La conception psychiatrique du suicide aliénait celui-ci à la maladie mentale en le réduisant à une des composantes qui la constituait ; il s'inscrivait dans un processus pathologique d'évolution continue, linéaire, comme s'il s'agissait de la conclusion logique d'une maladie fatale.
La conception psycho-dynamique du suicide a mis l'accent sur la notion de crise. Celle-ci constitue un moment de rupture dans l'existence d'un être vivant, résultant d'une perturbation du système de régulation qui assure la continuité et l'intégrité de l'être, au niveau corporel, psychique ou social. D'où l'aspect souvent protéiforme et insaisissable de la crise, qui tient aux possibilités illimitées des conflits qu'elle peut présenter.
Le geste suicidaire s'inscrit dans le déroulement de la crise comme une tentative de réduction des tensions internes auxquelles le sujet est en proie. Il s'impose à lui comme une nécessité, devant l'impossibilité de contenir une angoisse envahissante et déstructurante par les mécanismes de défense habituels. Certes, le passage à l'acte suicidaire n'est pas le seul moyen de réduire ces tensions : l'agitation, l'agressivité à l'égard d'autrui le permettraient aussi. Tout se passe comme si, face à cette équivalence (agressivité contre autrui ou contre soi) le sujet balançait, à travers ses représentations fantasmatiques, entre une identification à une position de victime ou d'agresseur, pour finalement trouver un compromis singulier : être les deux à la fois ! La crise suicidaire quand elle devient publique, constitue l'urgence par excellence, un moment décisif qui mobilise impérieusement l'autre. Le suicidant, par la mise en jeu de sa vie, s'impose aux autres. Il force l'attention, la relation, l'intervention de l'autre, c'est à dire qu'il en fait d'une certaine façon son objet, en court-circuitant l'espace et le temps de la demande.
Cependant, le temps du déroulement de la crise, dont nous analyserons les étapes, constitue paradoxalement un moment fécond en ce qu'il laisse place à des interventions préventives, contrairement à ce qui se passe dans le raptus suicidaire où celles-ci sont limitées du fait de l'instantanéité du geste.
Les différentes significations de ce dernier ne peuvent alors se décrypter que dans l'après coup, souvent post-mortem, mais il n'en reste pas moins que dans un certain nombre de situations, aucun signe n'a été perceptible par l'entourage familial, professionnel ou médical, ajoutant au désarroi de tous.
Il est difficile de décrire des étapes aux frontières bien tranchées : chaque sujet suit un cheminement qui lui est propre et dont les expressions sont loin d'être standardisées, même lorsqu'elles sont marquées du sceau de la pathologie mentale. Ce cheminement va provoquer divers types de réponses, indissociables du déroulement de la crise, qui peut s'en trouver par-là même profondément modifiée.
On ne peut mettre sur le même plan la description des étapes d'une maladie somatique et celles d'un processus psychique.
De la même façon que les psychanalystes ont pu évoquer pendant des années après Freud, la succession rigoureuse de stades dans le développement somato-psychique de l'enfant, il n'en est plus guère question aujourd'hui en dehors des nécessités pédagogiques.
De plus, le débat récurrent sur la dimension systématiquement pathologique du suicide n'est pas de nature à simplifier la question.
Peut-être serait-il plus conforme à la réalité du fonctionnement psychique et social de parler de moments au cours desquels le sujet est amené à mettre en question sa vie ou sa mort.
Il est habituel de distinguer les idées de suicide, des intentions suicidaires et des passages à l'acte suicidaire.
De quelque moment qu'il s'agisse, la question du sens doit être abordée avec le sujet, dans un échange de paroles : le plus grand danger que puisse rencontrer un suicidant, c'est de se retrouver seul, sans autre, à ressasser ses idées ou intentions, ou à ne rencontrer que des personnes trop angoissées et qui ne songent qu'à prendre la fuite.
Les idées de suicide germent chez un grand nombre de sujets, quelles que soient les positions de principe affichées antérieurement : ainsi, une attitude d'opposition déclarée face au suicide ne protège en aucun cas celui qui la met en avant.
La fréquence des idéations suicidaires a été estimée à 13,5% à un moment de leur vie sur un échantillon de 5877 répondants âgés de 15 à 54 ans dans l'Enquête Nationale de Comorbidité réalisée aux USA (1) entre 1990 et 1992. Cette enquête montre ainsi que 3,9% ont rapporté un plan et 4,6% une T.S. Les probabilités cumulées étaient de 34% pour le passage de l'idéation au plan, de 72% pour le passage du plan à la tentative et de 26% pour le passage de l'idéation à une tentative sans plan. Environ 90% des premières tentatives non planifiées et 60% des tentatives planifiées survenaient dans l'année suivant l'apparition de l'idéation.
