EVALUATION DE LA PRATIQUE DE
MISE EN CHAMBRE DISOLEMENT (M.C.I.)
DANS UN CENTRE HOSPITALIER PSYCHIATRIQUE DEPARTEMENTAL
E. LARRIEU * , M.C. CARTIGNY ** | Commentaires referi Vos commentaires |
RESUME
Longtemps passées sous silence, les pratiques disolement des patients en psychiatrie font depuis peu lobjet dune attention particulière, tant des pouvoirs publics que des professionnels eux-mêmes.(1)(2)
Dans un esprit de démarche de qualité des soins, le C.H.D. La Candélie à Agen (Lot-et-Garonne), a réalisé une étude prospective sur une période de six mois en 1999 sur les pratiques disolement thérapeutique dans les services de psychiatrie générale. Les informations ont été recueillies en suivant les préconisations de lA.N.A.E.S.(3)
Soixante-quinze actes disolement ont ainsi été recensés, représentant 7,5% des admissions sur cette période, et ont été soumis à une étude statistique par le département dinformation médicale.
SUMMARY
For a long time, practices of seclusion in psychiatry were past over in silence. Its only lately that these form the subject of a particular attention, as well from public authorities than from professionals themselves.(1)(2)
In a spirit of high quality of care, the C.H.D. La Candélie in Agen (Lot et Garonne), has made a prospective study during a period of six months in 1999 on practices of therapeutic seclusion in psychiatry services for adults. Informations have been collected in accordance with the references of A.N.A.E.S.(3)
Seventy-five acts of seclusion have been counted, representing 7,5% of admissions on this period, and have been submitted to a statistical study by the department of medical information.
Mots-clés : isolement thérapeutique, M.C.I., démarche qualité, A.N.A.E.S.
INTRODUCTION
Depuis longtemps utilisé au cours des soins des malades en psychiatrie, lisolement, après avoir été lobjet dun silence pudique voire honteux, est maintenant tout à fait réhabilité comme mode de soin intensif.
Pour garder un caractère de bonnes pratiques à cet acte bien particulier, qui pose de nombreuses questions dordre thérapeutique, éthique et légal, des procédures très précises doivent être respectées.
Cest dans cet esprit que lA.N.A.E.S. a publié en juin 1998 un guide dont les principes ont été utilisés pour mener à bien cette présente étude.
Nous avons mené une enquête prospective dans le contexte du Centre Hospitalier Départemental La Candélie, à Agen (Lot-et-Garonne), établissement psychiatrique de 390 lits dhospitalisation pour adultes, répartis dans 5 secteurs et un département de géronto-psychiatrie, pour une population générale de 306.000 habitants.
Lactivité du CHD concernant les patients adultes :
Tous les actes disolement ont été recensés sur six mois, du 1er janvier au 30 juin 1999, dans lensemble des chambres disolement dont dispose létablissement.
Ce travail important a mobilisé un grand nombre déquipes soignantes, fortement sensibilisées au phénomène de la violence en psychiatrie.
Un des auteurs anime depuis juin 1998 un groupe de travail pluri-professionnel sur ce thème.
Les résultats de cette enquête vont servir de point de départ dun audit clinique centré sur la démarche qualité concernant ce soin de M.C.I..
METHODOLOGIE
Il sagit dune étude prospective qui a porté sur lensemble des mises en chambre disolement (MCI) dans létablissement pendant une période de six mois.
Létude concernait quinze unités dhospitalisation dotées dune chambre disolement conforme (CI).
Le recueil des données a été confié, pour chaque unité de soins, conjointement à la responsabilité du cadre infirmier et au praticien hospitalier responsable.
Le matériel nécessaire à un recueil exhaustif quotidien ainsi quun questionnaire comprenant 11 groupes ditems ont été mis à la disposition des unités de soins.
Lensemble des réponses a été soumis à un traitement statistique par le DIM à laide du logiciel EPI-INFO®.
