Luc ROCHETTE et Catherine VERGELY
Facultés de Médecine et de Pharmacie - DIJON -
Le terme STRESS vient du latin "stringere" qui signifie tendre ou raidir. A la notion historique de stress s'attache deux noms, ceux de Hans SELYE et de Walter CANNON. En 1935, Walter CANNON précise le fonctionnement du système sympathique et de la médullosurrénale dans la sollicitation des composés énergétiques pour se préparer à l'action. En 1936, Hans SELYE caractérise la réaction "d'alarme" qui permet à l'organisme de s'adapter à de nouvelles conditions permettant de maintenir l'homéostasie du milieu intérieur. SELYE remarque également que chaque individu réagit de manière différente, ce qui met l'accent sur les différences inter-individuelles.
On distingue le système nerveux somatique et le système nerveux autonome (SNA). Le système nerveux dit somatique ou volontaire est constitué des fibres nerveuses qui vont des structures cérébrales aux cellules des muscles squelettiques par exemple. Les corps cellulaires de ces neurones sont groupés au sein de territoires définis du cerveau et de la moelle épinière. Quant aux éléments nerveux périphériques du système nerveux autonome, ces neurones innervent les cellules des muscles lisses, du muscle cardiaque, des structures glandulaires et des cellules qui possèdent des fonctions dans l'immunité. La subdivision en sympathique et para-sympathique repose sur des considérations anatomiques et physiologiques. Ces deux sous-ensembles permettent une double innervation de structures périphériques.Cette double innervation par des fibres nerveuses, aux actions opposées, aboutit à l'existence d'un contrôle très précis de l'organe effecteur.
Dans l'ensemble des actions, le sympathique aide l'organisme à s'adapter à un environnement qui peut apparaître comme délétère ; il est alors mis en jeu dans des situations d'urgences ou d'émotions fortes, comme la peur ou la colère, mais également au niveau des organes lors des épisodes de souffrance tissulaire (1,2). En revanche, le para-sympathique est actif au repos mais également lors des phases de récupération.
Les voies efférentes du système nerveux autonome, allant des structures centrales vers les organes effecteurs, comportent deux neurones. Le premier neurone est qualifié de neurone pré-ganglionnaire : l'axone forme des synapses avec le neurone post-ganglionnaire dont le corps cellulaire est localisé au sein d'un ganglion en dehors du système nerveux central.Les relais au niveau des ganglions sont réalisés à l'aide d'un neuro-médiateur qui en l'occurrence, que ce soient les ganglions sympathiques ou les ganglions para-sympathiques, est l'acétylcholine (ACh).Le neuro-transmetteur des fibres post-ganglionnaires para-sympathiques est toujours l'ACh, on parle alors de fibres cholinergiques. Dans le cas des fibres post-ganglionnaires sympathiques, le médiateur est la noradrénaline (NA), nous avons alors des fibres noradrénergiques.
Une différenciation du système sympathique est constituée par la médullosurrénale qui est une glande endocrine.
En dépit de variations permanentes de l'activité neuronale, les teneurs tissulaires en noradrénaline restent relativement constantes dans les conditions physiologiques, ce qui implique l'existence de mécanismes régulateurs qui adaptent l'intensité de la synthèse du médiateur à celle de sa libération. Cette médullosurrénale produit des hormones qui sont constituées à 20 % de noradrénaline et à 80 % d'adrénaline aux fonctions proches de la noradrénaline.
La libération du médiateur se fait par exocytose ; ce phénomène nécessite la présence d'ions calcium et une fusion des membranes des granules avec les membranes cytoplasmiques des terminaisons nerveuses ou de la cellule chromaffine.
La classification des récepteurs sympathiques fait apparaître la grande diversité des sites récepteurs à la noradrénaline et à l'adrénaline. Deux groupes de récepteurs ont été individualisés : les récepteurs a (3) et les récepteurs b (4)_. La noradrénaline agit sur les récepteurs a dont plusieurs sous-types existent. De nombreux sous-groupes ont également été décrits pour les récepteurs de type b : b1, b2, b3. Ces sous-types reflètent les effets possibles d'un ligand pour une cellule déterminée tout en permettant aux effets d'être plus sélectifs.Les récepteurs à l'ACh sont soit de type muscarinique bloqués par l'atropine, soit de type nicotinique. Les récepteurs cholinergiques nicotiniques des jonctions neuro-musculaires appartiennent à une super-famille de canaux ioniques activés par un ligand.
