Évaluation psychopathologique et sociale lors des sevrages de toxicomanes dépendants aux opiacés

Professeur Laurent SCHMITT

Service Universitaire de Psychiatrie et de Psychologie Médicale, Hôpital Purpan-Casselardit, 31059 TOULOUSE

Docteur Philippe CADILHAC

Ancien Chef de Clinique, Assistant des Hôpitaux de Toulouse,
Responsable du Centre Maurice Dide, Hôpital La Grave, 31052 TOULOUSE




L’évaluation psychologique et sociale avant un sevrage peut rencontrer plusieurs types d’obstacles :

1 - La représentation des soignants ou des équipes de soins vis-à-vis de la toxicomanie peut osciller entre la perception du toxicomane comme un sujet sain mais devenu dépendant d’une forme répétitive d’obtention d’un plaisir, ou bien la perception du toxicomane comme un sujet malade cherchant une forme de traitement dans le toxique. Plusieurs variétés de conceptions s’inscrivent entre ces deux extrêmes.

2 - Le terme d’évaluation peut se référer à un ou deux entretiens dont le contenu et les thèmes demeurent souples et laissés à l’appréciation de chacun, ou bien un processus d’évaluation très systématisé, voire quantifié.

3 - Enfin les dimensions psychologiques comprennent des domaines d’une grande variété, symptômes, fonctionnement, mécanisme de défense...

Le propos général, sans doute largement influencé par la formation, le type d’exercice et la structure de soins à laquelle appartiennent les auteurs, cherche à plaider pour une évaluation précise des dimensions syndromiques et structurales. Cette évaluation ne peut se faire en un seul entretien. Elle nécessite plusieurs formes de compétences. Elle inscrit le sevrage non dans l’idée dichotomique "abstinence et réussite" contre "rechute et échec", mais dans l’hypothèse qu’un sevrage peut être une étape dans le processus de soins, qu’un sevrage peut être partiel, qu’un sevrage doit rester, dans une perspective médicale, un objectif du soin. Même si cet objectif apparaît lointain ou sera nuancé par l’émergence d’autres conduites addictives, il ne doit pas faire renoncer à l’idée de l’interruption d’une dépendance aux opiacés.

La prise en considération de cette évaluation relève de plusieurs arguments épidémiologiques :

Compte tenu des simples chiffres de prévalence des différentes pathologies mentales dans la population générale, étude ECA 1990 et NCS 1994, on peut de façon très conservatrice estimer à 10 ou 15 % les sujets qui, ayant une dépendance, ont une autre pathologie mentale associée ; on utilise le terme de comorbidité ou de double diagnostic.

Les patients déjà inscrits dans un dispositif de soins vis-à-vis de la toxicomanie ou des affections mentales, définissent un échantillon particulier et ne représentent en aucun cas un reflet de la population générale. La prévalence des troubles psychiques paraît nettement plus élevée chez les sujets cherchant un traitement pour la toxicomanie. Plus de 50 % des sujets dans ce contexte accusent la présence d’un autre diagnostic mental : troubles de la personnalité, schizophrénie, troubles de l’humeur, trouble anxieux, autres consommations de produits.

A la suite d’études d’épidémiologie descriptive dans les années 1990 aux Etats-Unis (Regier et Coll., 1990), on a pu montrer que les toxicomanes aux opiacés présentent :

- un risque de troubles affectifs 5 fois supérieurs aux autres patients,
- un risque pour les troubles anxieux 3 fois supérieurs,
- un risque pour l’alcoolisme 13 fois supérieurs,
- un risque de diagnostic de personnalité pathologique au moins 24 fois supérieur.

Ces éléments d’épidémiologie descriptive se recoupent avec la description d’addictions alternantes montrant qu’à une addiction peut succéder un autre trouble addictif, ce qui corrobore les notions cliniques d’addiction à l’alcool faisant suite à des addictions aux opiacés.

Dans cette perspective, on considère les troubles psychiques de plusieurs façons :

1 - Les troubles sont primitifs, le toxique sert d’automédication. Cette perspective issue de la tradition psychodynamique pose la nécessité de repérer et de traiter d’abord la psychopathologie décelée, et secondairement les problèmes liés aux toxiques.

2 - Les troubles psychiques sont secondaires aux toxiques. Dans cette perspective, les effets psycho-toxiques des opiacés ou des différents produits expliquent les symptômes psychiques. L’accent est mis sur le contrôle général de la toxicomanie. Poussé à l’extrême, on encourage les patients à interrompre thymorégulateurs, neuroleptiques ou antidépresseurs comme "autant de toxiques" participant à la dépendance.

3- Les troubles évoluent chacun, toxicomanie et troubles psychiatriques, comme des entités distinctes. Cette hypothèse du double diagnostic, comme un diabète serait associé à une hypothyroïdie, ne tient pas compte des troubles psychotoxiques spécifiques des hallucinogènes ou de la cocaïne.


Ces notions de psychopathologie générale prennent une importance toute particulière lors du sevrage. Pendant plusieurs décennies, le sevrage a représenté l’idéologie dominante du soin vis-à-vis du toxicomane. Le sevrage se voulait radical, définitif ; tout échec ou abandon était mis sur le compte d’une insuffisance de demande et de motivation. Il est évident que les modalités des sevrages connaissent d’infinies variétés entre le sevrage complet réalisé en milieu hospitalier et le sevrage progressif que peut effectuer un médecin généraliste, voire un patient seul. Il est connu de longue date (Loô et Laqueille, 1987) que derrière une toxicomanie, peuvent se dévoiler des pathologies schizophréniques ou des décompensations dépressives automédiquées par les produits toxiques.

Dans le contexte actuel où tout sujet dépendant aux opiacés peut aisément se procurer une substitution par la buprénorphine et éventuellement par la Methadone, la place du sevrage dans l’économie psychique du patient mérite une attention particulière : approche idéalisée d’une guérison, injonction suscitée par des tiers, simple pause dans un itinéraire complexe. De façon analogue, poser l’indication d’un sevrage actuellement revient à discuter le lieu et le moment, et le sens d’une toxicomanie en tant que symptôme.

On peut considérer que l’évaluation psychopathologique et sociale permet à la fois de repérer la trajectoire de l’individu, les points de faiblesse qu’il peut éprouver, l’entourage social dont il peut disposer.


