Encéphale novembre-décembre 1997

G. MICHEL, S. CARTON, R. JOUVENT

Recherche de sensations et anhédonie dans les conduites de prise de risque. Etude d’une population de sauteurs à l’élastique (benji) - Sensation seeking and anhedonia in risk taking behaviors. Study in bengy jumpers

Résumé. Ce travail présente l’étude des relations entre la dimension Recherche de sensations (41) et l’anhédonie chez 80 sujets pratiquant le saut à l’élastique (benji). Nous avons examiné ces relations en fonction de certaines variables caractérisant la pratique du benji : le nombre de sauts à leur actif et leurs motivations à sauter (1. motivation personnelle, 2. motivation professionnelle - sujets travaillant dans le centre de sauts, 3. motivation liée à un effet de groupe - par exemple, sujets entraînés à leur premier saut par un groupe d’amis). Nous avons de plus évalué de façon globale la consommation de substances psychoactives. Tous les benjistes (hommes et femmes) obtiennent des scores significativement plus élevés sur la dimension Recherche de danger et d’aventures en comparaison avec l’échantillon témoin. Chez les hommes, plus les scores sur cette dimension sont élevés, moins leurs scores sur l’échelle d’anhédonie physique (8) sont forts. Chez les femmes, les dimensions Recherche d’expériences et Susceptibilité à l’ennui sont positivement corrélées avec l’anhédonie physique et leur nombre de sauts. De plus, les femmes avec une motivation personnelle sont celles qui obtiennent les scores les plus élevés sur les dimensions Recherche de danger et d’aventures et Susceptibilité à l’ennui. Ces résultats vont dans le sens de notre hypothèse de travail : ils suggèrent que, chez ce groupe de femmes, la recherche de sensations à travers la pratique du benji est plus particulièrement liée à une aversion pour la monotonie et semble sous-tendue par une plus faible capacité à prendre du plaisir avec des stimulations banales. Chez les hommes, la fréquence élevée de la pratique du benji est négativement reliée à la consommation de substances psychoactives, ce qui semble suggérer que le benji dans sa forme compulsive, rappelant une conduite addictive, est un mode spécifique et privilégié de recherche de stimulations.

- Summary. This study presents the investigation of the relations between sensation seeking (41) and anhedonia in 80 subjects who practise a risk taking sport, bengy jump. These relations were examined according to different variables which characterize the practice of bengy jump : the total number of previous jumps and the motivations to jump (1. personal motivation, 2. professional motivation - working in the jumping organization, and 3. group motivation - for example being leaded to jump by friends). We also assessed the use of psychoactive substances. All jumpers (men and women) have higher scores than control subjects in Thrill and adventure seeking dimension. In men, the more the subjects score on this dimension, the less they score on the physical anhedonia scale (8). In women, Experience Seeking and Boredom Susceptibility dimensions are positively correlated with physical anhedonia and with the number of jumps. Moreover, women with personal motivation are those who score the highest on Thrill and Adventure Seeking and Boredom Susceptibility dimensions. These results suggest that in women, sensation seeking through bengy jumping may be linked to a boredom tendency and driven by a need to compensate for a difficulty in experiencing emotions and sensations from common and mundane stimuli. In men, high frequency of bengy jumping was negatively related to the use of psychoactive substances, suggesting that bengy jump, in a compulsive form recalling an addictive behavior, is a specific and preferential way of stimulation seeking.

Keywords : Addiction, Anhedonia, Bengy jump, Flattening of affect, Risk taking behaviors, Sensation seeking.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 403-411

F. POCHARD, F. BELLIVIER, A.I. FAESSEL, P. SQUARA

Troubles anxieux et dépressifs dans les pathologies cardiovasculaires - Anxiety and depression in surgical cardiovascular diseases

Résumé. Les pathologies cardiovasculaires sont souvent associées à des troubles anxieux ou dépressifs. Cette comorbidité a été diversement étudiée dans la littérature internationale. Les troubles psychologiques sont, en effet, présentés soit comme des facteurs de risques, soit comme des facteurs aggravant le pronostic et l’évolutivité de la maladie coronarienne. L’analyse de la valeur pronostique de ces indices psychologiques est différente selon que l’on considère l’évolutivité de la maladie elle-même ou la survenue de complications après une chirurgie cardiaque et selon le type de cardiopathie (coronarienne ou valvulaire). Les relations complexes entre psychopathologie (dépression en particulier) et pathologie cardiovasculaire sont analysées. Des hypothèses physiopathologiques sont proposées pour rendre compte de ces interactions. Sont présentées enfin quelques applications pratiques des résultats de recherches récentes décrivant les troubles anxieux et surtout dépressifs comme étant des facteurs pronostiques indépendants.

