DIRECTION DE LHOSPITALISATION
ET DE LORGANISATION DES SOINS
Sous-direction de l'organisation du système de soins
Bureau de lorganisation de loffre régionale
de soins et populations spécifiques (O2)
Afin de faciliter la lecture du présent rapport, ne sont rapportées dans cette partie que les propositions à caractère général et les actions prioritaires à développer. Celles-ci ont été définies au regard de lanalyse des propositions thématiques formulées par le groupe de travail en matière de prévention, de réponse à lurgence et à la crise, de soins et de soins de suite ou de réadaptation ou de réinsertion. Lannexe n°1 détaille létat des lieux et les propositions pour chacune de ces modalités de soins.
Laccessibilité aux soins sapprécie à plusieurs égards:
- En termes géographiques :
Il convient dorganiser lensemble de loffre de soins psychiatriques de manière à assurer une réelle prise en charge de proximité en tenant compte de la démographie médicale et de lenvironnement et notamment des modes de communication. Il sagit notamment damplifier le développement des structures et/ou activités de soins dans la communauté au plus près des lieux de vie et dactivité des populations ainsi que des interventions précoces à domicile par les équipes de psychiatrie, y compris en cas de crise ou durgence.
Afin de garantir laccès aux soins, la continuité des prises en charge et préserver linsertion familiale et sociale du malade, les unités dhospitalisation à temps complet éloignées des bassins de population quelles desservent devront être relocalisées dans des sites hospitaliers plus proches. Ces relocalisations devront être réalisées dans des conditions permettant dassurer la qualité et la sécurité des soins. A ce titre, limplantation de ces unités devra privilégier les établissements de santé disposant dun service daccueil des urgences (SAU ou UPATOU).
- En termes de délais : il sagit de raccourcir les délais de réponse par dautres modes dorganisation des services en permettant la réponse en temps réel aux demandes qui le justifient, et en augmentant le nombre de jours et les horaires douverture des différentes structures daccueil.
- En termes de diversité de modalités daccès : la prise en compte des besoins de santé mentale doit être reconnue par tous les acteurs (généralistes, travailleurs socio-éducatifs, personnels de la justice, spécialistes publics et privés...). Selon les cas, lintervention du dispositif spécialisé seffectuera sous forme de prise en charge directe des personnes ou des interventions indirectes de type conseil, formation...
- En termes de lisibilité du dispositif : il sagit daméliorer la connaissance des usagers et des professionnels, par exemple au travers dannuaires, et daméliorer limage de la psychiatrie dans le grand public, lobjectif étant de simplifier et de rendre plus transparentes les modalités dentrée dans le dispositif ;
- En termes socioculturels : il convient dadapter les modes daccueil pour tenir compte des besoins des personnes en fonction de leur appartenance socioculturelle (ex : communautés étrangères).
- En terme de coût pour les usagers (coût des transports et temps de déplacement...).
- Favoriser une offre de soins graduée et diversifiée ...
Les prises en charge doivent pouvoir sappuyer sur un dispositif souple et évolutif en terme de pratiques et de structures. Toutes les combinaisons doivent être possibles et les différentes propositions mobilisables, en fonction des besoins dune personne à un moment donné, en fonction de son projet de vie.
Le développement des alternatives et de lambulatoire doit être nettement encouragé notamment grâce à une répartition des moyens plus favorable.
Lhospitalisation complète doit être considérée comme une modalité de soins parmi les autres et doit pouvoir être mobilisée en cas de besoin des patients. En outre, la qualité de lhospitalisation implique des locaux adaptés, entretenus et rénovés ainsi quun fonctionnement assurant la qualité des soins et le respect des libertés individuelles.
- ...répondant à une préoccupation damélioration de la qualité
La poursuite des démarches daccréditation, conduites par lANAES, doit concourir à lamélioration constante de la qualité des pratiques, des prises en charge, des locaux ... Il est nécessaire que lANAES tienne compte des orientations du plan santé mentale et notamment du développement de lambulatoire dans son guide daccréditation. Il est également souhaité que lANAES participe à la définition et au développement des outils dévaluation dans le domaine de la santé mentale.
Le principe de continuité, qui constitue un des fondements du secteur psychiatrique, induit de définir une organisation des soins attachée à soutenir et à accompagner les trajectoires des patients.
Il convient aujourdhui, de redéfinir les conditions de garantie de ce principe quand la diversité des sollicitations à légard de la psychiatrie interroge la capacité du secteur à apporter lensemble des réponses attendues. Cela conduit à considérer le dispositif de soins en psychiatrie essentiellement en termes dintégration, darticulation et de relais.
Il sagit de permettre une adaptation des soins, quels que soient létat de santé et les besoins de prise en charge que présente une personne, à lendroit, au moment, pour la durée et lintensité dont elle a besoin, quils relèvent strictement du domaine sanitaire ou du champ social.
Le secteur psychiatrique ne peut, à lui seul, fournir lensemble des réponses attendues et des modes de fonctionnement nouveaux, tels que lintersectorialité, fondés sur la notion de coopération, doivent être imaginés.
La nécessité daménager des parcours de soins au bénéfice des patients pour répondre à la complexité des besoins de soutien et de prise en charge, tout au long de leur trajectoire, implique également de réduire les cloisonnements au sein du dispositif de soins : entre la pédopsychiatrie et la psychiatrie générale, entre la psychiatrie publique et la psychiatrie libérale, entre la psychiatrie et les disciplines somatiques, entre la ville et lhôpital.
La continuité et la cohérence des soins passe par le développement des partenariats entre les acteurs de santé mentale, mais aussi avec lensemble des acteurs et des dispositifs associés. Le travail en réseau doit se renforcer entre les différents intervenants :
- liens entre médecins généralistes, pédiatres, gynécologues-obstétriciens et médecins spécialistes en psychiatrie,
- entre secteur somatique (dont les services durgences) et secteur psychiatrique,
- entre psychiatrie publique et psychiatrie privée à but lucratif ou non lucratif,
- et plus globalement entre sanitaire, social, médico-social et éducation nationale.
Les familles doivent être considérées comme un partenaire de léquipe de psychiatrie. A ce titre, elles doivent être écoutées, informées, formées et soutenues dans leur rôle daccompagnement de la personne malade.
Compte tenu de la pratique des secteurs de pédopsychiatrie en matière de prise en charge ambulatoire et alternative à lhospitalisation complète et dintervention à domicile ainsi que des besoins identifiés pour les adultes, les propositions de développement de lintervention à domicile visent en priorité ces derniers. Lannexe n° 2 regroupe cependant les réflexions menées par le groupe pour la psychiatrie infanto-juvénile aussi bien que pour la psychiatrie générale.
