La psychiatrie existe-t-elle ?

Le Dr Pierre Rombourg ne le pense pas, si l'on se réfère à son message reçu sur Psydoc-France, le 9 novembre 1999.

De très nombreux psychiatres et travailleurs de la santé mentale ont souhaité lui répondre.

 

E-Mail du Dr Rombourg

"Je ferai une réflexion simple :

Quand aurons-nous le plaisir d'assister à la naissance d'une psychiatrie scientifique ?

Quand les psychiatres se décideront-ils à travailler en étroite collaboration avec les neurologues, les biologistes, les généticiens ? (la liste n'est pas exhaustive).

Pourquoi le psychiatre de base ne demande-t-il jamais un bilan biologique, radiologique ou scannographique ? Pourquoi ignore-t-il délibérément toute cause physique (neurologique, immunologique, enzymatique, infectieuse, athéromateuse, voire tumorale) des troubles mentaux qu'il traite, ou prétend traiter ?

Lorsqu'on lit les publications psychiatriques, on constate qu'il s'agit d'intéressantes dissertations philosophiques, mais elles ne sont assorties d'aucun raisonnement scientifique argumenté.

Il est frappant de constater que, de toutes les spécialités médicales, la psychiatrie est LA SEULE qui n'est fait aucun progrès depuis cinquante ans. La découverte des neuroleptiques, thymo-analeptiques et autres tranquillisants est le fait de l'industrie pharmaceutique qui n'a jamais été guidée dans ses recherches par les psychiatres. Le raisonnement psychiatrique est resté en gros ce qu'il était au début du siècle.

Si la psychiatrie doit faire des progrès, ce sera avec l'aide des disciplines médicales nouvelles, qui ouvrent un champ jusqu'alors inconnu sur le mécanisme de la pensée humaine.

Personnellement, je crois que LA PSYCHIATRIE N'EXISTE PAS :

Ce qui existe de sont des troubles et des lésions neurologiques d'étiologies très diverses (virale, athéromateuse, immunologique, dégénérative, tumorale, génétique etc.) qui s'extériorisent par des troubles mentaux lesquels sont des signes et non la cause de la maladie mentale. Tant que les psychiatres s'obstineront à traiter les troubles mentaux en tant que tels, ils ne feront aucun progrès, ce qui est le cas depuis cinquante ans.

A notre époque qui voit exploser les connaissances scientifiques, on ne peut raisonner comme au début du siècle et garder pour Freud cette sorte d'admiration mystique qu'il ne mérite pas. (La psychanalyse et la psychologie sont des disciplines purement philosophiques qui n'ont aucune base scientifique.)

A quand un Laënnec de la psychiatrie ?

Docteur Pierre Rombourg (omnipraticien)"

 




Réponses au Dr Rombourg

 

La psychiatrie, comme toutes les autres branches de la médecine n'est qu'une discipline, qui ne peut revendiquer, pas plus que ses soeurs (les autres branches), la prétendue position scientifique.

J'aimerais savoir qu'elle est à ce propos la base scientifique de l'ouvrage de l'auteur de cet autodafé, qui se dissimule gentillement sous le titre de Docteur.

Je pensais qu'on apprenait en fac que la 1/2 vie de nos connaissances était approximativement de cinq ans, aussi, je serais curieux de connaître notre scientifique confrère.

Quant à l'absence (évoquée par notre confrère) d'évolution dans notre discipline, je ne l'ai pas observée tout au contraire. J'ai pu participé au cours de mes études à l'ouverture progressive des ex-C.H.S. (ex-H.P., ex Asile), et, à la resocialisation de nombreux patients qui avaient une très longue hospitalisation antérieure (en dizaine d'années). Je ne pense pas qu'une telle évolution aurait été possible sans bases thérapeutiques plus efficace que par le passé ....

Je laisse le soin à mes collèges de vous dire plus.

Au plaisir,

Dr Patrice Duquenne, P.H. Pédopsychiatre
courrier émail
pedopsy5906@nordnet.fr <mailto:pedopsy5906@nordnet.fr>
page Web :
http://home.nordnet.fr/~paduquenne/index.shtml

 



Le correspondant est mal renseigné. Les avancées de la Psychiatrie les 50 dernières années sont considérables. Il suffit de suivre ce qui se passe. Je ne touve pas opportun de faire des comparaisons avec les autres dissciplines médicales. Si néanmoins des comparaisons étaient faites (ce qui suppose des outils méthodologiques actuellement indisponibles), je pense que l'on objectiverait des résultats qui classeraient la psychiatrie à très bon rang au niveau de la survie, de la satisfaction du patient et de son entourage, de la globalité et de la continuité de la prise en charge. Certes, un grand nombre de patients sont pris en charge par les omnipraticiens comme c'est le cas aussi de patients cardiologiques, gynécologiques, dermatologiques ou autres. Néanmoins, le recours au spécialiste est parfois incontournable pour beaucoup de patients, notamment psychiatriques, ce qui est par ailleurs conforme aux injonctions du serment d'Hippocrate. Quant au respect dû aux pionniers de nos disciplines, je pense que s'est un sujet qui ne concerne pas uniquement les psychiatres mais l'ensemble des communautés intellectuelles humaines. Quels progrès seraient imaginables si on se coupait des racines de notre savoir ? Comment pourrait-on alors considérer "l'ensemble des hommes comme un seul homme qui grandit et qui apprend continuellement" (Pascal).

Quant au savoir psychiatrique de base (puisque je constate avec soulagement que le collègue reconnaît l'existence), il est depuis à peu près une quinzaine d'années (et non pas un siècle) garanti et codifié par les instances publiques des états les plus évolués de la planète. Ce savoir repose doublement sur les résultats de la recherche et de la pratique clinique, et plus récemment aussi sur une demande de qualité exprimée par les citoyens et les vecteurs de l'opinion. A nous tous de suivre dans le chemin de l'excellence, de l'éthique et de l'humanité.

Dr Emmanuel Kosadinos, Psychiatre des Hôpitaux

C.H. de Moisselles, Secteur 92G05 ekosadinos@compuserve.com


 

Certaines questions, s'annonçant comme simples sont en fait plutôt simplistes ; et la tentation est grande de se dire "voilà qui ne mérite pas de réponse".

A plus y penser, derrière ce que j'espère être de la provocation, faute de quoi je ne pourrai qu'imaginer ..soit une incompétence grave, soit un mécanisme, pour le coup bien freudien .. et non dépassé, se profile une question bien réelle, elle : celle de l'incompréhension entre deux visions du sujet souffrant, la "toute organique ", et la "psychologisante ". Un "omnipraticien" me semblerait se devoir d'avoir ne serait ce qu'un vernis lui permettant de comprendre que s'il reste sourd au discours inconscient, cela ne signifie pas qu'il n'existe pas ; peut être une consultation O R L y remédierait elle avantageusement ??? Il doit persister un "bouchon " quelque part,

Dr Georges Wapler gewapler@club-internet.com



Tout cela sent furieusement les études médicales inachevées.

