Nous définirons d'abord les principaux termes
en usage dans ce rapport.
Puis,
nous émettrons quelques considérations indispensables à
propos du cadre.
Ensuite,
nous exposerons les caractéristiques générales de la mise
en place de l'approche systémique et du travail familial.
Enfin, nous en détaillerons les applications
dans quelques situations-types.
Chapitre
1
DEFINITIONS
DES PRINCIPAUX TERMES EN USAGE DANS CE RAPPORT
I
- Perspective (ou point de vue, approche) systémique : centration, à visée
diagnostique et/ou thérapeutique, sur les interactions verbales,
comportementales et fantasmatiques entre l'auteur [3] et :
- sa
société en général ;
- les
groupes informels ou institués où il vit, ou qui peuvent
influencer sa vie ;
- plus
particulièrement, sa famille nucléaire actuelle (si elle existe),
sa famille d'origine et sa famille élargie.
II
- Traitement (ou prise en charge ; programme d'accompagnement), terme équivalent au vocable anglais management : il s'agit de la gestion globale d'un programme
(d'interventions) constitué, en proportions variables par des
composantes éducatives, sociales, thérapeutiques
(psychothérapeutiques ou/et médicamenteuses) et judiciaires.
III
- Entretiens et psychothérapies : Dans le traitement, on
met en place des rencontres de paroles instituées qui ont un objectif essentiellement ou
principalement psychothérapeutique. Elles s'adressent à l'auteur
mais aussi à d'autres individus (par exemple, son conjoint), à
des sous-groupes de la famille nucléaire, à l'ensemble de
celle-ci, etc. ...
Il
faut en distinguer deux grandes catégories :
- Les
entretiens (individuels, de couple, de famille, de groupe) [4] : rencontres de paroles demandées par les
professionnels (par exemple, imposées par le magistrat) dont
l'exécution est contrôlée par eux et auxquelles le
destinataire est prié de se présenter [5].
Les
entretiens ont des missions variées : aide sociale, éducation,
gestion du temps, information mais aussi et même souvent principalement,
intention psychothérapeutique. En référence à quoi,
nous appellerons thérapeutes les professionnels qui les mènent :
à eux d'essayer de motiver les destinataires à y être
présents davantage que de corps... l'expérience montre qu'ils y
réussissent régulièrement [2, p. 45 ; 3, p. 31-62].
- Les
(psycho)thérapies :
rencontres de paroles demandées par l'auteur lui-même (ou sa
famille) ; elles se mettent en place d'emblée ou après
sensibilisation [5] dans une perspective d'une rencontre de soi et d'un
meilleur fonctionnement [6].
Lorsque
ce que nous écrivons concerne indifféremment les entretiens ou
les thérapies, nous parlons de travail ou de rencontres (individuelles, de couple, etc.
).
IV
- Entretiens (ou/et thérapies, rencontres, travail) familiaux (ou de
famille) : ce sont des rencontres de paroles dont la
visée thérapeutique porte en proportions variables sur :
. la
famille (nucléaire, élargie...) ou des sous-groupes de celle-ci
en tant qu'ensembles (par exemple, amélioration de la communication, de
l'ambiance de vie, meilleures répartitions des places de chacun, etc. )
;
. chacun
de ses membres, à partir de sa réflexion personnelle
stimulée par les autres, et de nouvelles influences qui émaneront
des rencontres.
L'objectif
thérapeutique familial n'a donc rien à voir avec la composition
concrète et mouvante des groupes et sous-groupes présents aux
différentes séances [22, p. 218] ; on peut parfaitement faire un
travail familial en ne recevant jamais que séparément les
différents membres d'une famille, et en fonctionnant comme go-between.
Pour
éviter les confusions, nous parlerons d'entretiens (thérapies,
rencontres,...) individuels systémiques pour
désigner ceux qui sont réalisés avec un seul destinataire
présent mais dans le cadre d'un travail familial. Ils ne sont donc pas
protégés par le secret professionnel à l'égard des
autres membres de la famille et servent entre autres à préparer
les rencontres avec ceux-ci.
Par
contre, nous parlerons d'entretiens (thérapies, rencontres, ...) individuels
personnels pour désigner
ceux réalisés avec un seul destinataire également, mais
dans le seul intérêt thérapeutique de celui-ci (par
exemple, dans le cadre d'un travail psychanalytique, cognitivo-behavioriste,
etc. ).
- Entretiens
(ou thérapies, rencontres, travaux) de couple : il s'agit cette fois d'application au couple des
objectifs et des modalités que nous venons d'esquisser à propos
du travail familial. Donc, concrètement, les personnes présentes
en séance peuvent être le couple ou chacun de ses membres [7].
Dans
notre rapport, ce qui sera décrit, sans autre précision, sous le
vocable "familial" inclut aussi le travail avec le couple. Lorsque
des applications spécifiques existent, elle seront signalées
explicitement.
N.B. Ne sera pas abordé, dans le présent
rapport, la nature du fonctionnement psychique de l'auteur d'agression
sexuelle. celle-ci est toutefois une composante déterminante pour
l'implication de l'individu dans le travail thérapeutique.
Chapitre 2
LE CADRE DU TRAVAIL SYSTEMIQUE ET
FAMILIAL
I
- Le traitement complet de
l'auteur comporte des dimensions sociales, psychothérapeutiques,
médicamenteuses (rares actuellement) et judiciaires (fréquemment).
On
ne devrait jamais y substituer l'une à l'autre, c'est-à-dire
attendre de l'une qu'elle remplisse centralement les objectifs d'une autre !
Ces
composantes doivent donc coexister et dans toute la mesure du possible,
harmonieusement, chaque intervenant ayant du respect pour les autres : en se
parlant et en tenant compte les uns des autres, ils accroissent la
fécondité du traitement [5] [1, p. 29-30].
II
- Une perspective
systémique, avec les rencontres familiales qu'elle inclut, constitue une
composante intéressante de la dimensions psychothérapeutique du
programme. Il serait néanmoins réducteur et dangereux qu'elle
constitue une référence exclusive ; il ne s'agit pas non plus de
faire des hiérarchies dans les références : la perspective
systémique doit donc coexister avec bien d'autres, psychodynamique,
génétique, etc. ... Nous souhaitons qu'elles trouvent toutes des
voies de complémentarité et d'intégration [1, p. 29 et
30].
III
- Des rencontres familiales
mises en places précocement
constituent un complément très intéressant, parfois
indispensable, des rencontres individuelles personnelles.
Lorsque
l'on parvient à mettre en place ces dernières, on constate alors
souvent quelles exercent la fonction thérapeutique la plus basale. Mais
ce n'est pas toujours possible, et alors on réussit parfois à
mettre en place des rencontres familiales qui fonctionnent à elles
toutes seules.
IV
- Le traitement de l'auteur
devrait quasi-toujours comporter des actes dans le réel. Ce sont, par exemple, des dédommagements
(appelés aussi réparations) [30, p. 151-152], des mesures
d'éloignement, des interdictions de fréquentation, des
réaménagements de la vie quotidienne ou des relations sociales,
... Certains de ces "actes" sont convenus à l'amiable et
d'autres décidés judiciairement ; mais dans les deux cas, on doit
toujours contrôler de près leur exécution et leur
non-effritement dans la durée.
