RAPPORT FINAL - GROUPE DE REFLEXION PSYCHIATRIE

10 septembre 1992

I MANDAT ET TYPE DE FONCTIONNEMENT

En février dernier Y.Matillon, directeur de 11ANDEM, confiait à V.Kovess la mission de mettre sur pied et d'animer un groupe de professionnels chargés de réfléchir à 11 évaluation en santé mentale.

Ce groupe qui devait être informel a été constitué sur des bases de cooptation en essayant autant que faire se peut de couvrir la diversité des approches psychiatriques tant théoriques (analystes /non analystes),que pratiques (public/ privé, Paris/province).

La majorité des participants étaient des psychiatres ayant une grande expérience clinique et ayant actuellement des responsabilités dans les structures de soins, les autres avaient eu des responsabilités au ministère de la santé (élaboration de la politique de santé) ou étaient engagés dans la recherche, enfin l'un des participants était directeur d’hôpital. Bien qu'un certain nombre des participants soient affiliés voire aient des positions importantes dans des organisations syndicales, chaque participant parlait en son nom propre sans souci dl engager autre chose que son opinion.

Dès la mise en place du groupe de nombreuses candidatures se sont manifestées en particulier de la part du corps infirmier; ces candidatures proposées au groupe n'ont pas été retenues car il a semblé préférable dans un premier temps de travailler en groupe restreint puis dl engager secondairement des consultations auprès d'autres personnes.

Le groupe s'est réuni cinq fois dans l'année , la plupart du temps à l’ANDEM à qui ont été communiqués systématiquement tous les documents et compte rendus des réunions.

Lors de la première réunion une présentation des activités de l'ANDEM a été faite proposant au groupe de travail trois types d'action potentielles:

- des revues de littérature

- la mise sur pied de conférences de consensus ou de comités d'experts

- le financement de projets dl évaluation

Cette dernière direction étant plus expérimentale pour l’ANDEM.

II ETAT DES LIEUX

Quelle que soit la direction qui peut être suivie concernant 11 évaluation des soins en psychiatrie, il importe de bien cerner l'état d'esprit qui règne en France actuellement dans le milieu psychiatrique quant à cette problématique.

Nous aimerions distinguer deux aspects dont nous verrons qu'ils évoluent pratiquement indépendamment l'un de l'autre: les aspects que l'on pourrait appeler organisationnels et les aspects techniques.

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II.1. Aspects organisationnels

Nous commencerons par ce volet qui conditionne en grande partie le développement de l’ évaluation. Schématiquement on peut dire que les psychiatres ainsi que les soignants en psychiatrie se sont ouverts à la recherche et à l’ évaluation . De nombreux colloques ont été consacrés en France ces dernières années à ces sujets et ont été très fréquentés; des articles , des numéros spéciaux voire des livres ont été publiés en France et témoignent de cet intérêt même s'il n'empêche pas les réactions négatives.

Pour illustrer notre propos nous donnerons l'exemple d'une recherche sur le vécu quotidien des malades mentaux traités en hôpital de jour. Cette recherche conduite sur entretiens il y maintenant une dizaine d'années et publiée dans une revue internationale avait été localement faite dans des conditions extrêmement difficiles et la psychologue qui 11 avait conduite avait rencontré des oppositions virulentes de nombreux collègues en particulier des psychiatres d'obédience psychanalytique. Dix ans après se déroule dans le même service , sans la moindre réticence, une recherche sur la qualité de vie des malades mentaux à partir d'instruments canadiens . La recherche a été présentée au congrès de neurologie et de psychiatrie de langue française et publié à la demande des organisateurs dans la revue qui éditait le colloque. Le chercheur canadien qui avait adapté les instruments a été reçu dans l'institution et il a été possible de discuter largement des aspects comparatifs France /Québec de 11 évaluation en psychiatrie. Il s'agissait cependant des mêmes équipes.

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Cet exemple illustre nous semble-t-il le changement dans les mentalités et les psychiatres opposés au principe même de la recherche clinique et de lt évaluation se font de plus en plus rares le débat s'étant déplacé sur le "comment" et "par qui".

