L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998

Psychopathie et évaluation des comportements violents en milieu psychiatrique de sécurité -- Psychopathy and assessment of violent behaviors in security hospital

T. PHAM, S. REMY, A. DAILLIET, L. LIENARD

Résumé. L’étude examine les risques de comportements violents parmi 62 délinquants séjournant en milieu psychiatrique fermé. Deux variables prédictives des comportements violents répertoriés dans le dossier médical ont été évaluées : (1) la classification par le personnel soignant des sujets " violents " et " non violents ", (2) les scores au questionnaire (PCL-R) de la psychopathie de Hare (1991). Le score à l’échelle actuarielle du Michigan relative aux comportements violents (MARSS) a été pris en compte mais n’a pas été considéré comme une variable prédictive. Le PCL-R, la classification subjective et le MARSS présentent une corrélation élevée. Les régressions multiples suggèrent que le PCL-R évalue de manière valide les comportements violents. L’utilisation de cet instrument pour la prédiction des comportements violents est donc encouragée.

Summary. This study examines risks of violent behavior among 62 offenders in a belgian psychiatric security institution. Two variables were assessed as predictor of the subjects’ history of violent behavior recorded in their medical files : (1) subjective classification as " violent " vs " non violent " by care taking personnel; and (2) scores on Hare’s (1991) Revised Psychopathy Checklist (PCL-R). The study assessed also the score of the Michigan Actuarial Scale of Violent Behavior (MARSS) which was not considered as predictor. The PCL-R, the subjective classification and the MARSS were found to be highly intercorrelated. Regression analysis suggest that the PCL-R is a significant predictor of violent behavior. The use of this instrument for the prediction of violent behavior is thus encouraged.

Keywords : Assessment, Prediction, Psychopathy, Violent behavior.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 173-179

Antidépresseurs et stimulation sexuelle : la part des choses -- Antidepressants and sexual stimulation : is it a reality?

S. CHEBILI, A. ABAOUB, B. MEZOUANE, J.F. LE GOFF

Résumé. Nous étudions principalement les antidépresseurs stimulant la fonction sexuelle. Dans une première partie nous verrons que la physiologie de la fonction sexuelle fait intervenir de manière très complexe différents systèmes de neuromédiateurs : adrénergique, cholinergique, dopaminergique et sérotoninergique. Nous envisageons l’action de la viloxazine qui serait globalement désinhibitrice. Une étude précise montre que le moclobémide améliore de façon significative toutes les composantes de la fonction sexuelle. La doxépine présente un intérêt plus limité par ses effets secondaires gênants. Les travaux particulièrement précis pour les 2 premiers antidépresseurs montrent un effet pharmacologique propre sur les différentes phases de l’activité sexuelle. Puis nous testons la pertinence du concept de " correcteurs " qui, bien que nombreux, sont peu utilisés en pratique : yohimbine, cyproheptadine, amantadine et béthanechol.

Summary. The purpose of this study is to correlate antidepressant treatment with sexual stimulation. The first part of this paper tries to describe some physiologic aspects of the sexual function. This complex subject includes several neuromediators which belong to adrenergic, cholinergic, dopaminergic and serotoninergic systems. A double-blind study shows that viloxazine, an atypical antidepressant, could act specifically on sex drive by desinhibiting effect. A precise study concludes that moclobemide improve significantly all components of sexual function. The numerous side effects of doxépine is a hindrance to its prescription. More precise studies about viloxazine and moclobemide suggest that both could have a specific effect on different components of sexual activity. In the second part of this paper, we consider the concept of " corrector ". These drugs are numerous, however their prescriptions are not very wide spred : yohimbine, cyproheptadine, amantadine, bethanechol.

Keywords : Antidepressant, Moclobemide, Serotonin reuptake inhibitor, Sexual stimulation, Viloxazine.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 180-184

L’échelle des expériences subjectives des déficits (EESD) chez les patients schizophrènes The subjective experience of deficits in schizophrenia, SEDS, Liddle and Barnes, 1988 : traduction et validation de la version française chez 50 schizophrènes -- Scale for the assessment of subjective experiences of deficits in schizophrenia (SEDS, Liddle and Barnes, 1988) : validation of the French version in 50 chronic schizophrenics

V. YON, G. LOAS

Résumé. Les symptômes de base ou expériences subjectives de la schizophrénie font l’objet d’opérationnalisation à travers la mise au point d’échelles d’évaluation. La traduction française de l’échelle d’évaluation des expériences subjectives des déficits dans la schizophrénie (SEDS, Liddle et Barnes, 1988) est présentée ainsi que l’étude de la fidélité interjuges, de la stabilité temporelle et de la validité interne. Ces paramètres métrologiques sont satisfaisants, ce qui permet d’envisager l’utilisation de l’échelle en population française.

Summary. The aim of the study is to present the French version of the scale for the assessment of subjective experiences of deficits in schizophrenia (SEDS, Liddle and Barnes, 1988). The metrological parameters of the French version of the SEDS were studied in 50 RDC chronic schizophrenics. The interraters reliability was determined using the Kappa and Kendall coefficients of concordance. Among the 50 schizophrenics 30 filled out once again one month later the French version of the SEDS and the temporal stability of each scale’s item was calculated using frequency (%). The construct validity was determinated using first the Cronbach alpha coefficient and secondly by calculating the Pearson correlation coefficient between each item and the total score. The Kappa coefficients were higher than 0.4 for 15 items out of 22. The Cronbach value was 0.87. 19 items out of 22 had a temporal stability from 64.2 % to 100 %. Thus the French version of the SEDS seems to be reliable and could allow to study subjective experiences of deficits in schizophrenia.