L'institution
judiciaire dispose en outre de sanctions spécifique prévues par
le code pénal [28].
Les
rencontres familiales ne devraient jamais prendre la place de l'un de ces actes
[8].
L'inverse
n'est pas vrai : dans les rencontres familiales, on devrait pouvoir parler de
ces actes et de leurs sens et chercher comment en faciliter l'exécution,
notamment via les ressources de la famille.
V
- Il est logique que la
société civile et/ou les autorités judiciaires cherchent
à exercer un contrôle social sur le comportement ultérieur
de l'auteur.
Néanmoins,
nous ne devrions jamais accepter qu'un entretien et a fortiori une thérapie
soit mis en place dans cette perspective : si l'on veut du contrôle
social, que l'on mette en place une surveillance sociale et une autre
catégorie d'entretiens spécifiques.
Il
n'en est pas moins vrai que des rencontres thérapeutiques bien investies
par l'auteur ont des chances d'augmenter sa sociabilité et donc de
diminuer le risque de récidives.
Le
thérapeute, responsable de thérapies ou d'entretiens familiaux,
peut être informé de récidive avérée ou de
l'imminence de celle-ci. Il le sera plus probablement que le thérapeute
individuel puisqu'il travaille avec plusieurs membres de la famille,
témoins partiels des comportements de l'auteur.
Il
ne peut pas traiter cette information comme un seul fait de parole. Il lui
revient de travailler énergiquement à ce que cette
récidive soit empêchée ou s'arrête, d'abord en
restant dans le registre spécifique de dialogue où il se trouve.
Si ce n'est pas suffisant, il doit en sortir et demander l'aide de ressources sociales
et/ou judiciaires compétentes.
VI
- Une dimension judiciaire est
souvent incluse dans le programme d'accompagnement de l'auteur. Nous ne
discuterons pas dans ce rapport de son bien-fondé systématique ni
des différences d'appréciation et de pratique à leur propos
selon les pays. Nous nous limiterons à discuter des situations où
elle a été mise en place.
A. Quand il y a travail multidisciplinaire, en
intégrant la notion de respect dont nous avons parlé plus haut,
il est essentiel que les objectifs restent différenciés : le
thérapeutique pour les psy [9], le sanctionnel et le contrôle du respect des
lois pour les magistrats pénaux, ainsi que la protection de l'enfant
pour les juges pour mineurs. H. Hamon [8, p. 243] écrivait à ce
propos : "Le travail pluridisciplinaire qui est prôné sur
un mode presque incantatoire... s'avère difficile à mettre en
place et implique une rigueur dans le maniement des concepts et des champs
respectifs".
B. Les thérapeutes n'en seront pourtant pas
quitte d'avoir à parler des Lois humaines, des lois de la cité,
des sanctions et de leurs sens, du seul fait de l'existence et des missions
officielles dévolues au magistrat.
Par
ailleurs, ils ne devraient jamais proposer à ceux-ci que les entretiens
ou des thérapies se substituent aux sanctions pénales ni aux
autres mesures "dans le réel".
C. Quant aux magistrat français, la loi du
17/6/1998 [29 ; 31] leur donne la latitude d'imposer des soins :
1. On ne peut entendre par là
que imposer des entretiens [4b ;
2] ; de plus, ils gagnent à le faire après concertation avec des psy qui connaissent la
problématique en général et tel auteur d'abus en
particulier ; ensemble, ils peuvent en évaluer les modalités les
plus adaptées [29]. A défaut, nous recommandons qu'ils recourent à
une ordonnance très générale qui enjoint des entretiens
"individuels ou/et de couple ou/et de famille".
2. Ils doivent alors laisser aux
thérapeutes de terrain la responsabilité d'évaluer ce
qu'il est réaliste de mettre en place !
Ces
derniers ont une obligation de moyens, mais non de résultats. Ainsi peuvent-ils
modifier la composition des entretiens, voire les suspendre ou les
arrêter en tenant informé le magistrat, pour faire face à
des réalités comme le non-investissement permanent, le
pseudo-investissement, ou l'utilisation perverse des entretiens par l'auteur
(ou/et par des membres de sa famille).
3. Les magistrats peuvent
éventuellement encourager l'auteur à s'engager dans une
thérapie mais non l'imposer : une psychothérapie demeure
fondamentalement une démarche décidée librement [10].
Dans
les situations "judiciarisées", les entretiens constituent un
élément de prise en charge fondamental ; ils expriment à
la fois le désir d'aide et la vigilance des institutions
impliquées. Le fait qu'un auteur (et/ou sa famille) demande une
thérapie, d'emblée ou suite aux entretiens mis en place, ne
devrait pas supprimer ipso facto la continuation de ceux-ci, quitte à en
espacer le rythme.
4. Enfin, les magistrats pas plus que
les psy ne devraient jamais marchander entretiens ou psychothérapies
contre quoi que ce soit : les rencontres de paroles, redisons-le, ne peuvent
pas être des moyens utilisés pour alléger des peines, ni
même la durée d'une détention préventive [11].
VII
- Parmi les importantes
questions liées à la confidentialité, nous
n'évoquerons que celle posée par l'éventuelle
retransmission d'informations à des personnes externes au travail
familial (entre autres les magistrats) ; les principes et les règles
à ce propos sont les mêmes que pour les thérapies et
entretiens qui relèvent d'autres références.
- Pour
la majorité des personne, une large garantie d'intimité est une
condition nécessaire à l'engagement de soi .
- Un
accord préalable sur la retransmission doit être établi
entre toutes les personnes impliquées [21] ; il concerne aussi bien le
contenu que les procédures ; il inclut nécessairement la
non-obligation de confidentialité en cas de danger repéré.
- S'il
s'agit de thérapies, communiquer la régularité de
participation constitue souvent le maximum acceptable ; on peut aussi se
contenter de signaler quand il y a début ou fin, voire... rien du tout !
- S'il
s'agit d'entretiens, on peut aller un peu plus loin - sans y être
contraint ! - et au moins retransmettre la régularité de la
participation ; on peut même aller plus loin - sans y être
contraint - et faire savoir quelques grandes lignes de ce qui s'y vit.
Chapitre
3
LES
CARACTERISTIQUES GENERALES
Ce
n'est pas tel ou tel intervenant spécifique qui a la
responsabilité officielle d'opérationnaliser le point de vue
systémique. Mieux vaudrait que beaucoup s'en inspirent, en coexistence
avec d'autres points de vue, et qu'il s'ensuive une imprégnation de
terrain ; personne n'étant le "chef d'orchestre" de ce
mouvement, c'est chaque fois d'où ils sont et sans pouvoir officiel sur
les autres : que ceux qui pensent "systémique" essaieront
d'agir en conséquence.
Nous
nous limiterons à en proposer quatre applications :
I
- Se poser régulièrement des
questions-clés... et en tirer des conséquences pratiques (interpeller,
réaménager des groupes, modifier des orientations prises ou un
état d'esprit). Pratiquement :
- Le
fonctionnement global de l'auteur peut-il s'expliquer aussi, en partie,
à partir d'influences externes qu'il subit ? Plus
précisément, son agression sexuelle y reçoit-elle sa part
d'explication ? Et en allant du plus large au plus particulier, on peut passer
en revue ses interactions avec la société, son milieu
professionnel, ses groupes de loisirs, sa famille d'origine, élargie, sa
famille nucléaire, chacun de ses enfants, son conjoint, ...
