DIRECTION GENERALE DE LA SANTE
Sous-direction de la santé et de la société
Bureau de la santé mentale
Les professionnels spécialisés (psychologues et psychiatres) doivent contribuer à expertiser et évaluer les contenus des informations données dans le cadre des actions et programmes de prévention, notamment celles mises en œuvre par les intervenants non spécialisés ou celles proposées par les associations composées de bénévoles.
Ils doivent, en outre, être garants des objectifs et du contenu des actions de prévention réalisées par les partenaires institutionnels, en lien ou non avec léquipe de secteur, afin dassurer leur cohérence globale dans la communauté.
Outre une démarche de réduction des risques en santé mentale auprès des patients dont ils assurent le suivi, les professionnels spécialisés en santé mentale doivent privilégier laide aux aidants plutôt quune aide directe de la personne, afin de favoriser le repérage précoce déventuels troubles mentaux des personnes en souffrance psychique invalidante.
Il nen demeure pas moins que leur rôle doit pouvoir être mis à profit auprès de certains publics :
- personnes dont la caractéristique est généralement de ne pas poser de demande de soins (personnes en situation dexclusion ; personnes âgées ; personnes détenues ; adolescents).
- personnes en situation de vulnérabilité induite par une pathologie somatique.
Une aide directe doit pouvoir être réalisée notamment par les psychologues, les infirmiers et les éducateurs spécialisés des secteurs de psychiatrie, dans le cadre de missions spécifiques du secteur menées en partenariat avec les professionnels et institutions sanitaires, médico-sociales ou sociales. Elle nécessite, dans les secteurs de psychiatrie, lélaboration collective de lorganisation et des procédures dintervention dans la communauté autour de la souffrance psychique invalidante par léquipe pluriprofessionnelle, au besoin en relation avec les secteurs de psychiatrie voisins.
Cette organisation devrait sinscrire dans le cadre de protocoles co-élaborés par léquipe pluriprofessionnelle sous lautorité du psychiatre chef de service.
Ces protocoles doivent notamment garantir :
- la coordination des interventions du secteur auprès des partenaires extérieurs pour des actions de formation/information/communication sur les compétences mutuelles de chaque institution ;
- le rôle des psychiatres, psychologues, infirmiers, éducateurs et assistants sociaux amenés à intervenir dans le cadre de mission spécifique du secteur auprès de publics ciblés. (cf. ci-dessus).
Il est nécessaire que les différentes interventions du secteur dans le domaine de la prévention sintègrent dans une démarche planifiée, basée sur le constat des besoins, la définition dobjectifs et lélaboration dactions spécifiques évaluables. Au vu des multiples demandes de prévention en santé mentale dans la communauté (milieu scolaire, collectivités locales, justice, missions locales, ANPE...), il apparaît utile aux membres du groupe de mieux programmer ces actions afin doptimiser le rôle du secteur de psychiatrie en ce domaine.
Il est, à cet effet, proposé dans chaque secteur, sous lautorité du chef de service, une fonction de coordonnateur de prévention dont la mission première serait de recenser lensemble des actions actuellement menées dans lesquelles le secteur intervient, les spécificités auxquelles elles répondent (institution et publics concernés), danalyser la mobilisation des ressources du secteur en la matière et de recenser les attentes et les besoins des différents partenaires.
A partir de cet état des lieux, le coordonnateur de prévention aurait pour mission de proposer au chef de service, en concertation avec léquipe de secteur et ses partenaires, un programme dinterventions et assurerait, pour ce qui concerne les interventions du secteur, la logistique et la coordination de leur mise en œuvre. A partir de cette programmation, il revient aux membres de léquipe des secteurs concernés, de développer le travail de partenariat ou en réseau adéquat.
Le profil requis pour tenir cette fonction nest pas à priori médical, cet aspect étant garanti par la responsabilité du psychiatre chef de service. En revanche, un profil de santé publique, acquis ou à acquérir est indispensable. Sagissant des métiers concernés, les membres du groupe ont cité des expériences de terrain dans lesquelles ces fonctions sont confiées à un assistant de service social ou à un psychologue.
Par ailleurs, il serait utile de regrouper les coordonnateurs de prévention dun même département en équipe intersectorielle afin de favoriser une logique globale de prévention à léchelle dun département et mettre en relation les différentes équipes de secteur développant des actions similaires.