Keywords : Deficit, Rating scale, Schizophrenia, Subjective symptomatology.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 185-192

Modifications comportementales dans la dépression de l’enfant : étude des clignements des paupières et des autocontacts -- Behavioral modifications in childhood depression : the study of eyeblink and auto-manipulation

G. BRAND

Résumé. La dépression chez l’adulte suscite de nombreuses observations comportementales qui contribuent à l’affinement diagnostique, au suivi de l’évolution de la maladie et à l’évaluation de la prise en charge. Chez l’enfant en revanche, les recherches concernant les modifications comportementales liées à la dépression sont peu nombreuses. Ce travail s’intéresse à deux comportements particuliers, les clignements et les autocontacts. Il compare les fréquences d’apparition de ces comportements à J0 (avant traitement) et à JS (à la sortie du service), lors d’un entretien standardisé enregistré en vidéo, chez des enfants de 8 à 13 ans hospitalisés pour épisode dépressif majeur, ainsi que pour un groupe contrôle. L’analyse montre une diminution significative de la fréquence de clignement et du temps moyen d’autocontact à JS après amélioration de la maladie.

Summary. Different investigations have studied the evolution of childhood depression but little research has been based on the observation of behavior. This work aims at analysing two singular behaviors : eyeblink and auto-manipulation. This paper compares the results obtained on day A (hospital admission, before treatment) and on day D (discharge, after clinical improvement) during a standardized interview recorded in video with children aged 8-13 years, hospitalized for a major depressive episode and for a control group. The results show a significant decrease in eyeblink frequency and the mean auto-manipulation duration after clinical improvement. The discussion raises the question of the role of anxiety in the development of these behavioral modifications.

Keywords : Auto-manipulation, Behavior, Child, Depression, Eyeblink.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 193-197

Alexithymie et mémoire : un critère d’acceptation plus rigoureux dans les tâches de reconnaissance -- Alexithymia and memory : a more rigorous criterion for acceptance in recognition tasks ?

S. JACOB, M. HAUTEKEETE

Résumé. Deux groupes de sujets non pathologiques, contrastés sur leur score d’alexithymie, sont comparés. L’alexithymie est évaluée au moyen de la Toronto Alexithymia Scale. Les deux groupes effectuent une épreuve de reconnaissance intégrée dans une session d’apprentissage incident. Les résultats indiquent une tendance à faire moins d’erreurs chez les alexithymiques. Cette tendance est expliquée par un critère d’acceptation plus rigoureux : les alexithymiques rejettent davantage d’items. Les temps de réponse de ce groupe sont aussi plus longs en ce qui concerne les bonnes réponses (reconnaissance des items initiaux, élimination des distracteurs). Ces résultats sont discutés dans le cadre d’un modèle décisionnel : la réponse prendrait plus de temps chez les alexithymiques parce que leur critère de décision exige la récupération de davantage d’attributs pour arriver à complétion. Cette caractéristique pourrait expliquer, au moins partiellement, les difficultés de dénomination du ressenti observées chez les alexithymiques.

Summary. Alexithymia, the lack of words for affects, is often explained in a neurophysiological way. Many epidemiological studies have shown that this personality characteristic is a common one, frequently observed in the general population and, at least sometimes, context-dependent. Thus, alternatives to the split-brain alike hypothesis are required. In this paper, we focus on promising findings reported by Montreuil and Pedinielli (15) : poorer alexithymic performances on memory tasks in an incidental learning session. We tried to duplicate these results for a recognition task but failed to do so. Surprisingly, observed data show a trend in the opposite direction and alexithymic subjects perform better on distractors. Response times for the right answers (recognition of targets, elimination of distractors) are longer for this group. Taken together, these results suggest a difference in the managing of uncertainty. Alexithymic criterion for adoption/rejection of candidates to recognition is assumed to need a longer completion because of a greater number of attributes to recover in memory (considering a componential approach of representations in memory). Such a decision model explains why alexithymics perform better on elimination (they need more certainty) and why they show a slight decrease (unsignificant) on target acceptation (for a similar level of uncertainty alexithymics use a more rigorous criterion than the control group). From this decision model an alternative explanation is proposed for the results of Montreuil and Pedinielli in the recognition task. Further, it is suggested that a similar process might be implicated in the alexithymic difficulties about the translation of feelings into words. As it requires a matching between an ambiguous-continuous information (the inner feeling) and a consensual-discrete label (the emotional term), this process probably involves a great degree of uncertainty.