- Summary. Cardiovascular diseases are often associated with anxiety and depression. The literature gives different interpretations of this comorbidity. Psychopathological factors have been successivly studied as risk factors, comorbid disorders and factors influencing the prognostic. The authors describe the incidence and the prevalence of anxiety and depression, first in coronary heart disease and secondly before cardiac surgery. The prognostic significance of these psychological factors is also reviewed. Physiopathological hypothesis and practical application in clinical practice are proposed.

Keywords : Anxiety, Cardiac surgery, Cardiovascular diseases, Depression.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 412-419

H. DUCQ, I.GUESDON, J.L.ROELANDT

Santé mentale des sans-abri. Revue critique de la littérature anglo-saxonne - Psychiatric morbidity of homeless persons : a critical review of anglo-saxon literature

Résumé. Alarmés par la présence massive de sans-abri arpentant les rues des grandes agglomérations depuis les années 80, des chercheurs étrangers ont tenté de démontrer scientifiquement la surmorbidité psychiatrique qu’ils pensaient les caractériser. Aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Australie et au Canada, une multitude d’études épidémiologiques ont ainsi vu le jour dans un contexte où ont rapidement sévi des débats passionnels sur les rôles respectifs des insuffisances socio-économiques et de la désinstitutionnalisation. Une recension de la littérature et une analyse des techniques épidémiologiques révèlent surtout l’absence de consensus sur la définition du « homeless », l’hétérogénéité des méthodes et des résultats, et la partialité des auteurs les plus extrêmes.

- Summary. Because the visibility of homeless persons congregating in urban areas has increased since the 1980’s, the relationship between homelessness and mental illness has caused more and more concern. A multitude of epidemiological surveys have been organized in Great Britain, Australia, Canada, and mainly in United States, and have attempted to evaluate scientifically the psychiatric morbidity of this population. This literature review reveals disparity of epidemiological methods in assessing the type and extent of mental illness among homeless adults. The lack of consensual definition of homelessness, the choice of different settings in which the research is organized (street, health centres, shelters), and the use of diverse instruments of psychiatric evaluation (diagnosis by clinician, by scale or by structured diagnostic interview) lead to a great disparity of the results. Thus, 1/3 of the homeless adults had prior history of psychiatric hospitalisation. Rates of psychosis range to 70 % and it is estimated that 4 % to 74 % of the homeless persons suffer from affective disorders. Substance abuse disorder remains a problem for a significant number of these individuals, with a high frequency of dual diagnosis. Such divergent data highlight the anglo-saxon debate between those who accuse desinstitutionnalisation as a reason of homelessness, and those who blame the socioeconomic background.

Keywords : Epidemiological research, Homelessness, Mental health, Review of literature.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 420-430

P.M.LLORCA, C.LANÇON, G.REINE

Psychoses, humeur, suicidalité et clozapine - Psychosis, mood, suicidality and clozapine

Résumé. Symptomatologies dépressive et schizophrénique sont souvent intriquées, au cours de l’évolution de la pathologie schizophrénique mais aussi dans le cadre des troubles schizoaffectifs. La fréquence de survenue de cette association est élevée et son principal risque évolutif est le suicide qui constitue la première cause de mortalité chez les schizophrènes jeunes. La clozapine, chef de file des neuroleptiques atypiques, démontre une efficacité réelle dans le cadre des schizophrénies résistantes; elle semble posséder une activité thymique tant chez les patients schizophrènes que chez les patients schizoaffectifs. Cette action est retrouvée dans la symptomatologie dépressive observée lors des phases aiguës, mais reste à démontrer dans le cadre des dépressions post-psychotiques. Par ailleurs elle permettrait une diminution de la potentialité suicidaire chez les patients schizophrènes, ce qui doit être considéré lors de l’évaluation bénéfice-risque d’un tel traitement.

- Summary. Depression and mood disorders are frequently associated. They can be described as a part of schizophrenic symptomatology, observed as post-psychotic depression, be a part of a schizoaffective disorder or be a consequence of neuroleptic treatment. Suicide is the main risk of evolution in young schizophrenics and is often associated to depression. Despite methodological difficulties, a few studies demonstrate the efficacy of clozapine, one of the first atypical antipsychotic, in the treatment of depressive symptomatology in schizophrenics and schizoaffectives. This action remains controversial in the treatment of post-psychotic depression. This drug also contribute to reduce suicidality in a sample of chronic schizophrenics in an open study. This action has to be considered when we evaluate the risk-benefit of the prescription of clozapine.