La proposition de développer cette fonction de coordonnateur de prévention suscite lavis partagé des membres du groupe. Un représentant des psychiatres sy déclare hostile, estimant que cette mission de coordination appartient au chef de secteur ; et craint également, dune part, que cette fonction soit dissociée de la fonction clinique de léquipe de secteur, et dautre part, que soient privilégiées les actions de prévention collective au détriment dune prévention au plan individuel. Les autres membres du groupe y sont favorables. Les représentants dusagers estiment, par exemple, quune plus grande lisibilité des actions de prévention constituerait un atout pour le secteur de psychiatrie, favorisant notamment une approche plus globale des problèmes de santé mentale. La représentante des psychologues libéraux considère également que cette approche permet de sortir dune logique de médicalisation de la prévention. Les représentants de médecins psychiatres favorables à cette proposition insistent toutefois sur la nécessaire vigilance quant à la compétence requise et au mode de recrutement pour tenir une telle fonction. Il leur semble quelle doit demeurer tierce par rapport à lactivité clinique du secteur, quand bien même elle serait assurée par un membre de léquipe du secteur. Certains proposent ainsi le rattachement de cette fonction à un pôle de santé publique.
Le travail daccueil et de lien avec les personnes lors de situations de crise, doit également être proposé :
- par des infirmiers de secteurs de psychiatrie dans les services hospitaliers durgence et dans les secteurs de psychiatrie.
- dans le cadre dune plate-forme téléphonique qui pourrait être organisée par les secteurs de psychiatrie et les professionnels spécialisés libéraux ;
Concernant les cellules durgence médico-psychologique, un travail de régulation en amont est essentiel pour distinguer dans ce cadre la réponse à lurgence médicale psychiatrique et les réponses à une catastrophe collective (prise en compte du traumatisme ; des peurs paniques..) qui nécessitent alors de privilégier un mode dintervention psycho-social.
Lintervention en urgence des professionnels spécialisés (équipes des secteurs de psychiatrie ; psychiatres et psychologues libéraux ou salariés) en institution somatique, sociale ou médico-sociale..., doit garantir de manière complémentaire la double finalité du service rendu à la personne en souffrance et du service rendu à linstitution et aux professionnels qui y exercent.
Dans les services hospitaliers durgence, doit être organisé un véritable plateau technique complémentaire issu des secteurs de psychiatrie. Trois garanties doivent être apportées :
. assurer, en tant que de besoin, la double prise en charge somatique/psychiatrique des patients afin déviter quune de ces deux composantes ne masque la gravité de lautre ;
. prendre en charge la personne malade et son groupe en associant la famille ou lentourage, les partenaires damont (professionnels spécialisés ; médecins généralistes ; institutions médico-sociales le cas échéant..) et les partenaires daval (professionnels publics ou libéraux en hospitalisation ou en ambulatoire) ;
. permettre laccès aux soins spécialisés pour le patient le nécessitant, aussi est-il important dinscrire lurgence dans une continuité de soins ultérieurs.
Laide en urgence aux professionnels non spécialisés (médecins généralistes ; institutions sociales ou médico-sociales ; institutions scolaires, de lAide sociale à lenfance ou de la protection judiciaire de la jeunesse...) doit être assurée par les professionnels spécialisés en psychiatrie. Pour permettre aux équipes de secteur de psychiatrie et aux professionnels spécialisés libéraux (psychiatres, psychologues) de programmer du temps non programmé, peuvent être développées à cet effet :
. la plate-forme téléphonique de professionnels spécialisés précitée ;
. une fonction daccueil et durgence 24h/24h en secteur de psychiatrie pour apprécier et réguler des situations durgence rencontrées par les partenaires professionnels et les familles.
Il sagit de renforcer le rôle du secteur de psychiatrie, et notamment celui du CMP, comme pivot de la prise en charge globale spécialisée des personnes souffrant de troubles mentaux afin de coordonner et de mettre en relation les interventions des soignants spécialisés en santé mentale et de développer une démarche cohérente de soins.
Les équipes pluriprofessionnelles de secteur doivent intervenir en complémentarité, et non pas en relais, des professionnels spécialisés du champ de la santé mentale hors secteur de psychiatrie, - psychiatres et psychologues libéraux.
