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Accès au Second Symposium International de "Psychiatrie et Internet" (25 et 26 avril 2002)
Les 5 et 6 avril 2001, s'est tenu à Munich le "Premier Symposium International Internet et Psychiatrie : bénéfices, risque et perspectives" .
Dans la célèbre clinique universitaire, où ont excercé et enseigné Kraepelin et Alzheimer, une quinzaine d'orateurs venus de pays différents se sont succédés pour présenter l'usage d'Internet par les professionnels et les patients en termes de bénéfices et de risques, dans des contrextes culturels, économiques et réglementaires qui peuvent être différents.
- Le Professeur Ulrich Hegerl qui nous a chaleureusement accueillis avec ses collaborateurs, les Docteurs Patrick Bussfeld et Oliver Seemann, a ouvert le symposium sur la prise de conscience accrue, au cours des dernières années, des possibilités et des risques d'Internet pour les patients, les professionnels de la médecine et les systèmes de soin.
Un accès simple à Internet et une offre large concernant des thèmes psychiatriques variés a soutenu une culture vivante d'échanges d'information entre les patients et les professionnels. Comme exemple de bénéfice pour les patients, il y a une meilleure mise à disposition d'informations concernant des troubles spécifiques et leur traitement, l'aide d'une meilleure orientation dans les systèmes de soin ou la possibilité d'interactions directes médecin patient "Interrogez le docteur via Internet" . Comme conséquence, la position des patients, de leurs familles et de leurs groupes de soutien va se renforcer dans le futur. Les exemples de risques concernent les dangers d'une information peu sérieuse, les problèmes de confidentialité et les formes pathologiques d'usage d'Internet ("Internet addiction"), ou les possibles influences négatives de la relation médecin-patient en utilisant Internet comme le seul moyen de communication.
Internet va acquérir un intérêt particulier pour les psychiatres parce que les bénéfices et les risques peuvent être plus prononcés dans cette spécialité que dans les autres champs de la médecine. A cause de la stigmatisation des troubles psychiatriques, beaucoup de patients et leurs proches utilisent Internet comme le premier pas pour obtenir une information ou même pour engager un premier contact avec un médecin. De plus, les problèmes de communication interpersonnelle qui sont souvent associés à des troubles psychiatriques peuvent causer des difficultés pour le patient de trouver un avis médical. Pour ce groupe de patients, la communication via Internet peut devenir un solide support. L'évaluation scientifique du développement actuel est nécessaire pour assurer la qualité scientifique de l'information médicale en s'appuyant sur les critères de l'Evidence based medecine et en évaluant les nouveaux outils potentiels de diagnostic et de thérapeutique offerts par Internet. De plus, il y a un besoin d'étudier l'impact de l'usage intensif d'Internet sur la santé mentale des utilisateurs
sites : http://www.med.uni-muenchen.de/psywifo et http://www.kompetenznetz-depression.de
- Robert Kennedy (USA) a tout d'abord présenté l'évolution des échanges scientifiques. Avant Internet ceux-ci utilisaient les livres, les journaux, les congrès et les conférences. Les possibilités de collaboration étaient souvent limitées par la possibilité de voyager et de communiquer au-delà des distances. Tout en restant utiles aujourd'hui ces méthodes d'information et d'échanges se trouvent complètement transformées par la capacité d'immédiateté et de perspective globale que permet Internet. Dans le monde de la santé et particulièrement en médecine et en psychiatrie, la prolifération de l'information en ligne a transformé la façon dont les médecins et les professionnels de la santé l'utilisent. La possibilité d'une information complète en ligne est une force dynamique qui va se renforcer dans les décades à venir. L'édition des journaux est en pleine transformation et les possibilités d'Internet (rapidité, facilité d'emploi, nouvelles modalités de combiner l'inform ation) constituent des enjeux pour les éditeurs traditionnels. Beaucoup de nouveaux journaux sont seulement des e-journaux. Les relations entre le patient et son médecin se modifient à partir de cette information disponible en ligne jusqu'à une apparence d'inversion au savoir (les patients qui viennent en consultation avec les pages qu'ils ont imprimées à partir d'Internet concernant leur affection). La fin de son Intervention a été consacrée à la présentation de son site Medscape et l'outil pertinent qu'il représente "On-line Information in Psychiatry and Healthcare". En faire un résumé n'est pas raisonnable et je vous invite à vous y rendre http://psychiatry.medscape.com/Home/Topics/psychiatry/psychiatry.html
Sur les mêmes bases que Psydoc-France mais avec un budget sans commune mesure, Medscape peut être consulté pour différentes informations relevant de la psychiatrie, aussi bien les publications, forums, les collaborations avec d'autres professionnels, etc.