En France, l'enquête du baromètre Santé (2) a montré que 10 à 25% des jeunes ont des idées suicidaires, 12% de ceux-ci ont fait un projet précis de suicide. Parmi les adolescents ayant fait une tentative de suicide, 57,6% avaient pensé au suicide dans l'année. S'il convient donc de prêter la plus grande attention à de telles idées, il n'en reste pas moins qu'il s'agit également d'une manière de réfléchir sur l'existence et sa finitude, démarche s'intégrant fréquemment dans le processus de maturation psychique à l'adolescence.
D'ailleurs, tout être humain, quel que soit son âge, est soumis psychiquement au "travail de la mort" (3), même à son insu On peut aller jusqu'à souligner l'aspect structurant pour la personne de cette prise de conscience des limites de l'homme.
Il convient aussi de souligner l'ambivalence de ces idées de suicide qui peuvent paradoxalement avoir une fonction de protection contre un passage à l'acte. Comme le dit Cioran (4): "Je ne vis que parce qu'il est en mon pouvoir de mourir quand bon me semblera : sans l'idée de suicide, je me serais tué depuis toujours."
Lorsque la qualité de la structure familiale ou de l'entourage est insuffisante à contenir de telles idées, on peut alors assister au glissement vers une intention suicidaire lors de n'importe quel événement difficile de l'existence, qu'il le soit objectivement ou non : "L'inconscient n'attend que des prétextes pour réaliser des intentions, y compris des "intentions suicidaires semi-conscientes". Celles-ci s'expriment alors sous la forme de mutilations volontaires ou d'un malheur accidentel, tel un compromis entre la tendance à se détruire et les forces qui s'y opposent." (5).
Une des caractéristiques de ce glissement est que l'on abandonne la dimension exclusivement imaginaire de l'idée de suicide et que des éléments de nature symbolique (dates anniversaires ) ou de la réalité (organisation des modalités du geste) émergent.
Ce glissement peut être perçu et inquiéter l'entourage, surtout si le discours et le comportement habituel du sujet revêtent une tonalité différente. Walter (6) a bien montré qu'une meilleure connaissance des plaintes des patients suicidaires pourrait permettre de mieux identifier un éventuel "syndrome pré-suicidaire", décrit par Ringel (7), et dont une tentative de validation a été proposée par Ahrens et Linden en 1996 (8). Il se définit comme un syndrome transnosographique indépendant de tout diagnostic psychiatrique visant à mieux prédire le risque immédiat de passage à l'acte et caractérisé par :
- une constriction croissante de la personnalité à la fois au niveau situationnel (repli sur soi, limitation des relations interpersonnelles), psychodynamique (restriction des émotions et des mécanismes de défense) et des idéaux (réduction du sens des valeurs),
- une inhibition de l'agressivité soit par refoulement, soit par retournement de celle-ci, témoignant d'un intense contrôle de la tension intérieure,
- un envahissement fantasmatique par les idées de suicide qui occupent toute la vie imaginaire.
Poldinger, quant à lui (9) définit le suicide comme l'aboutissement de trois stades successifs : l'idée suicidaire, la période d'ambivalence et la décision définitive.
Le passage du premier au dernier stade peut être rapide par "réaction de court-circuit" chez les impulsifs, les psychopathes ou les schizophrènes par exemple. Par contre, dans les états dépressifs, le deuxième stade peut être prolongé, ce qui revêt une certaine importance pour la détection car c'est pendant cette période que peuvent être exprimées les idées suicidaires.
Cremniter (10) a ainsi montré que les troubles dépressifs prédominent nettement dans un groupe d'idées de suicide comparé à un groupe tentatives de suicide. Pour Poldinger, une fois la décision prise, le patient devient plus calme, ce changement devant particulièrement attirer l'attention.