- Inversement,
en passant en revue ces mêmes interrogations, y trouve-t-on des
éléments déjà ou potentiellement favorables ?
- La
manière dont se sont succédées les séquences de
réactions professionnelles, depuis la révélation des faits
; est-elle juste, objective, proportionnée à la gravité
des faits et à la nature de la personne (et de sa famille), ou est-elle
aussi influencée par des phénomènes de groupe ?
Lesquels ? Que peut-on y mobiliser ?
- Et
autant pour les réactions sociales !
II
- L'ensemble des intervenants impliqués dans le
traitement devrait faire tout son possible pour constituer lui-même une
"personne morale sociable".
L'inverse
- si commun - est désastreux : comment aider l'auteur, dont la personnalité
est si souvent altérée dans ses aptitudes sociales, à
redevenir sociable s'il a en face de lui un système de prise en charge
clivé, où chacun "roule pour soi" en méprisant
l'autre ?
III
- La question des
réaménagements concrets de la vie quotidienne est à
l'interface entre la pensée systémique et la
sociothérapie. Ils constituent des compléments indispensables aux
rencontres de paroles. Ils sont eux-mêmes soit exigés
judiciairement, soit discutés et convenus à l'amiable ; ils
gagnent à être soutenus par un réseau [6, p. 9].
Parfois,
ce sont des restrictions : quitter la maison familiale, ne plus
fréquenter les enfants, supprimer l'ordinateur du domicile...
Parfois,
ce sont des exigences potentiellement enrichissantes : faire du sport, ouvrir
sa famille sur l'extérieur, prendre un nouveau travail...
IV
- On entend souvent parler de thérapie
de (en) réseau ; nous venons
d'en donner un premier exemple, à propos de personnes
interconnectées et qui soutiendraient la réalisation dans la
durée d'actes dans le réel.
Les
mêmes personnes, ou d'autres, peuvent encore constituer un groupe
d'appui que l'on devrait organiser
au moment où l'on pressent entrer dans la dernière étape
des rencontres familiales [12 ; 32 ; 14, p. 220 ; 10, p. 367-368].
Ce
groupe d'appui est d'autant plus indiqué que l'auteur vit de
façon solitaire ou que sa famille nucléaire est très
coupée du monde. On en choisit la composition avec l'auteur et/ou sa
famille. Il réunit souvent trois à cinq personnes, professionnels
de première ligne, famille élargie ou membres proches de la
communauté sociale (par exemple, deux collègues
ecclésiastiques, la médecin généraliste, et le
frère de tel prêtre pédophile...). Ses missions,
discutées avec l'auteur (et sa famille) sont :
- Se
poser en témoin social proche qui reconnaît les faits, y réagit et accueille la personne
de l'auteur et sa famille.
- Communiquer,
stimuler ce qui est positif, donner de l'appui, manifester de la
solidarité.
- Veiller
sans naïveté, prévenir sans concessions de risque de
récidive, ne jamais éteindre sa vigilance.
- Rester
constant ; ne pas s'effriter dans la durée ; n'accepter la fin d'un
traitement qu'après
concertation soigneuse de tous !
Ce
petit groupe fonctionne en partie d'initiatives et en partie sur convocations
du thérapeute familial qui reste donc en place à travers lui
(deux convocations par an pendant des années).
N.B. Cette durée est voisine de celle des cercles de
support québécois [34], regroupant quelques ex-auteurs repentis et
des membres dits sains de la communauté, dans une perspective de
fonctionnement proche de celui des "alcooliques anonymes".
La
dimension thérapeutique de ces objectifs est identique, qu'il s'agisse
d'entretiens ou de thérapies ; la plupart d'entre eux
bénéficient aussi bien à l'auteur qu'aux membres de sa
famille qui s'associent au travail.
Adopter
une perspective systémique implique, non seulement de sortir l'auteur
des faits de sa solitude, mais de prendre en compte le niveau logique de
l'intervention, c'est-à-dire la force de la relation entre l'agresseur
et sa victime et entre chaque protagoniste et l'environnement
socio-affectif [25]. D'une manière générale, ces
rencontres, s'appuyant essentiellement sur une référence
systémique appelée "structurelle" [7], travaillent les
questions de liens (loyautés) [4], des frontières entre l'auteur
et les personnes de son entourage et/ou impliquées dans les faits.
Concrètement, certains aspects sont abordés : nous les
énumérons successivement en respectant l'ordre chronologique d'un
processus en cours, tout en sachant qu'il faut s'adapter avec souplesse aux
rythmes des uns et des autres. Voici les principales composantes :
- Un
préalable est constitué par une reconnaissance des faits [12] chez les protagonistes potentiels des rencontres, et
par une acceptation du programme de prise en charge.
- A
partir de la prise en charge par chacun, mieux comprendre le sens de l'agression sexuelle commise et ses
résonances probables avec le vécu de la famille : mieux saisir ce
qui s'était mis à dysfonctionner au fil du temps, mais aussi les
ressources familiales potentielles ou déjà effectives.
Cet objectif est réalisé par l'approche
des phénomènes relationnels, surtout récurrents, que la
famille donne à voir et à entendre ; mais on écoute aussi,
chez chacun, les fantasmes, idées, questions, soit
éveillés par les autres de la famille, soit très
personnels, mais dont le partage avec les autres est souhaité. Pour
nombre de ces évocations, on encourage la personne à chercher non
seulement comment son contexte de vie présent peut les influencer mais
aussi comment ils s'articulent avec son histoire (assez souvent marquée
par la carence, la souffrance ou l'emprise subie, au moins pour l'auteur ! ).
- Premier
corollaire : par ces échanges verbaux authentiques, battre en
brèche un dysfonctionnement fréquent, du moins dans les familles incestueuses,
centré sur les emprises plus ou moins déclarées et sur
l'ambiance de secret [26, p. 261]. P. Lebbe - Berrier [15, p. 274] écrit
à ce propos : "... dans les familles incestueuses, se limiter
uniquement à l'un des sous-systèmes ne permet pas à
l'ensemble de sortir de cette aliénation particulière aux mille
facettes que sont l'emprise, les fidélités et les loyautés
invisibles dans l'inceste".
- Mettre
en place une "reconnaissance sociale approchée" des faits [19, p. 35-46] réalisée par des
personnes supposées affectivement très proches ; se
présenter à eux avec sa partie de misère ou de mal, sans
pourtant s'y réduire [17].
Face aux faits, la réaction sociale de la
famille, l'expression par elle de sa souffrance ou/et de son indignation,
peuvent constituer un premier coup de boutoir dans le vécu de
toute-puissance et d'impunité de l'auteur.
Un pas plus loin et face à la personne de
l'auteur cette fois, la même famille peut, dans les situations
favorables, avoir une reconnaissance plus nuancée. L'auteur a en lui des
dimensions mauvaises, à quoi sa liberté intérieure n'avait
pas dit non, mais il a aussi des richesses humaines, et une part de souffrance
: il n'est pas rare, par exemple, qu'il soit lui même porteur d'un
"enfant intérieur blessé" et que la reconnaissance de
celui-ci par la famille contribue à réparer l'auteur de
l'intérieur [25].
