CHAPITRE 1 :
CHAMPS ET LIMITES DE LA CONFERENCE (questions 1-5)
(Catherine Polge)
Question 1 - Psychiatrie, justice et déviance
sexuelle. Perspective historique
(La
plupart des textes analysés sont des avis d’experts ou des revues
non explicites).
A
– PERSPECTIVES
G. Du Mesnil du Buisson [1] présente ainsi la situation : « Toute
l’évolution du droit pénal et de la procédure
pénale aura été de modifier progressivement le regard
porté sur le condamné et le rôle qui lui est
dévolu : d’agent passif, objet de châtiments corporels
au Moyen-Âge ou de privation de liberté à
« l’époque moderne » , celui-ci est
désormais davantage considéré comme acteur de la
peine, de même qu’il a
été l’auteur de l’acte délinquant. La question « soigner ou
punir » prégnante par le passé, n’est plus
d’actualité. « La question n’est plus tant de
faire subir que de provoquer une action ».
Pour G.
Lantéri-Laura [2] ni la nature humaine supposée pure chez
les « sauvages », ni l’observation des animaux
n’a permis de trouver une norme sexuelle qui aurait permis
d’établir des mesures de comportements pervers On constate au long
de l’histoire une appropriation progressive des perversions par la
médecine. En particulier en France, à partir des condamnations
des exhibitionistes récidivistes au bagne (cite Lantéri-Laura
1992]. D’où le recours à des médecins experts. « Les perversions se sont
rapprochées de l’ordre psychotique, s’y substituant ou
évitant de s’y perdre ». Parler de
« Singularité des conduites sexuelles »,
plutôt que « comportements pervers », pour exclure
toute référence à une norme.
B – QUELQUES ETAPES [2, 3, 4, 5, 6]
I
– De l’Antiquité à la Révolution
- Antiquité et jusqu’au début du
Moyen-Age :
Concernant le viol : d’une manière
générale la femme victime est mise en cause et est punie.
Première législation connue : à Babylone.
Lorsque le viol d’enfants est mentionné
dans les écrits c’est en terme d’initiation, mais il
était sans doute fréquent car l’enfant n’existait pas
en tant que personne.
- Moyen-Âge : Le viol devient une
activité lucrative car il permettait d’épouser de riches
héritières par contrainte.
- Droit canonique : s’oppose à la
sodomie, au plaisir, à l’adultère ainsi qu’à
d’autres comportements sexuels considérés déviants
car n’ayant pas pour but la procréation (zoophilie, homosexualité).
- Ancien Régime : Intégration progressive des principes religieux
dans la législation civile.
Ordonnance criminelle de 1570 : alourdit les
peines contre adultère et inceste.
Les perversions se réduisent plus ou moins
à l’homosexualité. Certaines pratiques (sodomie par ex)
jugées déviantes par la religion ne sont pas condamnées
par la loi si elles impliquent des adultes consentants.
Edit de Juillet 1682 : punit de mort les
infractions dont les enfants sont les victimes.
- Révolution : 1791 : 1er
code pénal ne réprime que le viol, aggravé si la victime
est une fille <14 ans. Inceste, sodomie, zoophilie ne sont plus
condamnés.
II
- XIXè siècle :
- Code pénal de 1810 : Viol et attentat
à la pudeur accompagnés de violence sont confondus et punis de la
même peine. Aggravé si victime est enfant<15 ans ou si le
coupable a autorité (contradictions sur la nature de cette
autorité).
- Loi 28 Avr. 1832 : Sépare viol et
attentat à la pudeur. Punit l’attentat à la pudeur sans
violence envers enfant<11 ans. Aggravation si avec violence ou si le
coupable est un ascendant (expressément visé).
- Notion de responsabilité dans le code
pénal : «ni crime ni délit lorsque le prévenu
était en état de démence au moment de l’action, ou
lorsqu’il a été contraint par une force à laquelle
il n’a pas pu résister »
- Esquirol parle de « désordres sexuels »
- 1863 : abus sexuel d’enfant <13
ans : punissable.
- 1885 : Magnan parle de
« perversions sexuelles ». Au même moment, en
Allemagne, Kraft-Ebing et Moll cherchaient à faire abolir le texte qui
punissait la sodomie. Mouvement promoteur de connaissances et de
réformes. Lantéri-Laura parle à ce sujet d’un savoir
résultant de l’objectivité et du militantisme.
- 1892 : introduction du terme
« fétichisme « par Kraft-Ebing
- 1895 : Kraft-Ebing :
« Psychopathis sexualis » : 1è tentative de
taxinomie des perversions, et création du
« sadisme ». A sa suite Moll développe une
théorie sociale des perversions
- Dupré élabore une théorie de
comportements pervers criminels
III
- XXè siècle :
- 1900 : quartier de sûreté à
l’hôpital de Villejuif : le placement devant garder
l’apparence d’une sanction pénale, ces établissements
ne sont pas totalement médicaux.
- 1905 : circulaire Chaumié pour les «
demi-fous »
- 1947 : entrée du psychiatre en prison
Ancien code pénal : abus sexuel
d’enfant <15 ans : punissable
- 1959 : création des services de
psychiatrie pénitentiaire, devenus Services Médico-psychologiques
Régionaux en 1986 (à la suite de la création des secteurs
en 1970).
- Loi 23 Déc. 1980 : supprime les
discriminations tenant au sexe de l’auteur et de la victime.
- Pas de répression particulière
spécifique de l’inceste.
IV - la violence sexuelle
intra-conjugale, une situation qui semble difficile à appréhender
jusque vers les années 1980.
Aux USA [7] : une revue non explicite mais
avec un abord critique des articles. En droit anglo-saxon la relation maritale
ne connaît pas le viol. En conséquence le viol sera défini
comme relation sexuelle imposée par un homme à une femme qui
n'est pas son épouse. En 1998 encore, 31 états exigent un
contexte particulier pour reconnaître le viol conjugal (instance de
divorce, etc). D'une manière générale, la preuve du
non-consentement est difficile à amener.
Dans
la littérature, silence jusque dans les années 80 (exception : Gelles 1977). Etudié en
marge des violences conjugales ou du viol en général.
En France [5] c’est
également vers 1980 que le problème de la reconnaissance du viol
entre époux s’est
fait plus pressant.
V
- Nouveau code pénal français en 1994
«
N’est pas pénalement responsable la personne qui était
atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique
ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes »
Exploitation sexuelle sans violence d’un mineur
contre rémunération : aggravation.
Etablissement de la perpétuité dite
« réelle ». Pour les meurtres de mineurs de 15 ans
précédés de viol, torture ou actes de barbarie :
période de sûreté de 30 ans, ou bien au terme de 30 ans le
Juge d’Application des Peines saisit un collège de 3 experts
psychiatres pour se prononcer sur la dangerosité du condamné.
Mise en place d’un suivi médical et
psychologique (au sein des Services Médico-Psychologiques
Régionaux)
Mesures de faveur (semi-liberté etc) :
conditionnées à une expertise psychiatrique
VI
- Actuellement
Primauté à la violence dans la manière
d’envisager ces questions, résumées dans la
« combinatoire de 3 éléments :
pénétration sexuelle, violence, mort ». [2].
Etudes épidémiologiques sur les formes
médico-légales de la psychose (Wessely) 1997
Les pervers représentent moins de 10% de la population
des UMD en France (Senninger 1996). Les experts tendent actuellement à
les responsabiliser.
Plus de 15% de non concordance diagnostique dans
l’évaluation de la population médico-légale (Kottler
1997).
G. Casile-Hugues [8] (avis d’expert) :
« La loi du 17 Juin 1998 se situe dans la perspective d’un
renforcement de la répression fondé sur une
spécificité de la délinquance sexuelle pour lui apporter
des réponses appropriées en même temps qu’elle
élabore une prise en charge spécifique avec tous les problèmes
que cela peut poser »
Question 2 Place et évolution de la fonction de
l’expertise psychiatrique
(La
plupart des textes analysés sont des avis d’experts ou des revues
non explicites).
Code Pénal [9] Chap.II, article 122-1,
alinéa 2 « N'est pas pénalement responsable la
personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique
ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses
actes. La personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble
psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou
entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois,
la juridiction tient compte de
cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le
régime. »
Avec l’ injonction de soins ,
la personne poursuivie est « susceptible de faire l’objet
d’un traitement ». Aucun traitement ne sera entrepris sans son
consentement, mais son refus motive une peine d’emprisonnement
supplémentaire. La proposition de soins est renouvelée tous les 6
mois.
I
- Missions de l’expertise : Selon C. Gongora [10] (avis
d’expert).
