La notion de niveau se retrouve sous plusieurs facettes dans le texte de Jean-Michel Thurin où il évoque le modèle Freudien du psychisme : temporelle (développement), structurale (réseau), économique (transformations). L'architecture de base repose sur un découpage en niveaux : sensoriel, perceptif, représentationnel. Freud étudiait une organisation biologique, compatible avec les comportements psychiques, conscients et inconscients, observés. Ce modèle anticipait, en quelque sorte, le paradigme de traitement de l'information.
Jean-Michel Thurin
La notion de «niveau» est utilisée par Freud dans plusieurs perspectives.
D'abord, génétique : celle du développement des activités et de l'espace psychique durant la psychogénèse.
Ensuite, structurale : en décrivant les systèmes d'éléments qui forment l'appareil psychique et leurs relations au cours des étapes de sa création et suivant les moments de son fonctionnement.
Enfin, économique : l'investissement énergétique du système, globalement ou pour certaines de ses parties, modifie son fonctionnement. Deux modes sont ainsi distingués : primaire et secondaire. Le premier se retrouve dans le rêve, le second, dans la pensée raisonnante. Il existe également des états intermédiaires. Ce que Freud introduit de spécifique, c'est que des mécanismes psychologiques vont intervenir dans le choix de ces niveaux de fonctionnement. Par le jeu des investissements, le délire réalisera ainsi un évitement de certains secteurs de la réalité «réelle» et les remplacera par de la réalité «désirée». Ces variations déterminent la conscience de la réalité.
Les niveaux permettent à Freud de concevoir la vie psychique dans une double dimension. Celle «macroscopique» des rapports conscients et inconscients que le sujet entretient avec le monde et avec son corps, comme objet de plaisir ou de déplaisir. Celle «microscopique» des «neurones» d'un appareil psychique recueillant toutes sortes de stimuli et soumis à quelques principes de fonctionnement.
La théorie Freudienne du psychisme contient également l'esquisse d'une théorie des niveaux de langage, dans le double registre de la communication et de la structure. Avec Freud, nous voyageons de la décharge motrice, sous la forme du cri, qui rétablit le calme biologique jusqu'à la parole ; de la langue des images à celle des chaînes de signifiants; de la «pensée» hallucinatoire à la parole égocentrique et au dialogue.
Ainsi sont décrits des moments et des espaces de la vie psychique humaine auxquels correspondent des structures physiques, biologiques et sémiologiques en activité. Celles-ci définissent, à un moment donné, un champ relationnel et transférentiel, la psyché, partiellement présente à la conscience et dont les effets contribuent à transformer les supports concrets qui l'ont produite.
Le fonctionnement originel du système, présenté par Freud comme le plus satisfaisant du point de vue du plaisir, est synchronique. L'organisation primaire (l'inertie), un moment perturbée, est rétablie par une réponse immédiate. Pour rester en concordance avec les nécessités biologiques et la réalité, la réponse va secondairement devoir être différée.
Dans un système individuel et intersubjectif qui se complexifie et fait intervenir des paramètres de plus en plus nombreux et contradictoires, le chemin parcouru pour parvenir au repos (but-satisfaction) devrait être toujours plus tortueux et long.
Mais le «temps raccourci» reste une visée fondamentale de l'humain. Ce but le pousse à se constituer et à vouloir maîtriser des objets toujours plus perfectionnés ou, tout simplement, à rêver. Objets internes (symboles, condensations) et externes (outils) se placent ainsi dans une étroite relation de convergence et de concurrence.
Dans ce cycle, la création et plus généralement l'acte sont au service de l'inertie tout en la contredisant. Toutefois, dans cette course au repos, un obstacle semble demeurer infranchissable : le temps de la pensée et à fortiori de la traduction et de l'action est plus long que celui de la perception. A moins que... se développent, après l'ère de la raison, de nouvelles formes de pensée, plus globales et intuitives.
Revenons à des considérations plus concrètes. Partons de l'élémentaire et suivons comment les réalités, biologique et sociale, vont s'associer et produire un fonctionnement psychique très complexe.
L'intérêt de ce parcours est aussi de saisir que, dans ce fonctionnement, le primitif et le tardif peuvent cxister ou se substituer l'un à l'autre dans certaines conditions. Cependant, certains principes fondamentaux demeurent identiques (principes de plaisir, de réalité et d'identité).
Commençons notre rapide voyage dans le temps phylogénétique et ontogénétique.
Les premières ébauches de notre activité psychique pourraient se retrouver, suivant Freud, dans la réponse d'un protoplasme irritable et dans le réflexe.
A une échelle près, leur fonction est identique ; il s'agit de se débarrasser des quantités qui atteignent l'organisme, fut-il réduit à une cellule.
Schéma 1 : Un stimulus atteint un organisme élémentaire ; celui-ci vise à s'en décharger. Par extension, «Le processus de décharge constitue la fonction primaire du système neuronique»1.
Considérons maintenant une décharge adaptée.
Un stimulus survient ; au cours du processus de son éconduction, l'organisme fuit ou supprime la source perturbante. Par exemple, il ferme les yeux devant une lumière trop vive. Il y a en même temps décharge et adaptation.2
L'adaptation constitue une «fonction secondaire» du système neuronique (schéma 2)
Remarquons immédiatement que cette activité «fermer les yeux» se retrouvera à d'autres niveaux de l'activité psychique humaine, du plus concret au plus symbolique : c'est l'étayage de l'abstraction.
schéma2
La décharge, fonction synchronique extrêmement simple, va se heurter à une limite : il y a des quantités qu'un organisme plus évolué ne peut et ne doit pas éliminer immédiatement.