Les psychiatres et psychologues libéraux doivent pouvoir, si nécessaire, accéder aux stratégies thérapeutiques proposées par les secteurs de psychiatrie pour garantir une égale qualité de prise en charge à tous les patients. En contrepartie, le secteur doit pouvoir solliciter les psychologues et psychiatres libéraux ainsi que les professionnels spécialisés dans la lutte contre lalcoologie ou la toxicomanie, pour mener des prises en charges adaptées.
Le développement de rencontres autour notamment dobjectifs communs sur des publics ou des pathologies ciblées, constitue également une réponse adéquate.
Enfin, un projet global de santé mentale associant les professionnels spécialisés libéraux (psychiatres ; psychologues) et les équipes de secteurs, devrait être défini localement et pourrait être concrétisé par un réseau de santé, en y associant les acteurs de soins primaires et les intervenants des centres de soins dans le domaine des addictions.
Toute personne malade doit pouvoir bénéficier dune prise en charge directe par un professionnel spécialisé dans les plus brefs délais. Laccès direct à une consultation de psychiatre ou à une psychologue doit rester possible.
Lors dune demande de consultation spécialisée, hors situation durgence, lorsquun rendez-vous avec un spécialiste (psychiatre, psychologue) nest pas envisageable dans les meilleurs délais, il est indispensable dorganiser systématiquement un accueil du patient dans des délais inférieurs à 10 jours suivant la demande. Cet accueil permet, en effet, dinscrire le plus rapidement possible un patient dans une démarche de soins.
Cette orientation contribue à gérer la question du délai dattente tant en libéral que dans le public. Elle est dautant plus essentielle pour les personnes qui ne relèvent pas dune urgence mais pour lesquelles lattente risque dentraîner, soit une rupture dans la démarche daccès aux soins, soit une aggravation de létat de santé. Dautant plus que ces demandes émergent souvent dun long travail de la famille, du médecin généraliste avec le patient.
Cet accueil nintègre ni la fonction de diagnostic, ni celle de lorientation ou stratégie de prise en charge. Il consiste en un entretien dévaluation permettant aux personnes de décrire leur situation, au soignant dapprécier lurgence et la gravité de cette situation dans un premier temps dévaluation psycho-pathologique et de mettre au point une solution temporaire en lattente dune consultation. Il ne sagit en aucun cas dapprécier la nécessité de la consultation par le médecin psychiatre, voire le psychologue.
A cet effet, il est indispensable de :
- renforcer la permanence douverture des CMP ;
- confier cette fonction daccueil à des infirmiers de secteurs de psychiatrie, dans le cadre du projet de service protocolisé ;
- mettre en place, si nécessaire pour des raisons de proximité géographique, des services daccueil et dévaluation dans les hôpitaux généraux hors des services durgence, au besoin par conventionnement avec des secteurs de psychiatrie pour la mise à disposition de personnels spécialisés.
En outre, dans une approche communautaire de la santé mentale, et pour favoriser la lisibilité sociale de loffre de soins, un dispositif formalisé permettant de connaître la disponibilité de chacun des professionnels publics et libéraux pourrait être étudié (standard téléphonique unique sur un territoire pertinent...).
Il sagit ici de renforcer et diversifier la composition et le rôle de léquipe pluriprofessionnelle, afin de répondre à lensemble des besoins existants dans la zone de compétence du secteur et daboutir à la mise en œuvre de projets de soins individualisés pour les patients.
Sous la responsabilité du psychiatre et dans la limite de leur champ de compétence, les différents abords de la spécificité dintervention de chacun des professionnels doivent être développés, tout en maintenant la cohérence de la prise en charge des patients, en vue notamment de répondre aux différents besoins de ces patients.
Les membres du groupe préconisent la mise en place de protocoles de fonctionnement des équipes, au sens dun projet de coordination des fonctions, fondé sur la clinique, à la suite dun travail de reconnaissance de lintervention spécifique des différents professionnels (cf. psychiatres, psychologues, infirmiers, psychomotriciens, kinésithérapeutes, assistants sociaux de secteur...). Clairement situés au sein de léquipe de secteur, au regard de leurs compétences propres, les professionnels sont plus à même de travailler ensemble autour des projets de soins individualisés.