- Examens techniques et scientifiques prescrits par
le Procureur destiné à permettre au Parquet de se
déterminer sur la nécessité de poursuivre et sur
l’orientation à prendre.
- Expertise ordonnée par le juge
d’instruction (noyau : recherche de troubles psychiques)
- Expertise ordonnée par la juridiction de
jugement : lorsque aucune expertise n’a été
réalisée avant.
- Expertise
« d’évaluation » l’obligation
probatoire de soins imposée à de petits délinquants
sexuels peut être judiciairement évaluée (tous les 6 mois
pendant la probation).
II
- Attentes du magistrat à l’égard de
l’expertise
1°/ Selon C. Gongora
[10]
- Dimension biographique de l’agresseur (permet
la comparution de témoins)
- Dimension diagnostique : utile de mettre en
perspective les personnalités de l’abuseur et de la victime
(même expert souhaitable)
- Dimension prospective : le pronostic devrait
être le plus affiné possible pour permettre aux magistrats un
choix approprié.
- Délai de réalisation de
l’expertise : doit être rapide, pour respecter le droit sur la
durée et avancer vers un traitement rapide des infractions sexuels
2°/
Problèmes soulevés par
B. Lavielle [11] (avis d’expert publié avant la sortie
d’une partie des décrets d’application de la loi de
1998) :
- Le juge a besoin de l’expert.
« Les services judiciaires s’entendent dire constamment
qu’il font trop de dépenses au niveau des expertises en
matière pénale et civile ». Or le texte de 1998
multiplie les expertises. Difficulté de trouver des experts en nombre.
Le même peut-il poser la responsabilité,
l’opportunité d’un aménagement de peine, d’un suivi socio-judiciaire
etc ?
- Le magistrat doit pouvoir s’adresser à
des médecins qui ont des connaissances particulières dans ce
domaine, afin que leur avis n’entre pas ensuite en contradiction avec
celui de l’équipe
soignante.
-
La loi ne
prévoit pas pour le sujet la possibilité de demande de
contre-expertise.
3°/ Restitution
de l’expertise au cours de l’audience.
Deux scénarios [10] :
- Tribunal correctionnel : les juges prennent
connaissance de
l’intégralité du dossier au cours de
l’audience. N’exigent pas la présence de l’expert.
- Assises : la cour n’assoit sa conviction
que sur les éléments oralement débattus. L’expert
restitue lui-même, à partir d’un rapport qui aura servi de
trame au débat.
Pour Benayoun [3], «la difficulté [de
l’expertise] réside
dans le fait qu’elle est un rétro-diagnostic consistant à situer au temps t
la responsabilité d’un individu dont la trajectoire existentielle
percute une structuration déterminée de sa personnalité
» (d’après G.Lopez, 1994), c’est « une clinique de
l’immédiateté ». Acte technique échappant
à la compétence du magistrat, elle est fondée sur la
sémiologie que l’expert doit traduire pour le tribunal.
Et [13] en pénal comme en correctionnel
l’expertise s’inscrit dans une double perspective :
évaluer à la fois la responsabilité pénale et la
curabilité avec risques de récidive.
I
- Différentes situations
d’expertise : selon D. Glezer [13]
1°/ Expertise au
niveau de l’instruction ou du jugement :
- Cas simples :
. irresponsabilisation pénale : concerne
essentiellement des psychotiques
. absence de pathologie mentale ou sexuelle (pas
d’incidence psychiatrique). Viol en réunion (problème
psychiatrique chez le leader), viol rétorsif .
- Cas complexes :
. sujet « non coupable »
(réellement ou non) : entrave l’exploration de la fonction sexuelle.
Inconfort de la situation expertale :
l’expert devient « à charge » et doit poser
l’injonction de soins. Il serait souhaitable que la juridiction se
détermine sur la culpabilité avant l’expertise.
. sujet coupable mais non responsable (le
prévenu met l’accent sur le rôle de la victime, etc).
L’entretien expertal devient pré-thérapeutique
. Sujet coupable et responsable :
coopération entre prévenu et expert, qui met les troubles
à jour. Motivation aux soins. Problèmes thérapeutiques en
fonction des pathologies sous-jacentes.
Alcool : problèmes de sevrage.
2°/ Expertise de
pré-libération conditionnelle :
- Code de Procédure Pénale CPP [14],
Art 722. Obligatoire pour meurtriers d’enfants auteurs de viols, tortures
Réalisée par 3 psychiatres. Se multiplieront avec la loi
Guigou avec l’incitation aux soins pendant la détention pour
obtenir des aménagements de peine. D’où des
pseudo-motivations aux soins.
- Il s’agit
d’évaluer le travail entrepris pendant
l’incarcération : certains redoutent passe à l’acte
à la sortie ; d’autres continuent à dénier.
3°/ Expertise de
libération :
(Art 720-4 CPP). Obligatoire, même cas que le
précédent. Auprès de la Cour Cassation, après 30
ans de peine incompressible.
Questions : Quelle est la philosophie ? Quels seront les
éléments à recueillir ? Selon G. du Mesnil du Buisson
[1] : Le détenu se met en « hibernation
psychique » : « comment expertiser la
vacuité ? ». G. Casile-Hugues [8] parle d’une
« expertise longitudinale s’inscrivant dans la
perspective de l’individualisation de la mesure en fonction de
l’évolution du sujet »
Cf C. Balthazar [15]
- Recueillir des confidences destinées
à un rapport public.
- Ne pas tenir compte de son identité de thérapeute
et de l’effet thérapeutique de son écoute.
- Tout dans l’existence du sujet permet de
découvrir des signes cliniques. Or l’expert ne doit pas
évoquer dans son rapport ce qui n’a pas trait à sa mission.
Par contre, pour Gongora [10], il n’est pas interdit au médecin
expert d’examiner les faits, d’envisager la culpabilité et
d’apprécier l’accessibilité à une sanction
pénale.
Quelle classification diagnostique
utiliser ? C.Balthazar [15]
s’oriente vers « les conceptions classiques
européennes, moins sujettes à querelles ».
Le psychiatre est-il
l’intervenant le plus légitime quand on doit se prononcer sur la
responsabilité d’un criminel ?
Outre la
question de responsabilité l’expert doit évaluer :
- Dangerosité : distinguer
dangerosité psychiatrique (sujet à soigner), criminologique
(risque de récidive)
- Accessibilité à une sanction
pénale : indiquer à quel degré une éventuelle
pathologie permet ou non cette accessibilité. Implique que l’expert soit informé des
modalités d’application des peines.
- Curabilité : on ne doit envisager une
curabilité que si l’on a décrit une maladie et
indiqué le traitement et le pronostic habituel. On peut également
indiquer une thérapeutique ou un accompagnement pour des agresseurs
sexuels sans pathologie mentale (modification de conduite, souffrance).
- Réadaptation : Prudence devant les
variables non maîtrisées : au moment de l’expertise on
ne peut préjuger de la condamnation, de la longueur de la peine, du
projet personnel en incarcération, des modifications de
l’environnement au moment de
la sortie etc.
Le rapport
d’expertise est présenté au sujet, qui peut ensuite
l’utiliser de manière perverse.
Déposition de l’expert devant le
tribunal : savoir
répondre aux questions des rapports entre la clinique et la
théorie.
a/ Problématique :
Les psychotiques délinquants sont-ils capables
d’accéder à la sanction pénale ?
Quelle est la structure psychopathologique au moment
des faits ? Peut-elle être sanctionnée ?
Distinguer deux types de perversion : symptôme
morbide ou bien «
aménagement défensif dans l’économie psychique du
patient psychotique ».
Le psychotique délirant ne peut
répondre de ses actes. Si l’expert conclut irresponsabilité
pénale + dangerosité, le juge décide un non-lieu .
Inconvénients du non-lieu :
. Le crime ou délit disparaît
juridiquement
. Le délinquant ne peut s’expliquer
publiquement
. Le juge d’instruction ne peut poursuivre son
enquête
Conséquence : dispense de procès (sauf
si une contre-expertise est demandée) et placement d’office
(médical).
L’expert a un rôle de sanction
(placement) . « Priver le psychotique de procès lui retire parfois
les seuls limites sociales symbolisables ».
b
/ Constats :
- Le rôle prédictif de l’expert
est difficile à tenir.
- Les établissements sont
sur-encombrés, il y a une tendance à responsabiliser les
délinquants et à allonger les peines infligées aux auteurs
de crimes sexuels :
- Manque de rigueur de certaines expertises,
échecs répétés de la justice et de la
médecine.
c
/ Suggestions :
- Envisager une procédure en 2 temps pour
permettre au patient d’exister légalement et
d’accéder aux soins :
. Recherche de l’imputabilité
matérielle des faits
. Recherche du degré de responsabilité
- Créer des centres d’évaluation
et d’expertise criminologiques pour diminuer la subjectivité de la
décision
- La psychiatrie de secteur devrait assurer le suivi
des condamnés à de longues peines souffrant de troubles mentaux.
