-ci ne seraient pas limitées ; que, par suite, l'arrêt attaqué a violé l'article 1149 du Code civil ;

- ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'expert judiciaire, loin de conclure à l'absence d'incidence professionnelle de l'invalidité de M. ROZEC, avait indiqué que cette incidence professionnelle était modérée avec nécessité d'un reclassement professionnel vers un emploi administratif difficile à obtenir ; que l'arrêt attaqué a, dès lors, dénaturé ledit rapport de l'expert judiciaire en déclarant à partir des conclusions de celui-ci que l'incidence professionnelle de cette invalidité était seulement relative, et a, par suite, violé l'article 1134 du Code civil ;

- ALORS, ENFIN, QUE la Cour d'Appel, en l'état de la faute médicale commise par le Docteur M., avait le devoir de rechercher si cette faute avait fait perdre à M. ROZEC une chance d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper, en tout ou partie, à une infirmité ; que l'arrêt attaqué, qui n'a pas effectué cette recherche et s'est borné à déclarer que l'aggravation effective de l'état du patient n'était pas démontrée, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1149 du Code civil.

LA COUR, en l'audience publique du 8 juillet 1998. Attendu que M. ROZEC, né en 1943, soufrait d'une gonarthrose évolutive du genou droit, qui présentait une désaxation de 10 degrés environ ; que tous les traitements auxquels il avait été soumis ayant échoué, le Docteur M. a procédé en décembre 1990 à une intervention chirurgicale qui a permis de modifier l'angle d'axation du membre inférieur ; qu'à la suite de cette intervention M. ROZEC a souffert des conséquences d'un syndrome de loge dont il a demandé la réparation au praticien ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Pau, 16 octobre 1996) l'a débouté de sa demande ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche et le second moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que M. ROZEC reproche, d'abord, à la Cour d'appel de n'avoir pas répondu à ses moyens faisant état d'une faute, consistant en une maladresse qu'aurait commise le praticien lors de l'ostéotomie de valgisation, et de n'avoir pas recherché si cette faute médicale ne lui avait pas fait perdre une chance d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à une infirmité ;

Mais attendu qu'il résulte des énonciations des juges du fond, qui se sont fondés sur deux rapports d'expertise, que le syndrome de loge dont avait été atteint M. ROZEC procédait non d'un traumatisme du nerf sciatique survenu pendant l'intervention, mais d'un hématome postopératoire qui s'était produit après la levée du garrot ; que ces constatations écartant l'hypothèse d'une maladresse opératoire et rendant inopérante la question de la perte de chance, ces griefs ne peuvent être
accueillis ;

Sur la deuxième branche du premier moyen et la première et deuxième branches du second moyen :

Attendu que M. ROZEC reproche encore à la Cour d'appel d'avoir décidé que le médecin n'était pas tenu de l'informer du risque d'atteinte du nerf sciatique lors de l'ostéotomie de valgisation en raison du seul fait qu'un tel risque était exceptionnel dès lors qu'il pouvait être évalué à seulement 1 %, et d'avoir estimé qu'il ne justifiait pas d'un préjudice ;

Mais attendu que la Cour d'appel, statuant par motifs propres ou adoptés, a constaté, d'une part, qu'eu égard au caractère évolutif de la gonarthrose du genou dont était atteint M. ROZEC et à l'échec de tous les traitements antérieurs, l'opération qu'il avait subie était indispensable et seule de nature à améliorer son état, d'autre part, que cette intervention avait effectivement abouti à l'amélioration escomptée, et que M. ROZEC, qui avait récupéré l'usage de son genou et pouvait exercer des activités professionnelles et récréatives, telles que le cyclisme et la chasse, auxquelles il s'adonnait avant l'intervention, ne souffrait, en définitive, du fait du syndrome de loge, que de troubles sensitifs moindres que ceux découlant de la non-réalisation de l'opération chirurgicale ; que l'absence de préjudice résultant pour M. ROZEC de la perte de la faculté qu'il aurait eue, s'il avait été informé, de refuser l'intervention, étant ainsi caractérisée, l'arrêt est légalement justifié par ces seules énonciations, abstraction faite du motif erroné mais surabondant suivant lequel un risque n'avait pas à être révélé au patient en raison du seul fait que sa réalisation était exceptionnelle ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. ROZEC aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. M..

Sur le rapport de M. Sargos, conseiller, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de M. Rozec, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de M. M., les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général. M. LEMONTEY, Président.