Seront abordés trois grands aspects :

I - Les contextes de l'évaluation en terme de relation, de situation, et de pathologie attendue

II- L'évaluation psychopathologique clinique : l'entretien et les outils

III- Quelles stratégies d'évaluation et quel retentissement lors du sevrage


I - Les contextes de l'évaluation en terme de relation, de situation, et de pathologie attendue

L’évaluation de l’indication relationnelle du sevrage peut comporter plusieurs cas de figure :

1 - Le sevrage représente un modèle imaginaire de l’arrêt de toute toxicomanie. Ce modèle apparaît comme idéal. Ceci pose la question d’une identification en miroir par rapport au modèle du thérapeute. Dans ce contexte, il convient d’évaluer, alors qu’il existe des possibilités de substitution, à quoi répond la demande d’un sevrage, ou poser des indications de sevrage orientées vers la substitution.

2 - Le sevrage peut représenter une forme de passage à l’acte dans des circonstances de vie problématique ou dans ce qui pourrait être considéré comme une crise narcissique. Qu’il s’agisse du début d’une grossesse, de la découverte d’une hépatite ou d’une infection VIH, ou de difficultés professionnelles. Le sevrage apparaît soudain comme la solution unique. Vis-à-vis de ce type d’attitude, l’élaboration du sevrage apparaît tout à fait indispensable.

3 - Le sevrage peut s’inscrire comme une évolution d’un long parcours toxicomaniaque. Le contexte relationnel survient en général chez les sujets toxicomanes anciens et dans cette demande, jouent un rôle important l’âge du sujet, l’inscription dans une problématique de réinsertion ou dans un désir de fonder une famille. Certains de ces patients se sèvrent seuls.

4 - Le sevrage peut se dérouler dans un contexte d’injonction, que cette injonction soit conjugale, familiale, ou ordonnée par la justice dans un dispositif de type injonction thérapeutique selon la loi de 1970.

5 - Le sevrage peut représenter une pause dans la consommation des produits sous la forme d’un sevrage partiel ou temporaire. Partiel si par exemple il supprime une association héroïne et cocaïne au profit d’une simple consommation d’opiacés, ou temporaire s’il vise à limiter une consommation devenant progressivement croissante.

Evaluer le contexte relationnel du sevrage a donné une importance toute particulière à des modalités plus subtiles que l’arrêt définitif de toute consommation de drogue. Ces modalités traduisent une certaine forme de demande de soins, mais ne vont pas jusqu’à une interruption complète de l’intoxication. Respecter ces modalités revient également à entretenir une forme de relation autorisant un cheminement ultérieur. Ce cheminement tentera d’insérer du sens, de l’élaboration et une compréhension au sein d’actes répétitifs.


Les situations dans lesquelles le sevrage se déroule peuvent schématiquement être représentées ainsi :

D’une part, le sevrage autogéré, avec à l’extrême un sevrage bloc où le sujet s’enferme pendant quelques jours dans le but d’arrêter toute prise.

D’autre part, le sevrage médical ambulatoire accompagné par un thérapeute qui prescrira des psychotropes, ou éventuellement une substitution progressivement dégressive. Cette modalité de sevrage s’inscrit dans un contexte relationnel où un médecin généraliste accompagne une demande d’arrêt. Vis-à-vis de ce processus, certains thérapeutes considèrent qu’un arrêt progressif n’est en fait qu’une tentative généralement vaine vis-à-vis d’un sevrage. Ils préconisent l’arrêt absolu de toute prise médicamenteuse : contexte du sevrage hospitalier classique, Gossop, 1986 ( ).

Les toxicomanes qui fréquentent des structures de soins peuvent élaborer progressivement une demande vis-à-vis d’un sevrage. Cette élaboration rend compte d’un travail psychique. Elle est généralement facteur d’un meilleur pronostic par l’existence de ce travail préalable.

Enfin, le dispositif le plus classique des lits de sevrage pose l’indication d’un arrêt quasi-absolu de la prise de toxique.


Les pathologies attendues

Différentes études d’épidémiologie, dont celles de Rounsaville ( ), portant sur 533 toxicomanes aux opiacés, ont permis d’avoir des indications sur les pathologies que l’on peut trouver le plus souvent chez le toxicomane.
Tout d’abord, 70% d’une population de toxicomanes présentent un diagnostic psychiatrique, et 52% de cette population a deux diagnostics psychiatriques au delà de la notion de consommation d’opiacés.
Il existe deux formes de prévalence : la prévalence actuelle qui donne le risque au moment de l’étude d’avoir une pathologie mentale associée à la toxicomanie, la prévalence sur la vie qui indique le risque au fil de l’existence d’avoir une co-morbidité psychiatrique associée à la toxicomanie.

En matière de prévalence actuelle, la dépression majeure est estimée à 23,8%, la dépression mineure à 12,2%, les troubles anxieux à 3%, les troubles schizo-affectifs à 1,5% et la schizophrénie à 0,02%. On retrouve 13,7% d’alcoolisme.

Lorsque l’on s’intéresse à la prévalence sur la vie, les grands diagnostics concernent les troubles de l’humeur (74,3% dont 53,9% de dépression majeure et 8,4% de dépression mineure), les troubles anxieux, toutes catégories confondues, représentent 16,1% pour l’essentiel il s’agit de troubles phobiques ; les troubles schizophréniques oscillent autour de 1% ; l’alcoolisme est retrouvé dans 34,5% des cas, les troubles de la personnalité sont retrouvés à 26,5%. Cette étude a été réalisée chez des toxicomanes se présentant dans des centres de soins. Elle ne reflète pas forcément la psychopathologie des toxicomanes de la population générale. Elle indique cependant la fréquence de la psychopathologie des utilisateurs d’opiacés, puisque la moitié va présenter un trouble de l’humeur et un quart un trouble de la personnalité.


II - L'évaluation psychopathologique clinique, l'entretien et les outils

L'entretien clinique avant un sevrage

Bien des demandes de sevrage interviennent dans des situations de crise : ruptures conjugales, menaces de licenciement, injonction après interpellation. Ces crises peuvent également avoir une composante narcissique : perception de difficultés intellectuelles ou début d’une grossesse. Repérer cette crise, revient à prendre en considération une demande impérative, peu élaborée, apparue dans l’urgence. Ce type de demande se caractérise par une labilité, une suggestibilité, une passivité par adhésion aux représentations de l’entourage. On peut comprendre qu’initié dans ces conditions, un sevrage soit interrompu au bout de quelques jours, ou remis en question.