- Approche multifactorielle et pluridisciplinaire
indispensable
d / Un exemple
Dans une étude clinique sur la
responsabilité pénale et les conduites perverses chez le
psychotique (Niveau 4), Benayoun [12] fait « l’analyse
comparative des comportements sexuels pervers chez le pervers et le
psychotique » en fonction des éléments suivants :
sexe et âge, déclencheurs, motivations, modus operandi,
symptômes associés, choix de victime, sentiment de culpabilité,
personnalité, adaptation sociale. (Se reporter au tableau I, p409 de
l’article).
Décision médico-légale pour le pervers :
responsabilisation, sanction et obligation de soins.
Décision médico-légale pour le
psychotique : non-lieu et hospitalisation d’office.
Condamnation et internement participent au
contrôle social permettant une approche cohérente des psychopathes
ayant commis des délits de caractère sexuel. La notion de responsabilité
pénale chez le psychopathe est sujette à débat.
Perturbations des émotions dans le domaine de la morale ainsi
qu’incompréhension des notions morales sont couramment
observées chez ces criminels. Leur incapacité à tirer des
leçons de l’expérience, incapacités à ressentir
de l’empathie, de la culpabilité ou du remords, peu
d’anticipation des stimuli aversifs, état de sous-excitation,
troubles de l’attention, pas d’apprentissage de
l’évitement passif, peu d’anxiété, pourraient
justifier d’une atténuation de responsabilité.
Cependant, du point de vue de la
responsabilité pénale, à la différence des
criminels atteints de trouble dissociatif de l’identité, les
psychopathes auraient la capacité de tenir des raisonnements pratiques
sur leurs intérêts dans le domaine légal, tout comme les
criminels « ordinaires ».
V -
Evolution de l’expertise :
Casile-Hugues [8] note une
« tendance générale à la limitation de la
clause d’irresponsabilité pénale (article 122-1 du
CP) : 16% en 1980 et 0,17% en 1998 (cite rapport Pradier 1999, Min.
Santé). La plupart des délinquants sexuels ne sont pas des
malades mentaux (cite rapport Balier 1998). Plutôt des sujets
« carencés sur le plan affectif » et
« troubles limités de la personnalité »
(cite Balier 1994 et Coutanceau 1995).
« Devant les faibles
perspectives thérapeutiques, le risque non négligeable de
récidives, c’est une aggravation de la peine qui est parfois
proposée, ce qui rend discutable, dans ce cas, la démarche
expertale, tout au moins sur le plan déontologique. » [13]
Réactions sociales et
connaissances scientifiques font évoluer les expertises.
Question 3 Quelles sont les catégories
pénales concernees ?
Se reporter au
Code Pénal (CP) [9] et au Code de Procédure Pénale
(CPP) [14], dont quelques points
sont énumérés ci-après.
Benayoun
rappelle [3] « [qu’]il n’existe pas de définition
juridique de chaque type de passage à l’acte, principalement en
matière d’atteintes sexuelles. A titre d’exemple, le code
pénal ne prévoit pas de peine pour le fétichisme ou le
masochisme mais réprime le vol (fût-il fétichiste) et les
violences commises avec l’assentiment de la victime. La diversité des comportements
psychopathologiques ne permet pas toujours de définir quels sont ceux
qui doivent conduire à un châtiment ou à la
tolérance sociale. »
A
– Viol exhibitionisme et
harcèlement
Section
3 : Des agressions sexuelles. Article 222-22. Loi n° 98-468 du 17 juin 1998
art. 19 Journal Officiel du 18 juin 1998.
« Constitue
une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence,
contrainte, menace ou surprise."
Paragraphe
1. Viol « Tout acte de pénétration sexuelle, de
quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui par violence,
contrainte, menace ou surprise est un viol. » .
Viol
entre conjoints n’est pas mentionné.
Paragraphe
2. Agressions autres que le viol. Dont Article 222-32 L'exhibition sexuelle
imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du
public.
La
tentative des délits prévus par les articles 222-27 à
222-30 est punie des mêmes peines
B – INCESTE
Dans le cadre du viol et dans celui des
autres agressions sexuelles, ainsi que Mise en péril des mineurs :
« Lorsqu'il est commis par un ascendant légitime, naturel ou
adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la
victime » [9]
L’inceste
est l’union illicite entre deux personnes parentes à un
degré prohibé par la loi pour contracter le mariage civil, selon
S. Bourcet [18].
L’inceste
entre adultes n’est pas poursuivi en civil ni pénal.
L’inceste dont la victime est mineur au moment des faits doit être
dénoncé et puni. Cependant le mot inceste n’est pas
cité dans le code pénal. La loi fait état d’abus
sexuels caractérisés, aggravés si l’abuseur est un
ascendant ou personne ayant autorité.
C
– SADISME
Paragraphe
1. Des tortures et actes de barbarie (Articles 222-1 à 222-6-1 )
«L'infraction
définie à l'article 222-1 est également punie de vingt ans
de réclusion criminelle lorsqu'elle est accompagnée d'agressions
sexuelles autres que le viol.
La
peine encourue est portée à trente ans de réclusion
criminelle lorsque l'infraction définie à l'article 222-1 est
commise sur un mineur de quinze ans par un ascendant légitime, naturel
ou adoptif ou par toute autre personne ayant autorité sur le
mineur. »
Section
3. Paragraphe 1. Le viol. « Le viol est puni de la réclusion
criminelle à perpétuité lorsqu'il est
précédé, accompagné ou suivi de tortures ou d'actes
de barbarie. » (Art 222-26)
D
- Pédophilie sans violence
Cf
CP, Section 5 : De la mise en péril des mineurs. Article 227-25 (Loi
n° 98-468 du 17 juin 1998 art. 18 Journal Officiel du 18 juin 1998)
Le
fait, par un majeur, d'exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise
une atteinte sexuelle sur la personne d'un mineur de quinze ans est puni de
cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende.
Question 4
Quelles sont les catégories psychiatriques concernees ?
A
– CLASSIFICATIONS DIAGNOSTIQUES INTERNATIONALES
I
- DSM-IV Manuel Diagnostique et
Statistique des Troubles Mentaux [19]
Exhibitionnisme / Fétichisme / Frotteurisme /
Pédophilie (comprend l’inceste) / Masochisme / sadisme /
Transvestisme fétichiste / Voyeurisme / Paraphilie non
spécifiée (nécrophilie, zoophilie etc)
Pédophilie = activité sexuelle avec un
enfant pré-pubère (< 13) par une personne âgée
de 16 ans au moins et de 5 ans plus âgée.
Le viol n’est pas dans le DSM-IV
II
- CIM-10 Classification Internationale des Maladies, section F65 [20] :
Fétichisme / Transvestisme fétichiste /
Exhibitionnisme / Voyeurisme / Pédophilie (mention d’inceste de la part d’un
homme) / sadomasochisme / Troubles multiples / Autres troubles frotteurisme,
bestialité, anoxie etc)
B
– QUELQUES AUTRES
CLASSIFICATIONS
I -
Selon Hamon [21] (Avis
d’expert.)
Les paraphilies utilisé au détriment du
terme de perversion et définit un caractère psychosexuel
déviant : pédophilie, zoophilie, frotteurisme,
fétichisme, masochisme, sadisme, travestisme, exhibitionnisme,
voyeurisme.
Se repèrent par :
. déviation d’objet
. déviation de zone érogène
. déviation de l’excitation
Trait commun : recherche de satisfaction
sexuelle auto-érotique.
II
- Définition de l’inceste par DEH Russell (1984), cité par
McConaghy [22]
Tout contact ou tentative de contact sexuel avec un
parent d’au moins 5 ans plus âgé, ayant débuté
avant que la victime n’aie 18 ans. L’abus est signifié
même si le ressenti de la victime est neutre ou positif.
Question 5 Quelles sont les données
épidémiologiques générales concernant les
agressions sexuelles ?
A - CONCERNANT L’ENSEMBLE DES Paraphilies
I
– Statistiques
1°/ En France
a/ Enquête nationale
(descriptive) de victimation, réalisée par le Centre de
Recherches sur le Droit et les Institutions Pénales en 1990 [23] :
sur 11 156 personnes >15 ans, 45 disent avoir été victime d’une
agression ou tentative d’agression sexuelle dans les 2 dernières
soit années, soit un taux de 4 pour 1000. Résultats non
généralisables.
b/ Evolution 1974-1993, source :
Ministère de l’intérieur, cité par Tournier
[23]
- Nombre de viols multiplié par 3,6
- Nombre d’attentats à la pudeur
(=autres agressions sexuelles) multipliés par 2
- Baisse des viols commis par plusieurs personnes
- Stabilité des viols simples
- Croissance des viols sur mineur de 15 ans et de
ceux avec circonstances
aggravantes.
c/ Evolution 1994-1998, source Ministère de
l’Intérieur, 1999, cité par Hachouf [24]
- Les délinquants sexuels = catégorie
pénale la plus importante [20% des 52961 détenus). Participe au
vieillissement de la population carcérale : âge
élevé à l’incarcération et
l’allongement des peines.