- (Surtout
si la famille ou une partie de celle-ci décide de rester vivre
ensemble), travailler à réduire les dysfonctionnements et à améliorer les ressources
positives [10, p. 371; P.
Lebbe-Berrier, 16 : "Réveiller les forces autocuratives de la
famille"].
Par exemple :
. Aider
l'auteur à reprendre progressivement une place d'époux ou/et de
père reconnu positivement.
. Créer
de nouveaux liens ; engager davantage de solidarité [14, p. 215].
. Dresser
ensemble des stratégies de meilleure vigilance et protection [17, p.
734].
- Si
l'on décide des séparations, veiller à ce qu'elles soient propres et ne constituent pas l'exclusion de
bouc-émissaires : selon les cas, c'est le couple qui se sépare
définitivement ou à l'essai, ou l'auteur qui s'éloigne
(au-delà de son éventuel emprisonnement), ou c'est un (des)
enfant(s) qui prend (prennent) distance (en cas d'agression intra-familiale)
[20].
II - Objectifs
stratégiques
- En
s'adressant à la famille, obtenir
son alliance, c'est-à-dire
qu'elle participe à l'engagement de l'auteur dans son travail de
rencontre de soi [18, p. 215].
- (Surtout
les fois où l'auteur est réticent à un engagement
personnel), favoriser l'intérêt de tous pour un travail de type
psychothérapeutique ; il
s'agit donc d'une fonction "préparatoire" où l'on
stimule l'envie de l'auteur (et peut-être d'autres) à s'engager
plus personnellement.
III - Indications et
contre-indications
A. Les indications
1. Il y a tout à gagner
à essayer d'inclure un travail familial aux côtés de
rencontres individuelles personnelles avec l'auteur. On devrait y songer
d'emblée et systématiquement !
Le
moment judicieux pour en parler est variable ce cas en cas : ce peut être
dès qu'une alliance thérapeutique s'est créée entre
l'auteur et son thérapeute individuel, mais nous venons de dire que
l'inverse se produit aussi parfois : un travail familial chronologiquement
premier peut préparer à des entretiens personnels individuels,
sans pour autant perdre sa valeur propre !
2. Sur base de cet état
d'esprit général, voici néanmoins quelques indications
préférentielles [11, p. 45-46-47] :
. les
auteurs qui vivent sans famille proche : le groupe d'appui que nous avons
décrit peut faire fonction de "famille de
référence" ;
. ceux
qui vivent dans une famille dépressive, repliée sur
elle-même, non- communicante ;
. ceux
qui vivent dans des familles enchevêtrées, fusionnelles ;
. les
auteurs autoritaires, rigides, qui vivent dans des familles qu'ils tyrannisent
;
3. Quant aux auteurs qui
relèvent d'une structure perverse, ils risquent de mettre tout à
mal, y inclus les rencontres familiales. On n'a cependant rien à perdre
à essayer de les confronter à un groupe familial solide et
vigilant.
B. Les contre-indications
Bien
avant l'étape des rencontres familiales inclue dans le traitement,
certains provoquent parfois des réunions du groupe familial très
précocement, dès la révélation et la crise qu'elle
génère. Leur objectif serait au moins qu'elles contribuent au
diagnostic, en confrontant les paroles des uns aux autres ; d'aucuns
prétendent même viser un effet thérapeutique
précoce, en permettant aux émotions et aux vécus
censés être très authentiques de s'exprimer et de se
confronter in statu nacendi.
Cette pratique nous semble formellement contre-indiquée [13], apte
à en terroriser et en traumatiser plus d'un, ou à renforcer des
défenses mensongères.
Certes,
dans notre perspective systémique, il est fondamental d'écouter
tous les membres de la famille dès que possible après la
révélation des faits, surtout si l'agression sexuelle est
intrafamiliale. Mais on doit impérativement commencer par des entretiens
individuels systémiques, où il exprimeront, chacun
séparément, réactions et questions face au
thérapeute. Sur cette base, on pourra prudemment entrer dans la logique
de complexification décrite ci-après.
Dans
ces entretiens individuels, probablement certains améneront-ils,
directement ou non, des éléments informatifs contributifs au
diagnostic de ce qui s'est passé ; mais il s'agit bien d'une
construction psychologique... et les intervenants psy n'y ont pas à
faire le travail des policiers, c'est-à-dire à collecter des
éléments de preuve !
N.B. Il existe d'autres risques et limites à
l'application des rencontres familiales mais nous les décrirons plus
loin, car, pour bien les comprendre, il est souhaitable d'avoir lu d'abord les
questions d'organisation décrites à l'alinéa III.
IV - Modalités de la mise
en place des rencontres familiales
A. Quels thérapeutes ?
le
thérapeute qui gère des rencontres individuelles personnelles ne
peut pas être celui qui gère les rencontres familiales,
encombré qu'il serait au cas contraire par la connaissance de
vécu intime de l'auteur. D'ailleurs, la mise en place des rencontres
familiales ne devrait pas mettre fin aux rencontres individuelles personnelles
dont bénéficient l'auteur et peut-être certains membres de
sa famille de leur côté.
En
référence à l'ampleur des tâches à
gérer, les thérapeutes familiaux gagnent souvent à
être deux. C'est quasi indispensable s'ils s'occupent aussi de
réaménagements concrets de la vie, ou d'organiser et de
superviser un groupe d'appui. S'ils interviennent dans ces
réaménagements, c'est cependant pour y faire
réfléchir et pas dans une perspective de contrôle social.
B. Les étapes de complexification des
rencontres et l'état d'esprit qui y préside
1. Quand on met en place des
rencontres familiales, on espère "naturellement" pouvoir
interpeller le plus de membres possible d'une famille, au moins sous sa forme
nucléaire, et les mettre ensemble tôt ou tard pour une réflexion
en commun. Néanmoins, il est sage de préparer les terrains les
plus difficiles et donc de commencer par des rencontres simples, celles que
nous avons appelées individuelles systémiques. On passe
progressivement aux étapes suivantes dès que les membres
potentiels des groupes qu'elles se proposent de réunir sont
estimés prêts [14] pour y accéder [11, 12].
A
titre d'exemple, voici comment on pourrait procéder dans une famille
"traditionnelle" dont le père s'est rendu coupable d'inceste :
. 1ère étape :
rencontres individuelles systémiques avec l'auteur, le conjoint,
l'enfant victime
[15], les autres enfants (éventuellement
même, un à un).
. 2ème étape : on passe à des rencontres "dyadiques" (par
exemple : la dyade parent non-auteur - enfant victime ; le couple ; la dyade
fonctionnelle parent non-auteur/ enfants non victimes).
. 3ème étape : on passe à des rencontres encore plus vastes : les
sous-groupes parent non-auteur/ tous les enfants ; tous les enfants entre eux,...
. 4ème étape : si
c'est possible, une rencontre de l'auteur avec l'enfant victime, souvent
accompagné de l'autre parent et/ou d'une personne de son choix ; la
rencontre n'a de sens que si l'auteur est décidé à
reconnaître pleinement les faits, à s'en expliquer sans faux
fuyants et à renégocier une place positive auprès de
l'enfant [16]. Ce dernier doit donner son accord sur le principe
de l'entretien ; quand il le fait vraiment, il est rare que ce soit sans
angoisse.