C'est un important vecteur de la culture américaine mais également un moyen d'évaluation de notre propre culture (différence et ressemblance).
- Le Docteur Jean-Michel Thurin a ensuite présenté Psydoc-France, le site de la Fédération Française de Psychiatrie http://psydoc-fr.broca.inserm.fr. Après avoir rappelé les objectifs initiaux (toujours actuels) de Psydoc-France : facilliter l'acès aux différentes publications françaises et réduire les barrières existantes entre les différents exercices (public, universitaire et privé) et approches (psychodynamique, biologique, comportementale, etc) ; engager un mouvement pour la recherche clinique ; promouvoir la culture psychiatrique française sur Internet et permettre des liens avec les confrères étrangers, il a présenté les nouveaux enjeux qui se sont exprimés au cours des trois dernières années : formation médicale continue, organisation d'un champ de la santé mentale allant largement au delà de celui de la psychiatrie et impliquant davantage les médecins généralistes et le champ médico-social, renforcement du rôle des usagers et des familles, intervention croissante de la santé publique et de la gestion économique du système de soin. A l'interface entre pratique clinique, données concernant l'efficacité des soins, santé publique et recherche d'information et d'échanges des usagers, s'est constitué un nouvel espace, la cybermédecine, où se cherche et s'inscrit un système de santé en pleine mouvance.
La façon dont le site, dans son organisation (dynamique et "régionalisée") et ses réalisations, vient répondre à ce mouvement (qu'atteste une très forte fréquentation : 6000 usagers chaque jour), ainsi que les notions très importantes validité de l'information et de son accessibilité par le plus grand nombre des internautes étaient bien entendu au coeur de son intervention. Accès communication
Dans la très belle pièce où se sont déroulées ces journées un public international, très attentif.
Après la pause Patrick Bussfeld a introduit les orateurs.
- Le Docteur Hans-Bernd Brosius (LMU München) a présenté les aspects méthodologiques d'études sur internet. Internet est devenu à la fois un intéressant thème de de recherche générale et un outil pour conduire une recherche sur différents thèmes.Comme thème, les chercheurs sont intéressés de savoir qui utilise Internet, quand et où, ce qui en est attendu, quels services et avec quels effets. Ces questions, basées sur la recherche classique sur les usages et les effets des outis de communicaton peuvent être approchées par différents outils méthodologiques de recherche générale. Les exemples les plus significatifs en Allemagne sont W3B (une méthodologie complètement basée sur Internet), l'étude sur la communication en ligne ZRD-ZDF et la GfK.
Comme outil, Internet a été utilisé en étudiant les opinions et les comportements des personnes qui l'utilisent.