- Viols sur mineur de 15 ans : de 271 (1994)
à 475 (1998).
- Autres agressions sexuelles sur mineurs de 15
ans : de 64 (1994) à 1119 (1998) condamnations
- Environ 50% des affaires en assises concernent des crimes sexuels dont la moitié sont des viols sur
mineurs perpétrés dans le milieu familial.
- Les 2/3 sinon 80% des victimes sont sexuellement
abusées dans leur milieu familial.
- Proportion d’agresseurs mineurs en
augmentation.
- A noter : la maltraitance
« transgénérationnelle ».
d/ Population incarcérée
pour viol et autres agressions sexuelles, Source Bureau des Etudes, de la
Prospection et du Budget, cité par Jubin. [25]
- Métropole : Jan. 1995 : 3786 dont
59 femmes ; Jan. 1999 : 6103 dont 87 femmes
- Outre-mer : Jan. 1995 : 312 ; 1999 : 657
2°/ En Allemagne [27] (revue non explicite, niveau 4)
Evolution pour l’Allemagne de l’Ouest des
statistiques d’infractions sexuelles rapportées par les services
de police : tableaux du bureau
Fédéral d’Investigations Criminelles de Wiesbaden entre 1980
et 1990.
- Baisse des crimes sexuels (-2%) malgré une
hausse de la criminalité. La proportion de crimes sexuels avec violence
est moins forte que ce qu’affirment les experts.
- Crimes contre l’auto-détermination
sexuelle : les cas de contrainte sexuelle augmentent (+5.4%) et les abus
sexuels d’enfants diminuent (-3.2%) ainsi que le nombre de viols (-26%).
- Moins de 15% des cas connus de la police font
l’objet d’une condamnation.
Proportion de criminels condamnés pour crime
sexuel : stable de 1983 à 1987
[7 à 8%).
- En 1987 sur les 4 858 condamnations : viol,
tentatives de viol et contraintes sexuelles 37%, pédophilie 28%,
exhibitionnisme 16%. Les 19% restants concernent diffusion pornographique et
incitation à prostitution.
- Inceste en baisse : 17 condamnations en 1987, en
majorité dans les niveaux socio-économiques
défavorisés. Les psychothérapeutes sont par contre
convaincus que l’inceste est plus important que ce qui est
révélé par les statistiques.
- Pour les crimes sexuels sur enfants de moins de 14
ans, les 12000 cas officiellement recensés par an sont contredits par la
presse qui annonce 300 000 cas, en négligeant les distinctions entre les
différents cas de maltraitance.
- De 1981 à 1994, baisse des cas
d’exhibitionnisme et de viols rapportés par la police.
On note des divergences
d’évaluation : en 1992, étude sur l’ensemble de
l’Allemagne, menée par l’Institut de Recherche
Criminologique de Basse-Saxe, impliquant 15 771 femmes montre que 8.6% des
femmes révèlent 1 agression sexuelle dans leur vie.
Projeté sur l’ensemble de la population, ce résultat donne
690 000 femmes victimes de violence sexuelle, alors que la police ne fait
état que de 60 000 sur la
même période.
II - Epidémiologie
1°/ Problèmes méthodologiques
Abel [27] dans une revue critique non explicite
portant sur 21 catégories d’actes paraphiles (dont 4 de
pédophilie) constate que la plupart des évaluations se font
par comptage des actes délictueux.
- En population générale :
difficulté à évaluer la fréquence des actes de
paraphilie à cause de la difficulté à obtenir des
réponses.
- Rapports judiciaires : 2 catégories de
paraphilies uniquement : viol par la force et autres crimes sexuels. Le nombre
d’arrestations n’est pas représentatif .
- Interviews de paraphiles en traitement, sous
condition de confidentialité : chiffres plus proche d’une
représentation de la réalité. Maximum : 37,3% victimes
d’exhibitionnisme minimum
0,1% pour inceste avec garçons, fétichisme, sadisme …
2°/ Nombre d’actes par type de paraphilie:
Calcul par la médiane [27]. La plus
forte : exhibitionnisme et masturbation en public. Pour la
pédophilie seule : actes non incestueux sur garçons. La plus
faible médiane : viol.
3°/ Age d’apparition des paraphilies [27] :
Entre 13.6 (travestisme) et 27.1 (inceste avec
fille). En terme de prévention, les traitements doivent donc cibler un
âge précoce.
4°/ Changements de comportement paraphile [27] :
Interview de 859 sujets paraphiles en fonction des 21
catégories d’actes et de 4 types de comportements : contact/sans
contact, intra-familial/extra-familial, fille/garçon, victime
enfant/adolescent/adulte (cite Abel 1989). Pour chacune de ces
catégories de comportement, les changements pour une autre
catégorie ont été notés dans l’intervalle
entre le premier diagnostic et les diagnostics ultérieurs. Des
changements sont remarqués chez un nombre significatif de sujets. Par
ailleurs, la plupart des sujets avec premier diagnostic dans une
catégorie recoivent ensuite des diagnostics secondaires dans d’autres
catégories. Peu de diagnostics secondaires pour les
catégories transsexualisme
et homosexualité « ego-dystonique », sans doute parce
qu’ils sont absents de la classification des paraphilies du DSM-III-R, ainsi que pour viol et l’inceste commis par femme, ce qui pose
la question de leur lien avec le problème central des paraphilies.
Les paraphiles vus en psychiatrie ont un plus fort
taux de changement de comportement et de catégorie, ce qui infirmerait
le rôle d’expériences précoces dans le
développement de comportements paraphiles spécifiques. Ces
changements seraient-ils plutôt expliqués par un manque de
contrôle ?
Etude rétrospective sur dossiers du profil de
157 délinquants soumis à évaluation psychiatrique dans un
hôpital de Singapour [28] (niveau 4). Biais : absence de dossiers venant de délinquants
incarcérés non psychiatriques. Infraction : Attentats à la
pudeur.
Résultats :
Schizophrénie 45%, retard mental 21.7%. 28%
des malades mentaux souffraient d’un symptôme actif au moment des
faits. 15.3% avaient un passé d’infraction sexuelle. Aucune
différence statistiquement significative entre les nouveaux agresseurs
et les récidivistes. Les actes se passaient majoritairement entre 6h et
18h.
B
- PEDOPHILES
Les
évaluations se basent soit sur les victimes, soit par enquête
auprès des agresseurs. Dans les deux cas il est difficile de mettre au
point une méthode d’estimation fiable.
- National Crime Victimization Survey : en 1996,
échantillon national représentatif de 94 000 âgés >12
Pour 1000 enfants âgés 12-15 ans :
Incidence du viol ou tentative 1.3 ;
incidence d’agression sexuelle : 0.9
Pour 1000 adolescents âgés 16-19 :
5.7 ; 1.1
Uniform Crime Reports (FBI) : toutes les agences
locales ne participent pas.
- National Incident Based Reporting System
appelé à remplacer le UCR :
8.7% des viols sur victimes mâles. 15% des
victimes violées ont <12 ans, dont 90% par une personne connue de la
victime. 29% entre 12 et 17 ans.
- US Department of Justice : Entre 1980 et 1994,
l’ensemble de la population carcérale d’état a
crû de 206% ; celle des agresseurs sexuels , de 330%. La proportion
des agresseurs sexuels incarcérés est passée de 6.9
à 9.7%. – Une enquête auprès des détenus
indique que les 2/3 de ces derniers ont agressé des mineurs ; sur
ces 2/3, 58% ont agressé des enfants <12 ans.
A noter : les méthodes habituelles de
recueil des crimes et délits ne permettent pas de connaître le
nombre réel d’actes impliquant des enfants.
b/ Selon N. Mc Conaghy [22]
Le DSM-IV est
peu employé dans les études de prévalence à cause de sa limitation. La définition de DEH Russell est
la plus utilisée : Tout contact ou tentative de contact sexuel
avec un parent d’au moins 5 ans plus âgé, ayant
débuté avant que la victime n’aie 18 ans. L’abus est
signifié même si le ressenti de la victime est neutre ou positif.