Ce principe entraîne, en corollaire, la nécessité que les innovations et actions pertinentes effectivement mises en place par les secteurs pour sadapter aux besoins des patients, soient reconnues, voire officialisées dans le cadre notamment du projet détablissement ou dun réseau. La mise en place de tels protocoles ne remet pas en cause la capacité à mobiliser des compétences externes pour intervenir, le cas échéant, dans le cadre des prises en charge proposées par le secteur (artistes ....).
Les protocoles (projets de coordination des fonctions), co-élaborés par léquipe pluriprofessionnelle sous lautorité et la responsabilité du psychiatre chef de service, en lien avec les cadres infirmiers et socio-éducatifs, doivent permettre une nouvelle distribution des rôles de chacun et garantir notamment :
- laccueil des patients et de leur famille dans le secteur dans des délais brefs ;
- la fonction 24h/24h dévaluation et de régulation des situations en urgence à destination des demandes formulées pour des patients par les institutions ou les familles;
- les modalités permettant aux patients daccéder au secteur de psychiatrie par un accès direct aux psychologues du secteur (public cible ; conditions de prise en charge ; supervision..) ;
- un projet de soin individualisé pour chaque patient en intra ou extra hospitalier ;
- un travail daccompagnement et/ou de co-prise en charge des patients suivis en libéral ou en médico-social ;
- un renforcement de lintervention de médecins somaticiens, plus particulièrement à légard des patients hospitalisés au long cours, au vu de la nécessité dintégrer la prise en charge du corps des patients, dans la prise en charge globale médicale, psychologique, sociale et éducative proposée dans les services de psychiatrie.
Le Conseil de service constitue un lieu adéquat pour élaborer de tels protocoles où sont précisées les fonctions et obligations de chacun dans des liens qui assurent la cohérence des soins sous la responsabilité du médecin psychiatre, Chef de service.
Cette identification est indispensable dans le cadre de la prise en charge globale des patients atteints dune pathologie psychiatrique lourde, telle que la schizophrénie ou les troubles de la personnalité.
Ce professionnel nest pas forcément le thérapeute de la personne ou celui qui décide des soins (cette orientation permet notamment de garantir au patient le libre choix de son médecin même au sein du secteur). Il est celui qui, en lien étroit avec le thérapeute, tout au long de la prise en charge sanitaire par différents professionnels, exerçant en libéral ou en secteur de psychiatrie, va se soucier de ou se préoccuper du patient dans la globalité de ses besoins en faisant appel, le cas échéant, aux professionnels plus particulièrement compétents dans le champ de la demande (thérapeute, assistant social, infirmier...).
Plusieurs propositions sont faites concernant les professionnels pouvant assurer cette fonction. Il y a néanmoins consensus du groupe pour préconiser une équipe référente, pouvant associer des professionnels libéraux et des professionnels de secteur, et éviter ainsi, linconvénient dune trop forte personnalisation de la fonction.
- Outre le médecin psychiatre, cette fonction peut être dévolue à divers professionnels spécialisés en santé mentale : infirmiers, travailleurs sociaux, psychologues ;
- Certaines propositions sorientent vers un triple référent (psychiatre ; infirmier ; travailleur social), chacun dans son registre de compétence ;
- Il convient de prendre en compte le choix des patients qui investissent eux-mêmes un professionnel et en font leur référent. Il sagit souvent de la situation des équipes intra-hospitalières qui continuent à tenir un rôle de référent à la sortie du patient de lhôpital sans que cela soit reconnu en tant que tel.
Pour ce qui est du suivi spécifique des patients souffrant de troubles de la personnalité, véritable pathologie du lien où se pose la question de la iatrogénie, il y a consensus du groupe pour que léquipe référente soit composée exclusivement de personnels infirmiers de secteur psychiatrique.
La psychothérapie constitue une modalité de soins qui répond à une indication basée sur une évaluation préalable. Loffre de soins en psychiatrie doit être diversifiée pour répondre à lensemble des besoins des patients. La psychothérapie, méthode de traitement psychologique des troubles psychiques, doit être développée au même titre que les traitements chimiothérapiques, soit en traitement unique soit en traitement associé à une prise en charge chimiothérapique ; les psychothérapies proposées devant être scientifiquement validées.
Les usagers ont cependant signalé le frein à laccès à cette prise en charge que constituerait une indication médicale, notamment psychiatrique.