Le développement de lintervention à domicile pour les personnes adultes est préconisée afin de répondre aux objectifs suivants :
- permettre une réponse graduée dans le temps (urgence/post-urgence, programmée/non programmée) et dans l'espace (allant du tout hospitalier au tout ambulatoire) ;
- développer laccessibilité du dispositif de santé mentale ;
- contribuer à limiter le fardeau familial et social du soin, prévenir ainsi les mécanismes d'usure ou de rejet ;
- promouvoir l'alliance thérapeutique avec les patients et leur entourage en inversant la démarche habituelle qui est celle du malade vers les professionnels, en accédant au contexte de l'intervention comme information et comme ressource et en aidant le patient et son entourage à s'engager dans une prise en charge ;
- limiter le recours à lhospitalisation quand elle ne simpose pas et préparer cette dernière quand elle savère indispensable ;
- permettre le maintien à domicile de patients présentant des troubles graves et persistants (patients seuls, comorbides et présentant des hospitalisations à répétition) ;
- permettre lhospitalisation à domicile lorsque létat de la personne le permet et que lenvironnement familial lautorise.
Concernant les modalités de développement de ce type dintervention, laccent est mis sur les points suivants :
- prévenir linsécurité dans les situations de crise ou durgence : prendre en charge des situations d'urgence psychiatrique au domicile peut comporter, pour les professionnels, un danger qui ne doit pas être sous-évalué. Celui-ci peut provenir du patient lui-même, de son entourage, ou du voisinage. Une formation appropriée, une vigilance et des précautions permanentes, des procédures définies et rigoureusement appliquées sont indispensables.
- adapter la réponse en fonction des besoins identifiés et des moyens disponibles
Plusieurs options peuvent être retenues au regard des besoins et des moyens mobilisables. Dans le cas où loption dune organisation 24h/24 est prise, il conviendra de prendre en compte la notion de taille critique suffisante (de 200 000 à 400 000 habitants suivant les zones et le contexte) pour garantir le niveau d'activité et "amortir" sur plusieurs secteurs le prélèvement éventuel des ressources nécessaires.
- Larticulation entre la psychiatrie infanto-juvénile et la psychiatrie générale :
Cette articulation est nécessaire pour réaliser une approche globale et pour assurer la continuité de la prise en charge garantissant la qualité des passages. Elle est tout particulièrement requise pour la prise en charge des adolescents, lors du passage à lâge adulte de jeunes pris en charge par la psychiatrie infantojuvénile et dans le domaine de la périnatalité.
- La coopération entre secteurs psychiatriques et entre établissements : lintersectorialité
Il sagit pour plusieurs secteurs psychiatriques rattachés ou non à un même établissement de santé de promouvoir un projet de soins élaboré en commun. Cette coopération se justifie dès lors que des critères tenant à la spécificité, à la localisation ou à la masse critique ne permettent pas à un seul secteur de répondre aux besoins identifiés. Ce mode de coopération est adapté à la mise en œuvre de techniques de prise en charge spécialisées telle que la réponse aux urgences, la psychiatrie de liaison, la réinsertion, ou la prise en charge de populations particulières telles que les enfants et les adolescents, les suicidants,...
Cette stratégie de soins fondée sur la spécialisation est efficace mais elle comporte des risques de hiérarchisation des soins, contraire à la notion dégalité daccès, et de fragmentation de loffre, contraire au principe de continuité de soins.
Afin de préserver la cohérence et la continuité des soins, la mise en place de services ou déquipements intersectoriels doit se concevoir et fonctionner en articulation forte avec les différents secteurs concernés, qui doivent sinvestir pleinement dans la gestion mutuelle dun projet médical commun, lui-même défini en cohérence avec les projets sectoriels.
Lintersectorialité entre secteurs rattachés à un même établissement peut se traduire par diverses modalités dorganisation : unités fonctionnelles, départements regroupant des unités fonctionnelles à vocation intersectorielle, fédération de secteurs. La fédération hospitalière, en raison de sa souplesse, de la concertation permanente quelle suscite et de sa réversibilité, semble la modalité la mieux adaptée à la gestion de lintersectorialité et la plus apte à éviter les risques sus-évoqués.
Lintersectorialité entre plusieurs établissements de santé peut sexercer dans le cadre dune convention, dun syndicat inter-hospitalier, dune association de 1901, en privilégiant la fédération médicale inter-hospitalière, qui peut permettre de pallier la difficulté à pourvoir les postes médicaux pour les établissements gestionnaires dun secteur unique ou dun petit nombre de secteurs posant le problème de la masse critique, et faciliter la gestion de postes partagés. La coordination exigeant du temps, des moyens devront être prévus à cet effet.
Dans tous les cas, il est nécessaire de formaliser ces coopérations et de les assortir dun règlement intérieur. Ce dernier doit prévoir la nature de lactivité, les protocoles dadmission et de prise en charge des patients, les relations fonctionnelles entre les secteurs, les conditions de responsabilité et de coordination médicale, de gestion des personnels, de traitement de linformation médicale...Doit également être prévue lévaluation périodique de lactivité et du fonctionnement de la structure.
- La coopération entre établissements de santé publics et privés à but lucratif ou non lucratif
Lobligation doffrir aux patients non seulement les conditions du libre choix mais aussi les conditions dégalité daccès aux modalités de prise en charge adaptée à leurs besoins (telles que les prises en charges alternatives à lhospitalisation), quel que soit le statut de la structure ou du praticien qui les prend en charge, justifient pleinement la recherche et la définition dune complémentarité entre établissements de santé publics et privés. La nécessité de développer la collaboration entre les professionnels est également liée à la difficulté à faire face à la croissance des sollicitations (diversification des missions de la psychiatrie publique, saturation de la psychiatrie privée), ainsi que la nécessité doptimiser les ressources. Elle constitue également un enrichissement en matière déchanges des pratiques.
® La coopération permet denvisager les modalités de mise à disposition réciproque, au bénéfice des patients, entre les établissements en charge des secteurs psychiatriques et les établissements privés de différents potentiels, en matière de :
- activités particulières (ex : thérapies familiales, prise en charge des troubles alimentaires, ergothérapie, alcoologie....) ;
- alternatives à lhospitalisation ;
Plusieurs domaines doivent bénéficier de cette coopération :
- la prise en charge des urgences et des situations de crise : contribution à lintervention de la psychiatrie dans les services durgences, réservation quotidienne de lits dans les cliniques privées dans le cadre de convention avec le SAU... ;
- les réponses à des besoins prioritaires de santé publique tels que le suicide, lalcoolisme... ;
- les réponses aux besoins de populations particulières telles que les adolescents et jeunes adultes, les personnes âgées... .