Parmi les premières études
représentatives en population générale aux USA :
- Finkelhor (1988) 27% des femmes et 16% des hommes
déclarent avoir été victimes d’abus sexuels avant l’âge 18
ans
- Laumann (1994) 17% des femmes et 12% des hommes
déclarent avoir eu des contacts sexuels avant l’âge de 14
ans avec une personne d’âge >14 ans.
Tous deux rapportent un taux de prévalence en
fonction de l’âge qui ne soutient pas l’hypothèse
d’une augmentation liée à la révolution sexuelle des
années 60.
- Williams (1994) plus d’un tiers des femmes
victimes d’abus sexuels oublient d’en faire état 17 ans
après les faits.
- Kilpatrick (1992) 2.5% enfants ou adolescents
déclarés abusés sexuellement dans 14 états des USA.
c/ Pour GG. Abel [27] la pédophilie serait moins fréquente que
ce que l’on dit. Elle est étudiée en détail, car
elle conduit souvent en psychiatrie.
Abel Cite sa propre étude (1987) menée
sur 453 agresseurs : 67,112 victimes et 106,916 actes. Actes sans contact
physique : 98.7% filles ; actes avec contact physique 62.0% victimes
garçons. Avec ou sans contact physique <21% d’actes sur des
victimes dans la famille. Avec contact et inceste <1%. Les agresseurs incestueux n’ont
souvent qu’une victime pour des actes répétés. La
grande fréquence d’incestes vus en clinique résulterait de
l’importance des dégâts physiques et mentaux
occasionnés par ces actes répétitifs.
2°/ Relation entre préjudices subis par la
victime et évaluation des taux d’abus [22]
a/ Préjudices physiques :
Plusieurs études font état soit d’absence
d’atteinte physique, soit de grands désaccords dans le taux
annoncé. Quant aux meurtres d’enfants, l’étude de
Quinsey (1986) dénombre 3 abus sexuels pour 83 victimes.
L’abus sexuel doit être mis en relation
avec les autres formes de mauvais traitements, qui sont plus fréquents
(cite Kilpatrick 1992) et plus menaçants pour
l’intégrité physique de l’enfant. La charge
émotionnelle produite par l’abus sexuel provoque des
réactions excessives (cite Finkelhor 1984]. Dans les pays anglo-saxons,
cette attitude semble associée au désir de protéger
l’enfant de toute forme de sexualité, provoquant un embargo
officieux sur les recherches sur la sexualité infantile (cite McConaghy
1993).
b/ Préjudices psychologiques à court
terme :
Confusion dans l’évaluation des
conséquences en raison des difficultés et des insuffisances
méthodologiques.
Pas de syndrome manifeste (cite Beitchman 1991). Les
PTSD et comportements sexualisés (avec de grandes variations de
fréquence entre les études) semblent les troubles les plus spécifiques.
D’où la croyance que les comportements sexualisés chez
l’enfant sont le signe d’abus sexuel, faisant oublier les
comportements normaux d’exploration sexuelle chez l’enfant.
Facteurs d’augmentation du nombre de
symptômes : abuseur
très proche,
fréquence, durée, utilisation de la force,
pénétration. Mais ces variables n’ont jamais
été étudiées toutes ensemble et leurs effets
n’ont pratiquement pas été contrôlés
statistiquement.
Rares études longitudinales montrant 10
à 24% d’aggravation.
La majorité des études sont
réalisées avec des échantillons venant de la protection de
l’enfance ou de services psychiatriques et aucune analyse
multivariée n’a fait la part des différents facteurs de
risque dans l’apparition des symptômes (cite Nurcombe 1995).
c/ Préjudices psychologiques à
long-terme :
Certaines études mesurent le fonctionnement
à l’état d’adulte en relation avec l’abus
sexuel.
Kilpatrick (1992) a trouvé une relation
statistiquement significative entre un fonctionnement adulte défaillant et le fait d’avoir eu des
relations sexuelles avec un proche parent, accompagnées de pressions ou de violence. Les hommes
rapportent moins de vécus négatifs que les femmes. Selon cite
Finkelhor (1985), ceci ne correspondrait pas à la réalité,
mais serait une attitude de protection de leur indépendance virile.
3°/ Caractéristiques des pédophiles
[22]
Cite Abel (1988) : sur 561 hommes interviewés
(avec garantie de confidentialité)
la majorité avoue plusieurs paraphilies ; ce qui est en
contradiction avec l’estimation traditionnelle, confortée par le
fait que les abuseurs inculpés le sont toujours pour le même type
d’abus.
Cite
Marshall (1996) qui trouve une majorité d’abuseurs ne
pratiquant qu’un type de paraphilie, et qui estime que les
résultats d’Abel doivent être ré-examinés dans
des études comparatives.
4°/ Confusion entre homosexualité et
pédophilie [22]
La confusion fréquente entre
homosexualité et pédophilie semble résulter de
l’impact médiatique et des aspects légaux de
l’homosexualité. « En fait l’homme à plus fort
risque de pédophilie serait un beau-père ou un partenaire
d’une femme ayant des enfants filles dont il n’est pas le
père biologique ». Presque toutes les études de prévalence
de la pédophilie en population montrent 2 fois plus de victimes filles
que garçons. Dans les échantillons cliniques, la proportion est
plus importante encore. L’étude de Dunedin (Anderson 1993) donne 1
beau-père sur 10.
5°/ Sexe des pédophiles [22]
La majorité des agresseurs identifiés
sont des hommes. Les abus féminins sont peu signalés, et
concernent majoritairement des garçons. Deux études
rétrospectives chez les adultes, et notent respectivement une prévalence de 1% (Finkelhor
1990) et 4% (Laumann 1994) d’abus sur des filles et de 17% et
54% sur des garçons. La différence entre ces études vient
de la nature des questions posées : de nombreux hommes ne considèrent pas leurs
expériences sexuelles prépubères avec des femmes adultes
comme des abus sexuels.
II
- Evaluation par enquête auprès des abuseurs :
1°/ Prévalence des pédophiles
a - D. Finkelhor, dans une
étude de niveau 4 [30], teste une approche méthodologique pour
recueillir des données de prévalence auprès des abuseurs
eux-mêmes :
- Population : 2827 américains >18 ans.
- Méthodologie : Interview
téléphonique ½ heure sur les problèmes
généraux liés à l’abus sexuel
d’enfants. Technique devant faciliter l’aveu dans un anonymat
garanti : adaptation de la « Randomized Response Technique » de
Folsom qui permet de contrôler les biais liés aux questionnaires. Une
question anodine est posée simultanément à une question
sensible (aveu d’abus). Un dispositif automatique permet à l’interviewé de
décider, à l’insu de l’interviewer, à quelle question (anodine ou
sensible) il répond. La question
anodine est répétée seule à un autre moment
ce qui permet d’évaluer la prévalence des réponses
et ensuite, par différence, la prévalence des réponses
à la question sensible. L’échantillon est réparti en
deux groupes différant par la nature des questions anodines afin de permettre
une validation interne de l’expérience.
- Résultats : 17% abuseurs dans un groupe (G1)
et 4% dans l’autre (G2).Rapporté à la population des USA :
entre 13% et 21% d’une part, et entre 1% et 7% d’autre part. Les
tests de validation interne attribuent cette différence à la
nature de la question anodine posée au groupe G2 : de faible
prévalence et de signification ambiguë. La prévalence du
groupe 1 serait donc plus proche de la réalité, ce que confirment
les corrélations avec les autres questions.
- Les estimations résultant du rapport entre
le nombre de victimes et le nombre de victimes par abuseur permettent
d’évaluer la proportion d’hommes abuseurs à 5%. En
augmentant le taux de victimes et diminuant le nombre de victimes par abuseur,
on arrive à 10% d’abuseurs.
b - McConaghy [22] constate que
l’on a peu d’informations sur des échantillons
représentatifs.
- Une étude nationale sur échantillon
masculin aléatoire (cite Herman 1990) signale entre 4% et 17%
(intervalle de confiance très large donc inexploitable, ou bien
utilisation de méthodes différentes ?) reconnaissant ayant
abusé sexuellement d’enfants. Malamuth (1989) et MacConaghy
(1993) trouvent 15% d’hommes
et 2% de femmes (USA et Australie).
- Les estimations fondées sur le nombre de
victimes en fonction du sexe et sur le ratio adultes/enfants dans la
population, permettent d’estimer que 5% d’hommes et 0.5% de femmes
abusent d’enfants. Comme 2 fois plus de filles que de garçons
disent avoir été abusés pendant l’enfance et que les
abuseurs de garçons ont beaucoup plus de victimes, les agresseurs de
filles doivent être beaucoup plus nombreux. Freund et Watson (1992) ont
calculé un ratio de 11 :1.
2°/ Prévalence des agressions devant
témoin(s)
Une étude à visée clinique de
R.C. Underwood [31].