Il s'agit de celles qui sont issues du corps propre qui signale ainsi à l'appareil psychique ses besoins. Il n'est pas possible de s'y soustraire ou de les éconduire comme c'était le cas pour les stimuli extérieurs3.
Une décharge répétée, sans action sur la cause, ne pourrait conduire à la limite, l'organisme qu'à sa propre destruction par auto-épuisement (schéma 3 boucle A).
L'interruption de cette poussée interne, insistante, source de déplaisir, exige un acte spécifique : obtenir quelque chose qui est à l'extérieur du corps et de son espace immédiat ; de la nourriture, par exemple (boucle B).
Schéma 3 L'espace biologique ne se limite pas à l'organisme
La réalisation différée par les conditions de la vie impose que l'appareil psychique dispose d'une certaine quantité en réserve4.
Il y a ainsi contradiction entre la fonction primaire du système neuronique (la décharge immédiate) et l'économie biologique rapportée à la réalité spatiale puis sociale5.
A ce stade de l'évolution, il ne s'agit donc plus pour l'appareil psychique d'éliminer complètement les quantités qui lui parviennent, mais de les maintenir à un niveau aussi bas que possible6 pour pouvoir exercer secondairement une action dans le monde extérieur.
Mais ce passage d'un niveau synchronique à un niveau diachronique de réponse avec extension spatiale n'est pas suffisant. L'acte spécifique, exigé par la pulsion et différé par les conditions de la vie, introduit chez le petit humain un autre besoin essentiel, celui d'autrui, dont l'intervention est indispensable.
Cette dépendance va avoir des conséquences fondamentales sur toute l'organisation ultérieure ; elle va amorcer l'entrée dans le champ de la communication et établir les bases structurelles du langage.
Les cris, mouvements du corps et larmes, qui n'étaient initialement qu'une simple décharge motrice, sans intention de communiquer, acquièrent cette dimension puis fonction du fait de la réponse de la mère qui, attentive, leur accorde une signification.
Schéma 4
Voici comment Freud décrit le déroulement favorable de ce moment princeps «l'expérience de satisfaction» : «L'organisme humain, à ses stades précoces est incapable de provoquer cette action spécifique qui ne peut être réalisée qu'avec une aide extérieure et au moment où l'attention d'une personne bien au courant se porte sur l'état de l'enfant. Ce dernier l'a alertée, du fait d'une décharge se produisant sur la voie des changements internes (par ses cris, par exemple). La voie de décharge acquiert ainsi une fonction secondaire d'une extrême importance : celle de la compréhension mutuelle. L'impuissance originelle de l'être humain devient ainsi la source première de tous les motifs moraux7».
Cette expérience se traduit, dans l'appareil psychique, par l'association d'un complexe de perceptions-sensations (le besoin) au déplaisir ; puis un autre (la réalisation) au plaisir. Entre les deux, l'intervention d'autrui. L'alternance plaisir-déplaisir s'associe à l'apparition et l'absence d'une perception, celle de la mère par exemple, associée à la satisfaction. Cet ensemble est mémorisé. Il servira d'ébauche dans l'acquisition symbolique (Fort-Da).
Cette étape est fondamentale. Elle amorce une évolution qui va conduire le nourrisson, à travers l'interaction sociale et l'attente du plaisir, du réflexe à l'acte intentionnel, du cri à la parole non seulement expressive8 mais aussi significative.
Nous sommes passés de l'espace cellulaire puis corporel à l'espace social, de l'instantané sans trace à une première représentation psychique de l'objet de satisfaction et à une ébauche de temporalité : l'alternance. Celle-ci inaugure la structure même du langage.
Ce moment va être complété par l'apprentissage de la différence entre une perception et une représentation hallucinatoire.
Lorsque la tension pulsionnelle s'accroît de nouveau, le complexe mnémonique associé à la satisfaction est réinvesti. «L'objet»9 est bien là, mais «en rêve», et aucun apaisement ne survient. L'activité psychique s'oriente alors vers d'autres voies, moins directes et immédiates mais qui se révéleront plus efficaces (par exemple le cri et la gesticulation). Cette réalisation, différée par le principe de réalité, renforce l’ébauche de la temporalité déjà acquise en y intégrant le temps du détour, de l’action motrice et de la compréhension.
Dès lors peut apparaître l’acte psychique élémentaire. Il est présenté par Freud comme la reconnaissance d’une perception identique à une représentation attendue (par exemple, le visage de la mère). Cet acte, qui conditionne initialement une certaine concordance entre le désir, l’activité corporelle et la réalité, participera progressivement à des activités vitales et mentales de plus en plus complexes (apprendre à parler, se projeter, tendre vers un but...) au sein desquelles les images visuelles et verbales vont prendre une importance majeure. Mais fondamentalement, le principe directeur reste le même : celui du plaisir qui suit l’identification d’une perception à une représentation désirée ou, à l’inverse, la découverte ou la création d’une représentation qui puisse recouvrir une expérience vécue (la “découverte” du mot juste, la création picturale, littéraire...).
Cette évolution, que je viens de présenter très brièvement, n’existe, faut-il le rappeler ?, que du fait que les expériences de la réalité s’inscrivent et s’organisent dans le cerveau et ses connexions sous forme de souvenirs. Mais comment ?
Pour essayer de le découvrir, ouvrons «la boîte noire» de l’appareil psychique, que Freud se figurait comme une sorte de télescope.