Les outils suivants peuvent être mis au service de cette coopération :
- la formation commune des personnels ;
- la démarche qualité ;
- le système dinformation et dévaluation.
® Lextension au secteur privé à but lucratif et non lucratif non sectorisé de la possibilité de créer et de gérer lensemble des alternatives à lhospitalisation
Il convient dappréhender la demande réitérée des acteurs de lhospitalisation privée tendant à la création et la gestion, à leur initiative et sous leur responsabilité, de lensemble des structures alternatives, avant tout sous langle du principe dégalité daccès aux soins.
En effet, si leurs besoins ou leur pathologie le justifient, il est indiscutable que les patients hospitalisés dans le secteur privé, doivent pouvoir bénéficier, à lissue dune hospitalisation complète, à linstar des patients hospitalisés dans le secteur public, de lensemble des modalités de prise en charge ambulatoires (hospitalisation partielle, mais aussi ateliers thérapeutiques, centres daccueil thérapeutique à temps partiel...). La satisfaction de ce principe est assurée dès lors que lensemble des structures alternatives gérées par les établissements sectorisés appliquent dans leur fonctionnement, une règle daccueil et de prise en charge, dans des conditions élaborées conventionnellement, de patients antérieurement hospitalisés en privé. Lorsque les besoins de leurs patients peuvent ainsi être satisfaits, il ny a plus la même nécessité pour les établissements privés de créer la palette de structures alternatives.
Sil est envisageable néanmoins que la restriction actuelle quant à la nature des alternatives susceptibles dêtre créées et gérées à linitiative du privé soit levée, cela ne peut se concevoir que sous condition de leur participation aux contraintes du service public (notamment en ce qui concerne la permanence des soins et la réponse à la crise et à lurgence), dans une logique de complémentarité. Il convient, en effet, déviter les doublons et linstauration de filières parallèles.
En tout état de cause, la création, par des promoteurs privés, de structures diversifiées en alternative à lhospitalisation complète, doit -comme pour les établissements sectorisés- être considérée comme un élément de mutation et dadaptation du dispositif hospitalier et doit, en conséquence, en fonction des indices déquipement en vigueur sur les territoires considérés, être gagée par la réduction correspondante de lits dhospitalisation complète dans le secteur privé. Pour les équipements non inscrits dans la carte sanitaire, une réflexion particulière devra être poursuivie afin de garantir leur adéquation aux besoins.
- La coopération entre la psychiatrie et les autres disciplines médicales : la psychiatrie de liaison, la prise en charge somatique des malades mentaux et la conduite conjointe de projets
La psychiatrie de liaison recouvre une pratique de consultation, centrée sur les patients pris en charge dans le cadre de disciplines médicales ou chirurgicales et en soins de suite et de réadaptation (SSR) et présentant des troubles psychopathologiques ou une souffrance psychique. Elle comporte, en outre, une aide apportée aux équipes de soins somatiques. Il sagit dun travail en équipe, justifiant une véritable multiprofessionalité, une technicité, et requérant du temps et de la disponibilité. La psychiatrie de liaison concerne les centres hospitaliers mais aussi les hôpitaux locaux. La psychiatrie de liaison gagne à être appréhendée comme partie dun dispositif cohérent dintervention de la psychiatrie dans dautres services hospitaliers (dun même établissement ou dans un autre établissement), incluant les urgences, les permanences daccès aux soins de santé (PASS) et lensemble des interventions auprès des disciplines somatiques.
Un tel dispositif qui implique une équipe pluri-professionnelle complète, doit faire lobjet dune formalisation précise entre les établissements de santé ou les services hospitaliers concernés (objectifs, moyens, modalités de travail en commun et de coordination et responsabilité médicale, effectifs médicaux et non médicaux mis à disposition, relations fonctionnelles avec les équipes somatiques, modalités pratiques dintervention, responsabilité des prescriptions médicales, traitement de linformation médicale, responsabilité civile..) et doit intégrer de façon systématique la réciprocité des échanges.
Le dispositif dintervention de la psychiatrie auprès des services de soins somatiques doit comprendre en corollaire une définition des modalités dintervention de ces services pour assurer la prise en charge somatique des malades mentaux (accès rapide et simple aux consultations spécialisées médicales ou chirurgicales, recours aux plateaux techniques, mise à disposition danesthésistes pour lélectro-convulsivothérapie...).
Pour la prise en charge de certaines pathologies ou populations, la définition de projets médicaux conjoints et la mutualisation de moyens pour les mettre en œuvre peuvent prendre des formes diverses selon les situations locales allant de la convention à la fédération médicales (fédérations de périnatalité, de géronto-psychiatrie...).
- La coopération ville/hôpital
Cette coopération peut être envisagée selon les modalités suivantes :
- accès à des consultations dans des délais rapprochés, pour fournir une expertise au généraliste,
- appel éventuel à léquipe de secteur dans les situations durgence psychiatrique,
- contact régulier des généralistes avec les équipes de psychiatrie : visite des patients dans les lieux dhospitalisation, études de cas et formation réciproque, protocole de sortie et lettre standard comportant un minimum de renseignements (suivi des projets de sortie, référents au sein de léquipe).
- les centres de santé (mutualistes, associatifs...), lorsquils existent, doivent être pris en compte dans ces partenariats.
Il convient de développer les liaisons entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social à légard des patients qui présentent des difficultés au long cours. En effet, les atouts du partenariat sont indiscutables pour permettre aux équipes de ne pas se sentir isolées pour assurer, dans la durée, laccompagnement de ces patients et le soutien de leur trajectoire, en bénéficiant dun enrichissement réciproque et de la mutualisation doutils de réflexion.
De manière concrète, deux propositions peuvent être formulées :
- Certains patients pourraient durant leur prise en charge, être admis de manière séquentielle dans des établissements médico-sociaux afin que justement un regard différent soit porté sur leur trouble et quun projet de vie soit élaboré dans ses différentes composantes. Ceci pourrait être envisagé de manière inverse, pour des sujets ayant des pathologies lourdes, confiées de façon très longue au secteur médico-social, et qui auraient besoin, dun accueil là aussi séquentiel et régulier, dans une structure psychiatrique, afin quune observation soit réalisée et que la prise en charge, soit éventuellement infléchie ou réadaptée ;
- Des échanges de personnel à temps plein ou à temps partiel pourraient être effectués entre les structures médico-sociales, sociales et sanitaires. On peut en effet envisager lintérêt de lintervention dun infirmier ou dun éducateur, appartenant à un service de psychiatrie, pendant 6 mois ou un an dans un institut médico-éducatif ou dans une structure médico-professionnelle. Il pourrait ainsi simprégner des modalités de travail de cette structure et réciproquement afin quil y ait en quelque sorte une importation des savoirs et des connaissances dans linstitution à laquelle appartient initialement le soignant.