Les questionnaires sur Internet sont simples à envoyer, bon marché et peuvent utiliser tous les avantages d'une présentation multi média des questions. L'introduction des données et leur analyse sont également simples. Cependant il reste des difficultés concernant la qualité des méthodes d'échantillonnage, le nombre des retours et la qualité de leur réponse. Plusieurs exemples d'études ont été présentés.http://www.ifkw.uni-muenchen.de
- Bernd-Rüdiger Kern (Faculté de Droit - University of Leipzig) sous le titre "Questions juridiques posées par le conseil sur Internet " a traité des questions juridiques les plus importantes concernant l'avis médical ou psychologique via internet. En premier lieu, il existe des problèmes avec la loi concernant les professionnels médecins. Les textes actuels "Musterberufordnung für rtze ne permettent pas de telles sortes d'avis. Des questions concernant les traitements médicaux standards sont en étroite relation avec ce sujet. De là, on peut se demander si ces conseils doivent être reconnus par les assureurs, si les données sont suffisamment protégés et si les secrets de la personne demandant un avis sont respectés. Accès communication
- Roland Hartig (Chief Editor Lichtblick-Online - Germany) propose un service d'information "newsletter". S'appuyant sur l'expérience d'un journal destiné aux patients et à leur entourage qui recherchent de l'aide pour faire face à la vie de tous les jours, il a produit une version internet de cette publication. On y trouve un carnet d'adresses pour créer des contacts à partir de différentes expériences liées à la psychiatrie. En outre, il existe maintenant un nouvel espace pour des initiatives contre la stigmatisation. Des savoirs faire et des aides particulières sont en préparation s'appuyant sur une information pertinente des personnes concernées, de leur famille et des professionnels. A coté de cela des campagnes variées contre la psychiatrie sur Internet ne doivent pas être sous estimées et même sérieusement prises en compte quand on veut situer l'impact d'une information spécifique sur ce vecteur.http://www.lichtblick-newsletter.de
- Le Professeur Lucian Alexandrescu (Romania) a dirigé son intervention sur le passé, le présent et le futur de l'ordinateur et d'internet dans les pays de l'Est. Au début des années 70, l'informatique a connu en Roumanie son "âge d'or". Les meilleurs élèves des lycées venaient à la faculté d'informatique. Un programme ambitieux d'informatisation de l'économie nationale fut engagé (avec des fonds d'Etat). Au début des années 80 "l'âge d'or" commença à se réduire. Les fonds du programme d'informatisation furent interrompus, l'explosion des PC dans le monde développé fut manquée. Au début des années 90, les seuls ordinateurs accessibles étaient des clônes de ZX Sinclair fabriqués en Roumanie et très chers. L'informatique était devenue un Hobby ou un intéret presque suspect dans un cercle plus ou moins élitiste et esotérique. Il n'y avait aucune liaison entre ordinateurs. Dans le champ médical, l'informatique était très rudimentaire et utilisée pour des tâches très spécifiques. Dans le début des années 90 de vrais PC sont apparus en Roumanie le plus souvent sous la forme de donation. Il n'étaient pas au top de la technologie. Toutefois l'adaptation des spécialistes à ces nouvelles machines a éré incroyablement rapide. Les nouveaux logiciels sont accessibles avec le problème toutefois de leur coût. Dans le champ médical, les ordinateurs sont utilisés pour presque n'importe quoi, du paiement des salariés à l'imagerie médicale la plus sophistiquée et aux bases de données. Environ 600 000 personnes (sur 30 000000 habitants) ont un accès à internet. De façon générale, les principaux problèmes des psychiatres (et des médecins) en Roumanie sont : le coût de l'accès téléphonique à Internet, le contenu des sites psychiatriques roumains, le manque général de spécificités des sites psychiatriques, le peu d'intéret des psychiatres pour des approches réputées techniques ou mathématiques.
On voit sur cette photo le Pr Alexandrescu (à droite).
- Franco Fracella a présenté un site médical organisé par un ensemble de laboratoires. http://www.pharma.de.novartis.com
- David S. Jago (England) a ensuite présenté le site du Royal college of Psychiatrists créé depuis mars 1996. Il est en constant développement comme chacun des sites que nous avons découvert. Il propose également de multiples domaines listés. Il vise à être accessible à la fois par les professionnels et les usagers. Les problèmes à résoudre pour développer une présentation et une approche satisfaisantes sont considérables. Il vient de subir une reconstruction complète à en se centrant plutôt sur les besoins et les attentes exprimés par les usagers que sur les préoccupations des différentes parties du collège qui participent à la réalisation de son contenu. http://www.rcpsych.ac.uk
- Le Docteur Michaël Stein (Germany) a présenté une expériences structurée d'"Aide sur Internet". Partant du fait que beaucoup de patients déprimés recherchent sur Internet des expériences similaires, ils leur est proposé un modèle "info-community" organisé sur le mode d'un espace virtuel où les personnes déprimées peuvent trouver des informations sur la dépression, discuter de leurs problèmes, poser des questions à des experts ou parler de leur histoire. http://www.netdoktor.de
- Après cette journée intense, il faisait bon se retrouver autour d'un verre et poursuivre la discussion,
beaucoup de discussion...