Parmi les composantes relationnelles des entretiens figurent : les non-dits, l’ambivalence, le déni. Les non-dits relèvent ou des complications médico-légales de la toxicomanie, ou de l’histoire familiale, ou des motifs immédiats précipitant une demande de sevrage. L’ambivalence se retrouve face aux différentes stratégies de soins proposées : maintenance, sevrage, groupe de paroles. Le déni peut apparaître dans la conviction d’un sevrage aisé et définitif.

Le déroulement de l’entretien doit suivre plusieurs étapes :

1 - Poser, en laissant parler librement le patient plusieurs minutes, la nature de la demande et le motif du sevrage. De façon sous-jacente, le clinicien tentera d’apprécier si la demande appartient au patient, sous-tendue par une réflexion, ou si elle relève d’une pression extérieure. Dans la même perspective, l’interrogation sur le sevrage doit porter sur le pourquoi maintenant ? et pourquoi ici ? Le maintenant cherche à prendre en considération des événements de vie, ou des phases maturatives dans le cycle existentiel du toxicomane. La question du lieu interroge les représentations du soin qu’a le patient, mais aussi son entourage : bouche à oreille, relations déjà suivies avec un lieu de soin ou un thérapeute.

2 - L’histoire des prises de toxiques doit s’appuyer sur l’âge de début, la recherche des pics de consommation, les autres produits ou toxiques impliqués. Le tabac, l’alcool, ou le haschich ne sont parfois pas mentionnés car non considérés comme des drogues. Les sujets ont parfois réalisé de multiples sevrages d’où l’intérêt de connaître ceux qui ont duré et pourquoi, et les raisons des rechutes. Dans une étude sur les facteurs de rechute, Bradly ( ) mentionne les cognitions : nostalgie de la drogue, les aspects affectifs, les influences externes, ou les aspects interpersonnels. Les symptômes émergents lors des sevrages, surtout physiques ou psychiques.

3 - Relations familiales et antécédents familiaux : le rôle du toxique dans l’économie psychique. Si on se contente de l’évaluation du toxique : quantité, durée, autre produit, on peut négliger la dimension "cautérisante" du produit. Cette dimension apparaît dans quatre secteurs : 1/ Identitaires quant la toxicomanie a permis au travers de groupes, de bandes et plus tard individuellement, de dépasser des problèmes de personnalité, de sexualité et d’affirmation de son individualité. 2/ Relationnelle quand le produit permet les contacts inter-humains, réduisant des symptômes phobiques, de replis, ou des angoisses interindividuelles. 3/ Energétique : ceci apparaît dans le discours où pour se sentir "en forme", "capable" , "performant", la prise de toxique est nécessaire. 4/ Vis-à-vis de la réalité quand le toxique évite des confrontations à des distorsions massives de la réalité, sous la forme d’idées délirantes et d’hallucinations. Outre ces grands aspects, on doit se poser la question d’une fonction imaginaire dans l’existence de rêveries, de fantasmes, et dans le souvenir ou le contact avec une activité onirique.

4 - Dans bien des cas, les patients orientent l’entretien sur le toxique, ses effets, ses conséquences, il faut alors infléchir l’entretien dans les deux grandes voies psychopathologiques que sont les difficultés syndromiques et structurales, ou de personnalité.


Poser quelques questions
sur l’existence de difficultés affectives, anxieuses, ou des idées de mort permet de définir les grandes aires psychopathologiques associés à la toxicomanie. Le sevrage peut déséquilibrer une pathologie de ce type, il peut aussi initier des mouvements hypomaniaques, dysphoriques, interprétatifs. De façon générale, quelques sujets résument leur histoire au toxique, et dans un premier temps fournissent une vision idyllique, simplifiée, ou élaguée de leur histoire ou de leurs vécus psychiques. En reformulant les mêmes questions où en s’intéressant à l’histoire de dépendance de la famille, ou à une problématique psychiatrique parentale : le même thème peut être ré-abordé. Au fil des entretiens et de la naissance d’une relation s’ébauchent les hypothèses qui peuvent fonder un sevrage.

L'approche de la personnalité
est rarement possible lors des premiers entretiens hormis une question sur "comment décririez-vous votre personnalité, ou comment les autres perçoivent votre personnalité ?" Compte tenu de la prévalence des personnalité antisociales, état limite, ou passives agressives, ceci est souvent nécessaire. L’histoire de la trajectoire biographique, des relations objectales et des investissements dans la vie peut fournir les premiers éléments ; les capacités d’introspection seront testées.

L’évaluation cognitive apparaît dans la concision de la relation des faits, dans la précision des souvenirs, la capacité à fournir des dates, et la cohérence des souvenirs, la mémoire autobiographique peut être lésée. De façon générale, le premier entretien doit être général dans ses thématiques, empathique dans la relation et réfléchi dans ses conséquences. La réflexion vise à améliorer l’alliance thérapeutique. Dans bien des cas cette alliance peut nécessiter au début un acte de soins. Cet acte peut être une nouvelle consultation, décision d’un bilan, évaluation sociale. Souvent la simple neutralité bienveillante va se conclure par une consultation unique ; l’aspect essentiel reste l’amorçage relationnel qui passe souvent par une prescription et le souhait d’entrer plus avant dans la relation. La prescription pourrait être une substitution brève, 3 à 5 jours, un antispasmodique, elle ne sera pas une benzodiazépine ou un hypnotique. Dans la pratique ne pas poser un cadre revient à ouvrir beaucoup d’incertitudes.

Les outils de l’évaluation : la plupart des professionnels de santé en matière de toxicomanie hésitent ou répugnent à se servir d’instruments. Ceci apparaît dans l’enquête de Charpak, 1997 ( ). Les instruments d’évaluation appartiennent à trois catégories : 1/ Auto-questionnaires remplis par le sujets ; 2/ Hétéro-questionnaires portant souvent sur un domaine pathologique défini ou sur une idée de dépistage ; 3/ Entretiens structurés.
Ces instruments ne doivent pas être utilisés lors des 2 ou 3 premiers entretiens ou du moins pas durant l’entretien clinique qui doit se dérouler en face à face, pour développer le mieux possible une alliance thérapeutique.
L’intérêt de tels outils, outre les aspects de quantification, revient au caractère systématique des investigations qu’ils autorisent amenant à des données relativement complètes. Cependant le patient doit percevoir son vis-à-vis comme à son écoute, tentant de comprendre, faire des liens, et essayer de repérer ses besoins.