Keywords : Alexithymia, Decisional model, Incidental learning, Memory.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 198-204

Influence des traitements par la méthadone dans la prise en charge médicale des toxicomanes séropositifs pour le virus du SIDA - Résultats d’une étude descriptive, Bayonne, 1996 -- Influence of methadone maintenance treatment on medical care of drug users with HIV and AIDS : results of an evaluation research, Bayonne (France), 1996

C. LAFITTE, F. BONNAL, J.P. DAULOUEDE, J. TIGNOL

Résumé. Depuis 2 ans, le centre méthadone Médecins du Monde de Bayonne a pris en charge 80 toxicomanes. Dans cette population d’héroïnomanes, 48 % d’entre eux sont séropositifs pour le VIH... L’objectif de cette étude descriptive est de déterminer l’influence des traitements par la méthadone dans la prise en charge médicale, spécialisée et hors centre, de ces patients séropositifs. En plus d’un recueil ciblé de données transmises par des outils d’évaluation standardisée (Addiction Severity Index et Tableau d’Evaluation Assistée de la Qualité de Vie), d’autres paramètres ont été observés sur cette population, comme la compliance du suivi médical en consultations, l’observance des traitements antiviraux, l’évolution du poids et du statut immunitaire. Les résultats descriptifs présentés et leurs comparaisons en fonction de la période de traitement (à l’entrée, à 3 mois puis tous les 6 mois de traitement par la méthadone) confirment le remarquable impact, sur tous ces paramètres, de la mise en place d’un traitement de substitution.

Summary. Since two years, 80 patients received methadone maintenance treatment in Bayonne Médecins du Monde Center. In this population, 48 % are HIV positive... The aim of this study is to determine the impact of methadone maintenance treatment on the medical status of a group of HIV positive subjects. In addition to the Addiction Severity Index collected data and quality of life evaluation by the TEAQV, the following data are collected : compliance to appointments HIV clinic, CD4 status, evolution of weight, observance of HIV medecine. Preliminary results are presented, showing precisely and confirming the good influence of methadone maintenance treatment on medical care of patients with HIV and AIDS. This kind of study, before and during the maintenance treatment (base line, third month and every six months) appears as a very important stake : for this patients with HIV and AIDS, in term of personnal and medical status, for us, in term of methadone treatment impact, and health public care.

Keywords : AIDS, HIV, Medical care evaluation, Methadone treatment, Opioid dependence.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 205-214

Evaluation prospective du sevrage des antidépresseurs -- Prospective study of the antidepressant withdrawal syndrome

I. MOURAD, M. LEJOYEUX, J. ADES

Résumé. De nombreuses manifestations psychiques et somatiques ont été rapportées lors de l’arrêt brutal ou progressif des antidépresseurs. Elles comportent des symptômes digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhée, anorexie), de l’anxiété, des symptômes généraux (frissons, fatigue, vertiges, myalgies, céphalées, syndromes pseudo-grippaux), des troubles moteurs, voire exceptionnellement une manie de sevrage. Nous avons réalisé une étude prospective de ce phénomène portant sur 16 patients traités par antidépresseurs et soumis à un sevrage brutal de ce traitement. Chez ces patients, la dépression était évaluée au moyen de la MADRS (Montgomery Asberg Depression Rating Scale), l’anxiété au moyen de l’échelle d’anxiété de Hamilton, les symptômes de sevrage au moyen de la SESSB (Scale for Evaluation of Benzodiazepines Withdrawal Symptoms). Quatorze des 16 patients (87,5 %) ont présenté des signes de sevrage : apparition ou aggravation de l’anxiété (31 %), de l’irritabilité (25 %), de troubles du sommeil (19 %). On observait également une diminution ou une disparition de l’anergie chez 19 % des sujets. Cette étude prospective des manifestations précoces du sevrage des antidépresseurs, réalisée chez 16 patients dans des conditions naturelles de prescription, souligne la fréquence des manifestations de sevrage et l’intérêt de leur repérage systématique.

Summary. The authors prospectively assessed symptoms induced by the interruption of antidepressants in 16 patients (11 women and 5 men), aged from 33 to 85 years (mean = 52.4 ± 16.4), treated with antidepressants since at least two weeks. All patients were free of alcohol abuse or dependence disorder and of other dependence to psychoactive substances. None of them presented medical illness. Diagnosis were made by separate evaluations by two authors and confirmed with a semistructured assessment instrument : the Schedule for Affective Disorders and Schizophrenia (Lifetime Version). All patients were submitted to a brutal discontinuation of their antidepressant agent. Patients were assessed twice, before the interruption of the antidepressant, and 72 hours later. Effects of antidepressant interruption were assessed by several means. Modification of anxiety and depression were evaluated using the Montgomery Asberg Depression Rating Scale (MADRS) and the Hamilton Anxiety Scale. Symptoms of withdrawal were assessed with Cassano and al.’s scale SESSH including an evaluation of anxiety, agitation, irritability, anergy, difficulty on concentrating, depersonalization, sleep and appetite disorders, muscle pains, nausea, tremor, sweating, altered taste, hyperosmia, paresthesias, photophobia, motor incoordination, dizziness, hyperacousia, pain, delirium. Fourteen of the 16 patients (87.5 %) presented modifications of their somatic or psychic state 3 days after the interruption of the antidepressant treatment. Most frequent symptoms were : increase in anxiety (31 %), increase in irritability (25 %), sleep disorders (19 %), decrease of anergia and fatigue (19 %). Mean scores of anxiety and depression were not significantly modified by the withdrawal. Following TCAs interruption (7 patients) most frequent symptoms were sleep disorders; increase in anxiety, nausea. Among patients withdrawn from SSRIs (6 patients), most frequent symptoms were increase in anxiety, increase in irritability, headache. Patients also presented a decrease of nausea, and of anorexia.

