Paris/Beaune (France) : 8-12 juin 1998
Paris/Beaune (France) : June 8-12, 1998
J.-J. Laboutière, Mâcon, France
Au-delà de leurs expressions cliniques, ils posent surtout le problème de leur situation nosographique et plus particulièrement de leur articulation, d'une part, avec la personnalité normale, dont l'existence est implicitement supposée, et, d'autre part, avec les entités pathologiques avérées.
La notion de personnalité normale est loin d'être facile à appréhender et aucune approche ne permet de la définir précisément. Cependant, l'absence d'une théorie satisfaisante de la normalité psychique ne constitue pas en soi un obstacle à l'étude des troubles de la personnalité qui s'est essentiellement fondée sur la prise en compte d'une double souffrance : souffrance de la personne elle-même mais aussi souffrance de la société face aux comportements de cette personne.
Pour légitime et opératoire qu'elle soit afin de trancher le normal du pathologique, ce critère de souffrance, tant personnelle que sociale, ne suffit cependant pas toujours à faire la distinction entre les troubles de la personnalité et les " maladies mentales " en tant que telles. C'est pourquoi les traditions psychiatriques allemande et française ont longuement étudié les troubles de la personnalité non seulement en cherchant à dégager des types de personnalités aussi pertinents que possibles mais, surtout, en questionnant les relations éventuelles entre ces personnalités pathologiques et les entités morbides.
Les positions des auteurs divergent largement sur ce dernier point. Si, certains soutiennent qu'il n'y a pas de rapport entre troubles de la personnalité et pathologies avérées, d'autres estiment, en revanche, que les troubles de la personnalité constituent parfois des formes mineures, ou de transition, entre l'état normal et l'état morbide. Il en résulte que les troubles de la personnalité constituent un regroupement très hétérogène sur le plan psychopathologique, dans lequel le modèle descriptif peut varier selon le trouble considéré : version a minima de la maladie correspondante dans certains cas, simples variations quantitatives de la personnalité normale dans d'autres.
Ce questionnement psychopathologique a été la source d'une abondance de classifications dont la richesse et la cohérence clinique ne peut se saisir sans les situer dans une perspective historique qui, pour chacun des grands types de personnalités pathologiques, reste l'unique moyen de rendre compte de l'évolution des conceptions psychopathologiques sous-jacentes.
A l'heure actuelle, les nécessités de communications entre les écoles et les pays amènent les psychiatres français à simplifier les descriptions des troubles de la personnalité pour se ranger progressivement au consensus international que représentent la CIM 10 et le DSM IV.
Ces classifications reprennent les principales catégories traditionnellement utilisée en France. Elle comprend : la personnalité paranoïaque, la personnalité schizoïde, la personnalité schizotypique, la personnalité antisociale, la personnalité borderline, la personnalité histrionique, la personnalité narcissique, la personnalité évitante et la personnalité dépendante. Pour chacune d'elle, cet exposé sera l'occasion de rappeler quelques notions historiques avant d'en décrire les principaux éléments cliniques.
Cette approche nosographique internationale n'est cependant pas sans poser problème à certains auteurs. Les catégories diagnostiques ainsi déterminées peuvent en effet manquer de spécificité et conduire à poser des diagnostics multiples qui en affaiblissent la pertinence. De même, la CIM 10 n'exigeant qu'un nombre d'items très réduits pour poser un diagnostic, la question de savoir si les troubles de la personnalité ainsi détectés sont bien pathologiques peut également se poser.