Nous y trouvons plusieurs systèmes : celui de la perception-conscience et celui de la mémoire auxquels sont associés ceux de la motricité et de la sensorialité. Ces deux derniers systèmes comprennent, non seulement les neurones appartenant à l’appareil psychique mais aussi les voies de communication qui les associent aux récepteurs et effecteurs.
Le corps pulsionnel fonctionne comme réserve d’énergie.
Dans le système «mémoires», deux grands champs mnésiques se distinguent par la stabilité dans le temps et le statut organisateur de leurs éléments :
Schéma 5
– dans le premier, on trouve les traces brutes et élémentaires du sensible, auxquelles s’associent rapidement celles constituées par l’expérience de la satisfaction et de la douleur, les sentiments primaires10 liés à la rencontre du monde et d’autrui (autrement dit, l’affect11) ; il y a aussi celles laissées par «l’expérience biologique12» (restes phylogénétiques et programmes élémentaires acquis par tâtonnement) ;
- dans le second, nous trouvons les traces des mots (ex : arbre)qui prennent une importance toute particulière du fait de leur capacité fonctionnelle d’unifier l’élémentaire et surtout d’établir des relations entre les objets13 en les associant dans des phrases.
Ces deux champs sont associés mais peuvent fonctionner de façon exclusive suivant la répartition des investissements à l’intérieur de l’appareil. Ainsi, certaines réalités sont pensées et d’autres «vécues».
Entre eux, plutôt du côté du premier mais participant aux activités du second, siègent les images visuelles. Leurs qualités pourraient être résumées ainsi : grande capacité d’unification mais distinction parfois délicate avec la réalité perceptive (à prédominance visuelle) et formalisation difficile des relations entre objets.
Imaginons maintenant que nous disposions d’un microscope un peu particulier qui nous permettrait d’observer la mémoire d’un point de vue neuronal, telle que Freud se la représentait en 1895. Il ne reprendra pas cette description après l’Esquisse14 ; mais il en conservera l’architecture en opérant un glissement par abstraction entre neurone et image mnémonique, complexe neuronal et représentation et entre frayage et association.
D’un point de vue neurophysiologique, la mémoire se définit pour Freud comme : «la faculté du tissus nerveux de subir, du fait de quelque processus unique, isolé, une modification permanente15».
Elle se caractérise par cinq points essentiels :
1 – Il n’existe pas un neurone du froid, un neurone du chaud, etc... comme pourrait le laisser penser une simple transposition des données de la physiologie à la psychologie16.
2 – Une représentation n’est pas non plus une simple projection point à point entre une source et un neurone spécifique. Les qualités élémentaires sont relatives à la fonction à laquelle elles participent. Avant même l’inter-connexion corticale, plusieurs afférences (visuelle, kinesthésique ...) s’intègrent avant d’aboutir à la création d’une représentation simple17.
3 – «Le corrélat physiologique de la représentation n’est pas quelque chose qui est au repos mais plutôt quelque chose de la nature d’un processus. Lorsqu’il s’est déroulé, il laisse une modification des connexions neuronales (les frayages) auxquelles correspond la possibilité du souvenir. Aussi souvent qu’est stimulé le même état du cortex, renaît à nouveau le psychique sous la forme d’une image mnésique18».
4 – La mémoire est distribuée dans des complexes neuronaux qui se constituent en fonction de l’intensité des stimuli, de leur répétition et de leur simultanéité19.
Prenons l’exemple de la perception d’un arbre pour illustrer ces quatre premiers points.
schéma 6
Le schéma 6 représente ce qui se passe (peut être) dans nos neurones au moment de la perception d'un arbre. Différents stimuli viennent activer des ensembles neuronaux. Ceux-ci se trouvent associés par des connexions plus ou moins larges.
Lorsque la perception disparaît (schéma 7), une architecture subsiste sous forme de frayages associant spécifiquement certains neurones
Schéma 7 – Une structure mnésique potentielle de l’arbre
Si une perception, même partielle (par exemple, le bruissement des feuilles) se reproduit, l’image est réinvestie et la représentation surgit.
Schéma 8 - Perception d’un bruissement de feuille : évocation d’un arbre
5 – Un cinquième caractère découle des précédents. Il se produit des connexions par homonymie, ressemblance et simultanéité qui permettent des ponts entre souvenirs divers (par exemple entre une image et un son) et leur accès par des entrées multiples. Remarquons immédiatement que la multiplicité des afférences qui participent à l’inscription d’un même contenu (ici, l’arbre) élimine d’emblée toute univocité de la représentation. Ceci instaure structurellement l’ambiguité dans la communication puisque chacun dispose de représentations différentes assorties de contextes singuliers.
Du premier système, des traces primaires (impressions sensorielles, sensations corporelles, affects, sentiments archaïques, expériences biologiques), émerge un premier niveau d’organisation qui utilise les images visuelles comme formes unificatrices.
Ces images sont appelées par Freud les représentations de chose (ou représentations d’objet). Le moment fondateur de cette organisation secondaire pourrait être le stade du miroir dont FREUD donne une pré-description dans l’Esquisse...
A ce système, s’associe d’élément à élément et par des relations privilégiées, le système des représentations de mots.
Celui-ci est formé des représentations sonores de mots, associées aux images (verbales) motrices correspondantes (phonation et mouvements corporels en relation à la parole) ainsi que de façon plus relative aux images motrices de l’écriture et de la lecture.