Keywords : Antidepressant drug, Depression, Serotonine specific reuptake inhibitor, Tricyclic antidepressants, Withdrawal.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 215-222

La potomanie : revue de la littérature -- Polydipsia and water intoxication in psychiatric inpatients : review of the literature

E. MERCIER-GUIDEZ, G. LOAS

Résumé. La polydipsie non expliquée par une polyurie d’origine organique concerne plus de 20% des patients psychiatriques chroniques hospitalisés dont près d’un tiers aurait présenté un épisode d’intoxication à l’eau. La plupart des patients potomanes excrètent toute l’eau consommée. Seul un sous-groupe de potomanes présentant une détérioration de cette capacité d’excrétion, liée le plus souvent à un état d’antidiurèse inapproprié avec hypersécrétion d’hormone antidiurétique, est à risque d’intoxication à l’eau. Repérer les patients potomanes et évaluer leur risque d’intoxication à l’eau constituent deux démarches préliminaires nécessaires à leur prise en charge thérapeutique. Cette dernière consiste à surveiller sur la journée leur poids et leur natrémie si nécessaire, à réduire les facteurs de risque et à pratiquer une restriction hydrique rapprochée dans les moments à risque d’intoxication à l’eau ,en associant parfois une thérapie comportementale, l’approche chimiothérapeutique faisant encore l’objet de nombreuses études. Enfin, il est probable qu’il n’existe pas un profil de patient potomane mais des potomanes dont l’étiopathogénie semble multifactorielle.

Summary. Polydipsia, unrelated to organic polyuria is present in 20% of the patients hospitalised in psychiatry on a long term basis. It seems that about a third of them have presented at some point an episode of water intoxication. Most patients with psychogenic polydipsia excrete all the water they absorb. In a subgroup of them, at risk for water intoxication, the capacity to excrete water is deficient. This is usually due to an inappropriate secretion of antidiuretic hormon. The first two steps in the treatment of patients with psychogenic polydipsia consist in making the diagnosis and in evaluating the risk of water intoxication. To do this, one must monitor throughout the day their weight and the serum sodium plasma level if necessary, then reduce the risk factors and prescribe water restriction during the high risk periods. Behavioural therapy is sometimes used; prospects for chemotherapy are being studied. It is probable that there is not a single type of patient with psychogenic polydipsia but several subtypes, the etiology being multifactorial.

Keywords : Chronic psychiatric inpatients, Epidemiology, Polydipsia, Psychogenic polydipsia, Schizophrenia, Water intoxication.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 223-229

Quel rôle joue l’environnement psychosocial dans l’anxiété? -- What is the role of psychosocial environment in anxiety disorders?

D. SERVANT

Résumé. Les données récentes de la littérature traitant des relations entre les stress de l’environnement et l’anxiété sont abordées dans cet article. Le rôle de l’environnement psychosocial dans l’anxiété est évident et a été suggéré par différents modèles théoriques. Cependant, très peu de travaux cliniques ont tenté d’explorer cette relation. Les études ont concerné principalement les événements stressants de la vie et les séparations survenues dans l’enfance. S’il existe une relation entre les événements de vie récents et anciens et l’anxiété, elle apparaît comme non spécifique et ne peut s’intégrer dans une relation causale simple.D’autres facteurs psychosociaux doivent être pris en compte comme le contexte et les stratégies de coping. Les modèles récents tentent d’intégrer de façon conjointe les facteurs de l’environnement aux facteurs de vulnérabilité biologique et génétique. En particulier, l’intérêt s’est porté sur la relation entre neurobiologie du stress et anxiété.Des études futures intégrant à la fois des facteurs psychologiques et biologiques sont nécessaires pour tenter de comprendre la relation complexe entre stress et anxiété.

Summary. Recent literature dealing with environmental life stress and anxiety is reviewed in this article. The role of psychosocial environment in both etiological and outcome factors of anxiety is evident and has been suggested by many theories. However, few studies have been conducted to explain this relation between life stress and anxiety. Mainly, studies have concerned recent life events and early separations. The link between life event and anxiety appears non specific and complex. Others factors may be taken in account like social context and coping styles.Recent models integrate both environmental factors and biological vulnerability. In particular, there has been an increasing focus on neurobiology of stress and anxiety. Further studies are necessary to specify the disorders and concepts under study and integrating biological and psychological factors in understanding the complex relationship of stress and anxiety.

Keywords : Anxiety, Life event, Stress.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 235-241

L’enfant anxieux le reste-t-il à l’âge adulte? -- Will childhood anxiety disorders continue through adulthood ?

C. MARTIN

Résumé. Des manifestations anxieuses, comme l’anxiété de séparation ou les phobies des animaux, existent au cours du développement normal de l’enfant. C’est en partie pour cela que le caractère pathologique de l’anxiété peut parfois s’avérer difficile à reconnaître. Les troubles anxieux de l’enfant ont été définis dans les classifications modernes. Ils se divisent en ceux communs aux adultes et aux enfants, et ceux qui débutent spécifiquement dans l’enfance et l’adolescence, et dont le trouble angoisse de séparation reste le seul représentant dans le DSM IV. Ces troubles anxieux sont une pathologie fréquente chez les enfants et les adolescents. Si l’on manque encore d’études longitudinales trouble par trouble, et de précision diagnostique pour certains d’entre eux, les données concordent pour étayer lacontinuité de la phobie sociale, de certaines phobies simples et du trouble obsessionnel compulsif entre l’enfance et l’âge adulte. Les autres troubles semblent évoluer de façon moins spécifique. Le trouble angoisse de séparation et l’anxiété généralisée représenteraient plutôt des facteurs de risque au développement ultérieur, durant l’enfance ou à l’âge adulte, d’autres troubles anxieux, de troubles dépressifs voire d’autres pathologies psychiatriques. La sévérité initiale des troubles, ou l’existence d’une comorbidité, paraissent constituer un facteur pronostique défavorable. En fait, si beaucoup d’enfants ou d’adolescents anxieux ne le restent pas à l’âge adulte, la plupart des adultes anxieux ont été des enfants ou des adolescents anxieux. Le dépistage et la prise en charge des troubles anxieux de l’enfance et de l’adolescence est donc nécessaire tant dans une visée curative immédiate que préventive à moyen et long termes.