J'ai coutume, quant à moi, d'énoncer un dicton qui ne fait rire que moi mais enfin je le trouve assez bon. Le voici: "Je ne crois pas du tout aux cardiologues ni à la cardiologie jusqu'au jour où j'en aurai besoin, bien entendu".

Qu'est-ce que la médecine?

Qu'est-ce que la psychiatrie?

Qu'est-ce qu'une science?

Premier essai de réponse (référence Fifi 1997, Frison-Roche, non encore publié)

Scientificité en psychiatrie. Conceptualisation de l'opposition entre l'événement et la structure. Il y a deux espaces de sens en psychiatrie: l'un d'entre eux est la source de modèles et l'autre est l'objet d'une méthode herméneutique. Trois critères prévalent : la psychiatrie est scientifique par sa visée, son objet et sa méthode. La visée consiste en une construction de modèles cohérents et efficaces des phénomènes, si du moins on sait repérer des faits psychiques pertinents.

Il est requis d'accroître le pouvoir intégrateur des théories, d'augmenter la capacité auto-organisatrice d'un corps de propositions, de renforcer la cohérence interne, la non-contradiction, l'interdépendance entre ses éléments, l'augmentation de la compétence par le pouvoir explicatif et anticipateur. Enfin elle est confrontée aux critères classiques de la "falsifiabilité" ou de la réfutabilité, de la vérification diffuse, de la généralité et du rejet du dogmatisme.

Dr Fineltain Ludwig
Neuropsychiatre & psychanalyste Paris 100534.355@compuservecom



Je suis psychiatre (jeune psychiatre). Je suis issu de l'internat de spécialité. Je constate une grande agressivité de la part de notre confrère. Aussi, je m'interroge sur la raison cachée d'une si grande provocation et le moment de cette explosion.

Les questions que je pose sont les suivantes :

- sait-il que la psychiatrie française est reconnue dans le monde entier,
- la psychiatrie est la discipline qui a fait le plus de progrès depuis 20 ans

- la psychiatrie est l'une des disciplines médicales où le contact et la communication médecin malade existent vraiment. La symptomatologie est repérée dans le discours (au lit du malade). La quasi-totalité des autres spécialités se détourne de la clinique au profit de la paraclinique. Le risque étant celui d'un médecin prescripteurs d'examens, de bilans, d'examens, etc., tandis, que le patient est en attente de quelque chose de plus humain

. Beaucoup, de troubles mentaux, dépressions, moments psychotiques sont secondaires aux conditions de vie, de travail et à la solitude. Je doute qu'un substratum organique soit le primum movens. Enfin, si notre confrère cherche à nous en persuader, il doit avoir d'autres raisons ?

- il serait intéressant qu'il lise des revues scientifiques françaises et de langue anglaise pour mieux apprécier les progrès de la psychiatrie.

- cette diatribe n'est-elle pas victime d'une surgénéralisation à partir de quelques cas ou d'une expérience malheureuse ?

- le décodage des processus mentaux est complexe. Il ne faudrait pas dans une vision réductionniste et linéaire rendre prévisible la nature humaine qui est imprévisible.

En ce qui me concerne, je travaille sur la mesure chiffrée de la perception visuelle des émotions faciales et beaucoup de mes collègues sont dans une vision neurobiologique de la psychiatrie. Néanmoins, il me semble que les travaux des psychanalystes de renom et de mes collègues moins célèbres contemporains ou passés me sont très utiles, et très formateurs. Leurs réflexions et combien même leurs dissertations philosophiques sont et resteront nécessaires. Une dernière précision, notre civilisation conquérante de technologie et de technicité est issue de la civilisation grecque pour qui seule la philosophie avait droit de cité et ou l'aspect matériel des choses était sans valeur.

Tout n'est pas blanc, tout n'est pas noir.

Dr Granato philippe pgranato@nordnet.fr



Notre "confrère omnipratcien" (ou bien omnibus des idées reçues qu'il véhicule gravement) sur la psychiatrie nous fait signe. Ce signe de Rombourg nous signale qu'on nous a gentillement et agréablement chatouillé (ou gratouillé ou papouillé...) la plante des pieds. Le croquemort mordille, Rombourg lui, écrase les orteils bleuis des cadavraskis (le signe de Kadaveski) que nous ne savons pas encore que nous sommes devenus, sous le poids de ses certitudes. Heureux homme s'il en a encore.

La psychiatrie n'est, nous le savons, qu'une science molle comme une montre de Dali. Plus personne n'y braconne le schizoccocus depuis 1968 et le schisme entre la neurologie et la psychiatrie.

Nous autres, pauvres erzatzs de neuro-psychiatre dans un monde où désormais, même les vaches sont folles, nous savons qu'avec l'âge les raideurs de déplacent. Nous laisserons donc bien volontiers les sciatiques aux vrais scientifiques préférant celles qui trouvent leur source dans le cerveau, premier organe sexuel.

Ces psychiatres tous des obsédés !

C'est vrai, la psychiatrie sera scientifique, un jour, lorsque l'homme sera enfin une liste exaustive de signes cliniques, un DSM autovalidé.

Tant que l'homme, ce salaud, sera cet être souffrant, sensible, orgueilleux, peureux, courageux, vindicatif, jaloux, artiste qu'il persiste encore à être, rien à faire il faudra toujours des besogneux du neuromédiateur, des sousbulbaires pour en être le confident, la prothèse institutionnelle parfois, l'écoute flottante, le radiateur près de la fenêtre.

En attendant je ne résiste pas à vous évoquer un patient qui m'a marqué il y quelques temps déjà.

Monsieur X. maghrebin, s'est présenté un jour aux urgences d'un CHU réputé. Il a dit dans le français laborieux qui était le sien qu'il ne se sentait pas bien. Le temps que l'interne de garde (il y en a encore dans les CHU !) s'absente pour satisfaire un besoin naturel, il l'a retrouvé au retour, inanimé dans le local d'examen.

Le diagnostic d'hystérie grave sous forme paralytique a été aussitôt porté devant tant de mauvaise grâce à bénéficier des bienfaits de la science. Le patient a donc été hospitalisé dans le service de médecine interne, exploré scientifiquement, bilanté, nourri par sonde gastrique (cet antiscientifique persistait à ne pas vouloir déglutir).

21 jours plus tard, il fallait sans doute faire de la place, ce mauvais plaisant a été hospitalisé (en HDT) en psychiatrie pour y poursuivre les soins nécessaires à cette "paralysie hystérique".

Le philosophe que je suis n'a pas du tout pensé à demander un bilan supplémentaire, il a simplement remarqué que ce patient avait les yeux expressifs. A l'aide d'un code simple accessible même aux psychiatres (un clignement = oui, deux clignements = non) il a pu faire une anamnèse sommaire et orienter les examens ultérieurs. Ce patient avait une méningite tuberculeuse. Il en est mort quelques semaines plus tard.

Donc nous venons de prouver scientifiquement que nul n'est besoin des fumeuses théories freudiennes ainsi que des ratiocinations et des calembourdaines lacanoïdes, l'hystérie a une cause évidente le BK. CQFD.