Les images sonores ont l’avantage de posséder deux particularités : elles sont circonscrites (c’est à dire en nombre restreint) et exclusives dans certaines conditions d’usage (la pensée avec but et le langage parlé). Le flux passe de l’image auditive à l’image verbale motrice et de là, à la production d’une décharge20. Celle-ci permet l’accès de la pensée à la conscience et sa mémorisation.
Schéma 9 – Représentation de mot et représentation d’objet (ou représentation de chose).
La relation entre traces plus ou moins élémentaires et traces linguistiques se fait donc par l’intermédiaire de la représentation de chose. La relation entre représentation de mot et représentation de chose est qualifiée par Freud de “symbolique21”
Les représentations visuelles et surtout verbales permettent de penser22. La pensée est elle-même, dans certaines conditions, mémorisée.
Cette théorie de la mémoire fait donc apparaître différents niveaux de proximité de l’objet réel (en particulier le corps) avec la représentation. La chose s’inscrit d’abord dans l’appareil psychique sous la forme de qualités élémentaires. Elle est ensuite reconstruite comme unité dans l’image et le mot. Par le jeu de ceux-ci, elle va peu à peu perdre ses qualités premières pour devenir concept. La proximité de la représentation avec les qualités sensibles de l’objet réel a tendance à décroître avec l’évolution en même temps que s’accroît la capacité d’abstraction et d’action secondaire sur le réel à partir du jeu des objets mentaux.
Il est un point sur lequel il faut insister : l’image verbale et l’image visuelle sont d’abord des perceptions avant de devenir des représentations.
Voici pour l’architecture de base.
Il s’agit maintenant de comprendre comment le système de la mémoire peut à la fois conserver des traces de la réalité initiale et évoluer à partir de la structuration de la réalité par le langage. «Un souvenir réel, (souligne Freud), ne doit vraiment pas être modifié par les réflexions qu’il inspire. Mais il est indéniable, d’autre part, que le fait de réfléchir laisse des traces extrêmement marquées sur les réflexions ultérieures concernant le même sujet23».
Ainsi une certaine concurrence s’instaure-t-elle entre les deux systèmes ; elle va permettre à des impressions primaires d’être progressivement «domptées24» par l’environnement linguistique auxquelles elles sont rattachées. Une réalité secondaire, celle des mots va se substituer à la réalité primaire.
Mais cette évolution n’est pas irréversible. «L’état du système», du point de vue de son niveau d’investissement, peut entrainer globalement ou localement le fonctionnement spécifique de l’un ou de l’autre des champs mnésiques ; pour compliquer le tout, des associations de mots peuvent très bien relever d’un fonctionnement «primaire» (les mots ont alors le statut de simples traces mnémoniques).
Essayons de saisir ce fonctionnement.
Supposons une quantité Q, venue d’un endroit quelquonque et pénétrant dans un neurone (schéma 10). Elle poursuit sa route en franchissant les barrières de contact les mieux frayées et suscite un courant dans cette direction. Plus exactement, le courant de la quantité Q se divise suivant un mode d’investissement proportionnel à la résistance des barrières qu’il rencontre25.
Autrement dit, la quantité suit une voie toute tracée, celle laissée par les expérience antérieures. il s’agit d’un processus primaire, le plus ancien du point de vue du développement.
L’activité est purement associative mais elle est toutefois influencée par certains surinvestissements de représentations (désir, perception simultanée). L’esprit qui vagabonde suit les meilleurs frayages et se dirige vers les représentations les plus investies.
Les investissements sont donc très mobiles d’une représentation à une autre. Il se produit «passivement» des déplacements et des condensations de quantité.
Ce fonctionnement primaire va subir l’influence d’un investissement actif dirigé vers certaines représentations et qui va contribuer, à sa façon, à la recherche du plaisir.
Il s’agit, initialement, de corriger les trajectoires primaires qui auraient des effets défavorables pour l’organisme (par exemple, la réactivation d’un souvenir de douleur26).
Schéma10 - Un esprit qui vagabonde
Dans ce cas, l’investissement d’autres voies par un groupe de neurones à investissement constant27 permet, en diminuant la charge du souvenir, de ne pas le confondre avec une perception réelle28 ou même de l’éviter par un changement de trajectoire.
Mais ce système utilise également les indices déclenchés par le fonctionnement primaire pour améliorer la performance des activités sensorielles et mentales par le mécanisme de l’attention29. Inversement, la suppression de l’attention pour certains secteurs de la réalité permettra de faire «comme si cela n’existait pas».
En fait, le surinvestissement par le Moi ouvre surtout le champ des souvenirs structurés par les mots. «Les processus cogitatifs viennent sur le même plan que les processus perceptifs en leur conférant une réalité et en rendant possible leur souvenir30». Les mots ordonnent les souvenirs dans le temps, ne serait-ce que par la nature séquentielle de leur articulation. Ils ouvrent la possibilité d’une action sur le monde extérieur qui ne soit pas purement réflexe ou «instinctive31».
Cet ensemble de régulations et d’interventions d’une partie du psychisme sur les processus qui s’y déroulent constitue le processus secondaire.
L’influence des processus secondaires sur les processus primaires évite en particulier certaines erreurs qui réapparaissent dans les moments de fatigue ou les fonctionnements pathologiques :
– prendre ses désirs pour des réalités ;
– confondre des objets analogues ou associés mais distincts. Par exemple, reproduire les mouvements auxquels on assiste (mimétisme) ; ressentir une douleur en écoutant un récit ;
– considérer de simples corrélations (associations fortuites) comme des enchaînements causaux.