. 5ème étape : on
aboutit à des séances avec toute la famille nucléaire, aux
mêmes conditions.
Certains auteurs (par exemple Perrone, 21, p.
120-122) accordent beaucoup d'importance à la demande de pardon
énoncée par l'auteur en fin de processus, pour peu qu'elle soit
sincère. Nous sommes plus prudents à ce sujet : oui,
peut-être, si l'on est sûr qu'il est sincère, et que ses
vis-à-vis ont été préparés et à
l'entendre et à se donner le droit de leur réponse la plus
personnelle à cette sollicitation.
Etapes annexes : sur ces rencontres avec la famille
nucléaire, il peut encore se greffer au besoin une ou des rencontres
avec tel ou tel membre de la famille élargie ou de l'entourage non
familial. On invite même parfois l'un ou l'autre membre de la famille
d'origine de l'auteur : à ces séances, et dans les bons cas, des
vécus transgénérationnels peuvent se dire, des secret se
lever, de vieux contentieux enfin se régler !
Cet
exemple schématique peut donner lieu à bien des variations
souples et/ou ne pas être suivi dans son ensemble dans son
entièreté, en fonction des circonstances et des motivations propres
à chaque cas.
Nous
ne faisons donc aucune recommandation rigide de chronologie, l'idée la
plus fondamentale, c'est de ne passer à une étape suivante que
s'il y a un accord au moins raisonnable sur son principe de tous ceux qui en
seront les protagonistes. Il faut aussi qu'on les sente vraiment
"prêts" à le faire (cfr. supra) : on n'y procède
donc pas s'il y a trop d'angoisse chez l'un ou l'autre (qui empêche un
vrai consentement) ou encore si l'un des protagonistes (souvent l'auteur) reste
installé dans la minimisation ou le mensonge.
Rappelons
encore qu'il y a parfaitement moyen de faire du travail familial en se limitant
à des entretiens individuels systémiques ; le thérapeute
fonctionne alors comme go-between.
2. La mise en place d'un étape
plus complexe dans la composition du groupe ne supprime pas ipso facto
l'intérêt de poursuivre les précédentes. En
particulier, les rencontres individuelles systémiques constituent un
point de rappel basal vers lequel on est invité à revenir
régulièrement.
3. La mise en place d'une nouvelle
étape constitue toujours une expérimentation. On ne la maintient
que si son fruit est estimé positif, immédiatement ou dans un
avenir rapproché. On la suspend (quitte à y revenir peut-être)
si, contre l'attente des thérapeutes, elle s'avère renforcer des
affrontements stériles, des minimisations ou des
dénégations, ou la mise de quelqu'un en position de
bouc-émissaire. On la suspend aussi si certains de ses protagonistes ne
l'investissent pas.
IV - Risques et limites de
l'application des rencontres familiales
A. Les risques existent d'autant plus que les
thérapeutes n'ont pas pu ou pas voulu repérer que les individus
n'étaient pas prêts à passer à des étapes de
réunion plus complexes ; ils existent aussi s'ils s'obstinent à
ne pas observer que les rencontres ne sont pas investies, ou s'ils attendent
d'elles une omnipotence sur le traitement qu'elle ne sauraient pas avoir. En
voici quelques illustrations.
1. Le risque le plus grave existe
quand on met en présence, en séance de groupe et sans
préparation, des personnes chargées d'une grande hostilité
ou d'une grande angoisse par rapport à d'autres, ou bien
décidées à mentir en s'affrontant aux autres. Alors, la
séance peut être source de pure décharge
d'agressivité verbale, d'un vécu traumatique, ou encore de
confusions dans les idées ou d'un désespoir de ne jamais se faire
entendre. On pense tout de suite, ici, au désespoir de l'enfant-victime
de l'inceste, qui se coltinerait avec l'emprise subtilement perdurante de
l'auteur... mais l'inverse peut être vrai aussi, et certains auteurs se
trouver désespérés de ne pas pouvoir être
reçu dans leur part de misère !
2. Autre scénario de
séance de groupe mal préparée, bien toxique lui aussi, ce
sont les manifestations rapides et bruyantes, émanant de l'auteur, de
repentir et de demande de pitié et d'amour adressée à sa
famille. Attitude bien culpabilisante, qui remet ceux-ci dans une
"obligation de pardon" immédiat par rapport à lui. Il
s'ensuit rapidement un désinvestissement de la thérapie,
déclarée inutile.
3. Et il y a aussi le drame des
enfants-victimes ambivalents, indécis, tout prêts à se
laisser reprendre sous l'emprise d'un auteur habile [19, p. 97-98], par
soumission, par besoin d'affection... et parfois même de sexe. Ici aussi,
la thérapie peut déraper très vite vers une
pseudo-adhésion très superficielle aux demandes sociales, suivi
d'un désinvestissement rapide...
B. Dans un autre registre d'idées, certains
thérapeutes vivent parfois des confusions regrettables quant aux objectifs
des rencontres, et à leur place précise dans l'ensemble du
traitement :
1. Par exemple, ils pensent que des
rencontres familiales réussies gardent finalement le couple ou la
famille nucléaire unie, ou restaurent à tout prix des contacts
entre l'enfant-victime et l'auteur d'abus. Or, un but essentiel de ces
rencontres, c'est de permettre à chacun de retrouver un projet de vie
digne et sociable et de l'affiner en se confrontant aux autres. Si, parce que
les participants le demandent, il en ressort davantage de communication
positive et d'union, c'est bien ! Si certains continuent de demander
d'être mis à distance d'autres, qui les ont agressés et
qu'ils ne peuvent plus supporter, c'est bien aussi !
2. Et l'on fait encore fausse route
quand on attend des rencontres familiales une dimension de contrôle
social et de garantie de non-récidive qui n'est pas dans leurs moyens ;
ou quand on considère qu'elles sont à même de remplacer
"des actes dans le réel" comme les éloignements, les
dédommagements, ou d'autres sanctions.
C. Quant aux limites des rencontres familiales, elles
ne sont pas de l'ordre d'une quelconque contre-indication spécifique,
mais elles touchent plutôt au mystère de la liberté humaine
: certains investissent ces séances familiales, et d'autres pas ou alors
ils les "investissent" au profit de leur perversité ou de leur
destructivité ; il faut donc régulièrement évaluer
l'apport positif ou négatif des séances et s'adapter en
conséquence.
Par
contre, adopter une perspective systémique permet toujours une compréhension plus riche
des faits, des personnes impliquées, de leur psychologie et de la
logique de mise en place du programme d'accompagnement.
Chapitre 4
APPLICATIONS
DE LA PERSPECTIVE SYSTEMIQUE ET DES RENCONTRES FAMILIALES A QUELQUES SITUATIONS-TYPE
I
- Trois figures de l'inceste
A. Inceste commis par un parent [17] dans une famille nucléaire traditionnelle
1. Plus que jamais, il nous faut
être attentifs aux forces systémiques en jeu ; certaines,
négatives, ont pu précipité le passage à l'acte
incestueux : le stress, le désemploi, la précarité
socio-économique, l'isolement de la famille, la disqualification d'elle
par l'entourage, le dysfonctionnement du couple, ... et donc, y remédier
peut avoir un effet facilitateur sur une meilleure sociabilité à
l'avenir...