Ceci dit que notre confrère omnivore se rassure, numerus clausus et DSM IV aidant, la plupart des malades sont maintenant (très bien) pris en charge par des généralistes et sont des médicamentaux.

Les psychiatres, bientôt ne seront que des dinosaures.

Pourtant, sous le médicamanteau circulent encore quelques idées, les psychiatres dissertent et trouvent même du temps pour surfer sur la toile.

Omnibus



Cher Ami,

Je trouve notre confrère un peu sévère et, qu'il me pardonne, réducteur vis-à-vis de la psychiatrie.

Je ne m'attarderai pas sur le débat de la scientificité, dépassé depuis longtemps. Je ne m'attarderai pas non plus sur l'affirmation, quelque peu péremptoire, de l'absence de progrès de la psychiatrie depuis cinquante ans ; il suffit, pour en faire justice, de comparer l'évolution des psychoses depuis 1960. En revanche, il me semble souhaitable de développer quelques points :

1. les psychiatres, de base ou non (qu'est-ce qu'un psychiatre de base et un qui ne le serait pas ?), d'une part ne se gênent pas pour demander des examens biologiques, et des explorations fonctionnelles ou de la neuro-imagerie, lorsqu'ils le jugent nécessaire et lorsque ce bilan n'est pas à la charge d'un confrère, notamment le médecin de famille. Il est vrai qu'ils n'en abusent pas, dans la mesure où la psychiatrie est une discipline où le primat de la clinique demeure. Dans la mesure aussi où les bilans biologiques et paracliniques ne sont pas d'un grand secours pour le diagnostic, sachant que la découverte ou l'élimination d'une affection somatique ne préjuge pas de l'existence d'une affection mentale.

2. la découverte d'un trouble somatique, intéressant soit la sphère neurobiologique soit tout autre système, notamment endocrinien, chez un patient présentant une sémiologie psychiatrique ne réduit malheureusement pas le problème au traitement du trouble somatique, même assorti du traitement symptomatique, par une médication psychotrope, du trouble psychiatrique. J'en veux pour exemple les états dépressifs intriqués (je laisse à notre confrère le soin de décider quel est l'ordre des facteurs) à une endocrinopathie, notamment une hypothyroïdie (qui, dans mon expérience personnelle, est souvent découverte par le psychiatre...). La correction du trouble hormonal améliore certains symptômes, ainsi l'asthénie, et partiellement le ralentissement, mais la dépression reste présente et évolutive, souvent mal améliorée par les psychotropes. La question d'un abord psychothérapique se pose ici dans les mêmes termes que pour toute dépression. On peut également évoquer les états démentiels, dont le diagnostic reste clinique, la neuro-imagerie étant souvent décevante. Les médicaments disponibles ne sont pas dépourvus d'intérêt, du moins dans les formes légères et débutantes. Ceci étant, on ne peut se contenter d'assister à la détérioration progressive de l'état du patient et à l'épuisement croissant de ses proches, en se bornant à calmer tant bien que mal l'agitation et autres symptômes perturbateurs ; il est nécessaire de le faire bénéficier d'une approche spécifique de ses troubles psychiques, sachant que la désorganisation de son appareil psychique résulte de l'atteinte lésionnelle de son appareil neurobiologique mais que les troubles cliniquement exprimés, autrement dit repérés par l'observateur sont la résultante de l'atteinte lésionnelle et des mécanismes adaptatifs de l'appareil psychique. Sauf erreur, les choses en sont pas très différentes en pathologie somatique. (Je reviendrai sur ce point, qui est évidemment très important).

3. Notre fonctionnement ne se réduit pas à la machinerie biologique de notre corps, même si nous n'existons et ne sommes inscrits dans la réalité, notamment et avant tout sociale (au sens de relationnelle, incluant la famille), que par ce corps. Notre appareil psychique se développe en intrication totale avec notre appareil neurobiologique. Or, il est essentiel de ne pas perdre de vue que celui-ci ne possède qu'un équipement programmé très réduit à la naissance (l'homme ne marche ni ne parle que si l'environnement le lui permet, au contraire des autres vertébrés) ; il détient par contre un potentiel incomparable de développement et d'apprentissage. Celui-ci, qui ne se limite pas au domaine perceptif et cognitif mais inclut le domaine affectif et émotionnel, est déterminant autant dans la construction du psychisme que dans celle de l'appareil neurobiologique. Il est acquis, depuis déjà longtemps, que le câblage et les connexions neuronales, très incomplets à la naissance, se développent essentiellement sous l'influence des stimulations reçues par le nouveau-né. Cette interaction ne se limite pas à la période de la prime enfance. Des évènements, exempts de toute implication corporelle directe, peuvent désorganiser le psychisme ; on connaît les confusions psychogènes. Ces désorganisations peuvent, tant par des mécanismes biologiques, par exemple de type hormonal, que par des mécanismes cybernétiques, engendrer des atteintes lésionnelles du S.N.C.. Des sujets, présentant une névrose de caractère, sans trouble psychique classique, repérable uniquement par leur mode relationnel avec leur entourage, peuvent, de manière brutale, s'engager, étant âgés, dans un processus démentiel à la suite d'une confrontation violente à une opposition jusque là évitée par cet entourage. Il est en effet nécessaire de ne pas en rester à la première cybernétique assimilant le cerveau à un ordinateur classique, fonctionnant en binarité programmée, mais d'en venir à la seconde cybernétique fondée sur le modèle neuronal. On sait qu'une seule information peut, dans certains cas sidérer tout le système, ce qui rejoint l'exemple des confusions mentales psychogènes.

4. Il est quelque peu réducteur de faire de la vie psychique une sécrétion du cerveau. Cette représentation, pour être, ou plutôt avoir été, classique, n'a guère plus cours. S'il est vrai que les fonctions motrices, sensorielles et instrumentales sont très directement sous la dépendance de circuits neuronaux identifiés, dont la souffrance ou la lésion s'expriment directement par un trouble précis d'ordre neurologique, la majeure partie de notre fonctionnement psychique ne peut être rapportée à un circuit ni même à une zone déterminée. De plus, s'agissant de fonctions particulièrement complexes, mettant en jeu des mécanismes à la fois multiples et eux-mêmes très sophistiqués, le fonctionnement neurobiologique, normal ou modifié par un processus pathologique ou par une substance chimique exogène ou endogène, ne s'exprime pas directement à la surface offerte à l'observateur. Il en passe par un agencement mental qui a sa propre organisation et qui doit bien être abordé par des méthodes et un ensemble de connaissances spécifiques. C'est l'objet de la psychologie et, pour les phénomènes morbides, de la psychopathologie. Il en résulte que la psychiatrie, discipline médicale, est conduite à se lier à de nombreuses disciplines connexes, dont certaines appartiennent au champ des sciences humaines. Pour être bref, on sait depuis fort longtemps que la causalité linéaire, d'ailleurs mise en cause par les physiciens, n'est pas opérante dans le monde vivant ; c'est vrai pour la pathologie mentale, mais aussi pour la pathologie somatique. Par ailleurs, si l'on considère les transmissions intergénérationnelles, en admettant - ce que récusent les généticiens - que l'on découvre le gène de la schizophrénie, je n'apprendrai rien au Dr ROMBOURG en remarquant que nous n'héritons pas seulement d'un patrimoine génétique, mais également de valeurs, de représentations, de traditions familiales autant que culturelles, d'une histoire, qui nous inscrit dans une lignée. Ce que nous en faisons en nous développant est une autre affaire. Cet héritage, qui est bien entendu engrammé dans nos circuits mnésiques, pèse parfois très lourd.