La Cour de cassation, Première chambre civile, 29 juin 1999

Arrêt n° 1267. Cassation partielle.

Pourvoi n° 97-14.254.

 

 

Sur le pourvoi formé par la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Seine-Saint-Denis, dont le siège est…,

en cassation d'un arrêt rendu le 19 décembre 1996 par la Cour d'appel de Versailles (1re chambre, section A), au profit :

1°/ de M. H., domicilié Clinique Ambroise Paré,…,

2°/ de la Clinique Ambroise Paré, dont le siège est…,

3°/ de la compagnie d'assurances La Préservatrice Foncière, société anonyme, dont le siège est 1, Cours Michelet, 92076 Paris-La Défense Cedex 43,

4°/ de M. Jacques Méchin, demeurant…,

défendeurs à la cassation ;

M. H. a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation, également annexé au présent arrêt ;

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Gatineau, avocat aux Conseils pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SAINT-DENIS ;

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis de sa demande tendant à voir le Docteur H. et la Clinique Ambroise Paré condamnés à lui rembourser les prestations fournies à Monsieur MECHIN à la suite des complications de l'opération du 29 janvier 1988 et de lui donner acte de ses réserves pour les prestations non encore connues à ce jour et celles pouvant être versées ultérieurement.

AUX MOTIFS QU'il résulte des conclusions de l'expert que le Docteur H. et la clinique n'ont commis aucune faute, négligence ou défaillance fautive à l'origine de l'infection présentée par Monsieur MECHIN ;

qu'en réalité, "la suppuration dont a souffert Monsieur MECHIN constitue un accident classique qui survient avec une fréquence non négligeable, d'après les statistiques mondiales qu'il a consultées."

que par suite, le Docteur H. qui "était tenu à l'égard de son malade à une obligation d'information, et devait en conséquence lui donner tous renseignements sur les risques de l'intervention et sur les conséquences éventuelles de l'opération projetée" aurait dû, en particulier "informer Monsieur MECHIN du risque d'infection" connu du monde médical mais pas des patients.

"que dès lors, c'est pertinemment que les premiers juges ont retenu que le docteur H. a failli à son devoir d'information à l'égard de Monsieur MECHIN ;

que la méconnaissance par le Docteur H. de ce devoir d'information a privé Monsieur MECHIN de la possibilité d'opter, en connaissance de cause, pour l'intervention chirurgicale que lui proposait le Docteur H., et du choix de ne pas se faire opérer, au moins dans l'immédiat, en vue de différer le risque de complications et les souffrances afférentes ;

que si ledit manquement du Docteur H. a donc généré à Monsieur MECHIN un préjudice certain (que le tribunal a qualifié de perte de chance), toujours est-il que son refus de se faire opérer s'il avait été dûment informé des complications possibles, apparaît hautement improbable et n'aurait pu, en tout cas, se prolonger dans la mesure où Monsieur MECHIN était menacé d'immobilisation à plus ou moins long terme, en raison de son état de santé, et où l'intervention pratiquée était le seul moyen de remédier à ses troubles ;

que dans ses conditions, la Cour est à même de fixer à la somme de 70 000 F le montant dudit préjudice, le jugement déféré devant être infirmé en ce qu'il a alloué à Monsieur MECHIN une somme de 100 000 F à titre d'indemnisation.

que la Caisse, comme son assuré "doit être déboutée de ses demandes formées contre le Docteur H. et la CLINIQUE AMBROISE PARE, puisque ces derniers n'encourent aucune responsabilité dans l'infection litigieuse et dans ses suites ;

que la CPAM ne peut exciper utilement, à titre subsidiaire, de la faute d'information retenue à l'encontre du Docteur H., pour prétendre à quelque indemnisation que ce soit, dès lors que cette faute est étrangère à l'affection elle-même, ayant entraîné les débours de cette caisse, et qu'en outre le préjudice qui en a résulté pour Monsieur MECHIN, de nature morale, lui est personnel."

1) ALORS QUE lorsqu'une personne victime d'une atteinte à son intégrité physique est indemnisée pour avoir perdu une chance d'y échapper, la perte de chance ainsi indemnisée concerne l'intégrité physique de la victime de sorte que l'indemnité allouée à ce titre est nécessairement soumise au recours des organismes de Sécurité sociale ; qu'en l'espèce, les juges du fond avaient décidé d'indemniser Monsieur MECHIN, victime d'une atteinte à son intégrité physique, pour avoir perdu, à raison d'un manque d'information, une chance d'y échapper ; qu'en affirmant que la Caisse ne pouvait exercer aucun recours sur l'indemnisation ainsi allouée car celle-ci réparait un préjudice de nature morale purement personnel à cet assuré, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article L 454-1 du Code de la sécurité sociale.