De fait il existe dans le milieu psychiatrique une grande méfiance vis à vis des organismes de tutelle , une crainte de se voir enlever des moyens jugés comme insuffisants, et de perdre la liberté de soigner en fonction de théories diverses au profit de soins standardisés une fois pour toute, la psychiatrie étant une discipline très diversifiée dans ses concepts théoriques et dans sa pratique.

A celà s'ajoute le fait que la psychiatrie gère des maladies très chroniques; la plupart des patients seront suivis pendant de très longues périodes de temps avec des résultats "objectifs" qui peuvent paraître décevants si l'on s'attend à un retour à la normale ou à l'absence de rechutes alors que se fait pourtant un authentique travail de soin. Les psychiatres craignent donc une évaluation venant de l'extérieur modelée sur des critères inadéquats par rapport à l'objet du soin et au projet thérapeutique qui peut être coûteux et apparemment non rentable.

Ainsi la plupart des psychiatres admettent le principe de l' évaluation à condition d'en garder la maîtrise et le discours selon lequel" Il vaut mieux développer nous mêmes des évaluations avant de se les faire imposer" commence à faire recette d'autant que s'y ajoute un phénomène de mode.

Un autre phénomène fait timidement son apparition: la pression des usagers. L'UNAFAM vient de conduire avec l'aide de chercheurs 5

en sciences sociales une enquête nationale auprès de ses adhérents sur leur satisfaction vis à vis des services. Le questionnaire, remarquable au demeurant, explore en détail les refus d'hospitalisation et d'une façon générale les démêlés des familles avec la psychiatrie. Certes l'UNAFAM reste très prudente dans la publication de ces résultats qui ne concernent qu'un type particulier de familles mais c'est une tendance qui ne peut que s’accroître et à laquelle le corps psychiatrique ne peut rester indifférent. Les remises en cause du système de soin psychiatrique sont relativement fréquentes et d'une façon générale il existe un certain malaise dans le public vis à vis des soins et de plus en plus des Associations revendiquent la possibilité de gérer leur patient en dehors du circuit médicalisé.

Les infirmiers sont aussi très demandeurs dl évaluation et ont commencé une réflexion sur leur pratique.

Tous ces phénomènes font qu'à notre avis le terrain est mûr pour une action d'envergure en évaluation des soins en psychiatrie cependant que la stratégie de sa mise en place reste une question délicate et capitale sur laquelle nous reviendrons.

11.1.2 Les aspects techniques

Disons le brutalement il n'existe pratiquement personne en France qui possède une formation valable en évaluation en psychiatrie

on citera au passage le groupe SCRIPT de Gérin et Dazord à Lyon, unité composée de deux chercheurs des domaines neuro et biologiques et qui est restée tout à fait marginale par rapport aux priorités développées par l'INSERM. Qui plus est ces chercheurs se sont intéressés aux aspects les plus délicats de 11 évaluation: les psychothérapies analytiques, 11 évaluation des traitements hospitaliers hors médicaments et intervention (effet interstitiel).Résolument originale leur approche complexe ne cherche pas à mettre sur la scène française des instruments facilement utilisables et des méthodologies généralisables à grande échelle d'autant que par rigueur scientifique ils souhaitent participer aux protocoles.

Les laboratoires pharmaceutiques conduisent et font conduire des évaluations de leurs molécules. De plus en plus ces évaluations impliquent des standards internationaux par conséquent le maniement de classifications internationales et d'instruments standardisés en général imposés.

Ces évaluations sont le plus souvent conduites dans des cliniques universitaires dont la pratique et le recrutement diffèrent
du secteur et elles ne tiennent précisément pas compte du travail
dit institutionnel Ceci fait qu'elles sont bien loin des préoccupations et des questions que se posent les psychiatres qui exercent dans ce contexte et qui sont la majorité.

On note cependant que face aux exigences du ministère de la santé les laboratoires commencent à se préoccuper d'autres choses que des effets médicamenteux et que des mesures de qualité de la vie tendent à s'ajouter aux protocoles classiques mais cela reste marginal.

Il existe néanmoins des évaluations de traitements autres que médicamenteux particulièrement dans les centres de traitement de l'alcoolisme et des toxicomanies.