Summary. Because anxiety has normal adaptative forms through development, the identification of pathology may sometimes pose difficulty. Child and adolescent anxiety disorders were defined in modern classifications. Some of them are common to children, adolescents and adults, such as generalized anxiety disorder, panic disorder, simple phobia, social phobia, obsessive compulsive disorder, post traumatic stress disorder. According to DSM IV, separation anxiety disorder is the only disorder which starts during childhood or adolescence. From the epidemiological evidence, anxiety disorders appear frequent. There is evidence of specificity in the course of simple phobia, social phobia and obsessive compulsive disorder, but less specificity in the course of other disorders. Separation anxiety disorder and generalized anxiety disorder represent risk factors for anxiety disorders, depressive disorders or other psychiatric disorders in childhood or adulthood. Data suggest that initial severity or comorbidity may play a role regarding the prognosis of anxiety disorders. Most child and adolescent anxiety disorders are no longer present in adulthood, but most adult anxiety disorders are preceded by child and adolescent anxiety disorders.

Keywords : Anxiety disorders, Child and adolescent psychiatry, Outcome.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 242-246

L’anxiété : personnalité, style de vie ou maladie? -- Anxiety, personality, life style, or disease?

A. PELISSOLO

Résumé. La nosologie des troubles anxieux a connu plusieurs remaniements successifs au cours des dernières années, mais certaines questions restent encore posées dans ce domaine. La frontière entre les divers états anxieux pathologiques et des états d’anxiété normale ou physiologique est délicate à formaliser. Les études épidémiologiques montrent bien qu’en faisant varier sur quelques points les modalités de définition des troubles, des différences importantes de prévalence peuvent être obtenues. L’anxiété généralisée ou les phobies sociales par exemple doivent être définies à l’aide de critères de retentissement et de sévérité suffisants pour les distinguer de certaines attitudes constituant des " variantes de la normale " ou des " styles de vie " particuliers. Le deuxième point concerne la distinction de certains troubles anxieux avec des traits ou des troubles de la personnalité. Peu d’études épidémiologiques ont été réalisées dans ce domaine, mais deux types d’approche peuvent être utilisés : la définition de catégories de troubles de la personnalité (évitantes, dépendantes, obsessionnelles par exemple) d’un côté, et l’étude de dimensions fondamentales de l’autre (trait névrotique, inhibition, anxiété-trait...). Des travaux d’épidémiologie clinique et des études prospectives sont encore nécessaires pour mieux cerner les limites respectives de ces diverses entités.

Summary. The nosology of anxiety disorders has been several times modified during the last years, but some important questions in this field still remain unresolved. The threshold between anxiety disorders and normal or physiological anxious states is often difficult to formally describe. Epidemiological studies do show that important variations of prevalence rates can be obtained by little modifications of diagnostic criteria. Generalized anxiety disorder and social phobia for example must be defined by severity and impairment criteria, adequately demanding to distinguish actual pathology from normal states or particular " life styles ". The other point is the distinction between anxiety disorders and personality traits or disorders. Only a few epidemiological studies have addressed this issue, but two models can be used : first categorical definitions of personality disorders (e.g. avoidant, dependent, or anankastic personality disorders), and second main personality traits such as neuroticism, behavioral inhibition, or trait-anxiety. Clinical epidemiological surveys and longitudinal studies may lead to significant progress in the comprehension of these problems.

Keywords : Anxiety disorder, Epidemiology, Nosology, Personality.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 247-251

L’anxiété est-elle héréditaire? -- Is anxiety a genetic disorder?

PH. GORWOOD

Résumé. On ne connaît pas à l’heure actuelle le poids ni le rôle exacts des facteurs génétiques dans les différents troubles anxieux. Néanmoins, les études de jumeaux ont montré que les facteurs génétiques étaient au moins aussi importants que les facteurs familiaux dans plusieurs troubles anxieux tels que le trouble panique ou différentes phobies. Les spécificités des facteurs génétiques dans les troubles anxieux sont soulevées. L’existence du traumatisme initial à la base du tableau clinique présenté limite l’évaluation du poids des facteurs génétiques dans certains troubles anxieux (tel le syndrome de stress post-traumatique). De plus, la distinction clinique entre les différents troubles anxieux, qui est utilisée dans les classifications internationales, n’a pas forcément de fondement en ce qui concerne les facteurs génétiques potentiellement en cause. Par exemple, selon une étude de jumeaux, le trouble anxieux généralisé partage l’essentiel de sa vulnérabilité génétique avec l’anxiété de séparation. Enfin, l’isolement du concept " trouble anxieux " (marqué par l’entité " névrose d’angoisse ") a peut-être plus de pertinence clinique et psychopathologique qu’étiopathogénique. En effet, les liens entre troubles thymiques et anxieux sont en bonne partie dus aux facteurs génétiques. De plus, à l’intérieur du groupe des troubles anxieux, les niveaux de sévérité, l’âge de début et/ou la comorbidité permettent d’isoler des sous-groupes qui pourraient avoir des facteurs de vulnérabilité indépendants. C’est la complexité de l’interface phénotype/génotype qui explique probablement le peu d’études génétiques positives sur les troubles anxieux et la faiblesse des études positives existantes (névroticisme et gène codant pour le transporteur de la sérotonine par exemple). La découverte de gènes réellement impliqués dans les troubles anxieux permettra non seulement de mieux comprendre les mécanismes en cause mais aussi vraisemblablement de démanteler le phénotype " trouble anxieux ".