- Le lendemain Monsieur Bernhard Otupal (Home Office, Government Austria) a posé la question de la prévention du suicide sur Internet. En effet, il existe des sites présentant sous un jour favorable le suicide et donnant les moyens d'y parvenir. Dans certains cas même de petites annonces proposent des suicides collectifs. Des confessions-appels dans des listes de diffusion posent la question de la possibilité d'une intervention préventive et de ses modalités. Un service du Ministère de l'intérieur autrichien s'occupe de ces questions et a présenté quelques interventions réussies mais également beaucoup de difficultés rencontrées.
- Le Docteur Oliver Seemann (LMU München) a présenté une intéressante recherche à propos de la réalité d'un usage pathologique d'internet, question très débattue ces derniers temps. Cette étude fait apparaître que l'"internet-addiction" ne peut être considéré comme un syndrome spécifique mais que la fréquentation assidue d'internet s'inscrit plutôt comme un symptôme qui est rencontré dans toutes les pathologies psychiatriques majeures allant des troubles anxio-depressifs à la schizophrénie en passant par les TOC. La visite des sites concernant le traitement des addictions internet pose la question de leur crédibilité. D'autres études sont attendues. http://www.kompetenznetz-depression.de et http://www.psychiater.org
- Gunther Eysenbach (University of Heidelberg - Germany) a exposé le problème de la qualité de l'information médicale sur Internet. L'information en santé est d'une extrême variété allant de l'information qualifiée, l'information basée sur l'évidence, à l'information frauduleuse motivée par le commercial, mal équilibrée ou mensongère. Pour les patients et les usagers, et même pour les professionnels de santé, il est difficile de juger de la validité de l'information électronique. La première partie de la communication a présenté quelques exemples concernant la qualité de l'information de santé sur le web ; la seconde partie a introduit un nouveau projet européen MedCERTAIN (MEDpics CErtification and Rating of Trustworthy and Assessed health Information on the Net) créé pour rendre l'utilisation d'une information de santé fiable plus effective. MedCERTAIN établira un système de metadonnées et de label de confiance pour une information de santé évaluée qui permettra ainsi aux utilisateurs de selectionner leur information parmi des promoteurs de confiance et/ou évaluée par des experts appartenant à un tiers indépendant. MedCERTAIN est une infrastructure technique et organisationnelle pour une évaluation décentralisée, elle ne sera donc pas une "autorité de qualité" centrale. Elle sera basée sur la coopération d'experts respectés et d'organisations médicales qui évaluent, accréditent ou recommandent de l'information de santé sur Internet. http://www.medcertain.org
- Christoph Wölk (University of Osnabrük - Germany) a présenté un programme pour un traitement en ligne de troubles obsessionnels compulsifs. Le patient est invité à choisir son trouble puis à contrôler le temps qui s'écoule entre le premier acte compulsif, le second, etc. Un traitement comportemental qu, à la limite, ne nécessiterait pas de thérapeute ! (photo à gauche)
http://www.psycho.uni-osnabrueck.de/
- Alfred Lange (University of Amsterdam - Netherlands) présente lui aussi un protocole pour un traitement en ligne de troubles psychiques. Psychologue comportemental également, il propose un traitement de psycho éducation, de tests basés sur une structure par l'écriture. (photo à droite)
http://www.interapy.nl
- Pour clore ces journées particulièrement intéressantes Ulrich Hegerl a invité les participants à débattre, à donner leur point de vue. Parmi les grandes questions proposées, celle des traitements en ligne et de leur possibilité en fonction des règlements et des cultures des différents pays, et celle de l'évaluationdes risques et des bénéfices de l'information de santé sur internet.
Au total, 10 grands thèmes auront été abordés durant ces deux journées : Information des professionnels ; Formation continue ; Information des usagers et Education à la santé ; Aide en ligne ; Traitements ; Études et recherches sur Internet ; Réglementations ; Situations en Europe et aux USA ; Qualité de l'information ; Bénéfices et risques.
- Dans les vitrines où une partie de l'histoire de la psychiatrie est exposée nous n'avons pas resisté à ramener quelques souvenirs : Kraepelin en visite, Kraepelin et Alzheimer en bateau, les notes d'Alzheimer et la première patiente à partir de laquelle il a fait sa découverte puis les plaquettes s'y rapportant.
Dernière mise à jour : mercredi 11 avril 2001 21:39:52
Monique Thurin