LA DEPRESSION :
IMPACT ECONOMIQUE ET ATTEINTE A LA QUALITE DE
VIE
Sur le plan médical, la dépression se
différencie du mal-être. Ainsi, la dépression majeure se
définit comme des troubles caractérisés par des
symptômes suffisamment aigus, nombreux et durables pour justifier ce
diagnostic (3).
La dépression majeure ou “ épisode
dépressif majeur ” est définie par les critères
du DSM-IV :
Au moins cinq des symptômes parmi les neuf suivants
doivent avoir été présents pendant une même
période de deux semaines. Ils doivent avoir présenté un
changement par rapport au fonctionnement antérieur (au moins un des
symptômes est soit l’humeur dépressive, soit une perte
d’intérêt ou de plaisir) :
·
humeur dépressive
ou irritabilité chez les enfants et les adolescents ;
·
diminution de
l’intérêt ou du plaisir pour toutes ou presque toutes les
activités quotidiennes ;
·
perte ou gain de poids
significatif en l’absence de régime ;
·
insomnie ou
hypersomnie ;
·
agitation ou
ralentissement psychomoteur ;
·
fatigue ou perte d’énergie ;
·
sentiment de
dévalorisation ou de culpabilité ;
·
diminution de
l’aptitude à penser ou à se concentrer,
indécision ;
·
pensées de mort
récurrentes, idées suicidaires récurrentes, tentatives de
suicide.
Aucun de ces symptômes ne doit répondre
à un critère d’épisode mixte, ne doit être
expliqué par un deuil ou imputable aux effets physiologiques directs
d’une substance ou d’une affection médicale
générale. Les symptômes doivent s’accompagner
d’une souffrance cliniquement significative ou d’une altération
du fonctionnement social, professionnel.
La détermination du degré de
sévérité de la dépression majeure (léger,
moyen, sévère) est fonction de la présence ou non de
symptômes supplémentaires par rapport au nombre requis pour
établir le diagnostic, et de l’impact des troubles sur le
fonctionnement professionnel, social et relationnel (2) (3).
Il est à noter que cette définition
n’intègre aucun substrat biologique permettant de confirmer le
diagnostic, engendrant ainsi une possible subjectivité dans l’établissement
de ce dernier.
Il existe toutefois des outils diagnostiques sérieux
permettant d’établir le diagnostic de la dépression
majeure, tels que le Diagnostic Interview Schedule Self Administered (DISSA), le Composite International
Diagnostic Interview Simplified (CIDIS), le
Diagnostic Interview Schedule
(DIS), le Composite International Diagnostic Interview (CIDI) ou le Mini International
Neuropsychiatric Interview (MINI, cf.
Annexe 1). Tous ces outils sont des questionnaires fermés
administrés en population dans le but de diagnostiquer la
dépression, ils possèdent des sensibilités et des
spécificités variables (2). Force est de constater
l’existence d’un décalage entre l’outil diagnostique
destiné à des études cliniques et son utilisation restreinte
en routine par les médecins.
Nous avons effectué une recherche bibliographique
afin de déterminer et de quantifier l’impact de la
dépression. Nous entendons par impact de la dépression aussi bien
les conséquences économiques (traitement et absence de traitement),
que les atteintes à la qualité de vie dont souffrent les
dépressifs.
Nous avons donc interrogé plusieurs bases de
données : Medline, Pascal, Embase, ABPI avec les mots clés
suivants : “ dépression et coût et
antidépresseurs ” (depression and cost and antidepressant). Nous avons ainsi recensé 301
références. Après lecture des résumés, nous
en avons sélectionné 134, et, parmi ces derniers, 43 sont
utilisés pour le présent rapport.
L’objectif du travail est de mettre en évidence
l’impact économique et l’altération à la
qualité de vie engendrés par la dépression.
La dépression se caractérise par une situation
complexe. Bien que cette pathologie bénéficie d’un
traitement thérapeutique efficace : les antidépresseurs, il
existe des lacunes concernant sa prise en charge. En effet, la
dépression est sous-diagnostiquée et insuffisamment
traitée.
Ce phénomène n’est pas
irréversible. La mise en place de programmes d’éducation
visant à améliorer les connaissances des médecins et des
malades semble être une action prometteuse.
La prévalence annuelle de la dépression est
estimée entre 3 % et 10 % selon les études.
Tableau 1 : Etudes de prévalence en
population générale de la dépression majeure
Pays Référence |
Année |
Effectif |
Outils diagnostiques |
Prévalence (sur 1 an) |
France DEPRES |
1997 |
78 463 |
MINI |
9,1 %[1] |
France CREDES |
1992 |
20 416 |
Autodéclaration à partir du DSM-IV |
4,7 % |
USA Kessler |
1990-1992 |
8 098 |
CIDI DSM-III-R |
10,3 % |
Nouvelle-Zélande Joyce |
1986 |
1 498 |
DIS DSM-III-R |
5,3 % |
USA Robins |
1984 |
19 182 |
DIS DSM-III |
3,7 % |
Canada Bland |
1998 |
3 257 |
DIS DSM-III-R |
5,2 % |
En France, l'étude menée par le CREDES en
population générale en 1992 indique une prévalence de la
“ dépression majeure ” de l'ordre de 4,7 %.
Si l'on considère la prévalence vie entière, la
dépression apparaît comme étant encore plus
répandue : 17 % à 19 % de la population souffrent
de dépression majeure nécessitant une prise en charge
médicale au cours de la vie (22).
Il convient d’ajouter qu’il s’agit
d’une affection liée à des facteurs de risques
socioéconomiques, touchant plus fréquemment les femmes que les
hommes (1,5 à 4 fois plus), les personnes à revenus modestes,
ayant un faible niveau d’éducation (27).
Dernière mise à jour : mercredi 18 avril 2001 16:37:32 Dr Jean-Michel Thurin |