L'évocation d'idées de suicide avec ou sans intention plus ou moins planifiée, est une situation que le médecin généraliste ou le psychiatre rencontre souvent. Même si ces praticiens peuvent estimer que parmi leur clientèle il n'est pas souvent question de suicide, il faut savoir qu'un grand nombre de suicidants ont consulté un praticien dans les jours ou semaines précédant leur passage à l'acte. Cette situation entraîne la plupart du temps un tel malaise que patient et praticien préfèrent éviter jusqu'aux termes de suicide ou de mort, au profit d'allusions du genre "penser à mal", "faire une bêtise", avoir de "mauvaises idées". Il peut s'agir, chez le patient, de tentatives de dénégation (autrement formulé : un dire qui ne peut se dire vraiment) plutôt que d'un abord direct du désir d'autodestruction ; cependant, le praticien ne saurait donc méconnaître que de telles allusions peuvent être reprises comme des amorces destinées à faciliter l'énoncé par le patient lui-même de ce dont il est réellement question.
Une fois dépassé ce moment, et pour aider le sujet suicidaire, le praticien devra être particulièrement attentif aux différentes modalités d'expression de ce désir de mort. Certains expriment leurs idées de suicide de manière très explicite. Le médecin, souvent conforté par l'entourage, arguant qu'il a "tout pour être heureux", peut être alors tenté de mettre en doute ces propos, surtout s'ils sont exposés sur un mode ironique ou détaché. A tout le moins, la tentation est grande de minimiser l'intensité du désir de mort. Parfois aussi, l'interlocuteur est impressionné par un discours logico-métaphysique dont la rigueur apparente peut le faire basculer de la compréhension à la complicité, sous couvert du respect de la liberté d'autrui. En fait, de telles rationalisations cachent le plus souvent de profondes détresses en évacuant tout affect pénible pour le plus grand confort des interlocuteurs.
Mais très souvent, plutôt que d'être exprimées en clair, les idées de suicide se traduisent indirectement dans des discours qui expriment les thèmes suivants, dans un contexte de profond désarroi :
- se sentir de trop, inutile,
- désir de rejoindre un être cher décédé,
- dispositions testamentaires sans nécessité logique, legs ou vente d'objets auxquels le sujet est attaché (souvenirs personnels, livres, jeux...),
- organisation de funérailles ou demandes concernant le don du corps,
- désir de fuite, d'évasion (voyages impulsifs),
- désir de dormir longtemps, véritable recherche de nirvana, de l'annulation des tensions, désir infantile de retour au sein maternel,
- désir de "faire peau neuve", espérance d'une nouvelle vie...
Bref, autant de perspectives qui ne s'ouvrent pas sur la mort vue comme but ultime mais qui s'y réfèrent comme à un moyen de déboucher sur autre chose, de fuir une certaine forme de vie. Ces évocations d'un certain rapport à la mort peuvent être bénéfiques et leur expression doit être facilitée par la qualité de l'accueil et par une écoute exempte de toute complaisance morbide.
C'est ainsi que dans la pratique clinique le médecin peut être confronté à différents cas de figure à partir de l'expression d'un désir de mort :
1°) - il peut s'agir d'un patient qui présente un état dépressif majeur, voire un accès mélancolique franc d'apparition récente avec la sémiologie habituelle comportant les idées de mort, de ruine, d'indignité avec la classique douleur morale intense. Il est bien évident que, devant un tel tableau l'hospitalisation s'impose.
2°) soit s'il s'agit d'un patient qui ne présente pas les caractéristiques évidentes d'un état dépressif mais qui peut s'autoriser à évoquer des idées suicidaires à son médecin traitant. Cela constitue un élément très important car le patient estime que le médecin est en mesure d'entendre de telles idées ou menaces sans prendre le risque d'une contre-attitude rejetante ou moralisatrice. Le lien de confiance avec ce médecin paraît solidement établi.
A partir de là, deux situations peuvent être envisagées :
- soit l'entretien permet de mettre en évidence que le patient est déjà psychologiquement engagé dans l'élaboration du processus du passage à l'acte et que par ailleurs le médecin arrive à percevoir des affects dépressifs. Dans ce cas il convient de travailler avec le patient sur la base du lien de confiance et de mettre en route un traitement antidépresseur et anxiolytique mais surtout de revoir le patient dans un délai court, maximum d'une semaine, afin de réévaluer la situation et décider une hospitalisation si nécessaire.
- soit le patient ne paraît pas encore dans la disposition mentale de préparation d'un passage à l'acte, ses idées restent encore assez floues ou allusives, l'entretien ne met pas en évidence d'élément dépressif patent : dans ce cas le praticien ne doit pas se précipiter dans le sens d'une prescription médicamenteuse mais proposer au sujet une série d'entretiens pour essayer de clarifier un peu mieux la signification de ces idées suicidaires.