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D'autres expériences dl évaluation ont été rapportées par Tignol dans les actes du congres de psychiatrie et de neurologie de langue française dont le thème a été 11 évaluation des soins en psychiatrie.

Enfin l'information psychiatrique vient de sortir un numéro spécial sur la qualité de vie des patients psychiatriques et les études qui s'y rapportent.

En résume et malgré un intérêt incontestable dont témoigne le nombre croissant d'inscription de toute provenance à des formations en évaluation des soins en psychiatrie, il existe un problème majeur de ressources techniques qui nous fera proposer des actions de formation qui ne peuvent se planifier qu'à long terme.

III LE TRAVAIL DU GROUPE

Devant ce constat de carence en quelque sorte le groupe a consacré un séance à une sorte de tour d'horizons du champ de la psychiatrie française dans le domaine de 11 évaluation pour se pencher en détail sur des méthodes dl évaluation plus accessibles dans l'immédiat du moins techniquement : 11 évaluation de la qualité.

III.1 évaluation des soins en psychiatrie

Trop souvent on considère que 11 évaluation est forcément une évaluation de résultats. En psychiatrie où l'accord est loin d'être fait sur les variables de résultats et les facteurs qui entrent en jeu, 11 évaluation devient un exercice particulièrement difficile. D'autant que les protocoles sont difficiles à établir; par exemple on ne peut tirer au sort les patients qui recevront une psychothérapie car la demande du patient est un phénomène important dans cette démarche et cette remarque s'applique pour d'autres modalités thérapeutiques. Les critères de "réussite sont aussi difficiles à établir, il faut tenir compte de l'évolution propre de la maladie , des évènements intercurrents, du réseau social et de nombre de facteurs qui influencent le devenir des patients.

Par contre 11 évaluation du processus est plus facile à mettre en oeuvre puisqu'il s'agit de l'étude des méthodes de travail LI évaluation de la qualité des soins est en grande partie une évaluation de processus. Ce type dl évaluation part de l'état actuel des connaissances et se situe donc en aval de la recherche clinique; on évalue alors comment les soins sont donnés et s'ils correspondent aux standards de qualité. Bien entendu ces standards sont révisés au fur et à mesure des connaissances car la qualité implique une constante remise à jour des pratiques.

III.1.1 Revues de la littérature

Quelque équipes spécialisées ont pourtant réalisé des études évaluatives de bonne qualité. Des revues de la littérature pourraient être soutenues par l’ANDEM sur ces travaux souvent méconnus par les français qui, sauf exception, lisent rarement la littérature anglo-saxone. Même si ces résultats se sont pas transposables directement dans notre système de soin ils méritent d'être connus et diffusés quitte à faire des protocoles pour en dupliquer les résultats. Signalons que les organisme de recherche québécois (FRSQ et CQRS) financent régulièrement en langue française des revues de ce type qui mériteraient d'être diffusées en France.

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Le problème cependant n'est pas que linguistique car souvent des mots semblables en apparence reflètent des concepts différents. Le concept de réadaptation est par exemple entendu différemment en France et dans les pays anglo-saxons où les notions mêmes de soin et de projet thérapeutique ne sont pas les mêmes. Il faut donc trouver des personnes qui au delà des mots connaissent les deux cultures pour pouvoir non pas traduire mais transposer et faire comprendre aux uns ce qu’ils peuvent tirer des expériences des autres.

111.1.2 les conférences de consensus

Les conférences de consensus peuvent être une des méthodes pour diffuser les connaissances et les faire rentrer dans la pratique.

Elles ont leurs propres limitations; il faut en effet que les questions posées correspondent à de réelles interrogations tout en étant potentiellement susceptibles d'un consensus sur les réponses. En psychiatrie il est probablement nécessaire qu'un consensus théorique soit présent et que le débat se fasse sur sa mise en œuvre.

L’ ANDEM propose trois raisons à la tenue d'une conférence de consensus:

- la nécessité d'aider les acteurs de santé sur des points de connaissance ou de pratique à propos d'une procédure médicale à visée thérapeutique ou diagnostique

- la nécessité d'intégrer sur un point de connaissance ou de pratique des préoccupations d'ordre éthique, économique sociologique ou légal.

- lorsqu'il existe un écart trop important entre la pratique et l'état des connaissances médicales.

En outre le thème de la conférence doit avoir donné lieu à suffisamment de publications scientifiques pour étayer valablement les décisions du jury et doit répondre à une préoccupation de santé publique.

Ainsi les questions peuvent-elles être des questions de pratique médicale ou des questions de santé publique touchant à des comportements ou à des populations.

Rappelons qu'à ce jour une dizaine de conférence de ce type ont été organisées aux Etats Unis et en France sur des thèmes psychiatriques:

- médicaments et insomnie (NIMH = National Institute of Mental Health 1983)

- prévention pharmacologique des troubles de l'humeur (NIMH 1984)

- Electroconvulsivothérapie (NIMH 1985)

- diagnostic différentiel de la démence (NIA = National Institute of health 1987)

-Traitement des comportements clastiques chez des patients atteints de troubles du développement (OMAR = Office for Medical Application of Research 1989)

-trouble panique (NIMH 1991)

-diagnostic et traitement de la dépression dans la dernière partie de la vie (NIMH 1991)

-évaluation des hypnotiques et des tranquillisants (SNIP syndicat National de l'Industrie Pharmaceutique 1990)

Leurs résultats sont peu diffusés en France et la plupart des praticiens ignorent leurs conclusions.

La diffusion des résultats et leur influence sur les pratiques restent une des difficultés de ces conférences dont il faut largement diffuser les résultats puis mesurer les effets.

Si l'on développe des conférences de consensus ou des démarches de ce type quels seraient les sujets possibles ?

Le groupe a proposé de distinguer trois types de problématiques:

1)les sujets sur lesquels il existe en fait un consensus dans le milieu psychiatrique et sur lequel un débat pourrait déboucher sur des recommandations utiles à savoir: la prise en charge au long cours des psychotiques, le traitement des dépressions.

Plus précisément les sujets pourraient concerner le bon usage des neuroleptiques: traitement lors des six premiers mois d'entrée dans la psychose, maintenance des neuroleptiques à long terme ou nécessité de "fenêtres thérapeutiques" , la coprescription. Le degré d'autonomie que l'on doit rechercher chez les psychotiques chroniques, l'influence d'un problème de santé mentale sur la nature du handicap.

A un degré moindre on pourrait ranger dans cette catégorie la prise en charge des démences et des déficiences mentales . Par exemple la place de la psychiatrie dans le traitement des déficiences, des démences, des soins aux personnes agées voire un thème général comme la dignité du malade mental .

Le traitement des troubles anxieux pourrait aussi entrer dans cette catégorie.

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2) des sujets qui posent problème, sur lesquels il n'existe pas de consensus , mais sur lesquels un débat pourrait amener au consensus ou tout le moins à une nécessaire clarification de conduites à tenir: Tentative de suicide chez l'adolescent, troubles des conduites alimentaires.

3) enfin des sujets à éviter à cette phase car éminemment conflictuels: autisme, alcoolisme, toxicomanies, états limites.

111.1.3 Les actions de formation

C’est une question complexe qui ne peut s'envisager qu'à long terme. La formation à la recherche clinique évaluative fait tout d'abord face au dilemme suivant: soit on forme de jeunes psychiatres intéressés à la recherche et qui n'ont pratiquement pas d'expérience clinique, soit on forme des cliniciens chevronnés qui n'ont aucune formation scientifique qui ont des patients en charge et des implications institutionnelles telles qu'il leur est difficile d'accéder à une réelle formation qui demande un plein temps sur plusieurs années. Ce dilemme a des conséquences sur la recherche clinique car les "chercheurs" purs connaissant mal les patients ne posent pas les problèmes et les cliniciens savent quelles sont les questions mais n'ont pas la méthodologie pour établir le protocole qui répondrait à cette question. Au Québec il a été proposé la mise en place de "vacations" de recherche pour les psychiatres désireux de faire une recherche (après approbation du projet par un conseil scientifique), le psychiatre devait pouvoir être aidé par un méthodologiste.

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En l'absence de cette dernière compétence en France il faudrait les former en sachant qu'il ne s'agit pas d'une formation statistique mais d'une formation à la recherche clinique évaluative. Il existe des équipes aux Etats Unis, au Canada, en Angleterre et dans d'autres pays de la CEE.

