Enjeux et problématiques de la presse scientifique sur Internet

Ghislaine CHARTRON*

Depuis le début des années 90, les revues scientifiques et les acteurs associés développent, testent et, aujourd'hui, commercialisent l'accès aux revues sous forme numérique. L'essor d'Internet, la banalisation de son accès et la facilité de distribution associée en font aujourd'hui un support privilégié, devançant souvent le CD-Rom plutôt assimilé à un support de stockage local limité.

L'édition scientifique médicale est caractérisée par un grand nombre de revues et d'éditeurs avec des statuts très différents (éditeurs commerciaux, presses universitaires, sociétés savantes très spécialisées...). L'étude de l'offre des revues en ligne montre en fait :

- un engagement rapide des « grands éditeurs » commerciaux : Elsevier, Academic Press, Springer, Blackwell-science... avec des modèles économiques visant à préserver leur marché.

- un engagement plus lent chez les éditeurs plus modestes, recherchant des partenaires pour le passage à l'électronique (partenaire tel que HigWirePress par exemple, menant le projet de mettre en ligne un nombre important de revues ayant un taux élevé de citations dans le domaine biomédical).

- une offre émergente d'agrégateurs d'éditeurs avec, manifestement, des difficultés réelles de négociations (Agences d'abonnements, Ovid, Adonis, HighwirePress).

L'étude de deux corpus différents a montré un nombre important de revues en ligne.

- 58% (en mars 97) pour les revues des 10 éditeurs « majeurs » (en terme de nombre de revues souscrites) à la Bibilothèque InterUniversitaite de Médecine de Paris.

- 66% (septembre 97) des 30 premières revues les plus citées en médecine selon les critères de l'ISI.

Les modèles économiques pour la vente des revues électroniques sont nombreux et différents selon les revues, ce qui conduit à une certaine confusion et nécessite une étude cas par cas. Il en va de même pour les contraintes juridiques.L'accès en ligne est très souvent couplé à la vente du papier mais peut aussi, pour certaines revues, être commercialisé de façon dissociée et moins chère que la version papier (par exemple, Journal of Biological Chemistry). La maturité de certaines offres pousse aujourd'hui à se poser de vraies questions en terme de politique d'acquisition pour une bibliothèque de recherche.

La mise en ligne des revues s'accompagne de nouveaux services pour les utilisateurs, notamment l'accès gratuit aux informations bibliographiques, les liens entres articles-bibliographies-banques de séquences, la vente de l'article à l'unité délivré immédiatement. Les enjeux se situent aussi au niveau de la vitesse de diffusion, de la gestion facilitée des revues très productives, de l'accès démultiplié et des politiques d'accès généralisé qui peuvent y être associées. Cependant, le changement de support ne peut se faire sans consultation des utilisateurs et sans une garantie suffisante sur l'accès rétrospectif nécessaire.

Enfin, face à l'émergence d'autres modes d'échanges scientifiques et techniques sur Internet (bases de prépublications, banques factuelles de dépôt des résultats, collaboratoires de travail, ...), on peut aussi se demander si la revue n'est pas un modèle de communication scientifique obsolète ? Si l'adaptation rapide de l'offre à l'électronique n'est pas l'expression d'une crainte de perte de marché de la part des éditeurs en place ?

En fait, on remarque plutôt une consolidation du rôle des revues (complémentarité développée entre revues-banques de séquences-banques bibliographiques, pas de bases de prépublications importantes). Dans le domaine bio-médical il semble qu'il n'y ait pas de révolution majeure dans le système de communication de l'information scientifique validée mais plutôt de nombreuses évolutions des services associés et certaines renégociations des rôles des différents acteurs.

*URFIST de Paris - École Nationale des Chartes




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