La problématique du moment du passage à l'acte reste encore hautement aléatoire, tous les stades pouvant être décrits entre une prise de médicaments psychotropes étalés sur plusieurs heures (volontiers associée à l'alcool) jusqu'au geste auto agressif brutal. De la même façon, nombres de sujets hésitent entre auto ou hétéro agression, le suicide étant en réalité un condensé des deux.
Une telle disparité dans les modalités du passage à l'acte a amené certains auteurs à inventer le concept de "para suicide" (11).
La même disparité se retrouve dans les éléments déclenchants, de la simple mauvaise note ou réprimande aux situations extrêmes.
Par contre, la mise en scène du geste est hautement signifiante, réalisant une sorte d'arrêt sur image du film de son existence, qui va laisser une impression parfois indélébile chez autrui.
Il apparaît immédiatement dans cet instant de découverte qu'un message est livré, dans des lettres d'explications ou d'adieux, (12) mais parfois il est à déchiffrer dans l'énigme du geste lui-même. Ainsi, dans le cas des suicides par intoxication par exemple, est-il intéressant de savoir à qui appartenaient les médicaments ingérés. Lorsque d'autres moyens sont mis en uvre, qui peuvent être très divers, leur valeur sémiologique n'est pas non plus dénuée d'intérêt en particulier quant à l'intentionnalité du geste mais il faut se garder d'en donner une interprétation réductrice (13).
En dehors de situations relationnelles particulièrement détériorées où le suicidant est délibérément ignoré ou laissé sans assistance (ce qui constitue une infraction caractérisée) des secours sont sollicités. Il est en effet impératif d'évaluer l'urgence et de prendre les dispositions nécessaires.
Certains conjoints, parents ou amis sont parfois tentés de limiter l'intervention des secours au strict minimum : la visite du "médecin de famille", espère-t-on, permettra de maintenir le patient à domicile. Ainsi s'exprime la crainte que l'intervention d'autres témoins (ambulanciers, infirmiers, réanimateurs, psychiatres...) n'aggrave la situation par une publicité intempestive ; on cherche en somme à éviter que les problèmes, exprimés ou non, ne "sortent de la famille". Cette tentation n'est pas dépourvue de risque : si la dangerosité toxicologique d'un geste suicidaire peut ne pas nécessiter par elle-même de surveillance intensive ou de soins particuliers, l'existence même de ce geste témoigne d'une perturbation dans les relations et d'une impossibilité - au moins temporaire - d'y faire face. Tout cela nécessite une évaluation attentive et éventuellement des soins appropriés. Il faut ajouter que la nature et la dose des produits ingérés sont souvent imprécis, voire dissimulés, et encore préciser que l'idée très répandue (y compris chez les soignants) selon laquelle une tentative de suicide médicalement peu grave correspond à un faible "désir de mort" s'avère parfois cruellement inexacte. Le désir de mort est en effet complexe : s'il existe une relation entre gravité médicale et intention suicidaire, (14) elle n'est ni systématique ni fiable lorsqu'on raisonne sur des sujets et non sur des échantillons.
Ainsi semble-t-il prudent et opérant de prendre très au sérieux les sujets qui ont effectué un geste suicidaire, si bénin soit-il, et parfois même ceux qui en manifestent seulement l'idée ou l'intention, car la relation thérapeutique s'avère tout aussi utile à ce stade (15). L'examen clinique doit alors requérir autant une totale disponibilité du praticien à l'expression spontanée du sujet (les situations humaines sont si variées qu'il est a priori difficile de les répertorier) que porter sur le repérage de signes traditionnellement évocateurs d'un processus psychopathologique dont nous verrons ultérieurement les conséquences qu'il faut en tirer.
Le plus souvent, les suicidants motivent leur acte en invoquant leur incapacité à surmonter leurs conflits et leur besoin de ne plus y penser ; ils se mettent alors, par le biais d'une intoxication médicamenteuse ou d'un autre geste, à l'abri, "hors-jeu" ou hors d'état de continuer à penser et à vivre dans cet état de déréliction. Le sommeil devient un refuge, une recherche d'apaisement, d'abaissement des tensions qui peut évoquer le nirvana, le retour à un état antérieur marqué par la sérénité, l'absence de tout conflit ou de toute menace (17). La plupart du temps, ce qui est imaginé s'arrête-là : les patients ne sont pas en mesure de discuter les conséquences possibles de leur acte, faute de les avoir pensées.
Le séjour hospitalier permet que se renouent des liens avec l'entourage dans un lieu tiers et suffisamment neutre : la famille, le voisinage, les copains... