Résumé. Le coût de la schizophrénie a fait l'objet de plusieurs tentatives d'évaluation à l'étranger. Aux Etats-Unis, le coût direct de la maladie a été évalué par deux auteurs différents. Selon Gunderson et Mosher (13), il s'élève à US $ 1 500 millions, tandis que pour Wyatt et al. (29), il représente US $ 25 625 millions. En Grande-Bretagne, les études réalisées estiment le coût direct associé à la prise en charge de cette maladie à # 390 millions [Drummond et Davies, (7)], à # 1 178 million [Kavanagh et al., (16)]. En Australie, le calcul du coût direct par incidence aboutit à un montant de US $ 24 621 millions [Andrews et al., (1)], soit 6 fois plus que le coût de l'infarctus. Enfin, la seule étude réalisée en France (Rouillon et al., 1997) donne un résultat qui atteint 17911 millions de francs. La part du coût associé au traitement de la schizophrénie est la principale rubrique de dépense au sein du coût direct : elle s'étend de 100% (13) à 17% (29). La prise en charge hospitalière occupe une part allant de 99% (16) à 55% (Rouillon et al.) de ce coût médical direct. Les coûts indirects font également l'objet d'une évaluation dans 4 études sur 6. Ils s'étendent de 71% (29) à 83% (13) des dépenses totales. Les différences de résultats observées au sein de ces 6 publications sont parfois surprenantes, notamment quand elles s'expriment au sein d'un même pays. Ces disparités importantes sont à mettre sur le compte des méthodes mises en oeuvre par les différents auteurs. Elles rendent compte de la difficulté à utiliser ces études pour une aide à la décision visant à hiérarchiser les priorités de santé publique. En outre, la recherche des correspondances de structure entre les différents pays est un exercice difficile qui limite la comparaison des études entre elles. Enfin, le manque de transparence de certaines d'entre elles est de nature à limiter leur crédibilité.- Summary. The cost of schizophrenia has been a major point of interest abroad. In the United States, two authors evaluated the direct cost of the illness. According to Gunderson and Mosher (13), it reaches US $ 25.625 millions. In the United Kingdom, the estimations are of # 390 millions (7) and # 1.178 millions (16). In Australia, a direct cost calculation based on incidence leads to US $ 24.621 millions (1), which is 6 times as much as the cost of infarction. At last, the only French study (Rouillon et al., 1997) gives a result of FF 17.911 millions. The indirect cost estimations vary from 71% (29) to 83% (13) of the total cost. The difference between the 6 publications are surprising (especially when they concern the same country) and are probably link to the difference of methodology. This point tempers largely the interest of these studies as a tool in order to hierarchise Public Health priorities. Moreover, the elaboration of structures equivalencies between the different countries is an ambitious enterprise and makes difficult comparisons of the studies. Finally, the lack of transparency of some of them limits their credibility.
Keywords : Care structures (equivalencies) Costing methodology, Cost of illness.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 83-99
Résumé. Ce travail présente une étude rétrospective sur la prescription de médicaments anticholinergiques correcteurs des troubles extrapyramidaux induits par les neuroleptiques. Celle-ci constitue une première étape d'un audit thérapeutique sur l'évaluation des pratiques de prescription de ce type de médicament. Cette étude fut conduite simultanément dans trois sites psychiatriques différents par un psychiatre et un pharmacien de chacun de ces hôpitaux. Dans un premier temps, les références sur les pratiques thérapeutiques, les données de la littérature et les protocoles de soins ont été étudiés. Sept critères ont été sélectionnés et renseignés à partir des dossiers médicaux de 67 patients traités conjointement par neuroleptiques et anticholinergiques. Ensuite, ces données ont été analysées à partir des standards attendus. Des variations importantes ont été observées et discutées.- Summary. Aims : A retrospective survey of prescription of anticholinergic drugs to patients treated with antipsychotics (i. e neuroleptics) was set up in order to evaluate quality and adequation of medical care. This study was ment as a first step of a therapeutic audit, aimed at improving clinical practices and attitudes. Methods : This retrospective study was conducted concomitantly at three different psychiatric institutions, jointly at each site by a senior psychiatrist and a senior pharmacist and at two different dates, six months apart one from the other. In a first step, references for therapeutic practice were collected, from current scientific literature, protocols and professional practices. Seven criteria were selected. Each criterion consisted in a variable, an expected standard, an observed standard and exceptions. Information was collected from the clinical charts and prescriptions of 67 patients (33 men, 34 women), aged 47.8 ± 14.9 years (range 21-76 years), treated with anticholinergic and neuroleptic drugs. These data were then analyzed, according to the seven predefined criteria and the observed standards matched with the expected ones. Results : Depending on the criterion, important variations could be observed, the observed standards ranging from 100% to 11,9% of the expected standards.
