- approche générale
Plusieurs rapports émanant d'organismes et de domaines professionnels divers ont été ainsi réunis et mis en perspective . Parallèlement, une réflexion a été menée sur le fond, avec consultation de 15 experts et synthèse des publications françaises qui concernaient la recherche en psychiatrie. Ces publications, émanant de cliniciens, en soulignaient essentiellement la difficulté - voire l'impossibilité - à partir des quatre arguments principaux suivants :
Cette analyse a donné un premier rapport qui a abordé chacun de ces points ; il a présenté aussi un certain nombre de réflexions et de propositions, émanant notamment des experts, qui à partir de leur expérience, suggéraient d'aller au delà d'une position de démission et d'entrer dans l'action, en s'appuyant sur les bases suivantes :
- réalité existante
A ces rapports et principes généraux, a été ensuite associé un recensement précis des activités et des structures de recherche , qui a été présenté au cours de la première Journée d'interface, à laquelle participait le Directeur Général de l'INSERM, Ph. Lazar. A peu près à la même période, S. Veil, alors Ministre d'Etat des Affaires Sociales a souligné l'importance que donnait le Politique à la recherche en psychiatrie.
Partant de ces éléments, le CA de la Fédération, le Comité d'Interface INSERM/FFP et la Mission Veil ont analysé les principaux problèmes qui étaient posés et recherché des solutions pragmatiques pour les résoudre
- Les problèmes se situaient à 4 niveaux :
- Nous avons recherché pour chacun de ces problèmes quelles pouvaient être les solutions pragmatiques correspondantes
1 - Concernant les moyens, il est apparu que :
Notre réflexion a alors été que la situation serait bloquée tant qu'un point critique de recherche, c'est à dire un nombre non négligeable de personnes y participant de façon régulière ne serait pas atteint. Comment y parvenir ?
Sans revenir sur le niveau de qualité qui devait être exigé d'un projet de recherche, l'INSERM s'est engagé à apporter au développement de la recherche en psychiatrie une attention particulière et à soutenir un certain nombre d'initiatives logistiques concernant l'organisation de réunions d'interface, la présence de psychiatres dans les commissions, l'attention des commissions sur les problèmes de psychiatrie, le soutien méthodologique, l'information sur les possibilités existantes, le développement de relations avec d'autres spécialités ..
Une incitation des cliniciens à << se lancer >>, concomitante avec le démarrage du PHRC d'une part, l'utilisation optimale des CNEP INSERM d'autre part ont permis, qu'au cours de la deuxième année, une trentaine de projets puissent être financés. Par contre, et cela reste un très gros problème, la possibilité d'institutionnaliser un "temps recherche" pour les cliniciens n'a pas été acquise .. Les CNEP ont malheureusement disparu aujourd'hui et nous le regrettons car ils permettaient, à partir d'un petit budget, de monter des recherches originales et très adaptées au champ clinique. Restent actuellement essentiellement les Réseaux qui donnent des moyens d'organisation mais pas de fonds propres pour les recherches elles-mêmes. Quand au montage des Unités ou des CRI , ils demandent un niveau très élaboré qui ne les réserve qu'à des équipes déjà professionnelles.
2 - L'information, la présentation, la mise en relation et la publication des recherches ont constitué notre second axe prioritaire.
Pour cela,
3 - L'absence de formation des cliniciens à la méthodologie était et reste évidemment un problème majeur.
Cette question a été abordée de plusieurs façons : recensement des DEA et DU ; présentation dans "Pour la recherche" des notions principales et d'exemples de recherches dans différents domaines ; organisation de réunions scientifiques concernant les différents courants d'approche de la psychiatrie ; participation des cliniciens à des réseaux de recherche.
En fait, il y a ici encore un déficit majeur d'infrastructure car la formation à la recherche ne peut se concevoir en dehors d'une démarche pratique, encadrée par des personnes qui connaissent non seulement la procédure générale mais un certain nombre d'outils qui peuvent servir de point de départ ou d'auxiliaires pour la mise en place de la méthodologie. Nous en avons personnellement fait l'expérience positive dans un domaine compliqué et qualitatif, celui de l'évaluation des psychothérapies et de l'étude des fonctions du rêve en psychopathologie .
Cette action de formation demande donc à être soutenue et renforcée, d'autant que ses retombées vont bien au delà du domaine propre de la recherche planifiée. Nous espérons beaucoup que la FMC, devenue obligatoire y contribuera, notamment en permettant d'organiser de véritables "écoles d'été" auxquelles pourraient participer des seniors ou des consultants.
4 - Ouvertures internationale et interdisciplinaire.