Cependant, elle peut échouer et même introduire de nouveaux problèmes :
– la réalité extérieure peut aller plus vite que la pensée ou la forcer : «le cours des associations peut être modifié par l‘importance des quantités issues du monde extérieur 32».
D’une façon générale, il y a un rapport inverse entre la capacité de penser et l’importance des quantités issues du monde extérieur33. ;
– ensuite, la réalité linguistique impose des contingences formelles et contextuelles. Elle implique une certaine perte de réalité. Le «bon» (plaisir) peut être l’ennemi du «bien» (jugement) et certains contenus pulsionnels devront à leur tour être «domptés» ou réorganisés par substitution, censure et contre-investissement (post-refoulement) pour devenir présentables.
Nous voici venus au moment de situer l’inconscient Freudien au sein des systèmes que nous venons de voir émerger :
– un niveau «inférieur» et antérieur34 contient les premières traces sensorielles, les mécanismes psychiques et régulations élémentaires, l’inscription des expériences biologiques fondamentales, des sentiments et des affects. Les processus, qui s’y déroulent, dépendent directement des quantités. Leur surcharge impose leur éconduction. Parmi celles-ci, les forces pulsionnelles apportent une source continue. Celle-ci est gênante sur le plan du principe d’inertie ; mais elle instaure la possibilité d’un asynchronisme des actions spécifiques indispensables et surtout une ouverture vers le monde extérieur et les autres.
Cet ensemble constitue le système inconscient, système éparpillé de traces primaires plus ou moins fortement investies35.
A cet inconscient primaire, le Ça de Freud, s’associe un inconscient secondaire, celui des représentations qui ont été unifiées et traduites en mots mais refoulées. Il en reste le substrat toujours actif, la représentation de chose.
– un niveau «supérieur» et postérieur recouvre très précocément le système inconscient et s’empare de l’accès à la conscience et à la motilité36. C’est le système préconscient-conscient
Le contenu de ce système est issu, pour une part, de la vie pulsionnelle (par l’intermédiaire de l’Ics) et, pour une autre part, de la perception37. Il est formé de représentations dont l’investissement est régulé. «La représentation consciente comprend la représentation de chose plus la représentation de mot afférente, l’inconsciente est la représentation de chose seule. Le système inconscient contient les investissements de chose des objets, les premiers et véritables investissements d’objet ; le système Pcs apparaît du fait que cette représentation de chose est surinvestie de par les connexions de mot lui correspondant. Ce sont, nous pouvons le présumer, ces surinvestissements qui entraînent une organisation psychique supérieure, et qui rendent possible le relais du processus primaire par le processus secondaire régnant dans le Pcs... La représentation non saisie en mots ou l’acte psychique non surinvestis restent en arrière dans l’inconscient en tant que refoulés38».
Schéma 11
Autrement dit, c’est l’investissement des mots qui, gagnant les représentations de choses, ouvre la construction d’une nouvelle réalité «consciente». Cette conscience pensée va constituer une sorte de «méta-psychisme». Elle est un regard porté sur la vie psychique. Elle observe, oriente l’attention et ponctue l’expérience.
Elle est à la jonction de l’immédiat, du pensable et du jalonnement de la mémoire.
Il nous reste à situer les frontières et les passages entre systèmes conscient et inconscient. Pour les frontières, Freud dira à plusieurs reprises que les relations entre inconscient et conscient sont fluctuantes.
Dans une vie, les relations du sujet avec le monde extérieur et la vie pulsionnelle sont en perpétuel remaniement. Il ne s’agit pas seulement d’un problème de codage. Le champ même de référence des qualités du monde se transforme ; certains mots apparaissent, d’autres s’estomptent, avec les qualités qu’ils véhiculent.
Il n’y a donc pas de passage global d’un niveau à un autre à un moment donné mais des équilibres et des zones frontières qui se déterminent et se défont.
Le passage du niveau supérieur au niveau inférieur se produit cependant de façon globale avec le sommeil et le rêve (ou la maladie). L’espace psychique se réduit avec la coupure sensorielle et le désintérêt du monde extérieur. L’équilibre se trouve ainsi déplacé au profit des afférences pulsionnelles et des sensations issues du corps propre.
Il se constitue (schéma 12) à partir des représentations préconscientes qui sont restées investies et des représentations inconscientes animées par les motions pulsionnelles qui peuvent ré-accéder au niveau des mots39. L’idée formée, après être passée du langage abstrait au langage concret, régresse encore jusqu’aux représentations de chose. Selon les lois des processus primaires, les investissement épars se déplacent et se condensent dans une ou quelques unes d’entre elles40.
L’investissement est alors suffisant pour déclencher une hallucination d’autant que le principe de réalité est aboli.
Il reste cependant une certaine participation du niveau secondaire sous deux formes :
– d’une part, les représentations activées ne surgissent pas à la conscience dans un désordre total. Les contingences et les possibilités d’une syntaxe des images sont utilisées au mieux pour élaborer un message ;
– d’autre part, une certaine censure subsiste. Le résultat final, le rêve manifeste, est donc souvent différent du rêve latent.
Reste la suite, l’expression en mots et l’acte de communication qui est souvent lié au rêve...
Ainsi retrouve-t-on dans ce double processus de régression et d’élaboration, la représentation de certaines étapes de constitution du langage et le passage à la conscience de souhaits réprimés.
Schéma 12
Notre voyage, à partir de l’œuvre de Freud, dans l’espace, le temps, l’architecture et l’économie du psychisme, nous a permis de dégager quelques unes des conditions et formes principales de ses activités.