Les anomalies du fonctionnement du système immunitaire peuvent être la cause de pathologies par déficit immunitaire ou par réactions immunitaires inappropriées. Il a été montré que de multiples systèmes de contrôle existaient au niveau de l'organisme pour réguler le système immunitaire qui ne fonctionne pas de manière indépendante des autres systèmes. On peut admettre actuellement qu'il existe des liens importants entre l'activité du système immunitaire et les grands systèmes de contrôle de l'organisme (5). De nombreuses études ont eu pour but de préciser les liens qui unissent la sécrétion de cortisol sous l'effet d'une stimulation nerveuse et la mise en jeu de substances telles que les interleukines. Le cortisol apparaît non seulement comme une hormone produite par la corticosurrénale mais également comme un médiateur (6) possédant des "affinités physiologiques" avec les récepteurs du système nerveux autonome.
Les organes lymphoïdes, tout comme les vaisseaux sanguins reçoivent une innervation à prédominance sympathique (7, 8). Il existe également des neurones innervant ces organes lymphoïdes qui sont de type adrénergique et peptidique ; le neuropeptide retrouvé étant le neuropeptide Y. Notons également la présence d'autres peptides en particulier au sein du parenchyme des structures lymphoïdes tels que les tachykinines, le CGRP ou le VIP. Au niveau des lymphocytes T et B, de nombreuses études ont rapporté l'expression de récepteurs adrénergiques de type b2 (9). Au niveau des organes lymphoïdes, on peut admettre que l'innervation sympathique participe au contrôle du débit sanguin régional mais aussi peut influencer l'activité des cellules lymphoïdes et par la même exercer un rôle immunomodulateur.
En ce qui concerne les liens entre système immunitaire et système cholinergique, il apparaît que les macrophages expriment des récepteurs à l'acétylcholine. Le médiateur lorsqu' il est libéré diminuerait la production de cytokines pro-inflammatoires mais pas de l'interleukine IL-10 qui possède, elle, des propriétés anti-inflammatoire. Aussi n'a-t-on pas évoqué dans ce cadre une voie cholinergique-anti-inflammatoire.
Il apparaît que la stabilité du milieu intérieur demande des ajustements permanents nécessaires pour adapter l'organisme aux perturbations externes et internes (10). En permanence, l'organisme met en jeu des réponses nécessaires à sa survie. Les voies afférentes permettent de véhiculer rapidement les informations vers le système nerveux central et les voies centrifuges doivent permettre une adaptation suite à la sélection des messages qui sont parvenus aux centres intégrateurs.
1. Moreau D, Rochette L, Didier JP, Opie LH, Bralet J. Effects of increased heart work on release of norepinephrine and ventricular arrhythmias following reperfusion in the isolated rat heart. J Cardiovasc Pharmacol 1990 ; 15 (6) : 927-32.
2. Rochette L, Moreau D, Opie LH. Effect of repeated regional myocardial ischemia in the rat heart on reperfusion arrhythmias and release of norepinephrine. J Cardiovasc Pharmacol 2001 ; 38 (1) : 78-89.
3. Docherty JR. Subtypes of functional a1-and a2-adrenoceptors. Eur J Pharmacol 1998 ; 361 : 1-15.
4. Arch JRS, Kaumann AJ. b3 and atypical b-adrenoceptors. Med Res Rev 1993 ; 13 (6) : 663-729.
5. Rochette L, Bralet J, Rochat C. Effects of propranolol and tertatolol on cardiac output and regional blood flows in the rat. Drug Dev Res 1987 ; 10 : 17-26.
6. Webster JI, Tonelli L, Sternberg EM. Neuroendocrine regulation of immunity. Ann Rev Immunol 2002 ; 20 : 125-63.
7. Qiu Y, Peng Y, Wang J. Immunoregulatory role of neurotransmitters. Adv Neuroimmunol 1996 ; 6 (3) : 223-31.
8. Rinner I, Felsner P, Liebmann PM. Adrenergic/cholinergic immunomodulation in the rat model - in vivo veritas ? Dev Immunol 1998 ; 3-4 : 245-52.
9. Xu B. The importance of beta-adrenergic receptors in immune regulation : a link between neuroendocrine and immune system. Med Hypotheses 2001 ; 56 (3) : 273-6.
10. Spieker LE., Hurlymann D., Ruschitzka F. et al., Mental stress induces prolonged endothelial dysfunction via endothelin-A receptors. Circulation 2002; 105:2817-20.
Dernière mise à jour : lundi 16 décembre 2002 12:44:57 Dr Jean-Michel Thurin