Cette démarche de recensement, d'information, d'incitation, de soutien des activités de recherche, de formation et d'ouverture peuvent être retrouvés sur le serveur internet FFP/INSERM "Psydoc-fr" http: //Psydoc-fr. Broca.inserm.fr, . Sa mise en place a été une des priorités pour l'année 1996, parce qu'elle nous semble une structure très favorable à la formation, à la transversalité , au développement de dynamiques d'échange respectant l'identité de chacun des pôles qui composent le champ de la psychiatrie. Ce serveur comprend dès à présent les éléments suivants :
- présentation de Société savantes et de leurs activités
- revues et leurs sommaires ; base de donnée
- recherches en cours
- interventions des Journées d'interface FFP/INSERM
- adresses internet psy et biomédicales
- informations, manifestations et séminaires
- forums.
Il a pour vocation de se développer comme un véritable service interactif pour le clinicien qui souhaite se familiariser, se former et participer à la recherche. Réunissant virtuellement les Sociétés et leurs revues sur un même site, son existence devrait soutenir la cohérence dans l'hétérogénéité dont la psychiatrie française a tant besoin.
(SIGMA) Pour conclure, le cadre étant posé, quelle orientation pour la recherche ?
Outre le problème des moyens humains et matériels indispensables pour atteindre une masse critique, la grande question qui se pose aujourd'hui est celle-ci :
(SIGMA) le psychiatre se définit comme quelqu'un qui est concerné par la pathologie chronique, la décompensation ou la souffrance grave de personnes dans un contexte psychosocial donné.
(SIGMA) En quelques décennies, il a réalisé le tour de force d'intégrer plusieurs modèles de référence, souvent en y adhérant d'abord de façon exclusive puis en leur donnant leur place relative dans sa pratique. Et de fait, des progrès très importants ont eu lieu qui se traduisent par une réduction de l'institutionnalisation et un déplacement des lieux de soin (secteur, cabinet privé, hôpital général), en même temps que s'opérait une ouverture sur d'autres domaines connexes : maladies graves, vieillissement, néonatalité, environnement, etc. Cette évolution de la fonction du psychiatre a contribué à assouplir l'idée de la << maladie mentale >> et à la situer plutôt comme une émergence particulière de troubles profonds auxquels contribuent différents facteurs.
(SIGMA) Dans le même temps, il est confronté
(SIGMA) à des menaces permanentes sur les moyens qui lui seront donnés dans les années qui viennent pour exercer, avec une demande de célérité qui va à l'encontre de tout ce qu'il sait sur le fonctionnement psychique et les difficultés de rétablir un fonctionnement << normal >> quand la ligne jaune de la rupture d'adaptation silencieuse a été franchie
(SIGMA) à une aggravation du contexte social qui renforce des déséquilibres individuels potentiels et crée de nouvelles pathologies, par exemple les toxicomanies.
(SIGMA) à une approche idéologique de la recherche qui attribue à l'élémentaire une vertu globale
Dans cette situation la recherche planifiée peut sembler bien décalée par rapport à la recherche empirique à laquelle participent plusieurs milliers de cliniciens depuis près de vingt ans et dont les décideurs semblent bien peu de soucier. Un appel d'offre européen dans le cadre de la Brain Decade Research proposait il y a quelques années de résoudre les problèmes de stress, d'insomnie, de toxicomanies, etc. par la génétique moléculaire. Cette approche peut faire craindre à juste titre aux psychiatres d'être la caution négative de la mise en place d'un humain hyperadapté à tout et régulé en fonction d'un monde qui lui échappe.
Cette situation à la Orwell ne peut pas pour autant conduire le psychiatre à ignorer la souffrance des patients qu'il traite et de leur entourage et à renoncer à progresser dans une démarche collective. Des recherches sont donc à initier et à développer concernant non seulement les grandes affections psychiatriques : schizophrénie, autisme, recherches dont il ne faudrait pas cependant attendre une clé universelle à tous les troubles psychiatriques. D'autres troubles, souvent intriqués, comme les dysthymies, les états limites, les dépendances, les décompensations concernent une partie très importante de la population générale et ne font pratiquement l'objet d'aucune investigation. Ici encore, il ne s'agit certainement pas de trouver on ne sait quel remède miracle, mais de mieux connaître les facteurs associés qui contribuent au développement de ces pathologies et corrélativement les moyens dont disposent les psychiatres pour les atténuer, voire les guérir.
C'est sans doute dans cet espace à la fois limité et immense que se situe l'avenir de la recherche en psychiatrie, dans une concertation entre clinique, épidémiologie analytique, recherche fondamentale et recherche évaluative des processus de changement, et où l'élémentaire apporte sa contribution au global, sans vouloir pour autant le subvertir.