Les conditions, c’est :
– la stimulation (ou la perturbation selon le point de vue duquel on se place) de neurones interconnectés et le principe d’inertie (ou de plaisir) qui gouverne cet ensemble en tendant à le ramener à son état initial ;
– l’intervention d’autrui et son intérêt pour la personne.
L’un et l’autre sont nécessaires au maintien de la vie. Ils ouvrent le champ de la compréhension mutuelle ; la mémoire avec différents niveaux d’organisation des traces mnésiques. Un même élément, comme un mot ou une image visuelle, pourra aussi bien être de niveau primaire, si son statut est essentiellement perceptif, secondaire s’il permet l’unification d’une chose, tertiaire s’il participe d’un champ symbolique descriptif, quaternaire s’il appartient au champ symbolique abstrait, etc...
Les formes c’est :
– la représentation primaire hallucinée (qui associe dans un même complexe, perceptions externes, internes et représentants corporels liés à la pulsion). Cette opération se produit dans un certain espace-temps-énergie qui associe directement la motion pulsionnelle et la représentation, c’est à dire la source et le but, sans contextes interne et externe ;
– l’acte psychique de second niveau qui a pour tâche de reconnaître, c’est à dire d’établir l’identité entre une perception et un souvenir (cette opération est réalisée par exploration à partir des frayages investis par la perception et connexion avec le complexe de la représentation ;
– celui de troisième niveau qui commence à analyser les formes en distinguant ce qui est constant (par exemple, le regard) et ce qui se modifie (la coiffure). Cette étape est celle où, par similitude et inférence, l’enfant se représente comme unifié. C’est par relation à l’image globale de l’autre, image investie dans laquelle il reconnait chacune de ses parties propres qu’il acquière cette première représentation du moi41. Cette opération est peut-être le prototype de l’identification d’une chose à partir de ses éléments ;
– celui du quatrième niveau où les mouvements et tranformations d’une perception n’entravent pas sa reconnaissance et où s’établissent des relations primaires entre perceptions. Il y a ébauche d’une structure d’articulation (ébauche de pensée) ;
– celui du cinquième niveau qui permet l’agencement d’images pour représenter une scène.
Pour les quatre premiers niveaux, le langage parlé n’est pas nécessaire. Le cinquième en est une forme primitive dans la mesure où elle associe une structure et l’agencement de représentations secondaires.
Nous parvenons ainsi à un sixième niveau où les mots et les phrases prennent toute leur importance.
Bien sûr, il s’agit de communiquer. Et le langage contient de fait ce qui détermine la possibilité d’un échange. En particulier, sa structure «ouverte» permet de ne pas limiter la relation d’une perception à son premier contexte, sous la forme d’une variation binaire agréable-désagréable et d’événements sensitifs, moteurs ou corporels associés. Il permet de se dégager des affects immédiats, de prévoir, d’explorer des voies nouvelles. Il instaure la temporalité42 par des jalons circonscrits et distinguables.
D’autre part, les mots ne recouvrent jamais vraiment la chose. Hormis les cas pathologiques d’induction43 , qui impliquent une structure particulière de la communication, l’identité n’est jamais complète entre le mot et la chose. L’espace d’évolution et de communication reste ainsi ouvert et investi à partir de l’ambiguité et du conflit sur la valeur des choses.
J’ai voulu rapporter très brièvement la façon dont Freud a tenté de reconstituer les relations entre biologie, réalité, mémoire, langage et pensée à partir de la clinique et de sa culture scientifique.
Du point de vue du modèle, beaucoup d’auteurs ont souligné son génie et son intérêt pour les neurosciences44.
Mais je voudrais insister sur sa richesse et sa performance pour se représenter les mécanismes d’affections dont Freud ne s’est que peu ou pas soucié. Je veux parler de la psychose et de la psychosomatique.
La connaissance des différents niveaux d’activité, d’inscription et de fonctionnement psychique recouvre une véritable intégration psychosomatique. Elle nous permet de mieux nous situer dans le temps du sujet qui s’adresse à nous, thérapeutes, la place qui nous est attribuée et d’appréhender alors les ressorts possibles de notre action.
Il existe ainsi un transfert psychosomatique et psychotique qui correspondent aux premières étapes de la structuration psychique de la subjectivité et à l’investissement particulier de la chose sensible puis de la chose-mot. Ceci peut expliquer l’importance, dans les pathologies psychosomatiques notamment, de la «présence», de l’alternance, de l’attention et de toute la sémiotique relationnelle qui participent à la création de l’espace personnel.
Nous participons alors sans doute essentiellement à ce que Freud nomme «l’expérience de satisfaction» qui ouvre l’espace de l’hominisation. Il y apparaît bien que le corps n’est pas seulement de l’organique et que les mots ne servent pas seulement à structurer la réalité et à construire des phrases. C’est tout le rapport du sujet au monde qui peut être engagé dans un cri, un appel, l’attention qui lui est portée et la signification qui lui est donnée. Freud ne nous dit pas ce qui se passe lorsqu’au lieu d’une voix ou d’une saveur, le nourrisson ne rencontre que le vide, l’absence ou l’incompréhension. C’est pourtant à cette expérience là que la clinique nous ramène souvent et que nous pouvons aider à dépasser.
Concernant les relations entre psyché et activités corporelles, j’ai voulu insister sur le passage des processus primaires aux processus secondaires et des traces élémentaires à la représentation de mot par l’intermédiaire de la représentation de chose. Ici encore, nous rejoignons des questions cruciales dans le traitement des affections psychosomatiques.