Summary. The role of genetic factors in anxiety disorders is yet unknown, although their is a clear familial aggregation, and although twin studies found genetic factors to be at least as important as familial factors for some anxiety disorders such as panic disorder or phobias. In this review, the complexity of genetic studies on anxiety disorders are presented. The problem of incomplete penetrance (only a fraction of cases carrying a given gene manifest a specified phenotype) is illustrated by familial studies on some stress disorder, such as post-traumatic stress disorder. The presence of a severe stress is necessary to be able to manifest the disorder, familial studies on PTSD should thus use analysis with censored data. Questions concerning phenotype specificities are also raised. For exemple, on the basis of twin samples, generalised anxiety disorder and separation anxiety disorder seem to share most of their genetic determinism. Furthermore, more major depressive disorders are found in families of probands with generalised anxiety disorder, suggesting commun vulnerability factors for some of anxiety and mood disorders. Lastly, as standarised diagnostic criteria are much more based on clinical evidence than on etiopathogenic validity, genetic factors may be involved in various bounderies of the phenotype, for example taking into account level of severity, age at onset, or comorbidity. Some of the association studies in humans, analysing the impact of genetic polymorphisms on the existence of anxiety disorders, were either negative or showed week evidence for commun traits such as nevroticism. For animal studies, quantitative trait loci technics may help to pinpoint some still unknown candidate genes. In conclusion, the genetics of anxiety disorders reflect all the difficulties proper to the genetics of complex disorders. Progress in molecular genetics will nevertheless probably change the diagnostic criteria, which are more based on clinical evidence rather than on etiological originality.

Keywords : Anxiety, Familial aggregation, Genetics, Panic disorder, Phenotype.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 252-255

Anxiété et troubles cognitifs -- Anxiety and cognitive disorders

C.S. PERETTI

Résumé. Les sujets anxieux présentent des troubles attentionnels avec un biais attentionnel pour les stimuli à contenu menaçant. La congruence entre les thèmes ou manifestations anxieuses et le contenu des stimuli va modifier le traitement de l’information conduisant à une réponse ralentie dans des tâches dérivées du test de Stroop (variante de Stroop " émotionnel "). Il en est de même dans des tâches de détection de stimulus aussi bien lorsque le matériel présenté est de nature visuelle ou auditive. Les mots anxiogènes sont activés inconsciemment chez les sujets anxieux, indépendamment de leur valeur sémantique, ce qui pourrait suggérer l’existence d’un amorçage émotionnel. Beck a formulé une théorie dite de l’hypervigilance, dans laquelle l’anxiété provoquerait une distractibilité avec sélection préférentielle de stimuli non pertinents avec la tâche à accomplir, une sélectivité attentionnelle pour les stimuli menaçants conférant une vulnérabilité cognitive à ces sujets. L’anxiété-état altère les performances en mémoire de travail, L’anxiété-trait ne semble au contraire pas entraîner de perturbation significative. A partir du modèle de Baddeley formalisant le fonctionnement de la mémoire de travail, Eysenck postule que l’anxiété mobilise une partie des capacités attentionnelles, plaçant le sujet anxieux en situation de double tâche. En effet, le sujet doit traiter à la fois l’information pertinente et celle qui est générée par l’anxiété. Si , dans des tâches simples, l’anxiété améliore les résultats en recrutant les capacités motivationnelles, dans des tâches comportant une grande quantité d’informations, les performances des anxieux sont déficitaires. En mémoire à long terme, les conséquences cognitives de l’anxiété ne corroborent pas le modèle construit à partir des hypothèses formulées chez le sujet déprimé. En mémoire implicite, les sujets anxieux présentent un biais de mémoire pour les informations anxiogènes. Il faut cependant compléter ces données préliminaires par des études plus systématiques. Enfin, la caractérisation des troubles cognitifs chez les sujets anxieux est liée à l’hétérogénéité des pathologies et aux problèmes de définition de l’anxiété.

Summary. Anxious subjects present attentional disorders that are manifest with an increased bias towards threatening contents stimuli. In tasks derived from the Stroop task (such as emotional Stroop, a variant of the classic Stroop task) congruence between anxious themes or manifestations and stimuli content induces information processing changes leading to a slowness of response speed. In this case, results are similar to those obtained in signal detection tasks either when information is visually or auditorily presented. In anxious subjects an inconscious activation provoked by anxiogenic words is observed. Because such activation is independent from the semantic content of the words, an emotional priming has been hypothesized. Berck formulated an hypervigilance theory according to which anxiety provokes a selective distractibility regarding non pertinent stimuli. Such attentional selectivity would be responsible of a cognitive vulnerability in anxious subjects. State but not trait anxiety induces working memory performances deficit. On the bases of Baddeley’s working memory framework, Eysenck proposed that anxiety uses part of the limited attentional capacity, placing the subject in a dual task situation. In that, he has to cope with pertinent information and anxiety generated information. If anxiety leads to better performance in simple tasks by recruiting motivational capacities, in tasks with high information content, anxious subjects performances are impaired. Changes in the long-term memory do not seem to fit with the theoretical models based on cognitive impairment observed in patients suffering from depressive states. Anxious subjects presented a memory bias towards anxiogenic information in implicit memory tasks. But experimental data are still too searce to describe implicit performance of anxious subjects and more systematic studies are therefore needed.