5. La position de notre confrère, qui, ne l'en déplaise, est éminemment philosophique, dans la mesure où cette discipline traite de la représentation de l'homme, est très voisine de celle de Thomas SASZ qui récuse le concept de maladie mentale, estimant qu'on regroupe indûment sous cette notion, soit des comportements déviants relevant dès lors de la justice et d'un traitement social, soit des troubles neurologiques. Il va sans dire que cette position, qui fait l'impasse de la souffrance, est pour le moins discutable.

6. Concernant la psychanalyse, s'il est vrai que la réflexion que l'on peut conduire à partir de la conception de l'Homme qu'elle implique est du domaine philosophique, il convient de ne pas méconnaître qu'elle est fondée et alimentée par la clinique. Elle est à l'origine des progrès immenses accomplis en psychiatrie depuis plusieurs décennies, notamment de la prise en compte des malades, y compris les plus graves et les plus démunis, en tant qu'êtres pensants et désirants. J'ai connu le temps où le discours du psychotique n'avait d'autre intérêt, pour le psychiatre, que sémiologique, permettant de faire le diagnostic et d'apprécier l'évolution. En d'autres termes, le patient était vidé de toute humanité. La théorie psychanalytique des délires, et bien d'autres travaux, a permis de considérer le délire comme un discours tenu par un sujet (au sens éthique du mot) pris dans une catastrophe insoutenable et tentant, certes de façon désordonnée et bizarre, d'y mettre de l'ordre et de retrouver un sens. Le psychiatre a la charge, difficile et souvent longue, de permettre au patient de retrouver un sens à son expérience, un sens qui ne l'ampute le moins possible de sa vie psychique. Les médicaments, dont on salue l'avènement comme l'origine de la révolution psychiatrique des années 50, ne suppriment pas le trouble mental comme un antibiotique détruit un germe bactérien. Ils modifient le fonctionnement neurobiologique et par suite le fonctionnement psychique selon les règles de celui-ci, dont on ne peut faire l'impasse. A titre d'exemple, la suppression imprudente ou hasardeuse, par un traitement neuroleptique "efficace", du délire d'une schizophrène peut le replonger dans le chaos de son expérience initiale, en le privant de l'amarre, certes très contestable du point de vue de la logique, jetée sur la rive pour mettre un peu d'ordre et de sens à ce qui lui arrive. La question de la dépression survenant en relation avec une expérience de perte, tel le décès d'un proche, dépassant la réaction de deuil, n'est résolue ni par le seul traitement médicamenteux ni par l'exposé que le temps finira par avoir raison de la douleur, ni par la combinaison des deux. L'étiologie figure-t-elle sur la liste proposée par notre confrère? Il est pour autant indiscutable que le fonctionnement biologique de la personne concernée est modifié, comme l'attestent les symptômes physiques qu'on peut repérer. Que dire lorsque, trente ans après, faute d'un travail d'élaboration (ou de métabolisation) psychique, la personne raconte la perte avec une telle actualité émotionnelle et affective qu'on peut penser, en l'absence de repère chronologique, que le décès vient d'arriver?

7. Sans vouloir polémiquer, j'ai l'impression que le Dr ROMBOURG se trompe d'époque et d'adversaire. Le "raisonnement" psychiatrique actuel n'a plus rien à voir avec ce qu'il était il y a cinquante ans, ni même il y a quinze ans. La compréhension de la clinique, dont les formes d'expression se sont enrichies, et des processus psychopathologiques s'est radicalement transformée. Les angles de lecture se sont renouvelés et multipliés, qu'il s'agisse de la neurobiologie, de la neuropsychologie, de l'exploration fonctionnelle du SNC, de l'analyse de la communication, du fonctionnement des groupes; l'épidémiologie psychiatrique, descriptive et analytique et mais aussi génétique, connaît un essor considérable. La psychanalyse n'en est pas restée à Freud, même si ses fondements ne sont pas récusés; elle évolue constamment et il est difficile d'en faire la critique sans prendre en compte son évolution au cours de son siècle d'existence.

8. Pour finir, il me semble que notre confrère, dans sa hâte de disqualifier la psychiatrie et les psychiatres, perd de vue deux choses, l'une formelle, l'autre fondamentale. Au plan formel, la psychiatrie n'est pas un domaine de la pathologie, pas plus que la cardiologie ou toute autre discipline ou spécialité médicale. Elle se définit comme l'ensemble des connaissances et des pratiques relatives aux troubles mentaux. Que ceux-ci soient strictement d'ordre neurologique comme l'affirme le Dr ROMBOURG ou non ne change rigoureusement rien à la nécessité de les étudier et de les traiter. La proclamation que la psychiatrie n'existe pas, qui rappelle celle concernant Dieu, est hors champ ou hors sujet. Au plan fondamental, notre confrère semble oublier ou mettre de côté un fait incontournable, à savoir la dimension symbolique, qui spécifie l'être humain. Cet accès au symbolique, qui est parfois compromis par des processus de développement pathologiques ou oblitéré par des phénomènes idéologiques, notamment groupaux, ne peut, d'aucune manière, se comprendre comme une fonction localisable dans le cerveau.

Bien cordialement.

Dr J-.P. VIGNAT, Psychiatre des Hôpitaux
C. H. St Jean de Dieu - Lyon jpvignat@ch-st-jean-de-dieu-lyon.fr




Cher Ami,

La préoccupation de votre correspondant mérite effectivement une réponse. Sa réflexion qu'il expose se comprend... si l'on s'en tient aux arguments présentés qui sont erronés.

Votre correspondant ne connaît pas bien l'histoire de la psychopharmacologie, ne retient qu'une partie de la littérature psychiatrique contemporaine, ignore manifestement la nature spécifique des objets de la psychiatrie et l'évolution des fondements scientifiques des disciplines humaines. Il lui faut effectivement se renseigner davantage avant d'affirmer que la psychiatrie n'existe pas.

P. Marchais pmarch@club-internet.fr




Lettre au Docteur Pierre Rombourg.

Cher Confrère,

Je répond à la deuxième partie de votre lettre consacrée à la recherche en psychiatrie.