Keywords : Anticholinergic drugs, Evaluation of clinical practices, Therapeutic audit.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 100-107
Résumé. L'Echelle d'Autonomie Sociale (EAS) est une échelle d'hétéro-évaluation, en dix-sept items et cinq sous-ensembles, conçue pour explorer le niveau d'autonomie des personnes souffrant de troubles psychiatriques chroniques. On sait en effet que, pour ces patients, le succès des projets de réinsertion dans la société dépend de leur capacité à faire face aux problèmes concrets de la vie quotidienne. Cette publication expose les premiers travaux de validation de l'EAS, dont la fidélité intercotateurs, la sensibilité, la validité concourante explorée par rapport à l'Echelle Globale de Fonctionnement (GAF du DSMIII-R), ainsi que la consistance interne apparaissent très satisfaisantes.- Summary. The Assessment of Social Self-Sufficiency (ASSS) is a scale of hetero-assessment, made up of seventeen items and five subsets, devised to investigate the self-sufficiency level of the persons who suffer from chronic psychiatric trouble. We know indeed that, for these patients, the success of their rehabilitation plans depends on their ability to face up to tangible problems in everyday life. This publication expounds the first work validating the ASSS. The " intercotators " accuracy of the work, its sensitiveness, its concurrent validity investigated with regard to the Global Assessment of Functioning Scale (GAF of the DSM III-R) as well as ther inner contents seem to be very satisfactory.
Keywords : Rehabilitation, Scale of hetero-assessment, Self-sufficiency.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 108-119
Résumé. L'objectif était d'étudier de façon concomitante la fréquence et le traitement des troubles anxieux en médecine générale, au moyen d'une étude épidémiologique transversale, réalisée dans le cadre du Réseau Sentinelle Aquitaine. Cinquante-cinq médecins généralistes, ont évalué 312 patients choisis au hasard dans leur clientèle, durant une semaine. La batterie d'évaluation comprenait : un recueil de données socio-démographiques et médicales (traitements psychotropes et psychothérapiques actuels, demande de traitement des patients), la section troubles anxieux du Composite International Diagnostic Interview, le Beck Depression Inventory. Vingt-cinq pour cent des patients présentent au moins un trouble anxieux en évolution, 29% consomment des psychotropes. Il n'existe pas de différence selon le sexe pour les troubles anxieux. Les femmes sont plus traitées que les hommes mais elles ne demandent pas plus de traitement. La demande de traitement varie en fonction du trouble anxieux. Les traitements les plus utilisés sont les moins spécifiques. Conclusion : La fréquence des troubles anxieux et de la consommation de psychotropes est concordante avec les données en population générale. Le sex ratio est différent. La demande de traitement des patients n'est pas à elle seule déterminante dans les prescriptions.- Summary. Objective : This study, conducted in Aquitaine (Southwest France), was designed to assess both frequency and treatment of anxiety disorders in general practice patients. Method : The assessment was cross-sectional; a random sample of 312 patients was chosen and evaluated during the last week of Mai 1993, by 55 general practitioners who usually collaborate in the Aquitaine Sentinel Network, supported by the Department of Medical Statistics and Public Health of the University of Bordeaux II. Anxiety disorders were assessed by the Composite Internationnal Diagnostic Interview and level of depression was self evaluated by the Beck Depression Inventory. The physicians reported current psychological and psychopharmacological treatments, and request for treatment of every patient tested. Results : Frequency of anxiety disorders is concordant with available epidemiological data in French general population. There is no sex difference for anxiety disorders in this study, in opposition to what is known in the general population (2 = 1.47, p > .05). Women are more treated than men (drugs : _2 = 7.31 p < .01 ; psychotherapies : _2 = 7.58 p < .04) although they don't request for more treatment (_2 = .59 p < .05). Benzodiazepines and psychodynamic oriented therapies are the most used treatments for any anxiety disorders; specific treatments (antidepressive drugs, behavioral therapies) of anxiety are very rarely prescribed. Conclusion : This study shows the difference between the current theoretical knowledge in anxiety disorders, and the management of these disorders by the general practitioner. It suggests that patient's request, in opposition to what is often found in the literature, is not a determinant factor in treatment.