Mots clés : Anxiété, Attention, Cognition, Mémoire, Mémoire implicite, Mémoire de travail, Stroop. -- Keywords : Anxiety, Cognition, Implicit memory, Memory, Stroop task, Working memory.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 256-259

L’anxieux est-il dépendant? -- Is the anxious a dependant person?

P. NUSS

Résumé. Répondre à la question " l’anxieux est-il dépendant ", c’est tenter de définir en quoi une conduite procède d’une pathologie. La difficulté de cette question résulte du fait que l’on peut décrire une réciprocité d’influences de ces deux phénomènes l’un sur l’autre. Si, pour tenter d’éviter cet écueil, on s’intéresse à l’analyse des comorbidités entre dépendances et troubles anxieux, on se trouve confronté à une nouvelle difficulté. En effet, si les données épidémiologiques montrent à l’évidence l’existence d’incidences plus élevées d’un trouble en présence de l’autre, relativement à une population générale, ceci ne renseigne pas sur la nature des liens qui les unissent. Les modèles de causalité qui sont proposés eux aussi achoppent autant sur les registres théoriques qui les sous-tendent que sur l’hétérogénéité des troubles (diversité des troubles anxieux et des dépendances) qu’ils analysent. On distingue néanmoins plusieurs hypothèses. Celles de nature neurobiologique signalent l’existence d’éléments d’une boucle d’analyse liant structures, fonctions cérébrales, anxiété et dépendance, sans pour autant définir la validité de la nature de ces intersections. D’autres, avec une extensivité parfois contestable, soulignent la nature essentiellement addictive du fonctionnement cérébral. Certaines, enfin, indiquent la nature des divers processus psychopathologiques liant troubles anxieux et dépendance; elles représentent souvent dans notre culture un mode d’accès pertinent à l’analyse et au traitement de ces troubles dans leurs aspects phénoménologiques.

Summary. To answer the question : is the anxious a dependant person, it is necessary to define to what extend behaviour depends on pathology. The difficulty in answering this question relies on the fact that these two phenomenons interact with each other. The comorbidity analysis allows a descriptive point of view. It shows a higher incidence of these troubles when occurring together, compared to a general population. Nevertheless, the comorbidity approach does not give any information on the nature of the links between anxiety and dependence. The causality models depend on the theory they use. Furthermore, unity between anxiety and dependence disorders does not exist; it is then certainly a mistake to consider their link in a unique way. Three main hypothesis are usually used. The neurobiology point of view supposes a link between brain structures, neurofunctioning, anxiety and dependence disorders. Some authors suggest a general addictive propensity of brain functioning, especially in cases of anxiety disorders. Lastly, the psychopathological analysis can be useful in the understanding of dependence behaviour in case of anxiety.

Mots clés : Anxiété, Dépendance, Epidémiologie, Psychopathologie. -- Keywords : Anxiety, Dependance, Epidemiology, Psychopathology.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 260-266

Anxiété et médecine : quelle place pour le psychiatre ? -- Anxiety and medicine : which place for psychiatrists ?

C. NAVARRE

Résumé. Les rapports entre la médecine somatique et la psychiatrie sont complexes et parfois difficiles. L’anxiété est un symptôme fréquemment rencontré dans les disciplines médicales et en particulier à l’hôpital général où il est de plus en plus fait appel au psychiatre pour gérer les situations de crise. Le trouble anxieux apparaît donc comme un lien permettant le rapprochement des médecins somaticiens et des psychiatres autour des mêmes malades. La comorbidité importante anxiété/maladies somatiques a d’ailleurs été largement démontrée sur le plan épidémiologique. Il est aussi de plus en plus fréquent de faire appel au psychiatre pour gérer les situations de stress post-traumatique. Celui-ci à l’interface de toutes les disciplines et prenant en compte les éléments psychosociaux et humanistes a donc toute sa place comme intervenant à la fois clinicien, pédagogue et chercheur.

Summary. The relationship beetween medicine and psychiatry is complex and sometimes a little diffficult. Anxiety is frequently met in somatic medicine units and particullarly in General Hospital where psychiatrists are often required for crisis situations. So, anxiety disorder becomes a link between physicians and psychiatrists looking after same inpatients. Epidemiological high comorbidity too is demonstrated between anxiety and somatic disorders. More and more frequently, psychiatrists are engaged for care of post traumatic stress disorders. In fact, in modern medicine, the psychiatrist is collecting medical, psychosocial and humanist points of view. His missions of clinician, teacher, and researcher seem really important for the future evolution of medicine.

Keywords : Anxiety, Comorbidity, Crisis situations, General hospital, Humanist point of view, Medicine, Post-traumatic stress disorders, Psychiatrist, Psychosocial.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 267-271

Comment prescrire les médicaments de l’anxiété? -- How should psychotropic drugs be prescribed for anxiety disorders ?