A cet égard, il convient de distinguer :
- le soutien à des patients pris en charge par des équipes ou dans des structures substitutives de domicile, au titre de la continuité des soins qui fonde lintervention du secteur psychiatrique et qui doivent bénéficier de lintervention des équipes de secteur dans des conditions aussi proches que possible de lensemble de la population ;
- le soutien aux professionnels qui doit davantage sapprécier comme une prestation fournie par le secteur psychiatrique.
Dès lors, les moyens des secteurs doivent être abondés de façon à répondre à ces besoins.
En tout état de cause, larticulation de la psychiatrie avec ces équipes et ces structures doit faire lobjet dune définition précise, par le biais de conventions particulières.
- Garantir la qualité des projets de création de structures sociales ou médico-sociales pour les personnes handicapées psychiques
Lorsque le projet est élaboré par un établissement de santé :
Pour aider à la conduite de ces opérations et éviter notamment les risques de ségrégation et garantir la qualité des projets, un guide méthodologique de création de structures sociales ou médico-sociales par un établissement de santé dans le domaine de la psychiatrie, élaboré par la mission nationale dappui en santé mentale et ladministration centrale, a été diffusé aux services déconcentrés et aux établissements en janvier 2001.
Pour les autres créations, outre les dispositions prévues par la loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant laction sociale et médico-sociale en ce concerne le développement de la qualité dans les structures sociales et médico-sociales, il conviendra de veiller tout particulièrement à lorganisation de la prise en charge sanitaire des personnes accueillies, en liaison avec loffre de soins existante. Par ailleurs, le niveau de médicalisation de ces structures devra être adapté aux besoins.
Une convention de financement entre le préfet de région, lARH et le Conseil général peut permettre de bien identifier lensemble des conditions financières de ces opérations.
Il sagit de :
- assurer lintervention de la psychiatrie au sein déquipes pluri-professionnelles dans les lieux fréquentés par les populations en difficulté
Lintervention déquipes psychiatriques pluri-professionnelles (médecin, assistante sociale ou éducateur, infirmier...) doit seffectuer dans les lieux fréquentés par les populations en difficulté (S.A.M.U. social, centres sociaux, C.H.R.S, missions locales, espace santé, partenaires associatifs, foyers de jeunes travailleurs...).
La présence psychiatrique, infirmière en général, est de nature à repérer et à rencontrer les sujets en grande souffrance psychique et à aider les équipes.
Il est souhaitable que ce soutien soit assuré, dans le cadre de conventions, par une équipe référente qui sera généralement intersectorielle.
- délivrer des soins de qualité en organisant un accueil adapté des exclus
Il s'agit de prendre en compte la souffrance psychique des plus démunis tout en limitant la stigmatisation psychiatrique redoutée par cette population.
Les exclus se présentent le plus souvent en état de crise dans les services d'urgence, lieu de prédilection de la demande daide. Cette détresse doit être accueillie à lhôpital général dans un cadre multi-disciplinaire : lintervention de la psychiatrie doit sintégrer aux permanences daccès aux soins de santé dans les établissements de santé (PASS), qui permettent de mettre en œuvre une prise en charge simultanée des aspects sanitaires et sociaux ainsi que la prévention ; une telle unité à proximité des urgences doit faciliter laccès des exclus aux différents services de soins de lhôpital (alcoologie, urgence, psychiatrie, médecine somatique) ainsi quau réseau externe composé de la médecine de ville, des services sociaux et des associations.
L'accueil peut se faire aussi au C.M.P, dont il convient de revoir les contraintes horaires et les modalités daccueil (consultations sans rendez-vous...).
Le réseau de soins constitue actuellement la forme la plus aboutie de coopération des acteurs de soins au bénéfice du patient.
La notion de réseau de soins nest pas nouvelle en psychiatrie puisque depuis 1960, sest développé, pour assurer la continuité des soins, le réseau généraliste sectoriel autour du patient. Il ressort cependant des réflexions du groupe de travail que cette modalité se voit conférer, aujourdhui plus que jamais, une pertinence particulière en santé mentale, en raison de la prééminence de la notion de continuité des soins. Lévolution nécessaire vers la prise en compte de la trajectoire des patients et vers une diversification des stratégies de soins oblige à promouvoir un décloisonnement des dispositifs, ainsi que toutes les formes de coopération entre lensemble des acteurs susceptibles dintervenir au long du parcours des patients. Le réseau apparaît par nature comme le moyen dassurer le maillage garantissant la mise en cohérence entre les diverses formes de partenariats.
Les textes distinguent à ce jour les réseaux inter-établissements et, concernant le secteur libéral, les réseaux soumis à des modalités dérogatoires de financement.
Afin dassurer une réelle continuité des soins, en coordonnant autour du patients des stratégies de soins complémentaires entre les acteurs et les institutions, il importe de développer les réseaux ville-hôpital en santé mentale réunissant lensemble des acteurs sanitaires et sociaux, soit au service dune population particulière (Ex : adolescents, personnes âgées...), soit pour la prise en charge dun besoin de santé publique (conduites addictives, suicide).
Le fonctionnement en réseau tient une place prépondérante dans chacune des modalités de soins développées par le groupe de travail (annexe n°1). Cest la raison pour laquelle une réflexion particulière a été menée par le groupe sur ce sujet, dont les développements figurent en annexe n°3 du présent document.
Ladaptation de loffre de soins doit être conduite au regard des besoins de la population. Lapproche ne doit plus être centrée sur les structures, ces dernières devant être considérées comme des outils évolutifs de réponse aux besoins identifiés. Lévaluation des besoins est en conséquence essentielle et doit permettre déviter des réponses stéréotypées pour chaque secteur. Les éléments objectifs issus de cette évaluation pourront entraîner une répartition différenciée de loffre de soins, adaptée à chaque contexte local.
La définition des modalités de soins doit privilégier une approche par objectif dans une perspective de réponse cohérente, à des besoins identifiés en santé mentale. Il sagit à partir dune meilleure identification des besoins, de définir des objectifs permettant de clarifier les missions des équipes des secteurs ; ceux-ci étant fixés, il est alors possible denvisager une plus grande souplesse dans lutilisation des outils existants, de mieux calibrer les moyens et de favoriser lévolution des pratiques professionnelles, le plus important étant le savoir-faire et la mobilité des personnels.