De toute façon même formées ces personnes devront avoir un statut et des possibilités d'insertion; cela implique de créer des position de chercheurs cliniciens dans les CHS (en utilisant par exemple l'autre mi temps de médecins DIM).

Cette piste mérite d'être explorée mais ne saurait donner des résultats à court terme.

Tout aussi important serait d'intégrer dès les débuts de la formation des médecins une formation à la recherche et à l'évaluation par des modules comprenant des notions de statistiques, dl épidémiologie et de santé publique.

Dans l'immédiat les solutions type Diplôme d'université en évaluation des soins en psychiatrie offert à paris VI à des praticiens impliqués dans la pratique et qui exigent un travail concret dl évaluation dans une optique de formation continue restent une solution relativement satisfaisante li ANDEM pourrait s'y impliquer (participation à l'enseignement , soutien logistique des mémoires, aide à la publication et aux communications).

111.1.4 Les projets CEE

La mise en place d'organismes de subvention européens pour la recherche a suscité une intense activité de collaboration entre chercheurs.

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Par exemple l'un d'entre nous a été contacté pour un projet de suivi d'une cohorte de schizophrènes . Ce projet groupe plusieurs pays européens (la leader est anglais), implique l'utilisation d'instruments standardisés pour 11 évaluation qu'il est nécessaire de traduire et comporte des aspects économiques (mesures de coût).

A partir de cette base méthodologique il a été réuni une sorte de réseau de collaborateurs français qui s'engagent à suivre le protocole et qui devront être formés.

Ce genre de projet devrait être soutenu par l’ANDEM car il s'agit d'un projet concret utilisant des techniques dl évaluation bien établies et qui comporte un aspect de diffusion et de pédagogie du plus grand intérêt pour la France. Parallèlement se développe un réseau européen de recherche en évaluation pour la psychiatrie.

Une des recommandations pourrait être le soutien à des projets dl évaluation impliquant une coopération avec des pays dont les techniques dl évaluation sont plus avancées.

111.2 11 évaluation de la qualité des soins

Si le développement de 11 évaluation des résultats est une projet à long terme étant donné les difficultés techniques, 11 évaluation de la qualité pose des problèmes d'ordre tout à fait différent.

Le groupe a étudié avec beaucoup d'attention deux types d'instruments dl évaluation de la qualité: les instruments expérimentaux de li OMS et les instruments servant à l’accréditation des hôpitaux psychiatriques canadiens.

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111.2.1 Les instruments OMS
Il s'agit de sept "cahiers" qui couvrent:
- politique de santé mentale
- programme de santé mentale
- dispositif de soins de première ligne
- dispositif de soins extrahospitalier
- dispositif de soins hospitalier
- dispositif de soin pour personnes âgées
- données épidémiologiques.


Chaque aspect participe à la qualité et on ne peut évaluer
l’un sans l'autre. LIOMS propose des critères: une cinquantaine
par cahiers, chaque critère comporte un glossaire qui en précise
le sens . Les critères sont évalués sur une feuille de réponse qui
évalue de 0 à 2 la présence du critère comme indicateur de qualité
et sa pertinence dans le système de soin du pays.
Tous les cahiers ont été revus par les membres du groupe qui
ont réfléchi en commun sur les critères concernant l’hospitalisa tion en psychiatrie.
La réflexion portait sur la pertinence et la faisabilité.
Il est apparu que si quelques formulations sont inadéquates et
méritent d'être reformulées ( à titre d'exemples des reformula-
tions sont présentées en annexe), les critères sont pertinents et
applicables à la France pour son dispositif psychiatrique. Les
participants ont trouvé la démarche tout à fait intéressante et
l'ont rapproché de certaines normes qui ont été récemment révisés
pour le système privé: "annexe 2311 sur les établissements
d'hospitalisation privés de psychiatrie pour malades adultes, et 16

"annexe 23 bis" conditions techniques d'agrément des hôpitaux de jour spécialisés dans le traitement des maladies mentales.