Beaucoup de professionnels se prévalent du titre et des compétences de psychothérapeute alors quils ne disposent pas toujours dune bonne connaissance des techniques psychothérapiques et ne répondent pas nécessairement aux exigences de qualification nécessaire à la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux. En outre, certains développent des méthodes et pratiques de psychothérapie dont le fondement et la pertinence scientifique sont inexistants, voire ont des effets délétères.
Il y a consensus du groupe pour considérer que les professionnels pratiquant la psychothérapie doivent répondre aux quatre critères suivants :
- avoir acquis une compétence clinique en psychopathologie validée par lUniversité ;
- avoir été formé à la relation en lien avec lUniversité ;
- avoir été formé à rendre compte de ce qui se passe dans la psychothérapie (supervision) en lien avec luniversité (cette formation peut être effectuée en dehors de luniversité mais sous sa responsabilité ; le choix des institutions par luniversité avec laide des sociétés savantes en psychiatrie et en psychologie) ;
- sappuyer sur un encadrement déontologique.
Il y a également consensus du groupe sur le fait que la démarche psychothérapeutique ou psychanalytique personnelle ne peut pas être régulée ni être obligatoire.
Le renforcement des contenus des formations proposées par les Universités en psychiatrie et en psychologie sur les champs de la psychothérapie, ainsi que lévaluation des pratiques psychothérapeutiques sont de nature à apporter les garanties attendues des patients.
Les membres du groupe sopposent en conséquence à la reconnaissance dun statut de psychothérapeute.
Une mention particulière sur la pratique de la psychanalyse dans le cadre des soins des troubles mentaux doit être effectuée également :
Lélimination des symptômes nest pas recherchée comme but particulier, mais il soccasionne comme un bénéfice annexe. Il ny a de visée thérapeutique quindirecte en permettant à la personne de trouver des moyens propres à cette guérison. Ainsi, en adaptant le cadre de la cure analytique, des interventions se sont développées auprès denfants en pédo-psychiatrie, et de patients présentant des troubles graves et persistants. Ces interventions se réfèrent à une conception de lactivité psychique et du sujet, qui est issue de la théorie psychanalytique. Dans ces psychothérapies analytiques, une position et une interrogation psychanalytiques y sont soutenues.
Il est donc important de garantir la spécificité et lexigence dune qualité de formation pour la pratique de la psychanalyse, psychothérapie analytique y compris, qui complète le cadre de la formation proposée par les Universités de psychiatrie et de psychologie.
Enfin, dans le dispositif de soins spécialisés, il est indispensable que la pratique de la psychothérapie ne se limite pas à une unique relation duale patient/soignant mais intègre le champ institutionnel, la clinique et la psychopathologie des phénomènes de groupe ainsi que les interventions cliniques de groupe (supervision ; synthèse, réunion soignants/soignés ; réunion institutionnelle, psychothérapie institutionnelle..), pour constituer le travail institutionnel.
Cette démarche qui doit dépasser le partenariat ponctuel, est essentielle dans le cas de co-morbidités psychiatriques rencontrées lors de suivi somatique (exemple du VIH) ou de pathologies complexes, telles lanorexie ou la boulimie par exemple.
Il sagit dun des axes premiers de la psychiatrie de liaison mis en œuvre par les secteurs de psychiatrie en lien avec les psychologues intervenant dans les services somatiques, qui implique pour ces professionnels ainsi que pour les soignants en somatique, une reconnaissance mutuelle de la compétence spécifique de chacun et un partenariat actif. La mise en œuvre de ces compétences devant toutefois sadapter communément à létat de santé polymorphe du patient.
Les professionnels spécialisés doivent intégrer la dimension de la réinsertion dans le cadre du projet de soin spécialisé individualisé mis en place pour chaque patient.
Il est essentiel que soit assurée une mobilisation des ressources locales du champ social et médico-social pour répondre aux besoins des patients stabilisés, en développant des complémentarités dactions si besoin. Cette fonction doit être dévolue aux personnels sociaux-éducatifs de secteur de psychiatrie et peut bénéficier également aux prises en charge proposées par les professionnels spécialisés libéraux.
Il est évoqué toutefois la tendance nouvelle des établissements de santé à privilégier lintervention dassistants sociaux des services du conseil général, au détriment dun accompagnement spécifique des patients lié à une connaissance de la pathologie mentale.
Le groupe de travail estime cependant essentiel de maintenir la spécificité des assistants sociaux de secteur de psychiatrie, au regard de leur double appartenance, reconnaissant en outre la nécessité de développer des liens plus étroits avec les assistants sociaux de droit commun.