Cette capacité de progrès technique et théorique que contient le modèle Freudien nous permet aujourd’hui de constater que l’acharnement de son auteur, pendant plus de quarante ans (de 189145 ou 189646 jusqu’à 193847 ), à l’élaborer n’était pas une simple concession aux sciences «naturelles», comme on le prétend souvent.
C’était – et cela reste encore – une condition essentielle pour tenter de se dégager de l’instantané et de l’empirisme dans la conduite d’une cure, malgré l’extraordinaire complexité de l’entreprise.
1 Freud, S., Esquisse d’une psychologique scientifique, 1895, p 317
2 Dans certains cas, cette échange peut fonctionner comme stimulus pour un autre système dont la décharge devient stimulus pour le système 1, et ainsi de suite jusqu’à épuisement (exemple : les coups ou les insultes). Dans certaines maladie de système, il semblerait que l’autre devienne le représentant du stimulus agressif et que l’on retrouve dans le «c’est lui ou moi» les traces de ce fonctionnement primordial.
3 Freud introduit à cette occasion la notion de projection comme mécanisme de défense : c’est une tentative de transformer en cause externe une cause interne.
4 Ultérieurement, Freud étendra ce problème aux stimuli provenant du monde extérieur : «le premier obstacle auquel se heurte le principe du plaisir nous est connu depuis longtemps comme un obstacle pour ainsi dire normal et régulier. Nous savons notamment que notre appareil psychique cherche tout naturellement, et en vertu de sa constitution même, à se conformer au principe du plaisir, mais qu’en présence des difficultés ayant leur source dans le monde extérieur, son affirmation pure et simple, et en toutes circonstances, se révèle comme impossible, comme dangereuse même, pour la conservation de l’organisme. Sous l’influence de l’instinct de conservation du moi, le principe de plaisir s’efface et cède la place au principe de la réalité qui fait que, sans renoncer au but final que constitue le plaisir, nous consentons à en différer la réalisation à ne pas profiter de certaines possibilités qui s’offrent à nous de hâter celle-ci, à supporter même, à la faveur du long détour que nous empruntons pour parvenir au plaisir, un déplaisir momentané. Les impulsions sexuelles cependant, plus difficilement «éducables» continuent encore pendant longtemps à se conformer uniquement au principe de plaisir, et il arrive souvent que celui-ci, se manifestant de façon exclusive soit dans la vie sexuelle, soit dans le moi lui même, finit par l’emporter totalement sur le principe de la réalité, et cela pour le plus grand dommage de l’organisme tout entier. («Au delà du principe du plaisir», Freud 1920, in Essais de psychanalyse, PBP, p10)
5 La réalisation de cet acte spécifique fait elle-même intervenir plusieurs situations. Pour l’animal, il existe des comportements instinctifs qui le portent vers un but. Chez l’humain, par contre, ce but doit être mentalement élaboré. Soit la personne est assistée d’un autre psychisme qui «agit pour elle» ; c’est le cas du nourrisson dont la mère veille à l’alimentation lorsque c’est nécessaire. Soit, il est nécessaire de penser l’action spécifique, ce qui implique d’abord de penser la réalité telle qu’elle est. Il existe toutefois de nombreuses formes d’action où le sujet renouvelle des expériences sans savoir ce qu’il fait.
6 «Les faits qui nous font assigner au principe du plaisir un rôle dominant dans la vie psychique, trouvent leur expression dans l’hypothèse d’après laquelle l’appareil psychique aurait une tendance à maintenir à un étage aussi bas que possible ou, tout au moins, à un niveau aussi constant que possible la quantité d’excitation qu’il contient. C’est le principe du plaisir formulé dans des termes un peu différents, car, si l’appareil psychique cherche à maintenir sa quantité d’excitation à un niveau aussi bas que possible, il en résulte que tout ce qui est susceptible d’augmenter cette quantité ne peut être éprouvé que comme anti-fonctionnel, c’est-à-dire comme une sensation désagréable. Le principe de plaisir se laisse ainsi déduire du principe de constance ; en réalité, le principe de constance lui-même nous a été révélé par les faits mêmes qui nous ont imposé le principe de plaisir. «Au delà du principe du plaisir» Freud 1920, in Essais de psychanalyse, PBP, p 9)
7 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 336 ; repris p 376 et également dans L’interprétation des rêves, 1900, p 481.
Une question se pose : celle des «courts-circuits de plaisir» qui aménagent le rapport à la réalité, y compris somatique, sans intervention d’autrui. Il peut se produire alors un processus inverse de «désocialisation». Par exemple, au cours d’un état dépressif aigu ou d’une souffrance psychique intolérable, le sujet trouve un soulagement instantané dans la drogue. A un moindre degré, le sujet atténue la rupture de la relation d’objet et le sentiment de son vide intérieur ou encore de son incapacité à affronter le monde extérieur par la satisfaction immédiate de l’absorption de nourriture et la consommation, destruction, de la cigarette.
8 «L’innervation du langage est initialement une décharge qui se réalise au bénéfice de Psi, comme une sorte de soupape de sécurité servant à régler les oscillations de la quantité Qn». Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 376.
9 Il ne s’agit pas, à proprement parler, d’un objet car il n’est pas isolé en tant que tel mais d’un ensemble de perceptions et sensations associées à la satisfaction d’un besoin.
10 «Les représentations sont des investissements – au fond, de traces mnésiques – tandis que les affects et sentiments correspondent à des processus d’éconduction, dont les manifestations dernières sont perçues comme sensations». «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 218.