L'activité scientifique ne peut se passer de l'épistémologie, de l'histoire des sciences, et bien que vous vous en défendiez votre réflexion s'inscrit dans un courrant philosophique qui est celui du Positivisme d'Auguste Comte ;
le Positivisme a influencé les scientifiques du XIX° siècle et au-delà, et s'est soldé par un échec quand il fut appliqué au domaine de la psychiatrie car aucune cause neurologique, infectieuse, immunologique (...) n'a été trouvée.
Par contre, cette forme de pensée, l'hypothèse lésionnelle des maladies mentales, a entraîné des drames pour les patients psychiatriques : de l'atteinte neurologique supposée, on est passé au concept de dégénérescence qui a été utilisé par les nazis pour justifier le massacre des malades mentaux en Allemagne et autoriser en France le régime de Vichy à les laisser mourir de faim.
Comme quoi, une idée scientifique erronée peut avoir des effets réels dévastateurs dans les domaines politiques et sociaux.
Les critères scientifiques du Positivisme ne permettraient pas de reconnaître comme science la mécanique quantique par exemple et actuellement il est fait références aux critères de scientificité élaborés par Karl Popper (1).

Je m'étonne qu'avec la longue pratique qui est la vôtre vous n'ayez pas été marqué par la question de l'effet thérapeutique de la relation médecin-patient ; il y a là un fait à aborder avec d'autres concepts que ceux du positivisme ; c'est à quoi Freud s'etait employé déclenchant à l'époque l'hostilité quasi générale.

Quant à Laennec, je peux saluer en lui, comme en Pinel d'ailleurs, le digne fils de la philosophie des Lumières, mais si cette philosophie est utile par l'humanisme qu'elle introduit elle n'est pas suffisante : Eichmann se referait à Kant pour justifier son action ; un autre abord de l'éthique est nécessaire.

Voilà cher confrère les quelques réflexions que m'inspire votre lettre ; je vous prie de recevoir mes meilleures salutations.

Eric Naneix eric.naneix@wanadoo.fr




Docteur Jacqueline Madre (psychiatre des HP)

Bien que relativement récemment en retraite, je me sens encore vivement impliquée dans tout ce qui représente une grande partie de ma vie.

Alors je ne peux lire votre message sans réagir.

Tout d'abord je suis d'accord avec vous sur le fait qu'il n'y a pas eu d'énormes progrès depuis l'arrivée des neuroleptiques. Mais lorsque vous dites que la psychiatrie n'existe pas, je me sens en désaccord. Il suffit d'avoir travaillé dans les HP pendant de nombreuses années pour se rendre à l'évidence qu'il y a des pathologies particulières, avec des signes cliniques identifiables. Nous avons ouvert la porte à l'arrivée de la génétique à celle des enregistrements de plus en plus sophistiqués. La biologie n'est pas restée au dehors. Les premiers neuroleptiques, le citrate de lithium, certes, ont eu des débuts empiriques mais nous les avons dépassés. Tout médecin psychiatre ne se borne pas à observer et à "causer". Ils sont nombreux à détecter des tumeurs cérébrales, des sida, et autres. Vous me direz : cela ne va pas bien loin ! Et là encore là dessus, je suis d'accord avec vous.

Mais j'ai plusieurs arguments à vous exposer.

- D'abord, peu à peu, nous sommes devenus de moins en moins nombreux dans les hôpitaux publics intra et extra hospitaliers devant une demande grandissante.

- Nos carrières, notre recrutement ont été malmenés, placés au dernier rang. Peut-être est-ce de notre faute mais pas forcément car le trouble mental fait peur et celui qui le soigne aussi. Alors mieux vaut l'éloigner.

- Nous avons eu de plus en plus de charges administratives qui gaspillent un temps précieux que l'on devrait employer auprès des malades, à l'écoute des "histoires des familles", aux relations avec les autres disciplines, en particulier les omnipraticiens mais surtout à la recherche en commun avec des spécialistes et chercheurs biologistes et autres.

- Nos budgets se sont effilochés et ne couvrent même pas nos besoins élémentaires en personnel.

- Vous parlez de Freud ! Et bien, tout en reconnaissant son apport théorique, je pense que la vague déferlante d'enthousiasme pour ses réflexions, souvent déviées de leur sens mais intéressantes par ailleurs, a complètement bloqué la recherche dans les domaines "scientifiques". Une mode qui passe.

- La réelle formation permanente ! l'informatique ! rions en plutôt que d'en pleurer. Elle est bien loin encore d'être entrée dans les murs du médecin psychiatre et de ses équipes. Pas de matériel et s'il y a matériel, il est privilégié pour des données administratives. De toutes façons pas de temps et formation superficielle souvent fantoche. - combien y a-t-il de postes de psychiatres dans les laboratoires de biologie, physiologie, anatomopathologie, etc.... ? Je n'en vois guère.

Votre propos est, certes, pertinent, mais pas complètement. Car vous semblez ignorer, et pour cause, tout ce qui se fait malgré tout dans l'ombre, la difficulté et l'acharnement. La psychiatrie est un art et c'est aussi une science lente. Car la relation ne s'établit pas en un jour.

En tous cas merci de votre intervention qui va sûrement soulever des discussions intéressantes et profitables, aux omnipraticiens, aux psychiatres et à d'autres

La balle est lancée ! Quelle rebondisse vite pour ne pas s'enliser dans la stérilité.

Dr Jacqueline Madre




Que notre cerveau soit bientôt remplacé par des ordinateurs devrait satisfaire ce monsieur. Car que restera-t-il de nous lorsque nous auront décortiqué (au sens propre du terme) toutes les particules de nos neurones. "Le meilleur des mondes" sans doute !

Psychiatrie veut dire "sciences de l'âme". Il ne s'agit, certes ni de verser dans les religions, ni dans de hautes vapeurs philosophiques....Quoi que.....

Nos patients méritent la considération de leurs discours, ils sont peut-être les seuls restes humains non "scientifisables", s'échappant depuis la nuit des temps au pouvoir médical (de moins en moins apparemment). Ils sont considérés comme malades parce que la volonté aliéniste a voulu les décrire comme tel. C'est justement par la frustration médicale des aliénistes que nous ouvrons cette acharnement à traiter. Besoin de reconnaissance médicale sans doute !!!!

Faut-il découper le cerveau d'Antonin Artaud, démanteler les fabuleuses et obscures écritures de Schreber, ne pas se plonger dans le labyrinthe de Joyce ?????

Je ne sais pas si la psychiatrie existe, mais les psychotiques existent toujours....et ça fait râler, c'est pas cartésien, c'est inexpliqué ! C'est inconcevable en l'an 2000.

C'est peut-être vrai que nous n'avons pas évolué, cher docteur, mais il vous reste le scalpel pour la lobotomie. Là, il n'y aura plus de résistance organique....et nos bla bla philosophiques disparaîtront.

Vous oubliez sans doute que la perception de la maladie se dit avec des mots, et que ces mots ont une cause culturelle, puisqu'ils se signifient dans la langue maternelle, celle qui nous est transmise.

Alors Freud démodé ?

"L'important n'est pas que l'inconscient détermine la névrose. Là dessus Freud a très volontiers le geste pilatique de se laver les mains. Un jour ou l'autre, on trouvera peut-être quelque chose, des déterminant humoraux, peu importe - ça lui est égal. Car l'inconscient nous montre la béance par où la névrose se raccorde à un réel - réel qui peut bien, lui, n'être pas déterminé"..J.Lacan, séminaire XI.

Avez-vous un inconscient, docteur ?