Evaluation à l'aide d'un questionnaire
(élaboré pour l'étude) auprès de 113 abuseurs
sexuels d'enfants comparés à 18 Agresseurs sexuels (sans
contact), dans deux centres de traitement pour abuseurs sexuels. Nombre
d'abus/agresseur dans le groupe abuseurs enfants : 88.6
- Résultat :
54% des abus effectués en présence d'un
autre enfant.
23% en présence d'un adulte
14.2% en présence des deux.
44.3% ont abusé de l'enfant en sachant le
témoin éveillé
12.4% dans le même lit qu'un autre adulte
3.5% dans le même lit qu'un adulte + un autre
enfant
64.2% pensent qu'ils en seraient arrivés
à ce point-là s'ils n'avaient pas été
arrêtés.
Malgré ses limites (imperfection du
questionnaire et échantillon on représentatif) l'étude
permet de poser la question non seulement du caractère non inhibiteur de
la présence d'un tiers, mais même de son facteur excitant.
C
- FEMMES AGRESSEURS
I
– Problèmes culturels
J. Hetherton [33] dans une revue non explicite,
constate que des stéréotypes sociaux fondés sur
l’idéalisation de la femme induisent le refus de certaines
réalités et conduisent à la minimisation ou au déni
des abus sexuels commis par les femmes sur les enfants, en particulier chez les
professionnels concernés.
1°/ Idées reçues concernant ce
type d’abus :
- Problème anodin puisque peu de
dénonciations (réticence des victimes liée au rôle
de la mère)
- Les études montrent un faible taux (en fait
études rétrospectives ne sont pas efficaces).
- Problème essentiellement masculin (image
culturelle de la femme)
- Le comportement sexuel des femmes envers les
enfants est doux et gentil donc anodin
- L’abus sexuel féminin n’est pas
nocif (stéréotype social)
- Les femmes abusives sont malades
2°/ Recommandations
ciblant les professionnels de la protection de l’enfance
spécialisés en maltraitance :
- Créer un climat autorisant la confidence
- Adopter le même comportement de soutien, quel
que soit le sexe de l’agresseur
- Appliquer le même questionnaire dans les cas
de complicités féminines comme dans ceux d’agresseurs
masculins
- Etre conscient du fait que les femmes sont capables
d’agressions graves
- Porter le problème sur la scène
publique
Hetherton ajoute qu’il conviendrait
d’entreprendre des recherches sur les biais induits par les
professionnels du domaine de la protection de l’enfance.
II
– Un éclairage sur la situation française
Situation en France au 1er Jan. 1997
: 2223 femmes
incarcérées soit 4,3% de la population pénale. Stable sur
5 ans. Sur ce nombre : 7,1% [73] pour infractions sexuelles. Seul groupe d’infractions
féminines dont le pourcentage augmente sur les 5 ans (5,8% en 1993).
Une petite étude
épidémiologique descriptive d’après 34 dossiers,
menée par N. Vidon [33] au centre pénitentiaire de Rennes indique
2 groupes de résultats :
D’une part 29 condamnations pour infractions
intra-familiales. 18 complicités de viol, 8 viols, 1 corruption, 1
atteinte sexuelle, 1 proxénétisme. 4 infractions en
réunion. Age moyen 35 ans.
D’autre part 5 infractions extra-familiales
toutes en réunion et accompagnées d’autres infractions.
Moyenne d’âge 27 ans.
Pour l’ensemble, peu de condamnations à
des peines alternatives. Aucune mention de perversion, par contre, mentions de
psychopathies alors que ce concept est peu utilisé pour l’homme.
D
- ENFANTS ET ADOLESCENTS AGRESSEURS
Une
étude de J.A. Hunter [34] analyse le dossier de police de 126
adolescents mâles arrêtés pour agression sexuelle : 62
contre pairs ou adultes, 64 contre enfants. La représentativité
de l’échantillon est inconnue.
Résultats :
-
Modus operandi préférentiel contre pairs et adultes : chez la victime ou dans un lieux
public, attaque surprise, actes sexuels multiples. Souvent associé
à une autre activité criminelle. Victime féminine, pouvant
être inconnue.
-
Modus operandi préférentiel
contre enfants : chez la victime ou chez l’agresseur,
activité sexuelle initiée sans explication. Actes sexuels
multiples. Victimes proches.
-
Est prédicteur de violence dans les agressions de pairs et adultes :
caractéristiques de la victime la rendant difficile à
contrôler. D’où moins de violence contre les enfants, qui
sont plus passifs.
E
- L’INCESTE
P.J. Carnes [35] (chapitre d'ouvrage, niveau 4)
étudie la relation entre addiction sexuelle et inceste. Dans une
enquête nationale (USA, 41 états) un questionnaire a
été adressé à 1000 "obsédés
sexuels" en cours de traitement. Un sous-groupe de 63 abuseurs incestueux
[54 hommes, 4 femmes) est constitué à partir des 412 questionnaires retournés.
L’étude présente un biais lié à la population
qui est en demande de soins et a donc un meilleur niveau d'éducation.
L’article ne signale pas si le questionnaire a été
validé.
Résultats de la comparaison des 2 groupes :
Alors
que tous les obsédés sexuels sexualisent leurs relations, les
incestueux repoussent les frontières plus loin. Leurs comportements sont plus accentués dans le
domaine de la victimisation, avec un certain nombre de victimisations à
l'extérieur de la famille.
44.52%
ont subi des abus dans l'enfance [38.91% pour les non incestueux) : abus
émotionnel et abus physique ; enfin abus sexuel.
Conclusion : il existe une catégorie
d'abuseurs incestueux sans addiction sexuelle. Chez les
« addicts », une minorité sont incestueux. Un certain nombre d'incestueux addicts
ont commis d'autres crimes sexuels. Certains incestueux non addicts ont
probablement commis également d'autres crimes sexuels. Evaluer
l'addiction sexuelle est une priorité pour le thérapeute ; une
échelle diagnostique en 15 points est décrite (se
référer p 141) ; le traitement de l'addiction est fondé
sur la technique dite
« en 12 étapes » analogue à celle des
alcooliques anonymes.
F
- VIOLENCE SEXUELLE INTRA-CONJUGALE
D’après une revue critique non explicite
de C.M. Monson. [7], aux USA, de 10% à 14% des femmes mariées ont
été violées par leur mari (cite Finkelhor 1988 ; Kilpatrick 1988 ; Russell 1990).
Peu d'études sur la situation inverse. De 1%
à 5% des femmes disent avoir sexuellement "violé" leur
petit ami (Pirog-Good 1992 ; 1989 ; Sigelman 1984). Les femmes seraient moins
enclines à mettre en cause leurs comportements coercitifs en raison de
leur habitude à être sujette à subir la coercition
sexuelle.
Peu d'études s'intéressent à la
coexistence d'agressions sexuelles et non-sexuelles. Des études sur des
femmes en hébergement d'urgence 33% à 59% des femmes battues
rapportent des viols intra-conjugaux. Ces résultats ne sont pas
généralisables. Dans les études en population, 1% à
10% des femmes non battues mentionnent des situations de viol (Finkelhor 1985 ;
Russell 1990).
Question supplémentaire - Quelles sont les données
criminologiques générales concernant les agressions sexuelles ?
Définition
de la criminologie (Durkheim) : “Nous appelons crime tout acte puni et
nous faisons du crime ainsi défini l’objet d’une science
spéciale, la criminologie”.
Pour
Cordier [36] (avis d’expert) « la criminologie clinique a pour
objet l’étude de la personnalité du délinquant,
l’évaluation de son état dangereux,
l’élaboration du programme de traitement qui devrait lui
être appliqué et le suivi de son éxécution, avec
contrôle de ses résultats. /…/ On peut désormais
ajouter l’intervention thérapeutique elle-même
puisqu’elle est rendue obligatoire par la loi »
(« criminologie interventionnelle »).
Pour
Greenland [37] (avis d’expert), il est difficile de ne pas mentionner
l’attitude de certaines féministes qui pensent que les
délinquants sexuels doivent être sévèrement punis
« afin de revenir à un état antérieur
d’innocence et d’harmonie sociale ». En tant que groupe
de professionnels du domaine, nous devons faire tout notre possible pour
éviter d’entretenir l’idée que la punition ou le
traitement résoudront à eux seuls la question aiguë du
viol ». Le pénis fut considéré comme source de
honte par de nombreux théologiens ; le fait de ne pas devoir le
montrer en public ajoute à l’anxiété.
« Cette crainte se perpétue car les hommes des pays
occidentaux sont persuadés que le siège de leur âme est
dans leur tête, comme ils pensent que leur pénis est le siège
de leur sexualité ».