La définition des objectifs dactions des secteurs doit permettre de répondre, de façon adaptée, aux besoins de la population et aux réalités locales, conformément aux orientations du SROS, aux projets des secteurs psychiatriques et aux projets des établissements de santé. Ces objectifs sappliquent à lensemble des secteurs. Plusieurs niveaux de réponse - sectorielle ou intersectorielle - peuvent être élaborés par les équipes selon le thème et la situation locale.
14 objectifs majeurs sont définis, à partir des principaux besoins de la population identifiés par le groupe de travail. Les équipes de secteur devront, dans un cadre sectoriel ou intersectoriel, proposer pour chaque objectif des réponses adaptées aux problématiques et contexte locaux. Limplication de chaque équipe pourra être variable en fonction des réponses existantes et de lintervention des partenaires. Ainsi, selon les objectifs et les partenariats, les soins directs auprès des personnes et les interventions indirectes (conseil, appui, articulation, liaison avec les autres professionnels concernés) représenteront une part variable de lactivité des équipes. Dautres objectifs pourront également être fixés en fonction des priorités et des ressources locales.
1-La réponse aux besoins des personnes (enfants, adolescents, adultes) en situation de crise et durgence
- Dans la communauté
- Possibilité dobtenir, dans des délais rapides, des consultations non-programmées en ambulatoire
- Coordination des CMP pour lorganisation des astreintes (téléphoniques, déplacements...)
- Intervention déquipes mobiles à domicile (24/24, 12/24... selon les sites) en lien avec le SAMU, le médecin généraliste, les travailleurs sociaux, léquipe de secteur... concernés.
- A lhôpital général
Dans les services durgence
- Présence de psychiatres au niveau des urgences hospitalières
- Des locaux adaptés pour les consultations et laccueil des patients et de leur famille
A proximité du service daccueil des urgences
- Création de lits de crise de 72 heures intersectoriels, avec système de garde, pour les personnes hospitalisées librement ou susceptibles de relever dune hospitalisation sous contrainte
- Globalement
- Améliorer la prévention pour limiter les crises et le recours aux urgences
- Identification dune ligne téléphonique unique pour répondre aux professionnels
- Participation à un système coordonné daccueil et de prise en charge des victimes (situations individuelles ou collectives, enfants ou adultes, victimes daccident, dagression, de catastrophe...) : accueil des victimes à lhôpital, intervention sur place (urgence médico-psychologique en cas de catastrophe), suivi...
2-La réponse aux besoins des familles (accueil, information et soutien)
- Mise en œuvre du droit des familles dêtre reçues par un professionnel de léquipe
- Mise en place dun référent par secteur chargé des relations avec les familles (informations sur les traitements, réunions avec les familles...)
- Mise en place de groupes de parole
- Aide à la création de groupes dauto-soutien.
3- La réponse aux besoins des personnes (enfants, adolescents, adultes) en matière de soins programmés de courte ou de longue durée en psychiatrie
- Soins programmés de courte durée
- Priorité pour les enfants et les adolescents : renforcer le dispositif infanto-juvénile et développer les capacités daccueil en hospitalisation complète
- Information sur loffre de soins (lisibilité des structures, des professionnels...), les pathologies, les thérapeutiques....
- Liens avec les médecins généralistes et les psychiatres libéraux (cf objectif 6)
- ...
- Pour les personnes justifiant dune prise en charge prolongée en psychiatrie :
- réserver lhospitalisation prolongée en psychiatrie aux patients qui le justifient en raison de lévolutivité ou de lacuité de leur troubles ;
- évaluer régulièrement, de façon à éviter tout risque de chronicisation, le fonctionnement des structures alternatives à lhospitalisation complète mises en place pour répondre aux besoins des malades traités au long cours.
4- La réponse aux besoins des personnes nécessitant une intervention coordonnée de la pédopsychiatrie et de la psychiatrie générale
- La périnatalité :
- Développer la psychiatrie de liaison dans les services de maternité, de pédiatrie et en PMI
- Organiser un réseau dans chaque maternité autour des professionnels concernés
- Mettre en place des consultations voire des unités mères/enfants
- La prise en charge des adolescents :
- organiser une approche globale en constituant une filière adolescent transdisciplinaire et commune à tous les champs (sanitaire, social, judiciaire, éducatif...)
- mettre en œuvre des réponses multiples, coordonnées, non exclusives les unes des autres, permettant des prises en charge inter-institutionnelles alternatives ou conjointes
- en matière de prévention : travail de communication et de formation des équipes de psychiatrie auprès des partenaires des champs sanitaire, médico-social et socio-éducatif, ainsi que des familles et des usagers
- en matière dhospitalisation : développer les unités intersectorielles spécifiques pour adolescents.
- La gestion du passage à lâge adulte des jeunes suivis par la pédo-psychiatrie
- Les objectifs spécifiques aux secteurs de psychiatrie générale
5- La réponse aux besoins des patients difficiles
- Définir une organisation pré-établie et pas seulement une réponse au cas par cas
- Constituer un groupe de référents eux-mêmes supervisés et aidés
- Accès rapide et fiable à un numéro de téléphone pour ces patients et leur famille et les professionnels
6- La réponse aux besoins de la population en matière de prévention
- créer en priorité les postes de coordonnateurs chargés de développer la prévention et le travail en réseau
- développer linformation sur le dispositif spécialisé (annuaire, réunions dinformation...).
7- La réponse aux besoins des professionnels et des institutions de soins (travail de liaison dans le secteur sanitaire) :
- Organisation déchanges entre les médecins généralistes et les spécialistes (psychiatres, pédiatres...) sur des cas identifiés et partagés
- Identification précise, par voie conventionnelle, des relations avec lensemble des structures hospitalières publiques et privées (urgence, psychiatrie de liaison, assistance en cas de crise).
8- La réponse aux besoins des personnes handicapées (enfants, adolescents, adultes)
- Conventions avec les établissements médico-sociaux afin daméliorer les soins ambulatoires et les conditions dhospitalisation des personnes quils prennent en charge et de formaliser le soutien aux équipes médico-sociales
- Création de structures sociales ou médico-sociales pour les personnes handicapées psychiques (notamment pour les personnes hospitalisées au long cours en psychiatrie ne nécessitant plus ce mode de prise en charge...)