Les équipes daide à linsertion, tant en milieu ordinaire quen milieu protégé, considèrent comme essentielles la disponibilité et laccessibilité du soignant. Cela leur permet de mieux assurer leur rôle propre auprès de personnes en souffrance psychique invalidante ou atteintes de troubles mentaux.
Les intervenants spécialisés doivent travailler en partenariat avec les équipes daide à linsertion, en milieu ouvert ou en milieu protégé, dans un but dexplication globale de la situation. Ce partenariat favorise léchange de bonnes pratiques et permet un accompagnement à la vie sociale par le regard clinique. Pour ce qui concerne les personnes atteintes de troubles psychiques graves et durables, il pourrait également sagir dune des fonctions des référents du soin au long cours précité au III.I.D.
Concernant les personnes atteintes de troubles psychiques graves et durables, les membres du groupe estiment indispensable de favoriser une complémentarité et articulation entre le sanitaire (équipe de secteurs psychiatriques et/ou libéraux), et les institutions médico-sociales, devant
dépasser le partenariat ponctuel. Lintervention régulière dans linstitution médico-sociale, dun intervenant spécialisé, public ou libéral, pour tenir une fonction dinterface, de médiation et de lien entre le projet de vie inhérent à linstitution médico-sociale et les soins proposés par les secteurs de psychiatrie ou en libéral, devrait être développée. Ce référent, extérieur au lieu de vie et tiers par rapport aux soins spécialisés mis en œuvre par des professionnels du champ sanitaire, tiendrait une position témoin de cette dynamique de prise en charge globale sanitaire et sociale.
Etre attentif à la dimension psychologique des personnes lors des prises en charge sanitaire, en prenant en compte la personne accueillie dans sa globalité, participe de la prévention en santé mentale.
Les acteurs de soins primaires (médecins généralistes, infirmiers) ainsi que les pharmaciens, doivent intégrer dans leur exercice la question de la souffrance psychique au même titre que celle de la douleur physique (cf. circulaire DGS/SQ2/DH/98/586 du 24 septembre 1998 sur la lutte contre la douleur qui inclue la dimension douloureuse psychologique des patients).
Les professionnels de soins primaires, les pharmaciens, les pédiatres, les médecins scolaires et médecins du travail, ont un rôle essentiel de guidance des patients et déducation pour la santé en matière de santé mentale. Ils peuvent aussi, du fait de leur proximité, veiller à lincidence des éléments existentiels ou sociaux sur la santé mentale des personnes.
En outre, ces professionnels, ainsi que les équipes thérapeutiques dans le domaine des addictions, doivent être acteurs du développement dune prévention globale en santé mentale visant également à réduire les incapacités des personnes en souffrance psychique ou atteintes de troubles mentaux. Ainsi lamélioration du repérage et/ou de la prise en charge par ces professionnels, des impasses psychologiques jusquaux crises suicidaires, de la consommation abusive de produits psychoactifs et des troubles du comportement alimentaire, participent de la prévention en santé mentale.
Il sagit de favoriser une évaluation sémiologique permettant dapprécier lurgence et la gravité de la situation des patients. Cette approche permet de favoriser un accès aux soins spécialisés dès quil est pertinent, sans pour autant remettre en cause laccès direct aux spécialistes (psychiatres et psychologues). Le médecin généraliste doit pouvoir faciliter lélaboration de la demande des patients pour une sollicitation du dispositif spécialisé, et éviter ainsi des situations durgence, voire des hospitalisations sous contrainte.
Les médecins généralistes et les pédiatres, acteurs de soins primaires, notamment dans le cadre de leur collaboration avec le SAMU, doivent pouvoir développer une compétence pour un travail daccueil et de lien lors des situations de crise. Il sagit notamment déviter, dans un certain nombre de cas, le recours aux urgences et le prononcé de mesures dhospitalisation sans consentement.
Il sagit de prendre acte du fait dune part que les patients expriment, à loccasion de leurs consultations auprès de médecins généralistes, un grand nombre de problèmes dordre psychique, et dautre part que ces patients aspirent dans de nombreux cas à un suivi au long cours par ces professionnels. Il est dès lors indispensable de donner à ces professionnels une formation adéquate et les conditions favorables à lexercice de leurs compétences notamment dans les partenariats avec le dispositif de soins spécialisés (équipes de secteur de psychiatrie, psychiatres et psychologues libéraux).