2) ALORS QUE lorsqu'une personne victime d'une infection est indemnisée pour avoir perdu une chance d'y échapper à raison d'une faute commise par son médecin, ladite faute n'est nécessairement pas étrangère à l'affection ; qu'en l'espèce pour débouter la Caisse de ses demandes, la Cour d'appel a affirmé que la faute d'information retenue à l'encontre du Docteur H. était étrangère à l'affection qui avait entraîné les débours de cette caisse ; qu'en statuant ainsi, elle a derechef violé l'article L 454-1 du Code de la sécurité sociale.

3) ALORS QU'une clinique est présumée responsable d'une infection contractée par un patient lors d'une intervention pratiquée dans une salle d'opération sauf à établir l'origine étrangère de l'infection ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel qui a exclu la responsabilité de la clinique sans avoir constaté l'origine étrangère de l'infection présentée par l'assuré a violé l'article 1382 du Code civil.

Moyen produit, au pourvoi provoqué, par Me Vuitton, avocat aux Conseils pour M. H. ;

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

d'AVOIR condamné Monsieur H. à payer à Monsieur MECHIN la somme de 70 000 francs en réparation du préjudice consécutif à son manquement à l'obligation d'information qui avait entraîné pour celui-ci une perte de chance ;

AUX MOTIFS QUE le Docteur H., en revanche, était tenu à l'égard de son malade d'une obligation d'information, et devait en conséquence lui donner tous renseignements sur les risques de l'intervention et sur les conséquences éventuelles de l'opération projetée ; qu'il lui appartenait, en particulier, d'informer Monsieur MECHIN du risque d'infection, dont il reconnaît du reste qu'il est connu de tous - s'entend à la vérité du monde médical - et ne peut prétendre justifier son abstention par la circonstance que "révéler tous les risques au malade reviendrait à l'inciter à ne pas se faire soigner et par là-même à empêcher l'homme de l'art d'accomplir la mission qui est sienne et qui est d'améliorer l'état du patient", alors qu'une telle thèse constitue une dénégation pure et simple du devoir d'information auquel est tenu le médecin envers son malade ; que dès lors, c'est pertinemment que les premiers juges ont retenu que le Docteur H. a failli à son devoir d'information à l'égard de Monsieur MECHIN ; que la méconnaissance par le Docteur H. de ce devoir d'information a privé Monsieur MECHIN de la possibilité d'opter, en connaissance de cause, pour l'intervention chirurgicale que lui proposait le Docteur H., et du choix de ne pas se faire opérer, au moins dans l'immédiat, en vue de différer le risque de complications et les souffrances afférentes ; que si ledit manquement du Docteur H. a donc généré à Monsieur H. (en réalité Monsieur MECHIN) un préjudice certain (que le Tribunal a qualifié de perte de chance), toujours est-il que son refus de se faire opérer, s'il avait été dûment informé des complications possibles, apparaît hautement improbable et n'aurait pu en tout cas se prolonger dans la mesure où Monsieur MECHIN était menacé d'immobilisation à plus ou moins long terme, en raison de son état de santé, et où l'intervention pratiquée était le seul moyen de remédier à ses troubles ; que dans ces conditions, la Cour est à même de fixer à la somme de 70 000 francs le montant dudit préjudice, le jugement déféré devant être infirmé en ce qu'il a alloué à Monsieur MECHIN une somme de 100 000 francs à titre d'indemnisation ;

ALORS QUE l'arrêt attaqué a constaté que le refus du patient de se faire opérer, s'il avait été dûment informé des complications possibles, apparaissait hautement improbable ; qu'en effet, l'intervention pratiquée était inéluctable puisqu'elle était le seul moyen de remédier à l'arthrose dont souffrait Monsieur MECHIN, menacé d'immobilisation à plus ou moins long terme ; qu'ainsi, le manquement du Docteur H. à son obligation d'information n'avait joué aucun rôle dans la décision du patient d'opter pour l'intervention chirurgicale qui lui était ainsi imposée ; qu'en estimant que ce manquement avait fait perdre une chance à Monsieur MECHIN, l'arrêt attaqué n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1382 du Code civil.