9- La réponse aux besoins des personnes (mineures et adultes) sous main de justice (cf le plan santé des personnes détenues)
Dans un cadre intersectoriel :
- Diversification et intensification des soins ambulatoires en milieu pénitentiaire
- Meilleur accès à lhospitalisation en établissement de santé et sécurisation des conditions de ces hospitalisations
10- La réponse aux besoins des personnes souffrant de conduites addictives
- Prise en charge directe, en ambulatoire et en milieu hospitalier (psychiatrie de liaison...)
- Coordination avec les équipes hospitalières de liaison en addictologie et les dispositifs spécialisés (centres de cure ambulatoire en alcoologie, centres spécialisés de soins aux toxicomanes, consultations de tabacologie...).
11- La réponse aux besoins des personnes âgées
- Identification de 3 niveaux dintervention : le domicile, les institutions, les réseaux
- Amélioration de la prise en charge de certaines catégories de personnes âgées en clarifiant les lignes de partage et les articulations entre la psychiatrie et les autres champs dintervention (du sanitaire et du médico-social) en ce qui concerne les malades mentaux vieillissants, les déments (notamment les démences Alzheimer) et les personnes âgées ayant besoin dune prise en charge psychiatrique.
12- La réponse aux besoins dinsertion sociale et professionnelle des personnes adultes (activités, emploi, travail, logement, ....)
- Actions thérapeutiques directes auprès de patients identifiés concernés par ces situations :
- soutien et accompagnement des personnes venues directement ou amenées par dautres professionnels,
- réponses graduées : du plus intensif au plus léger, dans les différents domaines :
- activités non professionnelles (maintien dans la communauté par la culture, le sport...)
- emploi/travail : graduation des réponses allant de lemploi protégé à lemploi normal
- logement, hébergement (gamme de réponse allant de lappartement thérapeutique jusquà lappartement individuel)
- insertion (RMI...)
- Actions indirectes de partenariat entre professionnels et travail avec les institutions concernées Ex : AGEFIPH, EPSR (équipe professionnelle pour le suivi et la réinsertion), OIP (organismes dinsertion professionnelle)...
- Coordination avec les programmes définis dans les champs concernés (ex : plan départemental dinsertion des travailleurs handicapés), montage de projets avec des associations....
- Les objectifs spécifiques aux secteurs de psychiatrie infanto-juvénile
13- La réponse aux besoins des enfants et des adolescents en matière de soins, de scolarisation et détudes (articulation avec lEducation nationale, les universités)
14- La réponse aux besoins des enfants et des adolescents relevant des dispositifs de protection de lenfance (PMI, ASE, PJJ...)
- coordination des politiques et acteurs
- prise en charge intégrant les aspects éducatifs, sociaux, judiciaires et les soins, en portant une attention particulière aux mineurs les plus en difficulté.
La formation apparaît comme un facteur privilégié dévolution des pratiques et des organisations. Le caractère prioritaire qui lui est donné sur lensemble des problématiques abordées (prévention, travail en réseau, travail en équipe, aide aux aidants , management, conduite de projet...) conduit à préconiser le développement des formations communes et croisées en lien avec les recommandations du groupe sur lévolution des métiers en santé mentale piloté par la direction générale de la santé.
Mieux connaître les pratiques en psychiatrie, qui sont très diverses, les recenser et permettre lévaluation des organisations de soins et de prise en charge des malades mentaux, notamment dans les secteurs, est une nécessité.
Il est illusoire de penser que ces dernières peuvent être normalisées : les réalités humaines locales sont éminemment différentes suivant les régions et les hommes et offrent des solutions différentes et variées aux problèmes et aux besoins des malades. Cependant, le constat selon lequel la nature réelle des prises en charge réalisées reste encore mal connue est en contradiction avec les impératifs de santé publique concernant laccès aux soins, la continuité des soins et la qualité des réponses apportées à la population.
Une réflexion devra être menée à cet égard, en liaison avec les travaux engagés par la direction générale de la santé sur lévolution des métiers. Elle devra tenir compte du rôle de lANAES en la matière.
La recherche en psychiatrie constituant un préalable indispensable pour fonder une politique de santé mentale à même de répondre aux besoins, le groupe rejoint la préoccupation évoquée dans le Plan Santé Mentale de novembre 2001 quant à linsuffisance de son développement et son nécessaire renforcement dans le domaine de la clinique, de l'épidémiologie et de la thérapeutique.
Le développement de la recherche psychiatrique ne peut aujourd'hui se concevoir qu'à partir d'un renforcement des coopérations, celles-ci devant se faire à la fois sur un mode interdisciplinaire (avec les chercheurs en santé publique, en épidémiologie, en pharmacologie, en biologie, en génétique, etc) et au sein de la discipline, par un renforcement des collaborations entre services universitaires et non universitaires.
Ce développement peut s'appuyer sur divers existants quil convient de renforcer :
1. Les PHRC et les collaborations avec les DRRC pour la recherche clinique :
Les PHRC doivent permettre le renforcement de la recherche en psychiatrie (celle-ci a été retenue comme thème prioritaire pour le PHRC national 2002). Les liens de collaboration que les PHRC ont d'ores et déjà permis de tisser entre les DRRC et les équipes hospitalo-universitaires doivent pouvoir être davantage étendus aux équipes non universitaires, ce qui suppose une meilleure formation de ces dernières à la méthodologie de la recherche, qui pourrait être un des objectifs de structures fédératives de recherche à mettre en place au niveau régional.
2. Les structures de recherche, et notamment l'INSERM, pour la recherche clinique, épidémiologique et fondamentale :
Lintercommission INSERM "Santé mentale et pathologies psychiatriques" récemment créée doit ainsi participer au choix des grandes orientations de la recherche en psychiatrie et favoriser la promotion des jeunes chercheurs de la discipline. Les équipes de recherche universitaires (UPRES, Jeunes Equipes, etc), INSERM ou CNRS doivent également participer à ce développement.
3. Le potentiel humain :
La recherche en psychiatrie a besoin d'un renforcement de son potentiel humain.
Ce renforcement nécessite tout d'abord la formation d'un plus grand nombre de jeunes chercheurs dans la discipline, notamment à travers la filière des DEA (Diplômes d'Etude Approfondie) rattachés à des écoles doctorales. Il nécessite en outre le recrutement par les instituts de recherche (INSERM) d'un plus grand nombre de chercheurs en psychiatrie, ce qui est une des missions de l'intercommission INSERM "Santé mentale et pathologies psychiatriques".
Il convient de réaffirmer le pilotage et un suivi au niveau national de la politique de santé mentale visant à répondre aux besoins sanitaires et sociaux des personnes souffrant de troubles mentaux.