Nathalie Dolbeau ISP




Ce serait tellement rassurant pour les psychiatres tels que Pierre Rombourg si les troubles de la santé mentale ne s'expliquaient exclusivement que dans le cadre de leur dimension neurobiologique ! Mais alors quid des traumatismes dus au contexte de vie des personnes, quid des psycho traumatismes de guerre. Pourquoi P. Rombourg ne va-il-pas jusqu'au bout de son raisonnement et n'affirme-t-il pas que l'inconscient n'existe pas !

La psychiatrie n'aurait de sens que scientifique? Alors qu'il nous explique que les enfants autistes sont victimes d'un gène "tordu", que les agressions sexuelles ne suscitent que des troubles chimiques. Peut être Dr Rombourg faut-il vous rappeler que la psychiatrie est partie intégrante de la médecine, que dans sciences humaines il y a science, donc scientifique et humain donc complexité des interactions avec l'environnement. Pourquoi vouloir encore une fois opposer biologie et psychiatrie alors que tout le monde sait quelles peuvent faire l'objet d'un excellent "PACS". Mais Dr Rombourg, pour cela, il faut accepter la notion de complexité, d'aléatoire. Il faut accepter de douter pour penser et agir. Il faut accepter de ne pas pouvoir tout résoudre. Ce serait tellement confortable, n'est ce pas ?

Mais peut être votre vie et votre enfance ne vous ont elles pas permis d'accéder à ce type de considérations !

Salutations

Marc Livet

Cadre infirmier en psychiatrie subjective



L'omnipraticien de service fait dans la provoc soigneuse histoire de susciter des réactions. Manière un peu perverse mais pourquoi pas. Un tel zigoto a fait déjà un coup analogue sur la liste de discussion de FRANCOPSY. Mais ce n'est pas le même à mon sens.

La manière de poser un problème, au plan scientifique est de procéder par la définition d'une problématique, d'une méthodologie, d'une hypothèse et de s'acharner à étudier tout ce qui contrarie l'hypothèse du chercheur, quitte à invalider sa propre hypothèse. Méthodologie et épistémologie sont les compléments indispensables de l'éthique du chercheur.

Asséner les lieux communs comme le fait zigoto l'omnipraticien, questionner du point de vue du contre dogme, à dogme contre dogme le fait plus ressembler à un ersatz ayathollien de ce que connut de pire notre communauté scientifique depuis trente ans.

A l'heure où justement les pratiques amènent aux rapprochements, où des psy et des neurologues, des éthologues, des sociologues, des chirurgiens, des urgentistes bossent ensemble, Zigoto nous fait le coup de dénoncer, de stigmatiser...

Mais c'est lui qui les porte les stigmates ! Regardez autour de vous un peu mon cher, renseignez vous!

Par exemple à Poitiers, le 4 décembre, nous organisons la première journée de Médecine de l'Adolescent sur le thème des accidents et répétitions d'accidents à l'adolescence, Amphi Descartes à la fac de Lettres de 8h30 à 18 h. Les intervenants et les approches ?

Des urgentistes, des psy tendance X, des psychologues tendance Z, des pédiatres, des ré éducateurs en réadaptation fonctionnelle, des entraîneurs sportifs, des psychiatres W, des pédagogues, des chercheurs en sciences exactes, d'autres en sciences molles...

Et il y aura du café, des croissants, plein de monde.

Infos au 05 49 44 57 59 ou par fax au 05 49 44 57 51

Amitiés à tous, même à notre ami que j'ai brutalement qualifié de zigotoprovocateurinfantiloigniorantpouet pouet!

Denis Reserbat-Plantey, Educateur spécialisé réalisateur audiovisuel plein temps Service Universitaire de psy de l'enfant et de l'adolescent de Poitiers CHL

Service du professeur Daniel MARCELLI


Le fait que la psychiatrie ne puisse pas être comparée à la plupart des autres domaines de la médecine ne signifie pas qu'elle n'est pas scientifique. Les praticiens qui s'occupent de la douleur se trouvent un peu dans la même situation. Notre approche doit tenir compte à la fois de données somatiques, de facteurs psychologiques propres à l'individu et de facteurs relationnels dans lesquels le praticien est impliqué. Si les recherches faites dans les deux derniers domaines relèvent plus des sciences humaines que de la biologie ou du scanner, elles n'en demeurent pas moins scientifiques ou alors nous devrons réfuter les sciences humaines dans leur ensemble.

Certes il serait sans doute plus rassurant de trouver un virus, une tumeur ou que sais-je encore...

Ceci dit en tant que psychiatre je prescris des examens et il m'est à plusieurs reprises arrivé de découvrir une origine somatique à des troubles que des collègues avaient diagnostiqués comme étant "psychiatriques". Alors ?

Je pensais qu'une telle querelle était aujourd'hui dépassée. Un tel message montre que nous avons encore beaucoup à faire pour changer l'image de la psychiatrie.

Bon courage à tous!

Marie-Christine Cabié




La psychiatrie biologique, j'en reviens. Après un séjour au Canada, je peux dire que c'est le pays du diagnostic stigmate qui marque au fer rouge, que c'est le pays de la contention, de l'isolement systématiques. Cette psychiatrie là je vous la laisse. La mienne n'a rien à voir avec la médecine ou si peu, c'est une science humaine dont les méthodes en matière de scientificité valent bien la psychiatrie biologique. L'histoire aussi a des méthodes scientifiques, relisez l'histoire de la découverte des neuroleptiques avant de dire que les psychiatres n'ont rien à y voir. Faites preuve de la même rigueur que celle que vous prônez avant d'oublier les Delay, Deniker qui ne sont certes pas mes tasses de thé théoriques mais qui ont "inventé" les neuroleptiques. Vous pouvez aussi nier les acquis de la sociologie, de l'ethnométhodologie. Je vous conseille également de faire un peu d'épistémologie avant de hurler que la psychiatrie n'avance pas. Prenez contact avec les psychiatres de Paul Guiraud. Beaucoup d'entre eux ne vous ont pas attendus pour établir ces liens. Ils se rassemblent au sein de l'association ERIE.

A en reparler plus longuement,

Dominique Friard.

P.S. j'ai oublié la lobotomie, les électrochocs qui ont, comme chacun sait, beaucoup apporté à la psychiatrie.




Pas mal le message de l'omnipraticien qui en fait reprend une idée qui se développe déjà dans certains services universitaires (comme à la Pitié) à savoir que tout trouble psychique possède un substratum anatomoclinique... sauf que pour le moment rien ou presque n'a été trouvé.

Enfin, globalement son message m'inspire que le Monsieur doit avoir une histoire pas banale vis à vis des troubles mentaux pour être autant défendu. Par ailleurs il semble confondre sciences fondamentales et sciences humaines, qui font de la psychiatrie une science à part entière avec ses théories et ses recherches. Enfin il frôle la malhonnêteté intellectuelle puisque c'est grâce a une équipe de cliniciens que fut découvert le premier neuroleptique (largactil per Deniker, actuellement service de Loo).

aciao,

Pierre Ludovic Lavoine




Entre deux tournées de vacances, je me contente de vous livrer cette citation en réponse à monsieur l'omnipraticien psychiatrophobe : "Par leur nature propre, les hommes de science sont portés à toutes sortes de perversions intellectuelles et morales. Leurs vices principaux sont l'exagération de leurs propres connaissances et le mépris envers tous ceux qui ne savent pas. Donnez-leur le pouvoir et ils deviendront les plus insupportables des tyrans". BAKOUNINE.