Les membres du groupe insistent sur limportance du travail en commun gage de la validité de lorganisation précitée des compétences. Ce travail en commun ninduit pas forcément un suivi du patient par un intervenant spécialisé et doit respecter les lieux dexercice respectifs de chacun des professionnels concernés.
Lintervention plus rapide des spécialistes (psychiatres et psychologues ) permet de garantir un diagnostic précoce et une stratégie thérapeutique globale pour le patient. Un suivi au long cours adéquat par le médecin généraliste ou le pédiatre, nécessite de formaliser les conditions de passage entre ces professionnels et les intervenants spécialisés.
Ces passages, fondés sur les compétences respectives des professionnels et sur leur capacité à assurer un suivi effectif et dans la durée, peuvent intervenir pour :
. une demande davis diagnostic et/ou thérapeutique et dorientation ;
. une demande de mise en place de co-thérapie ponctuelle ou durable ;
. un transfert avec délégation du suivi en santé mentale.
Les parties IV-2-2, IV-2-7 et IV-2-8, ci-après, précisent les conditions de passage entre les médecins généralistes ou pédiatres et le dispositif spécialisé.
Dans le respect du secret médical, les médecins généralistes ou pédiatres doivent développer un travail de partenariat et déchanges de pratiques avec les équipes daide à linsertion qui le souhaitent, tant en milieu ordinaire quen milieu protégé, afin de les aider à assurer leur rôle propre auprès de personnes en souffrance psychique invalidante ou atteintes de troubles mentaux dont ils assurent le suivi.
Le groupe insiste sur le fait quil est essentiel de distinguer dans le champ de la prévention, ce qui est de lordre du fait psychique et ce qui relève du fait social.
Dans certaines situations, des facteurs de résilience tenant à lenvironnement social, contribuent à la prévention de la souffrance psychique, voire de la maladie mentale, au même titre quun soin. Cest le cas, par exemple, de laccueil dans les crèches ou institutions pour les enfants en difficulté qui permet de les éloigner un temps dun environnement difficile ; également des réflexions et travaux autour de lhumanisation des institutions (écoles ; maisons de retraites ; prisons .....).
Favoriser les échanges avec les professionnels spécialisés en psychiatrie, permet de pointer limportance de la qualité de cet environnement, sans avoir pour objectif de transformer les professionnels des champs éducatifs, social ou médico-social en thérapeute.
La notion de bien être doit être prise en compte dans le domaine de la santé mentale. Etre attentif à la dimension psychologique des personnes lors des prises en charge sociale, en prenant en compte la personne accueillie dans sa globalité, participe ainsi de la prévention en santé mentale.
Les professionnels des secteurs éducatifs, médico-sociaux et sociaux doivent pouvoir proposer un cadre adéquat à lexpression des difficultés psychologiques des personnes quelles accueillent. Ce cadre doit favoriser lécoute empathique des personnes souhaitant parler de leur souffrance, quelle quelle soit, liée à un événement de vie, une maladie, un mal être. Les dispositifs daccueil et découte, tels les points accueil jeunes ou services de téléphonie sociale, composés de professionnels et/ou bénévoles participent de la prévention en santé mentale.
Dautre part, les membres du groupe mettent en exergue le rôle essentiel des psychologues dans leur travail sur le lien tant par lécoute et le soutien psychologique des personnes en souffrance psychique, que de manière indirecte, par laide quils apportent aux équipes dinstitutions ou dassociations confrontées à des personnes en difficultés psychiques (supervision).
Les membres du groupe de travail préconisent létablissement de liens entre les dispositifs daccueil et découte ou les psychologues intervenant en institution dans le cadre dactions de prévention, et les intervenants spécialisés, afin de garantir un diagnostic précoce et la possibilité dun accès précoce aux soins spécialisés.
Les intervenants de premières lignes sont de fait confrontés à la souffrance psychique des personnes. Ils doivent pouvoir proposer des réponses sociales et socio-éducatives spécifiques à leur champ de compétence permettant de prendre soin de ces personnes, que cette souffrance soit liée à des âges de la vie (adolescence, personnes âgées), des évènements de vie, ou à la précarité, par un accompagnement et une écoute empathique.