Concernant lévolution de loffre de soins et dans lattente de la loi cadre annoncée dans le plan santé mentale de novembre 2001, une circulaire de mise en œuvre des préconisations du groupe de travail sera notamment élaborée par le ministère de lemploi et de la solidarité.
Les programmes déquipement et dintervention du secteur social et médico-social devront intégrer les besoins en santé mentale des personnes en situation de handicap psychique du fait de troubles mentaux et des personnes quils accueillent ou prennent en charge.
- Développer les réponses aux besoins dinsertion sociale et professionnelle
Les personnes qui se trouvent en situation de handicap du fait de troubles psychiques graves et durables ne trouvent pas actuellement les réponses adaptées à leurs besoins en termes dinsertion sociale et professionnelle, en complément des soins qui leur sont prodigués et en bonne articulation avec ceux-ci. Il convient donc de promouvoir et de développer, dans le cadre commun de la politique en direction des personnes handicapées, toutes formes daide, daccompagnement et daccueil pertinentes et nécessaires. Les schémas et programmes déquipement médico-sociaux devront prendre en compte les besoins des personnes handicapées psychiques du fait de troubles mentaux, et cette obligation doit en constituer une condition dadoption.
Les innovations en matière de développement des services daccompagnement et des structures daccueil et de soins destinés aux enfants, adolescents et adultes souffrant de troubles mentaux, articulés avec le dispositif de soins, rendues possibles par les nouvelles dispositions de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant laction sociale et médico-sociale, devront être soutenues.
- Organiser les réponses pour les personnes nécessitant une prise en charge au long cours
Lévolution du dispositif de soins psychiatriques et notamment des capacités dhospitalisation complète passe par la réponse aux besoins sociaux et médico-sociaux des personnes hospitalisées de manière inadéquate au long cours en psychiatrie.
Il conviendra que dans chaque région, en collaboration avec les partenaires concernés, lagence régionale de lhospitalisation diligente une enquête sur les personnes malades mentales prises en charge au long cours ou susceptibles de lêtre afin de recenser celles qui pourraient bénéficier dune prise en charge plus appropriée en structure sociale ou médico-sociale et dévaluer le nombre de places nécessaires. Sur la base des besoins identifiés, une concertation devra être menée dans chaque région avec les autorités compétentes (Etat, conseils généraux, Caisse régionale dAssurance maladie) afin détablir un programme daccueil dans les structures existantes ou de création de structures adéquates.
La création (ex nihilo ou par transformation de lits dhospitalisation complète) de structures sociales ou médico-sociales pour personnes handicapées (MAS, FDT) ou pour personnes âgées, afin doffrir une prise en charge adéquate aux patients au long cours, doit seffectuer en cohérence avec les programmes définis dans les secteurs social et médico-social (ex : plan régional MAS/FDT), tant en termes de capacités que de modalités de fonctionnement des structures (localisation, projet de vie...).
Compte tenu de la diversité des situations régionales, notamment concernant les potentiels daccueil en hospitalisation complète et les capacités de redéploiements afférentes, les transferts de moyens du secteur sanitaire vers le médico-social doivent être effectués avec discernement. En effet, si les structures médico-sociales doivent être dotées de façon à fournir une prise en charge de qualité, il sagit également de permettre que ces opérations soient loccasion dune amélioration qualitative, voire -si nécessaire- quantitative, du potentiel dhospitalisation complète, et de doter les secteurs psychiatriques des effectifs nécessaires pour apporter un soutien aux personnes accueillies dans les structures sociales et médico-sociales.
En tout état de cause, il convient que la conduite de ces opérations conjointes, concernant à la fois les secteurs sanitaire, social et médico-social, seffectue de façon homogène en se référant à une démarche type proposée au niveau national et permettant dans chaque région, à lensemble des partenaires concernés (ARH, Etat, Conseils généraux, Caisse régionale dAssurance maladie) de sengager de façon coordonnée pour répondre aux besoins recensés.
Lélaboration dun guide méthodologique de la planification sanitaire, sociale et médico-sociale permettrait également dharmoniser les démarches régionales et départementales.
- Autoriser les prises en charge conjointes sanitaire et médico-sociale
Il est urgent de lever les obstacles juridiques à la prise en charge conjuguée en structure médico-sociale et en psychiatrie.
Compte tenu des évolutions importantes quelles supposent tant pour ce qui concerne les personnels que linvestissement, il est nécessaire de prévoir un accompagnement financier des mesures proposées.
Cet accompagnement devra amplifier les efforts, initiés en 2001, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale au titre de la santé mentale. En effet, 19,6 M (129 MF) ont été alloués au région en 2001 et 19 M (125 MF) en 2002 dont 7,6 (50 MF) pour mettre en place des coordonnateurs chargés de développer la prévention et le travail en réseau. Les crédits alloués en 2001 ont eu un effet levier important puisquau total plus de 45,7 M (300 MF) ont été attribués par les ARH pour la mise en œuvre des schémas régionaux de psychiatrie.
La lisibilité et le suivi des moyens de la psychiatrie sont indispensables à la poursuite du développement de lambulatoire et dun exercice optimal de lensemble des missions dévolues au secteur (prévention, soins, réadaptation et réinsertion). Lapprobation des projets détablissement, la mise en œuvre des contrats pluriannuels dobjectifs et de moyens, les retraitements comptables du PMSI ainsi que le bilan régional annuel des dépenses ciblées sur la psychiatrie permettront une plus grande clarté sur lutilisation des crédits. Par ailleurs, lidentification au niveau national et régional dune sous-enveloppe psychiatrique permettrait de suivre lévolution des moyens dédiés à cette discipline.
Le développement des capacités daccueil, dans les établissements de ce secteur, des personnes ne relevant plus dune prise en charge au long cours en psychiatrie, ne saurait sinscrire uniquement dans une logique de redéploiement du sanitaire vers le social ou le médico-social mais suppose que des moyens supplémentaires soient dédiés à ce secteur.
Il conviendra de demander aux ARH pour le secteur sanitaire et aux préfets de département pour le secteur social et médico-social de procéder à un état des lieux de lexistant et de chiffrer le coût de la mise en œuvre des propositions formulées par le groupe de travail. Une instruction ministérielle devra intervenir afin dhomogénéiser les démarches régionales.
Ladministration centrale devra réaliser la synthèse des états des lieux et déterminer, dans un cadre pluriannuel, les accompagnements financiers à demander au titre des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale.