2. Les premiers temps de la
révélation entraînent des crises émotionnelles
majeures, comme, par exemple, l'angoisse "mortelle" de la victime de
rester confronté à celui qui a abusé d'elle. Il faudrait
donc mettre en place des éloignements provisoires protecteurs,
décidés judiciairement ou non, de l'auteur et souvent de la
victime, pour que chacun puisse reprendre ses esprits.
3. La progressivité dans la
convocation des membres de la famille aux séances familiales s'inspire
au plus près de ce qui a été décrit au chapitre 3.
4. Le groupe d'appui décrit
page 9 est le plus souvent utile, malgré que la famille ait l'air
d'exister et de fonctionner. Il est surtout indiqué avec les familles
dépressives, isolées, peu sûres d'elles, ainsi qu'avec les
familles autoritaires, mais ici, il gagne à être constitué
de professionnels confiants en eux...
B. Inceste commis par un parent vivant
séparé de la famille où vit l'enfant-victime
Nous
supposerons que les allégations d'abus ont été
vérifiées [18], et que l'on est dans la phase d'accompagnement
ultérieure.
1. La perspective systémique
nous apprendra souvent que le bloc familial où vit l'enfant-victime a
besoin de vivre - et de faire vivre à celui-ci - que l'auteur de l'abus
est "un monstre" encore plus effrayant qu'il ne l'est en
réalité.
2. Les séances familiales qui
regrouperaient progressivement le parent non-abuseur et ses enfants n'ont de
sens positif que si elles ne constituent pas principalement un lieu
d'accusation et de démolition de l'auteur absent.
3. Beaucoup d'enfants ne veulent plus
jamais revoir l'auteur, pas seulement parce qu'ils sont suggestionnés,
mais aussi au nom d'angoisses et de dégoûts personnels plus
radicaux ; cette position reste assez souvent d'application, même et
surtout, par exemple, après que l'auteur ait "purgé sa
peine". Nous sommes très hostiles à l'idée d'imposer
à ces enfants des contacts, fût-ce en milieu
protégé, avec celui
qu'ils persistent à ressentir comme un grave danger. Des entretiens (ou
thérapies) individuels, personnels ou systémiques, peuvent aider
ces enfants à mobiliser leur position, si tant est que l'auteur, lui, a
bien changé de son côté. S'ils n'y arrivent pas, tant pis,
et ce n'est pas un échec thérapeutique : après tout, un homme qui aurait tué
ne pourrait pas ressusciter sa victime même si, par la suite, il devient
un saint... ! Qu'on l'aide alors à se pardonner et à en
faire le deuil !
4. Surtout si, après coup,
l'auteur se trouve en position de célibataire, l'aide du groupe d'appui
est plus précieuse que jamais !
C.
Inceste (ou son équivalent) commis par un membre de la famille
élargie [19] qui ne vit pas sous le même toit [20] que la victime
1. La perspective systémique
montrera parfois qu'il existe des alliances familiales élargies, fortes
et irrationnelles, exacerbées par la révélation et ses
conséquences, et que des camps peuvent surgir ou se confirmer, l'un pour
défendre farouchement l'auteur, et l'autre l'enfant-victime.
2. Un travail familial se fera donc
certainement dans la famille nucléaire de l'enfant-victime. Dans les
entretiens individuels systémiques, chronologiquement premiers, on sera
particulièrement attentif, par exemple, à écouter celui
des parents de l'enfant qui est le plus proche affectivement de l'auteur (par
exemple, la mère de l'enfant, dont le propre père a abusé)
: on écoutera sa souffrance, son histoire de vie éventuellement
identique, son vécu actuel, peut être ambivalent, et on l'aidera
à prendre ou à maintenir des positions de vérité et
de protection du plus faible.
3. Au-delà de ces rencontres
familiales avec la famille de la victime, un autre thérapeute peut
s'occuper de progresser dans un travail familial analogue avec la famille de
l'auteur, si tant est qu'elle existe. Dans ces deux axes de rencontres
familiales, il est inutile de poursuivre s'il constitue essentiellement un lieu
d'accusations de l'autre clan.
4. Parfois, il est possible de faire
quelques pas de plus dans l'ambiance bien préparée décrite
au chapitre 3 :
-
Rencontre de l'auteur (parfois de lui et de son conjoint) avec les parents de
la victime (ou avec le parent affectivement ou statutairement le plus proche de
l'auteur).
- Rencontre
ponctuelle de l'enfant-victime (accompagné d'un parent, des deux, ou/et
de la personne de son choix) et de l'auteur, dans une perspective de
reconnaissance des faits, sans faux-fuyants, et de partage des vécus.
5. Le groupe d'appui est
intéressant à concevoir, ici aussi, surtout si l'auteur est en
position de célibataire.
II - Les activités
sexuelles entre mineurs d'une même fratrie
N.B. Nombre de considérations émises ici
pourront être extrapolées, moyennant légères
adaptations, aux activités sexuelles entre mineurs en
général.
A. Un certain nombre de ces activités sexuelles
constitue des jeux ou des "moments d'éclats" sexuels entre
partenaires consentants ; ces partenaires ne se sont pas cherchés parce
que frère et/ou et soeur,
mais parce qu'ils constituent de facto les objets de consommation les plus
accessibles ; même si cet accès direct à la
sexualité est assez mal vécu par les parents, ils ne faut
néanmoins pas brader les termes "abus", ni "inceste"
!
La
régulation de cette sexualité relève de l'éducation
et des valeurs parentales ; éventuellement, ils se font aider par des
psy et ceux-ci proposeront parfois des thérapies familiales ; alors,
l'idée de progressivité décrite au chapitre 3 est toujours
en vigueur, pour préparer des dialogues constructifs et éviter
l'expression sauvage d'émotions négatives ou l'inhibition pure et
simple. Dans leurs consignes éducatives ultérieures, les parents
demanderont, entre autres, de vivre la sexualité ailleurs que dans la
fratrie.
B. D'autres de ces activités sexuelles sont des
abus clairs et nets, mais sans attachement affectif intense entre partenaires.
Ils ont ce statut d'emblée ou le prennent après une
première étape de consentement mutuel, parce que le mineur
dominant n'a pas pu entendre que l'autre n'en voulait plus.
1. Idéalement, il faudrait
mettre en place une séparation matérielle du mineur auteur et du
reste de sa famille, décidée judiciairement ou non. La
durée de celle-ci doit être assez longue pour "marquer le
coup" (par exemple vivre un an dans la famille élargie). Le retour
ne peut avoir lieu que si la victime l'accepte, au moins raisonnablement [21].
2. Que la situation inclue ou non des
autorités judiciaires, l'auteur doit également réaliser un
dédommagement matériel significatif, à la mesure de ses
dégâts : c'est un "acte dans le réel", bien plus
constructif que la seule et traditionnelle punition.