Keywords : Anxiety disorders, Epidemiology, General practice, Psychotropic drugs.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 120-124
Résumé. Les interactions entre facteurs de risque génétiques et environnementaux jouent probablement un rôle central dans l'étiopathogénie des troubles psychiatriques. Sont passées en revue les données suggérant que les facteurs génétiques augmentent le risque pour la schizophrénie en accroissant la sensibilité à des facteurs de risque environnementaux (interaction gène-environnement), ou en augmentant la probabilité que les sujets s'exposent à des environnements à risque (corrélation gène-environnement). Ainsi, l'impact des gènes sur la survenue de troubles psychotiques pourrait être médié par (une sensibilité accrue à) des facteurs environnementaux tels que des complications obstétricales, un environnement familial dysfonctionnel, l'exposition à des toxiques, etc. Du fait des avancées des recherches en génétique moléculaire, il est indispensable que le rôle des interactions gènes-environnement soit mieux connu afin que puisse se développer la prévention des troubles psychotiques.- Summary. Psychiatric disorders are thought to arise as a result of interactions between genetic vulnerability and environmental risk factors. However, research methods to actually investigate the pattern of hypothesized interactions have only recently been developed. In this article, we review the evidence that genes increase the risk for psychosis by making individuals more sensitive to environmental risk factors (genotype-environment interaction), or by making individuals more likely to select high-risk environments (genotype-environment correlation). It is likely that at least some of the impact of genes on the occurrence of psychosis is mediated through (sensitivity for) environmental risk factors such as a dysfunctional early family rearing environment, paternal absence, use of cannabis, complications of birth and pregnancy, stressful life events and unknown environmental risk factors associated with urban life and membership of certain ethnic groups. With the advent of molecular genetics, further knowledge about possible genotype-environment interactions is urgently required in order to develop and improve strategies for the prevention and early treatment of psychosis.
Keys words : Environmental risk factors, Genes, Genotype-environment interaction, Psychosis.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 125-131
Résumé. Chez l'homme, les androgènes jouent un rôle dans le comportement sexuel, l'agressivité, les processus cognitifs, le contrôle des émotions. Les progrès récents réalisés dans la compréhension des facteurs intervenant dans le contrôle de l'agressivité, en particulier sexuelle, ont permis le développement de nouvelles thérapeutiques. Il est en particulier possible de s'opposer aux pulsions sexuelles spontanément incontrôlables d'hypersexuels agressifs en déprimant la sécrétion ou en s'opposant à l'effet tissulaire périphérique de la testostérone. Les auteurs font une revue des différentes possibilités thérapeutiques dans ce domaine. Orchidectomie, oestrogènes et acétate de médroxyprogestérone ont ainsi progressivement été abandonnés. Nous rapportons également l'efficacité d'un analogue de la GnRH (triptoréline) qui a permis une inhibition hormonale réversible chez 11 délinquants sexuels. Ce traitement, qui a pour objectif de déconditionner le patient, permet d'offrir des conditions favorables à la mise en place d'une psychothérapie.- Summary. In humans, roles for androgens have been described in the regulation of sexuality, aggression, cognition, emotion and personality. Recent advance in the understanding of factors that are associated with sexual aggression have led to improved methods of treatment. A number of organic treatments which reduce the plasma testosterone levels or decrease androgen effects on target cells are available. These treatments may reduce the chance of reoffending of sexually aggressive men. The authors will review the literature on orchidectomy, oestrogens or progestogens such as medroxyprogesterone acetate (MPA) or cyproterone acetate (CPA) which are currently used in the treatment of deviant sexuality. From now, orchidectomy and treatment with either estrogens or MPA are withdrawn. The authors will also report the good clinical efficacy of a GnRH analogue (triptoreline) in eleven sex offenders. When used in conjunction with psychotherapy, they may benefit sex offenders especially in those who are motivated for treatment.