A
- Evaluation des agresseurs sexuels
Pour Hachouf [24], revue
non exlicite, avis d’expert [24], la prise en charge médicale et
psychologique doit obligatoirement être précédée
d’une évaluation tenant compte de :
.
Délit : répétition, violence ou contrainte associées
.
Histoire du sujet
.
Personnalité
.
Troubles mentaux associés
.
Evolution sexuelle
.
Déficits chroniques
.
Environnement etc
Le Questionnaire
d’Investigation Clinique pour les Auteurs d’Agressions Sexuelles
(QICPAAS), France : conçu pour la recherche, il est inapplicable en
milieu carcéral en raison de sa longueur [4h de passation) et de ses a
priori psychopathologiques.
Un instrument
élaboré au SMPR de Bordeaux-Gradignan est en cours de validation.
B
- typologies, classifications
N. Langström, [38] (niveau 4) étudie des 4354
dossiers soumis à expertise psychiatrique dite
« majeure » (longue et approfondie) de 1988 à 1995, dont 330
agresseurs [8%) âgés de 15 à 20 ans, parmi lesquels 47
coupables d’agressions sexuelles (Suède).
Taux d’irresponsabilité chez les
jeunes délinquants :
40% ; chez les délinquants sexuels : 41% ; chez les
jeunes délinquants sexuels : 53%
5 catégories : Cf Bénézech,
cité par V. Nicolleau [4]
Par recherche de pouvoir / par rage / par sadisme /
par comportement antisocial / psychotique
3 types de passage à l’acte : Cf
Balier, cité par V.Nicolleau [4] :
Carencés affectifs (passage à
l’acte violent) / fragiles avec identité mal assurée
(impulsivité et violence
avec meurtre possible) /
sujets plus stables (séduction et mauvaise foi : pédophiles,
incestueux)
Classification de Root, 1971, citée par J.J.
Gayford [6] :
- Type I : Inhibé, pas de
personnalité asociale, état d’urgence avec grande
anxiété, pénis flacide, culpabilité.
- Type II : Moins inhibé, plus sociopathe,
pénis en érection, peu de culpabilité. Plus susceptible de
récidiver dans d’autres formes de paraphilies
1°/ Selon R Coutanceau [39]
(éditorial) : 3 types d’actes pédophiliques :
- « sujet homosexuel ou
hétérosexuel ayant une potentialité pédophilique
dite secondaire dans des situations à risques
- sujet ayant un attrait pédophilique exclusif
ou prévalent avec passage à l’acte dans un contexte de
proximité
- sujet prédateur recherchant l’anonymat
sévissant loin de sa base ; acte souvent violent, parfois
ponctué par un homicide »
2°/ La classification de Groth
et Birnbaum (1979) est la plus
utilisée d’après N. McConaghy. [22] et K.A. Danni
[40] :
- Pédophiles « fixés »
attirés depuis l’adolescence par des individus jeunes, de manière
prioritaire ou exclusive. Ajustent leurs comportements sur celui des enfants.
Actes prémédités.
- Pédophiles « régressifs »
attirés dès l’âge adulte par des personnes
jeunes. Actes souvent sous
l’action d’un stress.
N. McConaghy [22] ajoute que les
« régressifs » agressent des filles et les
« fixés » des garçons et diffèrent
encore par d’autres caractéristiques :
- Pédophiles hétérosexuels : peu
de victimes, abus répétés d’une même victime
sur de longues périodes, agression au domicile de la victime, âge
moyen de la victime 8 ans, agresseur attiré également par les
femmes adultes, souvent marié, début du comportement
pédophile à l’âge adulte, souvent problèmes
socioéconomiques, psychopathologiques, …
- Pédophiles homosexuels : victimes nombreuses
(jusqu’à 100), en général une seule agression
par victime, hors du domicile de
la victime, âge moyen victime 10 ans, pas d’attraction sexuelle
pour adultes, célibataire, comportement débute à
l’adolescence, situation socioéconomique stable,
immaturité, absence d’intérêt pour les amitiés
adultes.
Les agresseurs de filles, en particulier incestueux
récidivent peu, ceux de garçons ont un fort taux de
récidive.
Les agresseurs de garçons pubères ou
post-pubères ne répondent pas aux critères DSM-IV de la
pédophilie. Freund (1982) a proposé de les définir
hébéphiles.
3°/ Classification de Fitch (1962), présentée par J.J. Gayford.
[6], revue non explicite :
- Immatures
- Frustrés
- Sociopathes
- Pathologiques
4°/ Classification de Knight (1988), revue par
Prentky (1997), avec 6 profils de pédophiles [40]:
Interpersonnel / Narcissique / Exploiteur / Sadique
atténué / Agressif non sadique / Sadique
Cette classification dépend directement des
diagnostics posés par des spécialistes confirmés et
n’est pas immédiatement utilisable par les professionnels de
justice.
5°/ Pendergast (1991) [40] :
couplage de la classification avec les notions « fixé » /
« régressif » de Groth et extension aux hébophiles.
Les pédophiles cherchent prioritairement à plaire, les
hébophiles préfèrent des victimes pubères.
a/ hébophiles (facteurs 5-8),
et les incestueux (facteurs 9-12) :
1. Antécédent de victimation sexuelle
pendant l’enfance ; 2. victime pré-pubère ; 3. Pas de
relation avec partenaire d’âge approprié ; 4. Cherche
à séduire l’enfant ; 5. Relations avec un partenaire
d’âge approprié ; 6. Vécu
d’évènements stressants ; 7. Attente d’une réciprocité avec la
victime ; 8. Victime post-pubère ; 9. Les victimes sont les enfants de
l’agresseur ; 10. Abus physiques ; 11. Bonne façade sociale ; 12.
Motivé par la colère.
b/ Une étude a
été menée par K.A. Danni [40] sur un échantillon de
168 agresseurs sexuels condamnés dans le Wyoming (biais) sur dossiers de
« Presentence Investigation » (très complet). L’analyse
des informations en fonction des facteurs de Pendergast a premis de
vérifier 3 hypothèses :
- chez les pédophiles : plus de victimisation
sexuelle pendant l’enfance, préférence pour des partenaires
pré-pubères, séduction active.
- chez les hébophiles : Evènements
stressants actuels
- chez les incestueux : Acte perçu comme quelque chose auquel on a droit
Ces résultats ont des implications pour la
prise en charge :
- des pédophiles : les plus difficiles car se
pensent incompris. Le traitement doit être en face à face,
approfondi et sur toute la vie.
- des hébophiles : une fois les
problèmes annexes régularisés, la probabilité de
récidive diminue.
- des incestueux : Il est nécessaire de
s’attaquer à la façade sociale en ayant des contacts avec
le milieu de vie de l’agresseur.
Selon J.J. Gayford. [6], 50% sont
mariés ; problèmes relationnels d’ordre sexuel ;
problèmes de personnalité et d’identité
sexuelle ; 10% sont jugés également pour d’autres
offenses sexuelles
VI
- Violence sexuelle intra-conjugale
Selon C.M. Monson [7] (revue non
explicite), les typologies du viol conjugal sont en général
fondées en premier lieu sur la violence sexuelle et en second lieu sur
la co-existence de la violence sexuelle et non sexuelle. Les typologies de la
violence conjugale sont en général fondées en premier lieu
sur la violence et en second lieu sur la co-existence des 2 types de violence.
La plupart des informations sur l'agresseur viennent des victimes.
C.M. Monson propose une typologie du
conjoint violent :
1. Famille uniquement / violence uniquement non-sexuelle majoritairement maritale
/ concerne 45% des conjoints violents
2. Dysphorique-borderline / violence sexuelle ou non
sexuelle / surtout maritale / concerne 25%
3. Généralement violent-antisocial /
violence sexuelle ou non sexuelle / maritale ou extramaritale / concerne 5%
L’auteur évoque
l’importance des théories étiologiques :
théorie de l'apprentissage social (vécus de violence sexuelle
chez les parents, tolérance sociale ou légale) ;
théorie de l'attachement (conjoints "dysphoriques-borderlines) ;
théorie socioculturelle (image de la femme et continuum avant et
après mariage). Une théorie de la violence contre les femmes doit
permettre de prédire qui va être violent dans les relations conjugales,
comment cette violence s'exprimera et si elle dépassera le cadre
conjugal. Il convient de construire des modèles intégrant les
facteurs de risques pointés par les 3 théories, c'est à
dire l'interaction par exemple entre évènements de vie
précoces, attachement, et facteurs culturels (cite Holtzworth 1994).
