Comment la conscience contrôle le cerveau

John C. Eccles

 

Fayard Le temps des sciences, 1997 (How the self controls its brain, 1994)

Dès l'enfance nous éprouvons la sensation d'être une entité unique, un « soi » conscient de sa propre ixistence, Or, loin d'expliquer ce sentiment d'unité, les progrès réalisés dans la compréhension des mécanismes internes du cerveau nous la font apparaître plus mystérieuse encore.

Des expériences récentes ont ainsi montré que la pensée pouvait exercer une action causale sur le cerveau. Ainsi en va-t-il du sujet qui, plongé dans le noir et protégé de toute sensation, doit detecter un attouchement à peine perceptible sur l'un de ses doigts. Il suffit en effet qu'il se prépare à la détection pour que l'aire du cerveau correspondant au doigt en question sait activée alors que celui-ci n'a pas encore été touché.

Mais si la pensée maîtrise le cerveau, comment cette action se produit-elle ? Comment la concilier avec les lois connues de la physique ? Après avoir exposé ses propres recherches, Sir John Eccles nous montre que cet obstacle peut être résolu. L'étude des structures ultrafines des cellules nerveuses jointe aux calculs issus de la physique quantique (qui étudie l'infiniment petit) révèle en effet comment l'expérience mentale interagit avec les structures neuronales du cerveau.

Ce faisant, l'analyse bouleverse les conceptions dominantes dans les neurosciences et ouvre d'immenses perspectives aux futures recherches sur la conscience et la formation du « soi ».

 Sir John Eccles, prix Nobel de médecine en 1963, est l'un des plus grands neurologues de ce siècle. Il est notamment l'auteur de Évolution du cerveau et création de la conscience (Fayard, 1992).

Ce livre du prix Nobel de Médecine 1964 ne promet pas ce que son titre annonce. Mélange de sophistication savante (la mécanique quantique) et de naïvetés (régressions à l'infini). L'action d'une réalité mentale immatérielle sur une réalité matérielle demeure toujours incompréhensible.

La Conscience apparaitrait avec les vésicules synaptiques et l'exocytose (Exocytose: mécanisme au cours duquel les vésicules synaptiques fusionnent avec la membrane terminale présynaptique et libèrent des molécules de transmission dans l'espace synaptique) et le rapport de l'esprit et du cerveau est ramené au jeu des "psychons" et des "dendrons" (dont il avoue, en fin d'ouvrage, p209: "Nous ne savons rien de l'anatomie de ce dialogue"). Et, au-delà, au rapport des Mondes 1 et 2 de Karl Popper. Par quel saut épistémologique?...

Et comme on n'en est pas à un "monde" prés, Eccles formule l'hypothèse que "les psychons existent peut-être indépendamment des dendrons, dans un monde de psychons, le monde du soi et de la conscience" (p213). Platon réveille-toi: les psychons arrivent !

Ce monde-là n'étant pas confondu ni exclusif apparemment d'un "autre niveau de réalité" qualifié sans fard de "surnaturel".

Retour au dualisme cartésien (bien qu'il s'en défende; et prétende que le dualisme est le garant de "notre liberté retrouvée") et à un atomisme consternant: "le monde mental est intégralement microgranulaire, le terme psychon désignant les unités mentales" (pp146,168). La vésicule présynaptique et le dendron sont la nouvelle glande pinéale.

"Ce livre est un défi à tous les matérialistes" écrit Eccles, ces matérialistes qui vivent dans la terreur de la conscience, comme dit Searle. Mais que penser de cette profession de foi qui termine son dernier livre sur la phrase suivante: "La transmission synaptique chimique constitue donc le fondement de notre monde conscient et de sa créativité transcendantale" ?!

Si l'on comprend bien, le problème pour Eccles est moins celui des rapports de deux substances (le cerveau et l'esprit) que celui du comment passer de l'un à l'autre sans supplément d'énergie (=sans violer la 1ère loi de la thermodynamique). De son point de vue de microbiologiste, c'est essentiellement une question de démultiplication, d'amplification a minima et seul le recours à la physique quantique permettrait de sauvegarder ce principe d'économie. Ce serait grâce à la faible probabilité quantique de l'exocytose provoquée par l'effet des impulsions présynaptiques sur un bouton que certaines expériences conscientes primitives trouveraient leur expression (p217).

Les intentions mentales augmentent des probabilités d'activation, d'exocytose. La Conscience, par la médiation du cerveau qu'elle stimule (comment??) augmente la probabilité des exocytoses dans les réseaux vésiculaires présynaptiques.

Pour Jean Delacour (Paris VII), le recours à la physique quantique est pour le moins prématuré et n'est évoqué, sans doute, que comme argument antidéterministe, les relations d'incertitude étant le dernier bastion de la liberté.

Mais le dernier mot (non prononcé) est quand même l'incontournable émergence ; que ne saurait expliquer une invocation classiquement Darwinienne (pp153,172).

Eccles finit par sombrer dans la théologie en invoquant "I'unicité de la conscience ou de l'âme" (ce que Delacour appelle une "pneumatologie" spéculative), "une entité située dans un autre niveau de réalité...une entité surnaturelle" et affirme sa "foi en une âme humaine d'origine divine" (p215). C'est son droit, mais que ne l'a-t-il dit tout de suite ! et pourquoi nous avoir maintenu en suspense si longtemps pour avouer ne parler, finalement, que des instrumentalités de "l'âme". Mais on n'est pas conseiller scientifique du Vatican par hasard.

RMP