Les questionnaires et outils généraux

Score TMSP
Le score de gravité des héroïnomanies : score TMSP, de Lowenstein et Gourarier ( ).
Ce score aisé à appliquer dans chaque consultation explore 4 axes diagnostiques :
- l’axe toxicomanie,
- l’axe suivi médical,
- l’axe socio-personnel,
- l’axe psychiatrique.

Pour ce qui est de ce dernier axe, 1 point est attribué s’il n’existe pas de troubles notables de la personnalité, 2 points s’il existe des troubles de la personnalité modérés, 5 points si les troubles de la personnalité sont importants. Dans ce score TMSP, il faut bien signaler que les troubles de la personnalité ne sont pas définis, que les exemples que l’on donne comme tentative de suicide, passage à l’acte, violence, séjour en hôpital psychiatrique à répétition, définissent plus des troubles des conduites ou du comportement ou des aspects syndromiques peu structurés. L’intérêt de ce score apparaît bien dans le fait d’attirer l’attention sur une pathologie psychiatrique, de tenter d’effectuer une évaluation.

ASI
L’index de sévérité de l’addiction (ASI) : cet index élaboré en 1992 par Mac Lellan et traduit par l’équipe d’Auriacombe et Tignol, essaie de repérer l’existence d’une dépression, d’un état anxieux, d’hallucinations, de troubles cognitifs, de troubles des impulsions, d’idées suicidaires ou de tentatives de suicide. Cette évaluation porte à la fois sur les antécédents et sur l’état actuel avec la recherche d’une dépression, d’une irritabilité, d’une anxiété, troubles cognitifs, d’idées suicidaires. L’ASI permet une cotation et une évaluation.

Lorsque l’on compare l’ASI à un entretien structuré destiné à établir un diagnostic avec le DSM III, tel le SCID (Dixon, 1996), il existe des corrélations avec le score composite des items psychopathologiques de l’ASI. Le score composite a une bonne corrélation entre les cotateurs et évalue sur les 8 items (dépression, anxiété, hallucinations, troubles cognitifs, troubles du contrôle des impulsions, pensées de suicide, tentatives de suicide, autres problèmes psychologiques) présents dans les 30 derniers jours et le nombre de jours où ils ont pu éprouver ces symptômes. Dans l’étude de Dixon, il existe une bonne corrélation entre les items d’index de sévérité d’addiction et l’existence d’un diagnostic psychiatrique repéré en entretien structuré.

GHQ
Une autre approche évaluative concerne le questionnaire général de santé (GHQ). Ce questionnaire développé dans des versions à 60-30-28 ou 12 questions, concerne globalement 4 domaines : la dépression, l’anxiété, le comportement, l’hypochondrie. Chaque item est côté de 1 à 4. Il s’agit d’un auto-questionnaire dont l’application est assez aisée.

HSCL 90 R
Parmi les questionnaires de dépistage, de façon analogue, l’utilisation de la HSCL 90-R (Hopkins Symptom Chechklist 90 est un instrument comportant 90 questions), symptômes Check-list traduite en français depuis 1984, comporte l’évaluation au travers de 90 questions, d’un certain nombre d’items comme les somatisations, les symptômes obsessionnels, la sensibilité interpersonnelle, la dépression, l’anxiété, l’hostilité, les phobies, les traits paranoïaques, les traits psychotiques et les symptômes divers. La passation dure 1/4 d’heure, chaque item est côté de 0 à 4, il s’agit d’un questionnaire global d’auto-évaluation.

Une version du HSCL 90 a été utilisée chez des toxicomanes pour évaluer leur état psychique. Des valeurs de HSCL au dessus de 2,5 indiquent un stress psychique. Une forme réduite à 24 items existe. Dans l’étude de Berg, 1996 ( ) l’utilisation du HSCL 24 ne distingue pas les sujets restant dans un programme de soins, de ceux qui abrègent leur séjour. Ce programme est un programme de 3 semaines, après désintoxication, avec hébergement, conseil et soutien.

Dans une étude de Ravndal et Vaglum, 1994 ( ) les sujets, avec les valeurs de dépression les plus élevées au HSCL 90 après 1 an de séjour communautaire quittent le plus fréquemment les programmes de soins.


L'évaluation des troubles de l'humeur


Hamilton, MADRS, BDI (Beck Depression Inventory). Cette évaluation utilise des questionnaires cherchant la présence ou essayant de quantifier des symptômes dépressifs. L’inventaire de dépression de Beck est un auto-questionnaire de 13 items. D’autres outils comprennent l’échelle de Hamilton ou la MADRS.

Dans l’étude de Rounsaville, 1982 ( ), la prévalence des troubles de l’humeur chez 157 toxicomanes est de 17% ponctuellement et de 48% sur la vie ; 5, 6% sont des dépressions primaires, avant le début de la toxicomanie ; 94,5% sont des dépressions secondaires apparues au décours de la prise de toxiques. Eprouver une dépression majeure ou mineure au début d’un traitement renforcer le risque d’usage de drogues illicites et de symptômes péjoratifs dans les 6 mois qui suivent l’évaluation.

La même équipe, Kosten et Rounsaville, 1986 ( ) s’intéressant à 268 toxicomanes aux opiacés montre : 1/ que le traitement de la dépression renforce l’abstinence ; 2/ les toxicomanes déprimés à l’entrée dans le programme ont moins de chances de rester abstinents ; 3/ les crises existentielles augmentent le risque de rechutes ; 4/ les crises et les troubles de l’humeur agissent en synergie pour majorer le risque de rechutes.

Dorus, 1980 ( ) retrouve un taux de dépression de 46% pour les dépressions modérées, et de 29% pour les dépressions sévères.

Strain et Broner, 1991 ( ) retrouvent une prévalence de 20% de dépression majeure et de 3% de dysthymie dans une population de 66 sujets toxicomanes.

En matière de suicide, la fréquence des tentatives de suicide ou des suicidés réalisés apparaît nettement plus élevé chez les toxicomanes, les suicides sont 3 à 4 fois plus élevés que dans la population générale.


L'évaluation de la schizophrénie

BPRS, PANSS, SAPS, SANS
Ces échelles explorent soit un large éventail de symptômes psychotiques comme le BPRS (Brief Psychiatric Rating Scale), soit des symptômes positifs : désorganisation, délire, hallucinations, ou négatifs : repli, désintérêt, absence d’activité de la schizophrénie.