Besoins :
- Etudes nationales sur des échantillons
aléatoires
- Evaluation de la validité des typologies
d'agresseurs
- Plus d'études sur les co-facteurs
VII -
Antécédents criminels
1°/
G. Casile-Hugues mentionne le passé pénal [8] (avis
d’expert) :
-
Pédophile : délinquance astucieuse ;
-
Violeur : violence, alcoolisme chronique , toxicomanie ;
-
Incestueux : alcoolisme chronique .
Tous : Souvent victimes de violence dans l’enfance.
Pas
d’homogénéité clinique entre les différents
types [41]
2°/ Une étude exploratoire
de Pritchard [42] : vérifier si certains abuseurs sexuels d'enfants ont
des antécédents de criminalité d'un autre type.
Insuffisance des informations.
- Population : 374 dossiers de police
de tous les coupables d'abus sexuel sur mineurs dans deux comtés
d'Angleterre, sur un période de 2 ans. 5 femmes uniquement : exclues.
- Méthodologie testée dans une
étude pilote.
- Résultats :
186 sujets : coupables uniquement d'agressions
sexuelles antérieures : typologie "régressifs" et
"fixés".
97 sujets : agressions sexuelles et autres : groupe
avec la plus grande proportion de mentions "non coupable" ;
intimidation physique des victimes ?
91 sujets : violence non sexuelle : groupe
particulièrement violent.
- Conclusion : Confirme l'étude de
Waterhouse (1994) sur l'existence d'un sous-groupe particulièrement
dangereux d'abuseurs d'enfants.
VIII - Aspects
anthropologiques
Pour L .M. Villerbu. [43] (avis
d’expert) « Le thérapeutique est le moyen par
excellence d’accès à l’interprétation des
conduites délinquantes ». « La conduite criminelle
est un champ privilégié d’études des choses
fondées en culture ». Les normes agressées ont leur
correspondant interne. « Rapport psychologique à
l’effet de la transgression des normes. Distinguer l’agresseur
sexuel qui « se résume à son infraction »
de l’auteur d’agressions sexuelles, avec possibilité
d’autres transgressions. Il y a une difficulté d’élaboration
du savoir lié aux « caractéristiques criminologiques
générales des auteurs d’agressions
sexuelles » :
identifications en jeu, qualité formelle de
l’agressé, statut formel de l’agresseur, formes
d’abus, modes d’agressions, éléments de
responsabilité, etc.
R.D.
Nadler [44], dans une revue non explicite, recherche un fondement biologique
à l’agression sexuelle dans l’espèce humaine,
à partir de l’étude en laboratoire du comportement sexuel
chez 3 espèces de grands singes. Les agressions sexuelles se produisent
lorsque les femelles sont en situation de vulnérabilité vis-à-vis des mâles en
particulier en l’absence des contraintes sociales habituelles ou des
comportements spatiaux liés
à l’habitat naturel.
D
- Evaluation de la dangerosité et du risque de récidive
Selon Hachouf [24] (avis
d’expert), il a une insuffisance de l’expertise psychiatrique en
matière d’appréciation de la dangerosité et de la
stratégie thérapeutique. Il par ailleurs est nécessaire de
créer des centres régionaux d’évaluation judiciaire
avec personnel diversifié et qualifié (Cite
Bénézech 1995).
I - Sous-estimation de la
récidive [24]
La plupart des travaux sur
l’efficacité des programmes sont fondés sur la
récidive légale (cite Aubut, Prentky). Taux annoncé pour
les abuseurs non soignés : 15 à 60%.
Un traitement bien adapté ferait baisser de 20
à 30% (cite Alexander ; Grossman ; Marx).
L’évaluation
du risque de récidive nécessite obligatoirement la connaissance
et l’étude de la totalité des informations judiciaires
concernant la victime et l’agresseur.
II - Prédicteurs de
dangerosité potentielle :
1°/
Cf Hachouf [24]
-
Alcoolisme fœtal
-
Victime de sévices sexuels dans l’enfance
-
Jeunesse
-
Psychopathie, sadisme
-
Infractions sexuelles antérieurs (nombre, gravité)
-
Antériorités de violence et d’incarcérations
-
Préférences sexuelles déviantes
-
Alcoolisation avant les faits
-
Agression sexuelle avec violence physique, viol
-
Agression sexuelle extra-familiale
-
Multiplicité des victimes
-
Coït avec fillettes
-
Pédophilie primaire
-
Pédophilie homosexuelle
-
Exhibitionnisme
-
Traitement absent ou incomplet chez agresseur à risque
élevé
Ajouter : Co-morbidité
psychiatrique : troubles anxieux et de l’humeur, usage de substances
psychoactives, autre paraphilie, insuffisance de désir sexuel et de
l’érection (cite Raymond 1999).
2°/ Critères de Schorsh décrits par H. Duncker.
[45] (Avis d’expert).
-
Profondeur des troubles de la personnalité
-
Degré d’intégration dans le moi de la dynamique agressive
et sexuelle
-
Structuration et intensité de la déviation sexuelle
-
Relation entre délit sexuel et crises ou personnalité
-
Qualité de la relation d’objet entre délinquant et victime
III - Le risque
d’homicide
B. Francis [46] dans une étude
rétrospective bien menée (niveau 4) a recherché les
homicides dans les dossiers de 7 442 personnes sur les 21 années suivant
une condamnation pour agression sexuelle en 1973 en Angleterre et Pays de
Galles.
Résultats : 19 personnes ont
été convaincues d’homicide, soit 1 pour 400. Ce qui
diffère de la proportion de 1 pour 3000 hommes dans la population
générale. Pas plus d’homicides constaté chez les
agresseurs d’enfants, mais lorsque ces derniers tuent, ils tuent plus des
femmes étrangères que des enfants. L’âge et la
violence antérieure sont des facteurs de risque.
IV - Pour améliorer
la qualité de pronostic [45]
-
Système de documentation
évitant les oublis dus à l’empathie soignant-malade
-
Association obligatoire de l’équipe pluridisciplinaire dans
l’évaluation de l’évolution
-
Séparer les fonctions psychothérapiques des fonctions
pronostiques
-
Associer un tiers hors traitement au contrôle de la décision
C
- Elaboration du programme de traitement
Cf Hachouf [24], (revue
non explicite, avis d’expert).
Pendant
la mise en examen, dans le cadre d’un protocole d’accord
juge-détenu-équipe soignante, il convient de focaliser non pas
uniquement sur le passage à l’acte (à l’opposé
des équipes d’obédience cognitivo-comportementale), mais
sur ce qui relie les faits à la personnalité.
Critères de sélection (tout ou partie)
permettant d’apprécier de possibles réponses positives aux
soins (se référer au paragraphe complet p185) :
- Reconnaissance des faits
- Demande sincère de soins
- Désir de comprendre le passage à
l’acte
- Soulagement ressenti à la judiciarisation
- Regrets
- Capacités de verbalisation
Si
l’incarcération est brève : priorité au
traitement hormonal, efficace et d’action rapide (cite Aubut)
Après
évaluation :
- Psychothérapie
dont les conditions sont discutées avec le sujet. Ensuite, après
de nombreux entretiens de mise en sens de leur problématique :
psychothérapie de groupe avec approche psychocorporelle (avec un
psychomotricien et un psychologue). En général, tournant
thérapeutique avec passage dépressif aigü qui permet un
rapport différent aux actes et à leurs conséquences.
- Quand les
capacités d’introspection sont limitées, et même avec
déni, surtout violeurs à répétition et
pédophiles : thérapies cognitives et comportementales.
Entretiens individuels répétés, qui peuvent être
complétés par un travail de groupe axé sur
l’identité, l’évaluation de soi, la confiance en soi
les relations sociales, le plaisir à communiquer, les mécanismes
de défense et les éléments de la chaîne qui conduit
à l’infraction. Personnels : psychologue et psychiatre
spécialiste en sexologie. Moyens audiovisuels.
E
- Attitudes du personnel judiciaire
K.M.
Bumby [47] a mené une enquête d’opinion aux USA
(Middlewest), auprès de 42 juges volontaires, inscrits à une
formation sur les agressions sexuelles. Biais de population.
Résultat :
ces juges reconnaissent avoir plus de difficultés à présider
les affaires d’agressions sexuelles ; ils révèlent un
certain nombre de croyances : relation causale avec un certain nombre de
facteurs, impulsivité de l’acte, croyances que les fantaisies
sexuelles déviantes sont inoffensives, difficulté à
appréhender l’hétérogénéité de
ces agresseurs.
B. Cullen [48] dans une étude comparative
rétrospective observe que le traitement judiciaire des agresseurs
sexuels d’enfants ne diffère pas de celui réservé
aux autres délinquants. Cependant leur profil est
différent : situation professionnelle stable, mariés,
américains d’origine européenne, âgés >30,
14% étaient récidivistes sexe ou violence [2% dans le groupe des
autres délinquants)
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