Nelly Derabours




Je pense que cet e mail est une boutade et qu'il faut le prende au second degré. Si le psychiatre n'écoute pas les patients, qui va le faire ? Certainement pas les médecins qui se jettent sur les examens complémentaires et ne peuvent que se réfugier derrière un scientisme qui ménage leur angoisse.

Quand finira-t-on d'enseigner aux étudiants que le patient est un objet ?

Laënnec a écouté !!!!!

boutade.....

Pierre Jean Colas pjcolas@club-internet.fr




Tous mes collègues ont largement répondu aux observations du Dr Rombourg,

alors que rajouter sinon que l'humanité c'est aussi nature et culture et que

faire l'impasse sur la culture c'est accepter d'être un boiteux, il faut peut

être lire Freud, mais aussi repenser a nos bons amis les vieux philosophes

grecs. Bien amicalement a vous qui n'avez pas progresse depuis 3000 ans et

bonne année.

Luc Vagogne psychiatre-psychanalyste Vagogne@aol.com




Salut l'artiste! Soigner a toujours été un art qui s'appuie certes sur des connaissances scientifiques, mais qui intègre l'ensemble des données bio-psycho-sociales de la personne. La psychiatrie est donc sans doute aujourd'hui, la seule véritable discipline médicale. Connais-tu l'aphorisme : "Il n'y a pas de maladie, il n'y a que des malades !" ? La schizophrénie n'existe pas et la dépression non plus. Il n'y a que des malades qui font des crises dissociatives et d'autres qui sont déprimés. Comment en rendre compte sans un peu de philosophie? Et après tout, si pour soigner la souffrance psychique, il faut se passer de la psychiatrie, pourquoi pas ? "Primum non nocere, deinde curare..."! "Le style c'est l'homme" dit-on encore, le tien sent la naphtaline. Un pédo-psychiatre de banlieue.

Jacques Beigbeder jbeigbeder@wanadoo.fr

 


Les propos tenus par Dr Rombourg sont inacceptables et reflètent au fond une méconnaissance totale de la Psychiatrie.

- le jour ou le Dr Rombourg aprendra a distinguer une anxiété généralisée d'une dépression anxieuse ou masquée, ou reconnaitra un trouble panique d'une anxiété situationnelle ou encore un trouble dépressif pseudo démentiel d'une démence dégénérative, je pense que ce jour là, il changera d'avis et d'attitude.
Que cela ne déplaise au Dr Rombourg, ces affections (il en existe d'autres) sont parfaitement curables et représentent plus de 14% de sa clientèle si notre cher Docteur exerce en qualité de médecin généraliste .
NB : recyclez vous .
Docteur C.Bendiouis E mail: C_bendiouis@mail.univ-tlemcen.dz



Qui puis je si les patients expriment avec leur corps des difficultés d'ordre affectives ou relationnelles (non objectivable par l'arsenal biologico-radiographique) : j'ai très vite vécu l'impuissanse et la détresse dans lequel me mettait tout mon savoir "medico-scientifique" acquis avec foi en la science toute puissante durant mes etudes de medecine. Alors j'ai commencé un nouveau chemin : inscription au DES de psychiatrie, thérapie personnelle, groupe Balint, formation à la relation d'aide, lectures analytiques, supervision, formation aux thérapies familiales...: jamais trop tard pour sortir de mes illusions et me donner une formation plus en rapport à mes besoins et à ceux des patients que je croise dans mes fonctions de (nouvellement) psychiatre (après un premier internat passé en réanimation) assurant une permanence aux urgences de l'Hôpital Nord de Marseille. Qui puis-je si la souffrance psychique résiste à la biologie et au scanner...? Ceci dit la science j'adore. Au plaisir d'échanger sur nos experiences réciproques de medecin.

fmaillard@email.com
10, rue Plumier. 13002 Marseille
http://fmaillard.ifrance.com



C'est vrai, le Dr. Rombourg avait évoqué l'absence de progrès, et tout le monde a pu constater que Mme Madre était de cet avis. J'avais hésité jusqu'alors à répondre devant l'agressivité et l'apparente mauvaise foi - la polémique est une perte de temps, le chien aboie et la caravane passe - et j'hésite encore. En effet, quoi qu'il veuille en dire, ce Dr. Rombourg est bel et bien agressif, et l'on est surpris qu'une telle disposition ait survécu au passage à la retraite. Il est agressif parce qu'il explique à des confrères, dont il connaît par conséquent le contexte quotidien, qu'on leur a enseigné une discipline fantôme à la faculté et que toute leur expérience clinique acquise dans leur exercice est imaginaire et réductible à d'autres disciplines et d'autres aspects de la pratique de notre art !?

Est-ce que cela mérite réponse ? Non.

Par contre, nous devons quelques aveux à ce tandem de retraités, j'entends par là Mme Madre et le Dr. Rombourg, un aveu : vous êtes partis au mauvais moment.
Nous avons des progrès plus qu'infinitésimaux avec nos psychotiques. Soyez heureux, Rombourg, ils sont dûs au médicaments et point aux seuls progrès de la psychothérapie, ni point encore aux miracles de la neurobiologie dont vous devriez lire les ténors puisqu'il arrive qu'ils philosophent eux aussi, curieusement, mais les nouveaux antipsychotiques permettent de réelles réinsertions, en nombre significatifs. J'assiste, pour ma part, à de réelles avancées sur ce terrain-là et comme ce n'est pas moi qui ait inventé la poudre, je suis bien content qu'on m'ait trouvé celle-là. Je trouve que nous vivons une époque angoissante à bien des égards, mais aussi chargée d'espérances. Et j'aimerais assez, malgré une tendance affichée à la néophobie, que vous, les retraités, ne découragiez pas ceux auprès desquels vous pouvez jouer un rôle lorsqu'ils ont besoin de vos confrères : l'avenir est là, déjà. Je me dis que je ne suis pas encore, certes, dans la peau des phtisiologues dont j'ai vu la disparition quand j'étais étudiant, mais qui sait ? J'exerce un métier dont l'avenir ne sera certainement plus le même dans quelques années, et pas seulement à cause des difficultés d'exercice dont il ne faut jamais parler parce que c'est impudique et qui seront ce qui gênera bientôt nos patients bien plus que l'état scientifique de la psychiatrie qui ne cesse d'accumuler des progrès importants : j'ai des schizophrènes réinsérés en usine depuis plusieurs années et qui bénéficient de promotion sociale interne ; aujourd'hui, quand on connaît la réalité du chômage, on ne trouve pas ça « un progrès infinitésimal ». Mais c'est vrai qu'on peut parfois craindre pour l'accessibilité des patients aux soins, à l'avenir, ce qui sera la nouvelle contradiction que nous devrons assumer : avoir enfin des moyens, mais pas pour tout le monde... C'est aussi la raison pour laquelle ceux qui ont connu l'avènement de l'accès aux soins pour tous, que sont Madre et Rombourg, auront encore à faire entendre leur voix : pour que ne revienne pas le monde d'avant-guerre, le monde des romans de Maxence Van der Meersch où la santé était la toile de fond d'un mélodrame.
Ce serait plus profitable et moins stérile que des polémiques dépassées cherchant querelles à des confrères de qualité, intellectuellement souvent sous-utilisés, écartelés entre la lecture des compte-rendus de congrès américains sur l'Internet, la fatigue de tâches quotidiennes administratives imposées, et le temps dû à la clinique, car les psychiatres fonctionnent moins en autarcie que les retraités et ce serait un bon moyen de rester actif tout en donnant de la voix !