La répartition de ces crédits devra tenir compte des inégalités régionales en fonction dindicateurs spécifiques à la santé mentale tant dans le domaine sanitaire que social et médico-social.
Bien que les questions relatives à la démographie et aux métiers naient pas été développées dans ce rapport, le groupe y attache une importance particulière dans la mesure où les propositions dévolution de loffre de soin sont liées, pour leur mise en œuvre, aux réponses préconisées ou apportées en matière de démographie (suites des rapports de la direction générale de la santé et de la direction de lhospitalisation et de lorganisation des soins remis en 2001) et dévolution des métiers et des pratiques (rapport du groupe de travail piloté par la direction générale de la santé relatif à lévolution des métiers en santé mentale).
En tout état de cause, il est impératif de maintenir des effectifs suffisants dans les établissements publics ou privés participant au service public hospitalier.
Le groupe de travail est favorable à lélaboration dun schéma régional dorganisation sanitaire (SROS) unique intégrant un volet obligatoire sur les soins psychiatriques afin de permettre une meilleure cohérence des organisations sanitaires, lintégration de la psychiatrie dans loffre de soins générale et la promotion des articulations avec lensemble des partenaires. Cette évolution est en effet indispensable pour améliorer la coordination dune part entre les soins somatiques et psychiatriques (notamment pour ce qui concerne la réponse aux urgences, lintervention des équipes de psychiatrie dans les autres services et la couverture des besoins somatiques des malades mentaux) et dautre part entre la psychiatrie et les secteurs social et médico-social.
Ce SROS unique permettra également que les autres spécialités médicales intègrent la psychiatrie dans leur fonctionnement et leur pratique ainsi que dans leurs projets de développement.
Les propositions du groupe de travail pourront être déclinées dans chaque région en fonction des contextes locaux. La circulaire relative à lélaboration des SROS 3 devra appeler lattention des ARH sur les actions prioritaires énoncées par le groupe.
La multiplicité des décideurs locaux, notamment en raison de la décentralisation, ainsi que les différents niveaux de planification (départemental, régional...) posent des problèmes de cohérence de laction publique.
Afin doffrir une réponse globale aux besoins de la population et pour assurer la cohérence des dispositifs, il est nécessaire de prévoir larticulation des politiques et des planifications sanitaire, sociale et médico-sociale.
Cette articulation dans les différents champs suppose donc la formalisation des partenariats entre les décideurs locaux (ARH, préfets, assurance maladie, élus). Le groupe de travail demande que la loi cadre prévue dans le plan santé mentale rende obligatoire lélaboration de contrats pluriannuels de santé mentale garantissant la cohérence des actions engagées sur les différents champs de compétence et permettant dorganiser et de financer des actions communes.
Il conviendra de veiller à assurer la portée mais aussi à limiter la complexité et la lourdeur de cette démarche :
- lengagement dans une procédure contractuelle ou tout au moins dans une concertation formalisée entre les décideurs, devrait figurer dans les différents schémas de planification,
- pour éviter que la possibilité de contractualisation ne se heurte à une diversité de niveaux davancement des démarches des différents partenaires, une procédure contractuelle à plusieurs étages doit être envisagée :
® engagement conjoint de tous les décideurs sur des axes définis au niveau régional et départemental (ex : Contrat dengagement ou de partenariat, avec volet financier, pour répondre de façon coordonnée aux divers besoins des malades mentaux),
® puis, en se référant à ce cadre, engagements bilatéraux, voire multilatéraux dans des programmations dactions concrètes et partenariales de réponses aux besoins recensés au niveau des secteurs sanitaires ou des territoires pertinents correspondant aux objectifs recherchés.
La concertation de lensemble des partenaires sur ces thèmes, et notamment les élus, est essentielle afin de pouvoir réaliser lexercice communautaire de la psychiatrie. Un débat national est nécessaire sur la place des élus dans la politique dintégration des personnes souffrant de troubles psychiques dans la cité. Ces débats devront avoir lieu à loccasion de la modification de la loi dorientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 ainsi que de la préparation du projet de loi cadre sur la santé mentale.
En vue de la définition des contrats pluriannuels de santé mentale et de leur mise en œuvre, il est proposé didentifier un lieu déchanges, permettant daméliorer la connaissance mutuelle des élus et des professionnels et dappréhender les compétences et les possibilités dintervention de chacun. Il est préconisé la mise en place dun conseil territorial de santé mentale, conçu comme un lieu détablissement du partenariat entre les professionnels des champs sanitaire, social et médico-social, en présence des décideurs institutionnels de chacun de ces champs. Il réunira ces différents acteurs afin de réaliser létat des lieux des ressources existantes, des difficultés rencontrées sur le territoire quil couvre et de proposer les projets prioritaires à développer ou initier pour y remédier. Le territoire géographique concerné pourrait être celui du secteur sanitaire ou tout autre territoire pertinent correspondant aux objectifs recherchés, sachant que les articulations avec les conseils de secteur existants ou à venir seront à prendre en compte.
Le secteur psychiatrique demeure le référent pour organiser la prise en charge soignante des patients. Pour autant lapproche globale des besoins de ces derniers nécessite que dautres acteurs et notamment les élus, interviennent et simpliquent pour mettre en œuvre un plan cohérent dintégration sociale (soin, logement, insertion...) pour lequel la psychiatrie seule nest pas compétente.
La promotion du travail en réseau, garant de laccessibilité, de la qualité et de la continuité des soins et permettant de rendre complémentaire les actions menées par différents professionnels et institutions, apparaît comme un élément incontournable de lévolution du dispositif de soin.
Lamélioration des modalités de financement des réseaux par les ARH et les URCAM, introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, permet daccompagner la mise en œuvre des réseaux dont ceux dans le champ de la santé mentale, dans une perspective ville/hôpital et santé/social.
La désignation de coordonnateurs chargés de développer les actions de prévention, de définir les besoins de formation réciproques et darticuler les interventions des professionnels, telle que prévue par la circulaire budgétaire relative aux établissements sous dotation globale pour 2002, pourra également utilement participer à lamélioration des partenariats entre les acteurs.
Le présent rapport et ses annexes constituent le cadre général dun travail qui doit se poursuivre à tous les niveaux : national, régional, local, entre décideurs, entre institutions et professionnels et entre professionnels des champs concernés par la santé mentale (sanitaire, social et médico-social, éducatif, etc). Les éléments de constats, les propositions à caractère général ou thématiques ainsi que la mise en œuvre des priorités devront faire lobjet de larges concertations.
Dernière mise à jour : jeudi 27 juin 2002 9:39:43 Dr Jean-Michel Thurin