LA COUR, en l'audience publique du 26 mai 1999, où étaient présents : M. Lemontey, président,
M. Sargos, conseiller rapporteur, Mmes Delaroche, Marc, MM. Aubert, Cottin, Bouscharain, conseillers, Mmes Girard, Verdun, conseillers référendaires, Mme Petit, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;

Attendu que M. MECHIN, qui souffrait d'une arthrose tricompartimentale du genou gauche, a été opéré le 29 janvier 1988 dans un établissement de santé, la Clinique Ambroise Paré, par le Docteur H., qui lui a posé une prothèse totale de ce genou ; qu'après cette intervention, M. MECHIN a souffert d'une infection nosocomiale due à des staphylocoques dorés dont l'éradication a nécessité plusieurs interventions chirurgicales et des changements de prothèse, la consolidation n'intervenant que le 31 décembre 1990 et M. MECHIN étant atteint d'une IPP lui interdisant la poursuite de son activité professionnelle ; qu'il a engagé une action tant contre l'établissement de santé que contre
M. H., mais que l'arrêt attaqué, estimant que ces derniers n'avaient commis aucune faute à l'occasion de l'apparition de l'infection nosocomiale, les a mis hors de cause de ce chef ; que la Cour d'appel a toutefois retenu que M. H. n'avait pas informé son patient du risque d'infection nosocomiale inhérent à la pose de la prothèse et évalué le préjudice en résultant pour M. MECHIN à la somme de 70 000 francs ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de M. H., tel qu'il figure à son mémoire et est reproduit en annexe au présent arrêt :

Attendu que ce moyen est sans fondement, la cour d'appel ayant retenu que la méconnaissance par M. H. de son devoir d'information avait privé M. MECHIN de la possibilité d'opter en toute connaissance de cause pour l'intervention chirurgicale que lui proposait ce médecin, et de choisir de ne pas se faire opérer, au moins dans l'immédiat ;

Mais sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches du pourvoi principal de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis :

Vu les articles 1147 du Code civil et L 376-1 du Code de la sécurité sociale ;

Attendu que pour rejeter le recours de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis tendant au remboursement des prestations qu'elle avait servies à M. MECHIN, l'arrêt attaqué a énoncé qu'elle ne pouvait exciper utilement de la faute d'information retenue à l'encontre du docteur H. pour prétendre à quelque indemnisation que ce soit, dès lors que cette faute est étrangère à l'affection elle-même ayant entraîné les débours de cette Caisse et qu'en outre, le préjudice qui en a résulté pour M. MECHIN, de nature morale, lui est personnel ;

Attendu, cependant, que dans le cas où la faute du médecin a fait perdre au patient la chance d'échapper à une atteinte à son intégrité physique, le dommage qui en résulte pour lui est fonction de la gravité de son état réel et de toutes les conséquences en découlant ; que sa réparation ne se limite pas au préjudice moral mais correspond à une fraction des différents chefs de préjudice qu'il a subis, de sorte qu'au titre des prestations qu'ils ont versées en relation directe avec le fait dommageable, les tiers payeurs peuvent exercer leur recours sur la somme allouée à la victime en réparation de la perte de chance d'éviter une atteinte à son intégrité physique, à l'exclusion de la part d'indemnité de caractère personnel ;

D'où il suit qu'en statuant comme elle a fait, la Cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur la troisième branche du même moyen :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que le contrat d'hospitalisation et de soins conclu entre un patient et un établissement de santé met à la charge de ce dernier, en matière d'infection nosocomiale, une obligation de sécurité de résultat dont il ne peut se libérer qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère ;

Attendu que pour débouter M. MECHIN de sa demande formée contre la Clinique Ambroise Paré à raison de la survenance de l'infection nosocomiale, la Cour d'appel a énoncé qu'aucune négligence ou défaillance fautive ne pouvait être reprochée à cet établissement de santé pendant la phase pré et postopératoire ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce que qu'il a décidé que M. H. était responsable, en raison de l'absence d'information sur le risque d'infection nosocomiale, de la perte de chance subie par M. MECHIN, l'arrêt rendu le 19 décembre 1996, entre les parties, par la Cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Amiens ;

Fait masse des dépens et les laisse, par moitié, à la charge de M. H. et à la Clinique Ambroise Paré ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.

Sur le rapport de M. Sargos, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la Clinique Ambroise Paré et de la compagnie d'assurances La Préservatrice Foncière, de la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. Méchin, de Me Vuitton, avocat de M. H., les conclusions de Mme Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; M. LEMONTEY président.