3. A côté de rencontres
individuelles personnelles destinées au moins à l'auteur et
à la victime, on peut réaliser un travail familial selon ce qui
en est dit au chapitre 3 (12, 13). Les professionnels de terrain constatent
néanmoins, et de façon inattendue, que l'implication des familles
est tout sauf facile.
4. Pour les plus chaotiques, les moins
soutenus familialement de ces jeunes, on peut penser procéder
également à des thérapies de réseau ou
multisystémiques ; leur existence n'exclut pas que ces jeunes soient placés
provisoirement en institution résidentielle, mais prépare une
intégration sociale future [15].
C. Dans une petite minorité des activités
sexuelles non abusives ou abusives que nous venons d'évoquer, il existe
aussi une forte passion amoureuse, possessive, exclusive émanant d'un ou
des deux partenaires de l'activité. Pour notre part, c'est à
cette catégorie que nous réservons le terme d'inceste.
1. Dans ces cas, une séparation
longue est la condition nécessaire, basale à toute
éventuelle maturation ultérieure de la vie affective.
Si l'on veut bien se souvenir qu'il ne s'agit pas que
d'installer une distance kilométrique mais aussi de contrôler le
courrier, le téléphone, les S.M.S. , Internet, etc. ... elle est
tout sauf facile à réaliser ! Elle exige donc dialogue et contrôle
social, ce qui n'est pas le fait des thérapeutes !
2. Dans le cadre de cette
séparation, on peut procéder à un travail familial avec la
famille nucléaire de départ et le jeune qui n'aurait pas
été déplacé ; corollairement, on peut le faire aussi
avec les seuls parents et le jeune déplacé [22]. On peut également mettre en route des
rencontres familiales de l'autre avec ses parents. On peut peut-être
même programmer quelques rencontres familiales avec la famille qui
héberge maintenant le jeune déplacé (ou avec un groupe
d'appui constitué à son intention). La progressivité
signalée au chapitre 3 reste de mise.
Il
y a néanmoins une limite stricte à la conception de ce travail
familial : ne pas remettre en présence les partenaires de l'inceste
(du moins pas avant que l'on soit persuadé que ce soit tout à
fait fini ! ).
III
- L'auteur vit dans une famille nucléaire mais a commis son agression
sexuelle en dehors de celle-ci
La
nature de l'agression sexuelle est variable : pédophilie, viol, etc. ...
Il y a de fortes chances que la situation soit judiciarisée.
A. Quoi
qu'il en soit, mieux vaut que l'auteur de l'agression se mette un certain temps
à distance de sa famille nucléaire.
B. Le travail familial progressif décrit au
chapitre 3 est particulièrement important à mettre en place, et
notamment les entretiens individuels systémiques.
Le
travail de couple en constitue un élément-clé : quelles
étaient les richesses du couple et qu'est-ce qui (probablement) y
dysfonctionnait ? Y a-t-il encore
un avenir commun envisageable ? Si oui, que faut-il améliorer ? Si non,
comment organiser une séparation "propre" ? Quelle que soit
l'alternative, le couple doit aussi discuter la possibilité de
restauration d'une fonction parentale pour l'auteur ainsi que ses
modalités.
D'autres
modules comme des séances parent non-auteur/enfants, et enfants entre
eux, peuvent également avoir leur utilité pour partager des
vécus.
Enfin
si c'est possible, des séances avec toute la famille peuvent contribuer
à ce que l'auteur s'explique, qu'on partage des vécus, et qu'il
reprenne une fonction parentale positive.
C. Si l'auteur sort de sa famille nucléaire et
se retrouve en position de célibataire, le groupe d'appui décrit
au chapitre 3 est plus que jamais important à mettre en place.
IV
- L'auteur d'agressions sexuelles ne vit pas dans une famille nucléaire
Il
est célibataire, isolé ou membre d'une communauté
(religieuse, militaire, etc. ...).
1. Se limiter à des entretiens
ou thérapies individuelles personnels est un réflexe très
naturel, puisqu'apparemment il n'existe pas de famille !
2. Mais justement, une partie du
problème provenait peut-être de cette solitude, ou, en tout cas,
de cette absence de lien affectif avec des proches, qui ont, entre autres, une
dimension contenante et soutenante de la sociabilité.
Il
est donc essentiel d'ajouter aux démarches thérapeutiques
individuelles, la reconstruction d'une "sorte de famille" autour de
lui. C'est l'idée du groupe d'appui déjà
évoqué (chapitre 3) mais poussé ici à son
extrême : on veillera donc à le constituer et à le soutenir
avec beaucoup de soins. Par exemple, on repérera avec l'aide de
l'auteur, ses amis les plus proches (pour peu qu'ils soient sains...), des
membres de sa famille élargie qu'il estime, des collègues de
travail... ; on travaillera les éventuelles réticentes de
l'auteur, dictée par la honte...on demandera à ce petit groupe
d'exercer les fonctions déjà décrites au chapitre 3, mais
avec une intensité particulière ; on le supervisera
également de plus près.
3. Il n'est pas impossible non plus
qu'une partie de la problématique de ces auteurs s'origine dans des
relations et transmissions transgénérationnelles pénibles.
Le cas échéant, on peut donc convoquer l'un ou l'autre membre de
la famille d'origine (parent ou fratrie) et viser à ce qu'ils s'en
expliquent.
N.B. Ces
propositions ne peuvent se lire sans malentendu que si le lecteur
se
réfère strictement au vocabulaire défini dans le premier
chapitre.
I. Une
perspective systémique gagne toujours à imprégner le
traitement
de
l'auteur (et de sa famille), aux
côtés d'autres.
II. Une
de ses applications les plus indispensables, c'est que les profes-
sionnels
impliqués dans le traitement parviennent à s'organiser et
à se
parler
en "personne morale sociable" !
III.
Une autre application souvent importante est la mise en place d'un
petit groupe d'appui, chargé de
soutien et de vigilance, durable,
supervisé
par un thérapeute
systémicien. C'est particulièrement
indiqué
quand l'auteur vit sans famille proche.
IV. Des
rencontres familiales sont systématiquement indiquées, plus
ou
moins fortement, précocement, aux côtés d'autres actes
thérapeutiques
si possible, à elles seules sinon. Il est souhaitable que
le(s)
thérapeute(s) de ces rencontres ne soit (soient) pas celui (ceux)
des
rencontres individuelles personnelles.
V. Lorsque
la prise en charge se déroule sans intervention judiciaire,
les
rencontres familiales y ont nécessairement le statut de thérapies
;
on
les met en place parce que demandées par l'auteur et par sa
famille,
spontanément ou après sensibilisation. On ne devrait jamais
les
mettre en place pour se substituer à une action judiciaire qui
serait
indiquée, ni à des "actes dans le réel".
VI. Lorsqu'il
y a intervention judiciaire, l'intérêt du traitement veut le
plus
souvent que le magistrat enjoigne
des entretiens, comme
dimension
basale de la thérapeutique ; par prudence, il pourrait
ordonner
"des entretiens individuels ou/et familiaux ou/et
de
couple" et laisser aux thérapeutes la responsabilité
d'apprécier
ce
qui peut s'en suivre dans la réalité.
VII. Dans
ces contextes judiciarisés, si l'on peut ajouter des thérapies
aux
entretiens, il faut toutefois être très prudents avant d'accepter
qu'elles
s'y substituent. En outre, thérapies et entretiens ne
devraient
pas réduire significativement les peines, ni se substituer aux
"actes
dans le réel", ni exercer de contrôle social.