Rounsaville et Weissman, 1982 ( ) dans une étude sur 523 toxicomanes aux opiacés font un bilan des troubles schizophréniques : la prévalence sur la vie de la schizophrénie chez les toxicomanes est de 0,8%, celles des troubles schizo-affectifs de 2,1%.

Une étude d’Addington et Duchak, 1997 ( ) chez 41 sujets schizophrènes consommant des substances montre le rôle d’apport énergétique et de bénéfice d’intégration sociale recherché dans l’utilisation des substances. Les résultats attendus concernent un effet euphorique et antidépresseur et dans l’espoir de réduire l’isolement social.

La recherche de symptômes psychotiques avant un sevrage implique plusieurs aspects. le toxique peut alléger la souffrance perçue du fait d’idées délirantes de persécution. Le toxique peut réduire des impressions de dissociation et améliorer des dysphories sous-jacentes. L’arrêt du toxique va s’accompagner d’une émergence d’angoisse.


L'évaluation des troubles de la personnalité

L’évaluation des troubles de la personnalité reste encore méconnue et parfois confondue avec des troubles de conduites comme les passages à l’acte, les violences ou les tentatives de suicide. Or les troubles de la personnalité influencent le pronostic et les résultats des différents traitements en matière de toxicomanie.

L’évaluation clinique de la personnalité n’est pas facile, ceci pour trois raisons : 1/ Dans les premiers entretiens, les toxicomanes mettent l’accent sur les produits et une évaluation indirecte de leur personnalité peut s’effectuer au travers des mouvements de leur biographie et des relations stables ou chaotiques qu’ils ont pu nouer. 2/ L’action des produits toxiques peut altérer divers modes du fonctionnement d’un sujet et ce n’est qu’à distance qu’une évaluation plus stable peut être effectuée. 3/ Les questionnaires de personnalité s’adressant directement au sujet soulèvent des processus défensifs rendant incertaine la validité des réponses. Ainsi, une question du type"Je suis capable de manipuler les autres très habilement si j’y trouve avantage" va soulever de fortes résistances.

Parmi les outils, quatre méritent attention :

1 - Le SCID II, entretien structuré pour les troubles de la personnalité, permet de poser un diagnostic selon le DSM IIIR.
Il s’agit d’un entretien semi-structuré, à partir d’un auto-questionnaire de personnalité comportant 113 questions portant sur l’un ou l’autre d’un trouble de la personnalité spécifique. Les épreuves de test-retest, comme les cotations inter-cotateurs, ont mis en évidence des kappas de 0.5O et plus pour la plupart des troubles de la personnalité.

Les études portant sur des questionnaires de type SIDP, SCID ou VKP retrouvent systématiquement associées à la toxicomanie, les personnalités antisociales, limites, narcissiques, dépendantes, passive-agressives et histrioniques. Généralement se retrouvent plusieurs traits ou plusieurs chevauchements de personnalité.

2 - Le TPQ : questionnaire tri-dimensionnel de personnalité représente un auto-questionnaire de 100 items s’intéressant à des dimensions de personnalité telles que la quête de nouveauté, l’évitement de la douleur, la dépendance à la récompense.

3 - Le VKP : le VKP version française de 1987, fait référence au DSM IIIR et reprend 12 catégories de personnalité. Cet auto-questionnaire comporte 157 questions auxquelles le patient répond par oui, non et dans quelques cas par un point d’interrogation.

Dans l’étude d’A. Bennet ( ) portant sur le VKP, la personnalité antisociale s’exprime chez 45% des toxicomanes aux opiacés, la personnalité état limite chez 39% , la personnalité passive-agressive chez 24%, la personnalité histrionique chez 14%, 15% représentent un trouble de la personnalité non spécifié.

4 - Le Rorschach : comme on le sait, 10 planches non figuratives, symétriques, sont proposées au patient pour évaluer son appréhension, son interprétation ou les déterminants de la réponse. A côté de la passation classique existe une modalité de Rorschach associatif élaboré par de Tychey.

Les études menées à partir du Rorschach révèlent des manifestations non spécifiques de la faiblesse du Moi : manque de contrôle pulsionnel et de tolérance à l’anxiété, prédominance du processus primaire de pensée, troubles du caractère de "bas niveau". Le vécu relationnel hostile et persécuteur, la pathologie des relations d’objet, le maintien des liens avec la réalité, Caglar, 1981 ( ) apparaissent systématiquement.
Le test de Rorschach représente dans l’approche des toxicomanes un instrument diagnostique précieux, Timsit et Leduc, 1981 ( ).

5 - Le KAPP : il s’agit d’un instrument cherchant à évaluer des modes de fonctionnement mentaux et des traits de caractère relativement stables. Ceci à la fois comme ils sont perçus par le sujet et comme ils apparaissent dans les relations interpersonnelles. Le KAPP est un profil de 18 items classés en 6 sous-groupes : items 1, 2, 3 décrivent les relations interpersonnelles ; les items 4, 5, 6, 7 évaluent le fonctionnement de la personnalité ; les items 8 et 9 s’intéressent à la différenciation avec autrui ; les items 10, 11, 12 évaluent le corps dans sa dimension d’estime de soi ; les items 13, 14 portent sur la sexualité et son vécu ; les items 15, 16, 17 décrivent la perception qu’a le sujet de son importance sociale. Le dernier item porte sur l’organisation de la personnalité. La cotation porte de 1 à 3 par demi 1, 1 et 1/2, ..., et côte en 5 points.
Les études utilisant le KAPP chez des toxicomanes mettent en évidence l’existence de traits alexithymiques significatifs, une capacité à la rêverie défaillante, des affects agressifs difficiles à gérer, des difficultés à établir des relations interpersonnelles sous la forme d’échanges et de réciprocité.

L’évaluation de la personnalité, qu’elle soit structurée ou au travers d’un entretien, permet de retrouver des points communs dans la trajectoire et les relations aux autres que les toxicomanes peuvent nouer. Cette évaluation n’est pas anodine, elle préfigure à la fois des aspects relationnels comme des aspects évolutifs.


Quête de sensations, impulsivité

Utilisant l’échelle de quête de sensations de Zuckerman (SSS), Ch. Sarramon ( ) a montré que les toxicomanes aux opiacés ont un score global plus élevé que des témoins par rapport à la recherche de sensations fortes, le facteur de désinhibition étant nettement plus élevé. De façon analogue, l’évaluation par l’échelle d’impulsivité de Barratt montre une dimension d’impulsivité très forte chez les toxicomanes.