F. Jacquemin
C. H. S. de La Charité-sur-Loire fr_jacqu@club-internet.fr



Cher confrère,
C'est avec un grand étonnement que j'ai lu votre première correspondance, elle marquait un parti pris scientiste et une méconnaissance assez impressionnante des travaux et pratiques dans le champ psychiatrique.

Votre deuxième lettre, plus explicite, plus ouverte aussi sur l'échec de la médecine comme science et comme pratique quotidienne parfois douloureuse, m'incite à dialoguer brièvement avec vous en reprenant un des aspects de votre intervention.

Le problème actuel de la psychiatrie n'est pas qu'elle ne soit pas scientifique ou trop philosophique ou trop tournée sur elle même en autarcie. La psychiatrie est au contraire actuellement écartelée entre de multiples approches allant des sciences dures ou appliquées (génétiques, biologiques, neurophysiologiques, neuropharmacologiques, neurodeveloppementales, etc) jusqu'aux théories comportementales, cognitives, et aux approches psychopathologiques phénoménologiques et psychanalytiques..etc. Son pb est assez clairement d'arriver à intégrer toutes ses approches. Mais encore bcp plus que celà, d'arriver à faire un pont entre ce que les sciences dures cherchent et trouvent et la psychopathologie. Un fait trés frappant si vous lisez les travaux de JP Changeux (L'Homme neuronal par ex.) et rapportés par lui concernant l'approche scientifique des hallucinations chez les schizophrènes, c'est qu'on a l'impression à le lire qu'il ne s'agit pas d'hallucinations qu'il "voit" au PET Scan, ni de schizophrénie tel que les cliniciens ont l'habitude d'en voir... (allez demander à un schizophrène halluciné d'appuyer sur le bouton lorsqu'il entend des voix... ), peut-être s'agit-il d'hallucinoses ou d'hallucination par tumeurs cérébrales "en toute conscience", ou qq chose comme ça.

Qu'est-ce-que ça veut dire? ça veut dire qu'on ne peut appliquer les progrès de la science, comme ça, à la pensée de l'homme, même malade mental. Car on va alors "prendre des vessies pour des lanternes" et ainsi de suite. Si vous connaisiez l'histoire de la psychiatrie, vous auriez pu constater qu'à chaque période, il y a eu ce sentiment de "tenir qq chose", une causalité, physique, psychique, sociologique, génétique, pharmacologique, etc. Nous sommes obligés de passer par l'epistémologie, pour savoir ce que nous faisons, pour savoir ce que nous pouvons attendre de ce que nous cherchons, avec les méthodes que nous employons. Car l'objet de la psychiatrie est un objet trés singulier: désordre de l'esprit inscrit dans le corps qui le supporte et le génére, sans qu'à aucun moment l'esprit ne puisse se réduire au corps, ni qu'à aucun moment un comportement ne puisse être pris pour un signe. C'est à cette complexité que nous avons affaire et c'est pourquoi nous avons, après et dépassant Descartes bien besoin de la philosophie pour nous y retrouver un peu. Je vous invite à lire l'éditorial de déc 98, de la grande spécialiste de la schizophrènie aux USA, Nancy Andréasen sur le site dédié à H. Ey dont je m'occupe (Allez sur psydoc, première page cliquer H. Ey, puis dans nouveautés Andreasen). Elle ne dit pas autre chose, pas de Biologie, de génétique, de pet scan sans une réflexion clinique et épistémologique approfondie; elle crie même au désastre si les cliniciens et leurs réflexions ne reviennent pas sauver la recherche.

Quant-à la psychanalyse et à l'Ics, il est évident qu'elle apporte bcp à la connaissance de l'homme, pour peu que l'on veuille bien se demander comment se fait-il qu'en me trompant de mot (lapsus), à ma grande surprise je me suis mis à rougir devant les autres. N'y a-t-il pas là qq vérité qui se dit en se cachant à moi-même? ça vaut peut-être la peine, pour certains, d'aller y voir de plus près, j'en ai des exemples tous les jours.

Mais croyez-moi, le véritable défi contemporain lancé à la psychiatrie, n'est pas celui contenu dans votre missive, mais "Rosetta" celle du film, que nous verrons de plus en plus en plus dans nos cabinet, non pas nous demander de l'amour qu'elle fuit, ni même un travail, mais une "place" au risque de devenir meurtrière. Croyez-vous que notre science y suffira (et même notre science de la parole risque bien d'y être insuffisante).

Bien à vous
Patrice Belzeaux patrice.belzeaux@wanadoo.fr



Cher Confrère,

Permettez-moi de vous réadresser à nouveau quelques questions suite à votre réponse :

1) de quelle Psychiatrie parlez-vous ?
si pour vous, cher Confrère, la psychiatrie n'existe pas comment peut-elle vous faire écrire autant que çà ?
2) Qu'appelez-vous "avancée tangible" et qu'appellez-vous "guérison" ?
Par exemple : un sujet diabétique insulino-dépendant est-il pour vous guéri avec son insuline ?
3) Dans quelle rubrique philosophique classeriez-vous les actes manqués, les lapsus, les "habitudes" inutiles de notre vie quotidienne dont vous semblez épargné (peut-être du fait d'une cécité ou d'une surdité psychiques, ou peut-être du fait de vos postulats) ?
4) N'avez-vous jamais lu d'épreuves cliniques et/ou expérimentales en psychiatrie ?
5) Pensez-vous réellement que la science soit capable un jour ne serait-ce que de lire vos pensées, percevoir vos émotions profondes, bref vous lire à livre ouvert tout ce qui fait de vous autre chose qu'une machine scientifique aux modules intercheangeables par chirurgie standard ou clonage génétofivétique ?

En quelle sorte, êtes-vous prêt à confier la destinée de votre douce retraite à un supermacroprocesseur du type "HAL 9000" (confer 2001 L'odyssée de l'espace, Stanley Kubrick)

J'attends vos réponses aux questions que vous avez soulevé chez moi. Merci de ne pas trop me faire attendre

Patrice Duquenne, Pédopsychiatre
paduquenne@Nordnet.fr


Dernière mise à jour : jeudi 17 février 2000 8:59:08

Dr Jean-Michel Thurin