Keywords : Clozapine, Depression, Schizoaffective disorder, Suicidality.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 431-436

M.C. MAURI, L. FABIANO, S. BRAVIN, C. RICCI, G. INVERNIZZI

Les patients schizophrènes avant et après la séroconversion de l’infection de VIH : une étude de cas-contrôle - Schizophrenic patients before and after HIV infection : a case-control study

Résumé . L’étude porte sur 13 patients schizophrènes VIH positifs (premier groupe), âgés entre 23 et 60 ans, diagnostiqués comme schizophrènes (DSM IV), pendant la période de 4 semaines d’hospitalisation, en raison d’une exacerbation de la symptomatologie. Les patients ont été traités par l’halopéridol (3-15 mg/die par voie orale) et le diazépam (2,25 mg/die par voie orale). On a étudié le cadre clinique et les effets secondaires en administrant aux patients les tests suivants : BPRS, HRS-A, HRS-D, et DOTES, au début et après 2, 3, 4 semaines d’hospitalisation (Temps 5, 7, 8, 9).On a comparé ces évaluations cliniques avec celles qui dataient d’une hospitalisation précédant la séroconversion (aux Temps 0, 2, 3, 4), et avec un groupe de contrôle (deuxième groupe) constitué par des patients schizophrènes VIH négatifs (11 patients) suivis pendant 2 hospitalisations.En définitive l’infection VIH peut causer des altérations organiques du système nerveux central qui peuvent entraîner des conséquences psychopathologiques : une symptomatologie dépressive grave et une tolérance réduite des patients séroconvertis aux neuroleptiques.

- Summary. Thirteen HIV positive schizophrenic patients (Group 1), age ranging from 23 to 60 years, diagnosed as schizophrenics (DSM IV), were studied during a four week hospitalization period, due to an acute exacerbation phase. The patients were treated with haloperidol (3-15 mg/die p.o.) and diazepam (2-25 mg/die p.o.). Clinical picture and side-effects were assessed by BPRS, HRS-A, HRS-D, and DOTES, at admission and after 2, 3, 4 weeks of hospitalization period (Time 5, 7, 8, 9).Clinical evaluations were compared to a previous hospitalization period, before seroconversion (Time 0, 2, 3, 4), and to a control group (Group 2) of HIV negative schizophrenic patients (11 pb) followed as well during 2 periods of hospitalization. Our data seem to emphasize that the HIV infection could induce organic alterations in the CNS which might cause psychopathological consequences : significatly more severe depressive symptomatology and a reduction of tolerability to neuroleptics in the seroconverted patients’ group.

Keywords : Depression, HIV infection, Neuroleptic tolerability, Schizophrenia.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 437-441

C. MERIC, E. PHAM, S. CHERY-CROZE

Validation d’une traduction française du questionnaire «Mesure de la détresse liée à l’acouphène» (Tinnitus Reaction Questionnaire, Wilson et al. 1991) - Validation of a French translation of the « Tinnitus Reaction Questionnaire (TRQ)» (Wilson et al., 1991)

Résumé. Le « Tinnitus Reaction Questionnaire » de Wilson et al., validé en Australie (11), comprend 26 items permettant de calculer un score évaluant la détresse psychologique liée à la présence de l’acouphène. Après traduction, il a été soumis à un échantillon de 173 patients consultant pour acouphènes en même temps qu’une version abrégée du MMPI (Mini-Mult) (7) permettant le calcul de scores à diverses échelles psychopathologiques. La validité interne a été démontrée par de fortes corrélations, d’une part de chaque item avec le score total (coefficient r de Pearson compris entre 0,33 et 0,87; p < 0,0001), d’autre part des facteurs internes du questionnaire (0,58 <= r <= 0,81, p < 0,0001) entre eux. Un test a de Cronbach permet de confirmer la validité interne générale du questionnaire (a = 0,94). Les facteurs externes utilisés pour la validation concourante sont les scores aux échelles dépression, psychasthénie et anxiété du Mini-Mult. Elle a été déterminée par de fortes corrélations entre les scores obtenus aux échelles dépression et psychasthénie et (1) chaque item (sauf les items 5 et 20), (2) chaque facteur interne du questionnaire, et (3) le score total au questionnaire, démontrées à l’aide de deux tests statistiques : l’ANOVA à un facteur et un calcul de régression linéaire simple. Par ailleurs, les résultats obtenus avec l’indice d’anxiété montrent une corrélation avec le facteur 3 du TRQ et avec seulement quelques items appartenant, pour la plupart, au facteur 3. L’utilisation de la version française de ce questionnaire est donc possible, en tenant toutefois compte de la non-pertinence des items 5 et 20 pour la mesure de la détresse psychologique des acouphéniques dans notre pays.