VIII. Les rencontres familiales doivent se
préparer soigneusement ;
entre
autres, l'amplification des
personnes présentes aux séances se
fait
le plus souvent progressivement ; on ne met en présence les
participants que s'ils sont d'accord de le faire et
que si onles estime
prêts
à s'y montrer suffisamment positifs.
IX . La
mise en place et la complexification des séances familiales a
une
dimension expérimentale ; le thérapeute ne persiste que si les
fruits
sont positifs. Sinon, il revient
en arrière, sans que cela ne soit
un
échec thérapeutique.
X . Un
des challenges des thérapeutes, c'est de ne pas laisser s'effriter les
choses dans la durée, face soit
à l'inertie et aux résistances du groupe
familial,
soit à sa séduction et à ses proclamations, ou soit au
temps
qui
passe sans apparent incident, tout
simplement.
XI. La
fin de la prise en charge s'appuie sur une concertation large
réunissant
les avis de l'auteur, celui des personnes de son entourage,
et
notamment du groupe d'appui et de la famille nucléaire restant
impliqués
dans le traitement, et celui des différents intervenants
psy
et/ou judiciaires impliqués dans le traitement.
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[1]
J.-Y. Hayez, pédopsychiatre, docteur en
psychologie, coordonnateur de l'équipe SOS Enfants-Famille et
responsable de l'Unité de pédopsychiatrie, Cliniques
universitaires St-Luc, B - 1200 Bruxelles - E-mail
:jean-yves.hayez@pscl.ucl.ac.be
[2] E. de Becker, pédopsychiatre, thérapeute
familial ; Equipe spécialisée dans la prise en charge des auteurs
d'agression sexuelle, Service de santé mentale de l'UCL
Chapelle-aux-Champs, Clos Chapelle-aux-Champs, 30 bte 3049, B-1200 Bruxelles -
FAX : 32.2.764.3955.
[3] Pour simplifier, nous appellerons auteur l'agent direct de l'abus, de l'agression ou du
délit sexuel (termes aux-mêmes interchangeables dans le
présent rapport).
[4] Certains auteurs les désignent comme thérapies sur injonction ; mais ce terme nous semble induire de la confusion. D'autres parlent d'expertises (familiales) [18], mais donne trop à penser que l'on se situe indéfiniment dans une première phase d'évaluation diagnostique.
[5]
Lorsque l'injonction émane d'un tribunal
pénal, elle ne peut jamais obliger que le seul auteur ; si d'autres, de
sa famille p. ex., l'y rejoignent, c'est librement ! Néanmoins, nous
nous référerons au statut de l'auteur et nous dirons que l'on est
toujours bien dans un contexte d'entretiens.
Par contre, dans sa fonction protectionnelle centrée sur
l'enfant, le Tribunal pour mineurs, lui, peut obliger l'ensemble de sa famille
nucléaire.
[6] Cette subdivision est évidemment
schématique, mais nous ne pouvons pas exposer toutes les nuances et
situations bâtardes dans le cadre restreint de ce rapport.
[7] On en trouve une excellente synthèse sous la plume de B. Lamoureux, p. 214-220 dans le livre de J. Aubut Les agresseurs sexuels [14].
[8] P. ex., on ne devrait jamais accepter : "Je suivrai régulièrement ma thérapie mais, par pitié, laissez moi diriger mon club sportif junior ; c'est si important pour moi ! ". On ne devrait jamais mettre en place les entretiens à la place d'une sanction pénale ; ils ne devraient même pas apparaître comme "le" moyen d'échapper ou de mettre fin à la détention préventive.
[9]
Nous utiliserons l'appellation familière psy pour désigner psychiatres, psychologues... voir
autres psychothérapeutes dans leurs fonctions générales
(diagnostic, psychothérapies, etc. ...).
[10] Nous excluons donc de notre vocabulaire les termes prescrire
une thérapie et celui d'injonction
thérapeutique [24, p. 270].
Nous préférons entendre le magistrat exiger (ordonner, enjoindre)
des entretiens, et non les prescrire, ce qui sonne trop
"médical" à nos yeux.
[11] Une petite exception cependant : si au moment où se discute une libération conditionnelle, après qu'un détenu ait purgé une bonne partie de sa peine, il s'avère qu'il a multiplié les actes positifs et notamment une participation sincère à des rencontres de paroles, ce dernier point peut quand même jouer en sa faveur !
[12] Reconnaissance ou/et acceptation souvent partielles, mais qui doivent être estimées "suffisantes" par les thérapeutes. Laissons à ce terme un peu d'appréciation personnelle. Winnicot ne disait-il pas que la mère doit être "suffisamment, bonne...".
[13]
Une petite exception à cette règle
: lorsque le conjoint de l'auteur est très sûr que les
faits ont eu lieu, qu'il est déterminé, et qu'il accepte de
rencontrer l'auteur occupé à nier, cette rencontre de couple
peut faire parfois "basculer" le système de défense de
l'auteur, et rétablir une communication dans le couple.
[14] "Prêts" signifie ici : "D'accord
pour se parler et pour essayer de s'écouter, sans investir durablement
la majeure partie de leur énergie mentale à mentir, à se
justifier soi ou à agresser l'autre".
[15]
Nous emploierons toujours le terme "(enfant)
victime" au singulier ; c'est un terme générique.
[16] Liposki, p. ex., dit "It is essential that direct communication with the child not occur until such time as the offender acknowledgs... the full extent of the abuse" [17, p. 732).
[17]
Nous y assimilons l'abus sexuel commis par le
compagnon (la compagne) du parent, le beau-père (la belle-mère)
qui vivrait de façon stable sous le même toit et exercerait une
partie de la fonction parentale.
[18] Pour les vérifier, rappelons que nous sommes des plus réservés face à tout ce qui ressemblerait, de près ou de loin, à des confrontations directes de sous-groupes familiaux notamment celles qui incluent la supposée victime. Qu'elles se passent dans le circuit judiciaire ou chez le psy, ces confrontations sont source de terreur pour la victime (... et de façon non-déclarée, par l'auteur) et obligent bien plus celui-ci à mentir qu'à devenir authentique : que chacun s'exprime plutôt individuellement à ce sujet !
[19]
L'auteur est donc, p. ex., un grand-parent, un
oncle ou une tante, tel cousin célibataire, jeune adulte vivant encore
chez ses parents !
[20] Vivre sous le même toit impose une réflexion supplémentaire au sujet des séparations, provisoires ou définitives.
[21] Pas de retour de l'auteur si le refus de la victime est motivé par l'angoisse, les sentiments pénibles... Si c'est une manière de se venger dans la toute-puissance, c'est autre chose : on peut soit ne pas en tenir compte, soit lui proposer à lui, l'ex-victime, en alternance, de séjourner ailleurs.
[22]
Ce jeune déplacé, c'est l'auteur en
cas d'inceste abusif ; s'il y a consentement mutuel, ce pourrait être le
jeune le plus âgé, ou identifié comme le plus fort. Il ne
s'agit évidemment pas de le couper de tout contact avec ses parents,
mais bien avec son ex-partenaire.