Il semble donc possible après révision par un comité plus large de produire des normes de qualité applicables et acceptables par des praticiens français à partir d'instruments immédiatement disponibles.

Si les solutions techniques sont disponibles, il existe par contre un problème organisationnel pour ne pas dire politique.

Qui doit juger de ces normes? dans quel contexte? quelles seront les conséquences de non respect des normes ou de respect?

Doit- on les proposer sur une base de pur volontariat.? Doit-on proposer des incitations et lesquelles?

Sur quelle entité administrative 11 évaluation de qualité doit-elle se faire: services, établissement, secteur?

En sachant que la qualité des services peut être différente dans le même établissement, qu'elle ne peut être évaluée sans tenir compte de l'environnement (absence de structures alternatives par exemple).

On doit aussi tenir compte du mandat du service un service peut être excellent parce qu'il s'est hyper spécialisé dans un domaine particulier mais il ne répond pas à son mandat de service public et de ce point de vue les instruments OMS qui évaluent en même temps tous ces aspects sont tout à fait adaptés .

Dans la mise en place de ces évaluations, il est indispensable de procéder par étapes progressives pour ne pas créer trop de résistances,

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Les normes OMS devraient être révisées et après discussion dans des comités où participeraient les tutelles (DGS, DH, DRASS et DDASS) proposées à un niveau national .

Dans un premier temps ces normes seraient proposées à titre expérimental à une dizaine de centres volontaires correspondant aux différentes contextes de soin (rural/ urbain, secteur/ hors secteur, CHU/ CHS) puis après révision, elles seraient envoyées systématiquement à tous les centres de soin. Dans une première phase les personnes les rempliraient par elles mêmes sans qu'il soit procéder à un contrôle (3 ans) puis progressivement s'organiseraient des formes de contrôle qui auraient pour but de régler les problèmes.

C'est la stratégie des normes minimales de qualité.

111.2.2 L'accréditation

Nous n'entrerons pas dans une description détaillée de ce qu'est l'accréditation; il s'agit d'une forme particulière d'audit qui s'applique en psychiatrie comme dans les autres disciplines médicales.

Nous avons étudié très spécifiquement l'accréditation en psychiatrie telle qu'elle se pratique au Québec car les documents sont accessibles en français et que nous y avons un accès faciles.

L'accréditation au Québec a quelques particularités: elle ne couvre pas les aspects "techniques" qui sont couverts au préalable par les corporations professionnelles et elle s'oriente vers une accréditation de type conseil plutôt que notation.

Le groupe de travail a eu connaissance du guide d'accréditation des hôpitaux psychiatriques de 1991 qui est le 18

guide que les hôpitaux doivent remplir par eux mêmes quelques semaines avant le passage des "visiteurs".

Ils ont eu également à connaître le compte rendu des rencontres avec des visiteurs lors d'un voyage à Montréal sur ce thème. A noter que lors de ces entretiens il a été demandé aux visiteurs leur opinion critique sur le processus, ses possibilités de transposition dans la culture française que la plupart d'entre eux connaissent fort bien et leur disponibilité pour venir "accréditer" des hôpitaux français volontaires.

L'opinion du groupe de travail a été que le processus parait un peu lourd, que les normes sont parfois difficiles à atteindre pour des hôpitaux français bien que le projet d'établissement ou plus simplement des tentatives de définitions des missions et fonctions de surveillant chef correspondent à ce genre de démarche.

Si le système français produit de nombreuses normes par écrit, il n'est pas habituel de trouver des écrits sur les procédures de mise en application ces normes. Ces sortes de règles du jeu ou de manières de faire sont transmises oralement tandis que l'accréditation exige qu'existent des textes écrits.

Il en est de même pour nombre d’informations importantes concernant le malade qui ne sont pas systématiquement écrites dans le dossier.

on remarque aussi une tendance à ne pas divulguer les informations comme si le fait de donner ces informations étaient une sorte de menace pour 11 exercice du pouvoir.

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Il y a aussi la peur légitime de figer les pratiques en instituant des conduites à tenir; on oublie par là que toutes les démarches de qualité implique une révision régulière , à période précisée à l'avance, de dites conduites.