- Summary. The present study proposes a validation of a french translation of the TRQ initially published by Wilson et al. (11), for evaluating the psychological distress of tinnitus sufferers. The 26 items translated into french were used on a sample of 173 tinnitus sufferers, who also filled out the Mini-Mult, a short version of the MMPI proposed by Kincannon (7). Internal validity was demonstrated by strong correlations (i) between each item (except items 5 and 20) and total TRQ score (0.33 <= r <= 0.87, p < 0.0001), (ii) between each internal TRQ factor (0.58 < r < 0.81, p < 0.0001) and the others. Cronbach’s a test also showed the questionnaire to have a good internal validity (a = 0.94). The external factors used for testing concurrent validity were the scores on depression, psychaesthenia and anxiety Mini-Mult scales. The strong correlations (one factor ANOVA and simple linear regression tests) between scores on depression and psychaesthenia scales and (1) each TRQ item, (2) each TRQ factor, (3) total TRQ scores, confirmed concurrent validity. Scores obtained on anxiety index showed high correlations only with total TRQ score, factor 3 score and some TRQ items (most of them included in factor 3). The internal and concurrent validities of the French version of the TRQ justify the use of this questionnaire, with the reserve that items 5 and 20 appeared irrelevant for the measuring of tinnitus distress in French-speaking countries. Such a questionnaire should improve our knowledge of tinnitus’ life-impact and enable detection of patients whose psychological distress necessitates rapid intervention.

Keywords : Psychological distress, Reaction, Tinnitus.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 442-446

F.C. BLAIS, L. GENDRON, V. MIMEAULT, C.M. MORIN

Evaluation de l’insomnie : validation de trois questionnaires - Assessment of insomnia : validation of three questionnaires

Résumé. L’insomnie est un problème de santé très prévalent qui diminue la qualité de vie de l’individu et entraîne des coûts importants au niveau social et économique.Il n’existe aucun instrument valide en français pour évaluer les différents aspects reliés aux difficultés de sommeil. Deux études visent à évaluer la traduction française de trois questionnaires portant sur l’insomnie. L’Index de la Qualité du Sommeil de Pittsburgh (IQSP), l’Index de Sévérité de l’Insomnie (ISI) et l’échelle de Croyances et Attitudes concernant le Sommeil (CAS) sont retenus sur la base de leur utilité clinique.Une première étude établit la traduction inférentielle des versions préliminaires par l’intermédiaire de six juges experts.L’équivalence empirique des versions originales et traduites est confirmée auprès d’un échantillon bilingue. La deuxième étude évalue la fidélité et la validité convergente des instruments auprès d’un échantillon francophone.Les données démontrent une bonne cohérence interne des instruments ainsi qu’une stabilité temporelle satisfaisante pour une période de test-retest de deux semaines.Les données sur la validité convergente sont adéquates.Bien que des études ultérieures soient nécessaires pour confirmer les qualités psychométriques, ces questionnaires demeurent tout de même de bons instruments pour évaluer l’insomnie soit dans un contexte clinique soit de recherche.

- Summary. Insomnia is a widespread problem impairing daytime functioning and carrying important social and economic costs.No valid instrument exists in French to assess sleep difficulties.Two studies assess the French translation of three insomnia measures.The Pittsburgh Sleep Quality Index (PSQI), the Sleep Impairment Rating Scales (SIRS) and the Beliefs and Attitudes about Sleep (BAS) questionnaires were selected according to their clinical utility. Study one established the inferential translation of the preliminary versions with six expert judges. The empirical equivalence of the original and translated versions were confirmed with bilingual nonclinical sample. Study two assessed the fidelity and convergent validity of these instruments with a nonclinical French sample. The results showed adequate internal consistency ; test-retest fidelity for a two-week interval was acceptable. The findings on convergent validity are also appropriate. While future research is necessary to confirm their psychometric properties, these questionnaires are good measures to assess insomnia in a research or clinical context.