Keywords : Cyproterone acetate, GnRH analogues, Medroxyprogesterone acetate, Sex offenders, Sexual aggressive behavior.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 132-137
Résumé. Le but de cet article est de présenter la contribution que la neuropsychologie clinique et l'évaluation neuropsychologique peuvent apporter à la neuropsychiatrie, en particulier dans l'estimation des troubles cognitifs, ainsi que dans le traitement médicamenteux de la dépression. Six patients (quatre femmes, deux hommes, âgés de 16 à 54 ans) présentant des troubles dépressifs ont suivi un examen neuropsychologique. En fonction des scores obtenus au test de Rey-Osterrieth, les patients ont été classés comme ne souffrant pas ou peu de troubles de la mémoire (diminution < 20%), ayant des troubles modérés (diminution comprise entre 20 et 40%), ou des troubles sévères (détérioration > 60%). Les scores obtenus à deux autres tests de mémoire (échelle de Wechsler, et test d'apprentissage visuel de Rey) furent également pris en considération. Le degré de sévérité d'atteinte de la fonction cognitive est tout à fait corrélé avec la gravité des désordres neuropsychiatriques des patients, comme le font apparaître les tests de personnalité (MMPI, IDA, et questionnaires de Eysenck) ou bien encore les renseignements fournis durant l'entretien initial. Cet article évoque l'importance et l'utilité d'une complète évaluation neuropsychologique des patients déprimés, et envisage la possibilité de son utilisation pour approcher le traitement médicamenteux.- Summary. The purpose of this article is to discuss the contribution that clinical neuropsychology and neuropsychological assessment can conter to neuropsychiatry, particularly in the evaluation of cognitive disturbances and pharmacological treatment of depression. Six patients (4 females, 2 males; age : 16-54 years old) suffering from depressive disorders underwent a clinical neuropsychological examination. Depending on the memory scores obtained on the Rey-Osterrieth complex figure test, the patients were classified as having mild or no memory impairment (< 20% decrease), moderate memory impairment (20-40% decrease) or severe memory alteration (> 60% deterioration). Evaluation of memory scores of two other memory tests (Wechsler memory scale and Rey visual design learning test) were also considered. Patients who were classified as having severe memory impairment were consistently reported as seriously impaired on all memory tests. The severity of cognitive dysfunction is in accordance with the serious ness of the neuropsychiatric disturbances of the patients as revealed by personality testing (MMPI, IDA and Eysenck questionnaires) or by personal details as assessed during the interview. This paper discusses the importance of the utility of a comprehensive neuropsychological evaluation of depressed patients and seriously considers the possibility of the use of this approach for pharmacological treatment evaluation.
Keywords : Anxiety Depression Memory Neuropsychology.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 138-150
Résumé. Certains patients offrent de très nombreuses plaintes et demandent des contacts très fréquents pour eux ou pour leur entourage. Le nombre de ces motifs est souvent multiplié lors des étapes marquantes du cycle de vie. La différence culturelle, lorsqu'elle existe, doit être intégrée lors de l'anamnèse, de l'écoute et de la prise en charge effectuées par les médecins exerçant en poste de soins primaires. La production des symptômes pour soi ou pour ses propres enfants entre dans le cadre des symptômes factices, du syndrome de Münchhausen, syndrome de Meadow ou du syndrome de Polle. La mise en échec des soignants fait partie du mode de relation habituel de ces patients. Une tentative de clarification et une recherche de sens proposées à chaque contact peuvent constituer une approche de ces patients souvent réfractaires ou fuyants vis-à-vis des psychothérapies et des prises en charge institutionnelles.- Summary. With description of the case of a patient birth in Maroco and emigrated in France at 10 years old, met during 6 years, we try to includ signs noticed in a nosologic entity. Some patients offer many complaints and have very frequent contacts for themselves or their family, with the practitioners. Events of current life grow expression of their troubles. Cultural difference will be integrated in anamnesis, hearing and in care. Production of symptoms for himself or for children are called : factitious disorders, Münchhausen's syndrom, Polle's syndrom or Meadow's syndrom. Generally physicians are in check with these patients. During medical session this relationship requires to try to have clarifications or have research of meaning. These patients are very often refractory in psychotherapy and no compliant for institutional therapy. For second generation of immigrates, cultural identity is in conflict with personal identity, in part caused by the decay of social group of belonging. Troubles caused by distorsion of fusional relation with mother can be favoring factors of these diseases for Maghrebian patients.
Keywords : Culture of Maghreb, Factitious disorders, Family environment, Family practice, Immigrants, Münchhausen's syndrom by proxy, Pathomimia.
L'Encéphale, XXIV, II, Mars-Avril, 1998, 151-155