RESULTATS
NOMBRE DISOLEMENTS |
Total Entrées |
% |
|
75 |
990 |
7,5 |
SEXE |
Nbre |
% |
F |
21 |
28 |
M |
54 |
72 |
AGE |
||||||||||
20-30 ans |
31-40 ans |
41-50 ans |
> 51 |
|||||||
Nb |
% |
Nb |
% |
Nb |
% |
Nb |
% |
|||
32 |
42,7 |
18 |
24,0 |
17 |
22,7 |
8 |
10,7 |
|||
Age Moyen 35,6 ans |
MODE DHOSPITALISATION |
Total Entrées |
||
HO |
25,3 % |
35,8 % |
|
HDT |
48,0 % |
19,2 % |
|
HL |
26,7 % |
2,6 % |
DATE DADMISSION DANS LUNITE |
||||||
1967 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
% |
% |
% |
% |
% |
% |
% |
2,7 |
1,3 |
2,7 |
4,0 |
4,0 |
12,0 |
73,3 |
73,3 % des isolements ont concerné des Patients de lannée |
HEURE MCI |
|||
Répartition basée sur le roulement du personnel soignant |
|||
6h - 14h |
14h - 22h |
22h - 6h |
Non renseig |
48 % |
40 % |
10,7 % |
1,3 % |
88 % des mises en chambre se font dans les plages horaires des journées |
|||
PRINCIPAUX PICS |
|||
10h 14h 40 % dont 10h 12h 21,3 % et 12h 14 18,7 % |
|||
10h 18h 61,3 % ce qui représente les 2/3 des MCI dans ce tiers de journée |
MOTIF |
% |
Acte agressif, violence |
29,3 |
Agitation psychomotrice |
22,7 |
Agressivité verbale |
9,3 |
Prévention de violence imminente |
5,3 |
Refus des soins |
5,3 |
Autres |
5,3 |
Dissociation déstructuration |
4,0 |
Dangerosité |
4,0 |
Prévention dacte auto-agressif/risque suicidaire |
4,0 |
Fugue |
4,0 |
Tentative de suicide/mutilation |
2,7 |
HO ou HDT |
2,7 |
Acte non toléré par règlement du service ou le contrat de soin |
1,3 |
Confusion - désorientation |
0,0 |
CIM 10 |
% |
F20 Schizophrénie |
49,3 |
F60 Troubles spécifiques de la personnalité |
17,3 |
F10 Troubles mentaux et troubles du comportement liés à l'utilisation d'alcool |
4,0 |
F22 Troubles délirants persistants |
4,0 |
F30 Episode maniaque |
4,0 |
F06 Aut tb mentaux, dus à une lésion ou un dysfonctionnement cérébral, ou à une affection physique |
2,7 |
F23 Troubles psychotiques aigus et transitoires |
2,7 |
F43 Réactions à un facteur de stress important, et troubles de l'adaptation |
2,7 |
F71 Retard mental moyen |
2,7 |
F00 Démence de la maladie d'Alzheimer |
1,3 |
F31 Trouble affectif bipolaire |
1,3 |
F32 Episodes dépressifs |
1,3 |
F41 Autres troubles anxieux |
1,3 |
F59 Syndromes comportementaux non spécifiés associés à des perturbations physiologiq ou à des facteurs physiques |
1,3 |
F70 Retard mental léger |
1,3 |
F72 Retard mental grave |
1,3 |
F83 Troubles spécifiques mixtes du développement |
1,3 |
ACCOMPAGNEMENT |
% |
Une intervention verbale suffit |
44,0 |
Nécessité dune intervention physique |
2,7 |
Appel à des renforts Délai satisfaisant renforts suffisants |
44,0 |
Nécessité dune intervention physique Sans renfort |
9,3 |
INCIDENTS |
|
OUI |
NON |
4,0 % |
96,0 % |
TRAITEMENT MEDICAMENTEUX |
% |
Mise en place ou modification du traitement antérieur : traitement par voie injectable |
54,7 |
Mise en place ou modification du traitement antérieur, sans traitement injectable |
14,7 |
Poursuite dun traitement injectable |
6,7 |
Pas de mise en place ou modification du traitement antérieur, pas de traitement par voie injectable |
24,0 |
COMMENTAIRES
Soixante-quinze actes disolement ont ainsi été recensés, représentant 7,5% des admissions sur cette période.
Près de 3/4 des personnes isolées étaient des hommes, avec un âge moyen de 35,6 ans.
Une majorité de patients étaient hospitalisés sous contrainte, notamment 48 % en HDT. On note également que 26,7 % des patients isolés étaient en hospitalisation libre. Ce fait nécessite une vigilance accrue par rapport à la mise en conformité des modalités dhospitalisation quand lisolement doit se prolonger.
Toutefois les actes disolement nont concerné que 2,6 % des admissions en H.L.
Une majorité disolements concernait des patients récemment admis, donc potentiellement en situation psychopathologique aiguë.
Si 88 % des M.C.I. ont lieu au cours des plages de travail de jour du personnel soignant, un nombre non négligeable (10,7 %) se font la nuit, où souvent la question des effectifs, en particulier masculins, est cruciale.
Les deux principaux motifs observés sont un acte agressif, ou une agitation psychomotrice.
Pour près de la moitié des patients le diagnostic de schizophrénie a été posé, viennent ensuite les troubles spécifiques de la personnalité.
Pour ce qui concerne laccompagnement, si dans 44 % des cas une intervention verbale a suffi, dans un nombre de situations égal lappel à des renforts a été pratiqué.
Des incidents lors de la M.C.I. ont été notés dans 4 % des cas.
Dans 61,4 % des cas un traitement par voie injectable a été utilisé.
CONCLUSIONS
Cette étude prospective sur les M.C.I. au Centre Hospitalier Départemental La Candélie, révèle des résultats proches des données déjà disponibles sur le sujet, montrant que cet établissement ne présente pas de caractéristiques particulières à ce sujet.
Par contre on constate que la M.C.I. est loin dêtre une pratique exceptionnelle, et quelle est majoritairement utilisée pour traiter les situations de violence avérée ou potentielle, chez des patients qui sont parfois venus à lhôpital de leur plein gré.
Un respect très attentif des protocoles et recommandations de lANAES, semble donc simposer. A partir de ces données, une démarche visant à améliorer la qualité des soins et la sécurité des patients, paraît fort souhaitable.
BIBLIOGRAPHIE