Les obstacles à la mise en place de cette évaluation ne sont pas vraiment techniques car là encore on peut adapter l'accréditation au système français mais de nature organisationnelle ou politique. comme pour les instruments de l'OMS les problèmes concernent beaucoup plus la stratégie de mise en place que le contenu de l'accréditation ou sa méthode. Cependant le groupe a trouvé en général les critères canadiens plus complexes et bien qu'il reconnaisse qu'il n'y a pas d'obstacles majeurs dans l'application de la démarche , se sent plus à l'aise avec les critères OMS.

Contrairement à ce qui se passerait dans une approche de type normes minimales de qualité l'accréditation devrait être faîte à la demande. Cette accréditation serait gérée par un organisme indépendant (association, ANDEM?) qui aurait formé grâce à des expériences du type de celle que nous proposons avec le Québec des visiteurs crédibles professionnellement. De tels audits ont déjà eu lieu en France dans des situations difficiles où on a demandé à un professionnel reconnu de faire une sorte d'expertise sur la situation et de faire des recommandations.

La réciprocité de la démarche est bien entendu un facteur d'acceptation: une équipe "visite" un service mais cette même équipe sera visitée par ce service ou un autre. Dans cet ordre d'idée l'un de nous a relaté une expérience récente où il a invité 20

l'équipe d'autres services à venir visiter le sien tandis que s'instaurait le démarche inverse. Ces échanges ont été fructueux pour chacun et on peut penser commencer par des démarches de ce type.

Il serait souhaitable enfin que cette accréditation soit exigée pour les hôpitaux qui font de l'enseignement où qui poursuivent des activités de recherche.

Ceci nous amène à la question des incitations; il semble difficile du moins dans l'état actuel d'imaginer que tous les services s'engagent dans une démarche de qualité sans incitation.

Les moyens semblent certainement la meilleure des incitations; on peut proposer par exemple un pourcentage: centième , millième ou autre du budget des hôpitaux à redistribuer aux services qui ont entrepris une démarche de qualité validée par un comité ad hoc.

Il peut aussi s'agir d'une bourse qui récompenserait la meilleure initiative en matière dl évaluation de la qualité des soins.

La responsabilité de la mise en œuvre de la qualité pourrait être confiée aux DIM en accord avec les présidents de CME.

D'ailleurs le texte mettant en place les DIM PSy expérimentaux mentionnait cet aspect de leur mission.

RECOMMANDATIONS POUR L’ANDEM

-Soutenir des démarches concrètes dl évaluation de la qualité à partir des critères OMS révisés.

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Ces critères pourraient être révisés par le groupe des la fin de l'année et proposés par l'intermédiaire de l’ANDEM aux instances pertinentes (DH,DGS et autres)

Pour 1993, une dizaine d'équipes sont déjà d'accord pour une expérimentation. Ces équipes correspondent à des services travaillant dans des contextes tres diversifiés: secteur CHS ou CHU, zones rurale et urbaines, Paris/ province et public/privé.

LIANDEM pourrait alors organiser deux réunions nationales de 5 membres environ par équipe l'une pour le "lancement de la méthode" et l'autre pour le rapport des résultats.

Cette action permettrait à des équipes différentes de se connaître et d'échanger pour préparer la deuxième étape celle des échanges. L'année suivante ( 1994 ) une équipe en visiterait une autre pour discuter des critères et voir comment ils sont appliqués.

Cette étape de visite pourrait être introduite par le venue de "visiteurs "québécois qui ont une bonne expérience de ces échanges. A terme on commence à former des visiteurs potentiels qui pourront eux mêmes recommencer l'expérience.

-mener une conférence de consensus sur un thème de santé mentale à choisir lors d'une réunion subséquente

-faire des actions de formation à long terme (bourse) et court terme (soutien aux DU et à toute forme de formation continue sur l'évaluation)

-des actions de diffusion des connaissances: traduction des conférences existantes et revues de la littérature.

Enfin le groupe suggère de maintenir son existence en tant que groupe de suivi de ses recommandations car il lui a semblé qu'il s'agissait là d'un lieu de concertation informel où des courants tres divers étaient représentés et qui pouvait être d'une certaine utilité dans la réflexion à long terme sur la mise en place de la qualité des soins en psychiatrie.