F.J. BAYLE

Résumé. L’utilisation des benzodiazépines et leur risque de mésusage catalysent l’intérêt du traitement médicamenteux de l’anxiété et des troubles anxieux. Celui-ci pose plusieurs problèmes de nature différente. Celui du seuil pathologique de l’anxiété peut être abordé sur un plan psychologique dimensionnel. Dans une perspective plus large, il autorise également un questionnement médico-philosophique. Les stratégies thérapeutiques peuvent être définies suivant la durée du trouble et aussi par une approche catégorielle, nosologique. Cette dernière apparaît aujourd’hui comme la plus opérationnelle. Chaque trouble (trouble panique, anxiété généralisée, trouble obsessionnel-compulsif, phobie sociale, état de stress post-traumatique) répond préférentiellement à une molécule de classe et/ou de nature différente. De nombreux travaux attestent de ces différences de réponse. Cependant, d’autres facteurs influencent la prescription : durée possible de prescription, existence d’un trouble comorbide, caractéristiques individuelles du patient. L’amélioration de la prise en charge médicamenteuse suppose plusieurs approches complémentaires : meilleure définition clinique des troubles; étude des relations entre trouble caractérisé et personnalité; prise en compte de l’intensité et de la chronicité; recherche de paramètres biologiques.

Summary. Difficulties in anxiety treatment is emphasized by benzodiazepine use and misuse. Pathological anxiety threshold can be understood in a dimensional perspective or by large in philosophical considerations. Therapeutic guidelines can be defined on the length of disease or by a categorical and nosological approach. Actually, this one appears more efficient. Numerous studies lead to better selection of psychotropics for each disorders (panic disorder; general anxiety disorder; social phobia; obsessive-compulsive disorder; post-traumatic stress disorder). Therapeutic choice is under others conditions such as length of prescription, severity of the disorder; comorbidity; individual feature to patient. Improvement in therapeutic efficacy needs further studies. Some directions could be : better definition of disorders and their link with personality, appreciation of intensity and chronicity, biological parameters.

Mots clés : Anxiété, Psychotropes,Thérapeutique, Troubles anxieux -- Keywords : Anxiety, Anxiety disorders, Psychotropics, Therapeutic

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 272-279

Impacts médico-socio-économiques des troubles anxieux -- Economic burden of anxiety disorders : a review

P. MARTIN

Résumé. La mise en place de politiques de maîtrise budgétaire pour faire face à l’augmentation des dépenses de santé des pays industrialisés et aux déséquilibres des comptes sociaux pose le problème de la préservation de la qualité des soins et de la qualité de vie des patients. Seule une véritable évaluation médico-économique des différentes stratégies thérapeutiques possibles permettra de concilier les deux termes de cette équation, dont il est permis de se demander s’ils sont véritablement contradictoires. Ceci est particulièrement vrai dans le domaine du traitement des maladies mentales, en particulier les troubles anxieux. La maîtrise budgétaire ne saurait se résumer à une simple gestion de pénurie, les traitements les moins chers n’étant pas obligatoirement les plus rentables. D’autant qu’il est reconnu qu’en France, les patients ne sont pas traités suffisamment longtemps et à posologie suffisamment élevée. Dans ce contexte, de nouvelles stratégies thérapeutiques sont proposées : un diagnostic rigoureux (évitant à la fois la non-reconnaissance de la maladie et les dérives consuméristes) et un traitement optimal précoce et de durée suffisante des troubles anxieux constitueraient l’attitude la plus économique dans la prise en charge de cette pathologie. Il reste que l’évaluation médico-économique des troubles anxieux est difficile en raison de la complexité des paramètres impliqués. Assez développée dans les pays anglo-saxons, elle reste à mettre en place en France. L’impact du traitement des troubles anxieux sur la qualité de vie du patient pourrait même éventuellement avoir directement une traduction en termes économiques, si l’on tient compte du supplément de consommation médicale et du déficit induits par l’échec thérapeutique.

Summary. Budgetary control policies implemented in order to cope with the increase in health costs in industrialized countries and with the desequilibrium of the national health insurance accounts, give rise to the problem of preserving the quality of care and quality of life of the patients. Only health economic studies evaluating the possible different therapeutic strategies, will enable us to reconcile the 2 terms of the equation whose contradiction might be only apparent. This is particularly true for the treatment of psychiatric diseases, and especially anxiety. Budgetary control cannot be reduced to a simple management of penury, since the cheapest treatments are not necessarily the most profitable. In this context, new strategies are proposed : it is suggested that thorough diagnosis (avoiding both the non acknowledgement of the illness and the overconsumption of anxiolytic drugs) and early optimal treatment, of adequate duration, of the anxiety disorders might be the most economic attitude in the management of this pathology. On the other hand, the impact of the treatment of anxiety on the quality of life of the patient has a direct effect on costs if one considers the supplement to medical consumption and the social deficit induced by therapeutic failure in particular anxiety disorders. It remains that the evaluation of the health economics of anxiety is difficult, because of the complexity of the parameters involved. Though rather well developped in the UK and in North America, this evaluation still has to be introduced in France.

Keywords : Anxiety disorders, Direct and indirect costs, General anxiety disorders, Medico-economic studies, Quality of life.

L’Encéphale, vol. XXIV, n° III, Mai-Juin 1998, 280-296


Dernière mise à jour :

Dr Jean-Michel Thurin