On peut sinscrire parfois à la limite de la prévention et dune véritable prise en charge précoce des troubles mentaux. En effet, la souffrance psychique de certains patients ou dusagers du secteur social nécessite, lorsquelle devient invalidante, une réponse soutenue, par une relation daide ou découte.
Ces prises en charge doivent être distinguées de la pratique de la psychothérapie qui sinscrit dans le champ du soin des troubles de la santé mentale. (Cf. II.1.3-niveau dintervention des professionnels spécialisés)
Renforcer la qualité des pratiques des professionnels développant ces relations daide devrait permettre une meilleure orientation vers une consultation spécialisée qui établira la nécessité dun suivi spécialisé.
Il est essentiel de favoriser un travail daccueil et de lien lors de situations durgence permettant détablir avec la personne souffrante un dialogue susceptible de linciter aux soins.
Cette fonction daccompagnement peut être effectuée dans le cadre de la téléphonie sociale par des professionnels et/ou des bénévoles, voire des pairs, représentants des usagers en lien avec les professionnels spécialisés publics et libéraux.
Le développement et la reconnaissance des compétences des intervenants de 1ère ligne dans les institutions éducatives, sociales et médico-sociales, pour repérer les signes avant-coureurs permettant de prévenir ou de contenir des situations de crise, contribuera à faciliter l orientation vers les professionnels de soins spécialisés quand elle est opportune. Ce travail doit être conduit en amont des situations de crise. Il devrait contribuer à diminuer le recours en urgence aux soins spécialisés.
La compétence des intervenants de 1ère ligne pour laccompagnement de personnes atteintes de troubles mentaux dans une démarche de soins spécialisés, doit être amplifiée (cf. III.3.3 précité). Ce travail constitue un temps pré-thérapeutique délaboration progressive dune demande de prise en charge par la personne elle-même.
Il sagit de pouvoir faire alterner ou coexister, chaque fois que cest nécessaire, des phases coordonnées de prise en charge sanitaire et sociale.
Dans le cadre du suivi de certaines personnes malades, plus particulièrement chez les adolescents et jeunes adultes souffrant de troubles de la personnalité, il est nécessaire de développer un soin psychiatrique intégrant une dimension sociale importante, afin déviter toute rupture définitive du lien (familial, social, sanitaire...).
A cet effet, il est recommandé que le thérapeute (public ou libéral) assurant le suivi de la personne malade, crée un cadre thérapeutique avec dautres professionnels du champ social intervenant dans lenvironnement du patient, et léquipe pluriprofessionnelle du secteur, particulièrement les infirmiers. Ce maillage, à visée thérapeutique, dinterventions sanitaires et sociales autour de ces patients vise un suivi cohérent et continu de la prise en charge proposée.
Le groupe insiste sur la nécessité dun travail délaboration technique qui permet aux acteurs professionnels, associatifs et bénévoles de prendre de la distance par rapport aux situations de souffrance rencontrées dans le cadre de leur exercice et ainsi daider à ladaptation personnalisée du projet de réinsertion proposé. Un travail de supervision des équipes est donc souhaitable.
Ce soutien est dautant plus important pour les professionnels qui assurent la prise en charge sociale ou médico-sociale de personnes polyhandicapées.
En ce qui concerne les maisons daccueil spécialisé ou les foyers à double tarification qui accueillent à visée de réadaptation, des personnes lourdement atteintes, il est préconisé un équilibre entre professionnels soignants (infirmiers ; aides soignants) et professionnels sociaux afin que ces lieux de vie puissent répondre à lensemble des besoins des patients. Les membres du groupe insistent en effet sur le fait que la prise en charge de ces personnes, par les institutions médico-sociales, ne peut pas être dissociée de la notion de soins.
Il est essentiel, en effet que ces patients accèdent à tous les droits liés au handicap en matière de (ré)adaptation, dhébergement et de (ré)insertion et que lon prenne également soin de leur dynamique psychique en garantissant un travail de mobilisation thérapeutique.
Le référent mentionné au III-1-3-d), ci-dessus, contribue à la garantie de ce travail de mobilisation thérapeutique à légard des personnes atteintes de troubles psychiques graves et durables accueillies dans les institutions médico-sociales.
Dernière mise à jour : jeudi 30 mai 2002 16:50:52 Dr Jean-Michel Thurin