Keywords : Assessment, Insomnia, Psychometric properties, Sleep disorders.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 447-453

G. LOAS, S. DUBAL, P. PEROT, F. TIREL, P. NOWACZKOWSKI, A. PIERSON

Etude de validation de la version française de l’échelle de plaisir de Snaith et Hamilton (Snaith-Hamilton pleasure scale, SHAPS, Snaith et al. 1995). Détermination des paramètres métrologiques chez 208 sujets sains et chez 103 malades hospitalisés présentant une dépression ou une schizophrénie - Study of the validity and reliability of the French version of the Snaith-Hamilton pleasure scale (SHAPS) in 208 healthy subjects and 103 schizophrenics and depressives

Résumé. En 1995 Snaith et al. ont proposé une nouvelle échelle d’évaluation de l’anhédonie, l’échelle de plaisir de Snaith et Hamilton (SHAPS) comprenant 14 items. Après avoir traduit cette échelle en français nous en avons étudié les paramètres métrologiques chez deux groupes de sujets, 208 sujets sains et 103 malades hospitalisés répondant aux critères RDC de dépression ou de schizophrénie. Les résultats ont montré une validité interne satisfaisante (coefficient KR 20 et corrélations items/score total) notamment chez les sujets malades. La validité concourante (par rapport à l’échelle révisée d’anhédonie physique de Chapman et Chapman, PAS) et la validité prédictive étaient correctes. L’âge et le sex ratio n’exercent pas d’influence sur le score à cette échelle. L’intérêt de la SHAPS est discuté notamment par rapport à la PAS.

- Summary. The aim of the study is to explore the validity and the reliability of the French version of the SHAPS in two groups of subjects. 208 healthy students and 103 inpatients meeting the RDC criteria for schizophrenia or depression filled out the French versions of the SHAPS and the revised Physical Anhedonia Scale of Chapman and Chapman. The internal consistency of the SHAPS was measured in each group using first the Kuder Richardson coefficient (KR 20) and secondly by calculating the correlation coefficient (point biserial) between the items and the total score. The concurrent validity was studied using the Pearson correlation coefficient between the SHAPS and the PAS in each group. The predictive validity was determined by the comparison of the SHAPS score between the two groups. The reliability was studied using a test-retest in a sub-group (n = 32) extracted of the control group. The values of the KR 20 in the healthy and psychiatric groups were respectively 0.47 and 0.80. The mean of the correlations between the items and the total score were respectively 0.35 and 0.52. The values of the correlations between the SHAPS and the PAS were respectively in the normal and psychiatric groups 0.39 (p < 0.001) and 0.34 (p < 0.001). Psychiatric subjects had a higher score (m = 2.33, sd = 2.68) on the SHAPS than the normals (m = 0.89, sd = 1.18) [F (1,303) = 12.26, p = 0.0005]. The test-retest showed a correlation of 0.56 (p < 0.01 ) between the two passations of the SHAPS. The metrological parameters of the SHAPS were discussed as well as the utility of that scale compared to the PAS.

Keywords : Anhedonia, Pleasure, Rating scale, Reliability, Validity.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 454-458

Y. SARFATI, F. CHAUCHOT, A. GALINOWSKI

Une paraphrénie méta-processus d’une maladie maniaco-dépressive - Case-report = paraphrenia

Résumé. Dans cet article, nous discutons, à partir d’un cas clinique illustratif, des liens entre paraphrénie et troubles thymiques. Kraepelin avait noté une parenté entre paraphrénie et folie maniaco-dépressive, et notamment entre manie et paraphrénie confabulante. Par la suite, l’Ecole allemande a surtout souligné les similitudes symptomatiques et évolutives des deux entités. L’Ecole française a, quant à elle, plus insisté sur l’intervention possible des accès thymiques dans la formation du syndrome paraphrénique : la paraphrénie y est envisagée comme une évolution potentielle de troubles psychotiques antérieurs. Si des cas de paraphrénies post-schizophréniques ont déjà été rapportés, l’exemple d’une paraphrénie constituée à partir d’un trouble bipolaire de l’humeur paraît plus rare. Un tel cas est ici présenté et discuté, appuyant la conception de la maladie telle qu’elle est rapportée dans la nosographie traditionnelle française.

- Summary. A typical case report exemplifies existing links between paraphrenia and affective disorders. Kraepelin noted similarities between paraphrenia and manic-depressive illness, particularly between mania and paraphrenia confabulans. Thereafter, the German school has insisted on similarities of symptoms and course of the two entities. The French school, on the contrary, has insisted on the instrumental role of affective disorder in the development of paraphrenia : paraphrenia is considered as a potential evolution of primary psychotic disorders. If cases of post-schizophrenic paraphrenia have been reported, the development of paraphrenia on a background of bipolar disorder seems rarer. Such a case is presented and discussed, supporting the concept and its mechanisms as illustrated by French psychiatrists.

Keywords : Chronic delusional disorder, Manic-depressive illness, Paraphrenia.

L’Encéphale, vol XXIII, n° VI, Novembre-Décembre,1997, 459-462