L'évaluation des liens et du fonctionnement familial

40% des toxicomanes ont connu une séparation ou un décès dans leur famille. Les parents des toxicomanes peuvent se vivre davantage comme parents que comme un sujet bien individualisé. Ils font plus référence à leur statut parental qu’à leur vécu individuel. L’amorce d’un mouvement de séparation avec leur enfant, lors de l’adolescence apparaît difficile. Il est entravé soit par des freins manifestes envers l’autonomie, soit par des crises provoquant des séparations brutales. Les modalités de la fonction parentale peuvent présenter des aspects paradoxaux : permissif et démissionnaire sous certains aspects, surprotecteurs et autoritaires sous d’autres. L’intrusion peut se manifester chez 80% des mères et 38% des pères. Ceci témoigne d’une non différenciation de l’autre en tant que sujet. Cette intrusion peut porter sur l’affectivité avec un trop plein d’excitation. Record 1993 ( ).


L'évaluation sociale des toxicomanes

L’histoire de la criminalité, des difficultés d’insertion sociale et professionnelle, un statut familial précaire, sont associés à des résultats et à un pronostic réservé.
A l’évidence un âge plus élevé, l’existence d’insertion sociale antérieure, l’absence de criminalité représentent des facteurs de meilleurs pronostics.
Si la dépendance au produit et à un mode de vie qui accapare la quasi-totalité du temps a pour effet de maintenir le sujet dans le plus grand isolement social, l'évaluation de la situation sociale de celui-ci est un temps important du début des soins.
L'accès aux droits sociaux conditionne en grande partie l'accès aux soins ; les toxicomanes les plus marginalisés ayant peu accès aux soins.
Cette évaluation sociale initiale permettra d'autre part d'évaluer les soins dans le temps.

L’évaluation sociale, l’entretien et les outils
1 - L’entretien
La première rencontre avec le travailleur social est l'objet d'une évaluation globale de la situation qui portera sur plusieurs points :
- couverture sociale avec ouverture des droits,
- les papiers d'identité,
- les revenus (obtention du Revenu Minimum d'Insertion, des allocations et différentes prestations familiales),
- la situation par rapport à la justice ; les mesures pénales bouleversent parfois la continuité des droits,
- le logement,
- l'insertion professionnelle qui reste une difficulté majeure du fait du contexte socio-économique actuel, du faible niveau de qualification et d'expériences professionnelles chaotiques des patients,
- les liens familiaux, et sociaux de manière générale.

Une fois l'insertion minimale acquise (couverture sociale, revenus sociaux, hébergement) il restera à construire un projet professionnel ou de formation dans le temps.

2 - Les outils
- L’Index de Sévérité d'Addiction (ASI) élaboré par Mac Lellan et traduit par l'équipe d'Auriacombe et Tignol permettant une évaluation multifactorielle de la dépendance et l'établissement d'un profil de gravité est un des seuls instruments valides prenant en compte la dimension sociale. Parmi les sept scores de gravité constituant le profil, trois concernent plus particulièrement l'aspect social ; il s'agit des items emploi/ressources, situation légale et relations familiales et sociales. Les ASI de suivi permettent d'avoir une évaluation dans le temps du patient.

- D’autres outils d’adaptation psychosociale comme le DAS II (Disability Assessment Scale) ou l’EGF (échelle d’Evaluation Globale du Fonctionnement), de l’axe V du DSM IV, peuvent faire l’objet d’utilisation, Huguelet ( ).

L’échelle de traitement des abus de substance SATS (Substance Abuse Treatment Scale)

Cette échelle a été conçue pour évaluer des progrès vis-à-vis de la toxicomanie liés à un progamme de traitement. Elle comprend 8 niveaux : 1/ Pré-engagement dans les soins ; 2/ Engagement ; 3/ Début de prise de conscience ; ....... ; 7/ Prévention des rechutes ; 8/ En rémission ou en guérison, Mc Hugo, 1995 ( ).

Les données concernant l’évaluation sociale

Les informations concernant les données épidémiologiques sociales ne sont connues que pour les seuls toxicomanes ayant recours au système sanitaire et social de soins. En effet les toxicomanes les plus marginaux aux liens sociaux très pauvres n'ont que peu de recours au système de soins et ne sont donc pas représentés dans les études épidémiologiques descriptives de leur situation sociale. Si la précarité sociale aggrave la toxicomanie et les maladies afférentes, elle rend bien sur plus problématique le recours aux soins.

Un travail mené par l'ASEM en 1991 concluait à l'existence de trois types de toxicomanes :

1 - les toxicomanes errants qui sont des toxicomanes marginaux aux liens sociaux très pauvres ; peu demandeur d'aide,

2 - les toxicomanes de quartier, insérés dans un quartier du fait de leur famille ou de leurs amis. Beaucoup ont grandi dans ce quartier, ont des conduites très antisociales et constituent le noyau dur de la toxicomanie. Les premier interlocuteurs institutionnels de ces toxicomanes sont souvent la Police et la Justice. Ils ont recours en premier lieu aux structures de soins de proximité, implantés dans le quartier,

3- les toxicomanes socialement insérés ; les médecins généralistes sont leurs interlocuteurs privilégiés.

Les informations récentes publiées par l'OFDT rapportent que l'insertion des toxicomanes dans la vie active est faible. 72% des toxicomanes suivis en Novembre 94 n'exercent pas d'activité professionnelle ; parmi ceux-ci 60% sont au chômage. Par ailleurs, la situation de ceux qui exercent un emploi est relativement précaire puisque parmi eux plus de la moitié sont en contrat à durée déterminée. C'est dans les centres sociaux que la part des toxicomanes inactifs est la plus importante, mais les toxicomanes y ayant recours sont également plus jeunes.
Concernant les données de l'OFDT 8% d'entre eux n'ont aucune couverture sociale, particulièrement représentés parmi les moins de 25 ans. Le quart des toxicomanes perçoivent le RMI.

D'après les études récentes, il semblerait que par rapport aux années antérieures on assiste à une majoration des états de pauvreté et de précarité chez les toxicomanes.

Une enquête effectuée en 1996 concernant 369 patients consultant pour la première fois un centre de soins de proximité rapporte un rajeunissement de la population accueillie s'accompagnant d'une précarité accrue, celle-ci observée tant au niveau de la couverture sociale qu'au niveau des ressources financières légales. Cette augmentation de la précarité concerne une population jeune en situation de rupture familiale et sociale.

Rôle de l’approche sociale en matière de sevrage aux opiacés

Comme nous l'avons vu, l'évaluation sociale et la réponse qui peut y être faite doivent être prises en considération lors du sevrage. Malgré des études classiques montrant l’intérêt d’une prise en charge psychosociale des toxicomanes, Mc Lellan, 1993 ( ), il n'existe pas à notre connaissance d'études évaluant l'incidence de la problématique sociale sur le pronostic du sevrage aux opiacés. De telles études pourraient peut-être déterminer des indicateurs sociaux de mauvaise réponse au sevrage aux opiacés chez certains patients, engageant les équipes soignantes à développer un étayage des soins plus important pour ceux-ci, ou à les orienter vers d'autres modalités thérapeutiques. En effet l'ensemble des études centrées sur l'aspect social chez le toxicomane aux opiacés s'attachent à décrire les caractéristiques sociales de cette population ou à évaluer des procédures de soins (le plus souvent des programmes de substitution) au travers de leur impact sur la situation sociale des patients.


III - Quelles stratégies d'évaluation et quel retentissement lors du sevrage ?

Bien que ces données appartiennent au suivi des toxicomanes aux opiacés en général et non pas spécifiquement à l’évaluation d’un sevrage, on peut reprendre les résultats de Rounsaville 1986 ( ). Ces résultats s’appuient sur l’utilisation de l’ASI et des critères RDC.

De façon générale, une sévérité des troubles psychiatriques évalués par l’ASI rend compte d’un impact majeur sur les différentes composantes de l’évaluation du pronostic, cet impact compte pour 12% de la variance totale.

La présence d’un trouble de l’humeur, notamment d’une dépression majeure, influence fortement sur le pronostic.

Plus de la moitié des sujets font l’objet de plusieurs diagnostics psychiatriques, 53%, et un grand nombre accuse un diagnostic structural de personnalité antisociale ou de traits de cette personnalité associés à ceux d’autres troubles de la personnalité.

L’influence de la psychopathologie retentit directement sur l’adaptation sociale. L’existence de troubles de la personnalité antisociale s’accompagne à 6 mois de problèmes judiciaires plus importants.

L’évaluation doit être multidimensionnelle dès le début de toute inscription dans un dispositif de soins pour sensibiliser à des modifications, même subtiles dans un domaine.

Ainsi, avant tout sevrage :
1/ Identifier et anticiper les facteurs de risques généraux.
2/ Savoir les effets attendus de certains facteurs sur le sevrage.
3/ Pouvoir, dans l’entretien, poser les questions indispensables.

Actuellement, plus que dans le passé

le sevrage doit être préparé et mûri. La facilité pour se procurer un produit de substitution doit rendre circonspect devant toute demande impérative ou urgente pour pratiquer un sevrage. Des différentes études concernant l’approche psychopathologique et sociale, plusieurs éléments jouent un rôle.


L'existence d'un trouble de l'humeur

peut favoriser la prise de toxiques à visée euphorisante ou d’apaisement. Si ce trouble fait partie d’une dépression unipolaire ou d‘une maladie bipolaire, la reconnaissance de l’affection va impliquer un diagnostic de co-morbidité et un pronostic différent. De plus, au décours du sevrage, un trouble de l’humeur peut intervenir. La conduite toxicomaniaque peut représenter une complication au même titre que le suicide ou l’alcoolisme. L’hypothèse de l’automédication par les opiacés a été développée pour expliquer comment certains toxicomanes luttaient contre la dysphorie ou la tristesse, Rounsaville, 1982 ( ), Castanede, 1989 ( ). D’autres patients utilisent l’héroïne pour prolonger ou intensifier des états d’excitation sous jacents à une hypomanie. Chez les parents des sujets toxicomanes, la présence d’un ascendant ayant un trouble de l’humeur devra être évalué. Pour chaque cas l’évaluation du poids de la comorbidité apparaît important. Les traitements ne devront être proposés qu’après 2 ou 3 semaines de symptomatologie pour ne pas instaurer d’autres traitements pour des états transitoires, circonstanciels.


L'existence d'un trouble anxieux

Il apparaît fréquent. Les phobies sociales, ou les attaques de panique peuvent précéder, accompagner ou suivre les épisodes de sevrage. Ici aussi l’hypothèse d’une automédication a été soulevée. L’exacerbation de l’anxiété peut être la conséquence d’un sevrage brutal ou différé vis-à-vis des opiacés. Dans d’autres cas, l’anxiété aura été le point de départ pour la consommation d’opiacés et secondairement la perception subjective de l’anxiété ne se fait plus conduisant juste à majorer ponctuellement la prise de toxiques.
A la suite de sevrage peuvent apparaître différentes formes de tableaux anxieux que l’on ne percevait pas toujours avant le sevrage. Les symptômes anxieux rendent les sujets vulnérables, il faut apprendre à bien distinguer ce qui relève de l’anxiété au sens clinique et ce qui relève d’une symptomatologie de sevrage, qu’elle soit physique ou psychique. Dans cette discrimination, les sujets penseront toujours à un sevrage et y répondront par une prise de toxiques. Les benzodiazépines doivent être évitées et l’on utilisera des antidépresseurs tricycliques, des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine ou des neuroleptiques sédatifs. Dans les périodes du sevrage immédiat, un travail psychothérapeutique permettra de ne pas attribuer à l’absence d’héroïne tout symptôme subjectif.


Les symptômes psychotiques et schizophréniques

Là aussi il convient de tenter de préciser si les symptômes psychotiques précédents compliquent ou accompagnent la toxicomanie. Dans bien des cas, les toxiques opiacés servent à réduire l’intensité des symptômes psychotiques ou à améliorer la dysphorie liée à leur condition. L’héroïne, comme d’autres opiacés, peut représenter des tentatives pour contrôler des hallucinations ou des symptômes délirants. Les produits servent soit à agir en les augmentant ou en les réduisant, soit à se distancier des états psychopathologiques. Les toxiques peuvent aussi être une explication rationnelle vis-à-vis de symptômes par ailleurs incompréhensibles.


Les troubles de la personnalité

Leur taux de reconnaissance dépend à la fois des compétences psychiatriques, des médecins, d’un programme et de l’accent mis sur la personnalité lors des entretiens. Les diagnostics de personnalité antisociale, état limite, narcissique ou dépendante sont les plus souvent reconnus. Ces troubles expliquent les difficultés antérieures des patients et vont induire des problèmes de distance relationnelle de continuité dans la relation et des risques importants de rechute. Avec Kosten, 1989 ( ), on peut souligner la fréquence des besoins en soins liés aux personnalités état limite et narcissique. La comorbidité médicale plus fréquente des personnalités antisociales est à signaler.

Les personnalités antisociales : leur diagnostic paraît créer un climat d’impuissance. Certaines conduites antisociales traduisent les conséquences de la toxicomanie, d’autres peuvent être liées à un trouble bipolaire ou à un trouble schizophrénique. Il convient d’évaluer soigneusement les premiers troubles et le moment de survenue de la toxicomanie. De la fréquence et de la gravité des passages à l’acte, découlera les conditions de durée d’un sevrage. Dans bien des cas un diagnostic de trouble de l’humeur peut accompagner le diagnostic de personnalité antisociale. Certains troubles de la personnalité antisociale apparaissent comme secondaires aux conduites toxicomaniaques : vols, petite délinquance.

Les personnalités état limite : la consommation de toxiques, ceci de façon impulsive, fait partie des critères de diagnostic. Dans une étude sur la consommation des substances chez les états limites Dulit ( ) a pu montrer que si la toxicomanie ne faisait plus partie des symptômes de diagnostic de personnalité limite, le cours de la maladie devenait plus favorable. Ces patients peuvent engendrer lors des sevrages soit de symptômes psychotiques, soit des troubles anxieux, soit des états dépressifs majeurs sur l’un des 4 pôles : cognitif, affectif, psychotique ou comportemental.

Les personnalités narcissiques : utilisent les opiacés à la fois comme stimulant, mais aussi comme objet substitutif qu’elles peuvent contrôler à volonté. Dans bien des cas, ces troubles de la personnalité vont entraîner des conduites d’auto-sabotage et de mise en cause du traitement. La perte d’une image brillante et "socialement lumineuse" d’eux-mêmes leur est intolérable. Bien souvent la responsabilité sera rejetée sur le thérapeute ou l’équipe, considérés comme insuffisants, peu disponibles, pas assez à l’écoute, ...

Les personnalités passives-agressives, histrioniques ou autres posent des questions de difficultés dans le transfert et de fragilité vis-à-vis des rechutes. Reconnaître l’existence de telles personnalités revient à ne pas répondre au "pied de la lettre" à des attaques contre le cadre de soins ou le thérapeute, mais de nuancer ou d’introduire des métaphores dans les réponses.



Conclusion

Alors que les messages de prévention concernant la santé physique pour ce qui est de la désinfection, de l’échange des seringues, des mesures d’hygiène, font l’objet d’une diffusion et d’un large consensus y compris auprès des associations d’usagers des drogues, la notion de souffrance psychique et d’affections mentales chez les toxicomanes reste source de controverses. Ceci s’exprime par "la terreur de l’empire psy", ASUD, 1998 ( ).

Un des stéréotypes les plus communs tourne autour de la prescription des psychotropes qui ne seraient qu’une toxicomanie induite, surajoutée aux problèmes du sujet. Ces stéréotypes ont amené à fournir des relais de soins peu médicalisés et souvent anti-médicaux au moment où les médecins comme les pharmaciens devenaient des partenaires du premier plan dans le monde des soins de la toxicomanie.

Qu’il s’agisse d’un fonctionnement psychique prévalent, mais le plus souvent acquis après des traumatismes ou des difficultés de vie, bien des toxicomanes expriment au premier contact un fonctionnement hyper-adapté, au plus proche du concret et du réel. Ces contacts initiaux, renforcés par les défenses de caractère, plaident pour la "normalité" des toxicomanes.

Les études épidémiologiques ont pu montrer, et préciser, qu’un certain nombre de pathologies se rencontraient. L’épidémiologie fonctionne comme le révélateur et l’indicateur de besoin de soins. Les professionnels de santé doivent rechercher les indices de souffrance psychique, d’affections mentales, de troubles de la personnalité, comme autant d’éléments jouant un rôle dans le pronostic du sevrage comme dans celui de la destinée des sujets toxicomanes. Certaines pathologies décelées justifient d’un traitement à orientation médicamenteuse, d’autres expliquent les ruptures, les rechutes, d’autres rendent compte de la difficulté dans la relation, des multiples prises en charge, voire des vécus de compétition ou d’hostilité entre certains thérapeutes ou entre certaines équipes.

Une évaluation des problèmes psychiques, des difficultés de personnalité ou des problèmes sociaux, ne doit pas être un élément supplémentaire d’un dossier. Elle doit faire l’objet d’une réflexion, d’un partenariat avec le toxicomane pour que le dispositif de soin possède une certaine consistance, une capacité d’élaboration et une sensibilité suffisante pour déterminer l’opportunité et le moment d’un sevrage.



Facteurs de risques psychopathologiques et sevrage (Fig. 1)
Identifier et anciper les facteurs de risques généraux du sujetRisques intervenant sur le sevrageStratégies initiales
Internes Externes
Syndromiques
comportements familleanxiété : prescription BZD limiter les prescriptions de tranquillisants
confusion / sevrage
pensées, cognitions et croyancessupport et lien sociauxdépression : automédication par opiacésrôle des antidépresseurs et des thymorégulateurs
émotions, affectsrevenus et insertionschizophrénie : vécu persécutoire ou délirantneuroleptiques atypiques
co-dépendances : effets des autres produitstraiter les co-dépendances
Troubles de la personnalité
personnalitécrises de viepersonnalité antisociale : ruptures multiplespsychothérapie cognitive et/ou interpersonnelle
introspection imaginairediscontinuité thérapeutiquepersonnalité limite : instabilité, rechutespsychothérapie et traitements pharmacologiques
productions mentales pathologiquesdispositif de soins rigidepersonnalité narcissique : distance relationnelle
Sociaux
milieu de toxicomanes : environnement négatifmesures sociales : RMI, AAH, stages
désinsertion : absence de soutienrôle des Associations

D’après BRADLEY et GOSSOP, Br. J. Psychiatry 1989, 154, 354-359 - El GUEBALY et HADGINS, Can J. Psychiatry 1998, 43, 29-36




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