11 L’affect est présenté dans l’Esquisse comme une expérience corporelle qui peut s’exprimer au cours de la réanimation d’une représentation de la douleur 338-339
12 «L’expression «instruit par l’expérience biologique» nous permet de jeter les nouveaux fondements d’une explication ayant sa valeur propre, tout en n’excluant nullement (au contraire) un recours aux principes mécaniques, c’est à dire aux facteurs quantitatifs».Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 340 et également, p 344, 345, 346, 347, 348, 350, 355, 380, 392, 395.
13 «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 241.
14 «De ce que nous appellons psychisme (ou vie psychique) deux choses nous sont connues : d’une part son organe somatique, le lieu de son action, le cerveau (ou le système nerveux), d’autre part nos activités de conscience dont nous avons une connaissance directe et que nulle description ne saurait nous faire mieux connaître». Abrégé de psychanalyse, 1938, p 3)
15 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 319.
16 En psychologie, la simple représentation est pour nous quelque chose d’élémentaire, que nous pouvons distinguer nettement de ses combinaisons avec d’autres représentations. De là, nous arrivons à supposer que son corrélat physiologique, à savoir la modification qui provient de l’excitation de la fibre nerveuse se terminant dans le centre, est également quelque chose de simple qui peut être localisé en un point. Une telle transposition est évidemment tout à fait injustifiée.
17 Contribution à la conception des aphasies, 1891, PUF 1983, p
18 Contribution à la conception des aphasies, 1891, PUF 1983, p 106.
19 «Nous avons rejeté l’hypothèse qui veut que les images mnésiques soient localisées en un autre endroit que le processus par lequel elles sont associées». Contribution à la conception des aphasies, 1891, PUF 1983, p 153.
20 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 375.
21 Contribution à la conception des aphasies, 1891, PUF 1983, p 127.
22 Sur la différence entre pensée visuelle et pensée verbale, voir »Le Moi et le Ça», 1923, in Essais de psychanalyse, PBP, p 188-189.
23 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 388
24 Le terme est de Freud, (L’Esquisse, p 390)
25 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 341.
26 “Esquisse d’une psychologie scientifique”, 1895, p 339 où est introduit le «refoulement» comme défense primaire contre le déclenchement de l’affect et 348.
«Le contre-investissement est le mécanisme exclusif du refoulement originaire; lors du refoulement proprement dit (post refoulement), il s’y ajoute le retrait de l’investissement pcs.» «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 220.
27 Première définition du «moi» dans l’Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 371.
28 «Le souvenir primaire d’une perception est toujours une hallucination et seule l’inhibition venue du moi nous enseigne à ne jamais investir W de façon à lui permettre de transmettre rétrogressivement cet investissement à Phi». Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 356
29 L’attention est suscitée par l’indice de qualité issu de W. Un investissement est dirigé vers le champ perceptif actif. Ce flux modifie les conditions d’écoulement des quantités issues du monde extérieur.
Ainsi, «le courant d’associations de la quantité Q (apportée par les perceptions) passe à travers des neurones préinvestis et Qj, c’est à dire la quantité appartenant aux neurones j et qui se déplace est chaque fois remise en liberté. C’est pendant ce trajet des associations que les indices de qualité sont créés. Le courant d’association devient ainsi conscient et capable de se reproduire. Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 383.
30 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 376.
31 «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 218.
32 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 384.
33 Esquisse d’une psychologie scientifique, 1895, p 385.
On peut dès lors se demander si le rêve ne constitue pas aussi un moyen de penser en différé. L’afflux des images sensorielles, percutant des représentations inconscientes, serait stocké tel quel, faute de pouvoir être traduit en temps réel. Elles seraient re-présentées dans la scène du rêve. La verbalisation secondaire permettrait une retemporalisation de l’événement qui deviendrait dès lors pensable et pourrait être réintroduit dans le champ contextuel du langage.
34 «L’inconscient”» 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 226.
35 «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 227.
36 «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 226.
37 «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 232.
38 «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 240.
39 Du fait de la suppression des mécanismes de refoulement par la transformation d’état qu’instaure le sommeil.
40 «Voici le point où se montre la différence décisive entre le travail du rêve et la schizophrénie. Dans cette dernière, ce sont les mots eux-mêmes, dans lesquels était exprimée la pensée pré-consciente, qui deviennent objet de l’élaboration par le processus primaire ; dans le rêve, ce ne sont pas les mots, mais les représentations de chose, auxquelles les mots ont été ramenés. Le rêve connait une régression topique, la schizophrénie, non». «Complément métapsychologique à la doctrine des rêves», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 252.
41 «Esquisse d’une psychologie scientifique», 1895, p 349.
42 «les processus du système inconscient sont atemporels, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas ordonnés temporellement, ne se voient pas modifiés par le temps qui s’écoule, n’ont absolument aucune relation au temps. La relation temporelle, elle aussi, est rattachée au travail du système Cs». «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p 226.
43 Identification psychotique du mot et de la chose, dans «L’inconscient», 1915, in Œuvres Complètes n° XIII, p
44 Notamment, Lacan, Pribam, Sulloway, Widlocher...
45 Contribution à la conception des aphasies, 1891, PUF 1983.
46 «lettre n°52 à Fliess», 1896, in Naissance de la psychanalyse, PUF, 1973.
47 Abrégé de psychanalyse, 1938, PUF.
Dernière mise à
jour :
mardi 21 octobre 2003
Dr Jean-Michel Thurin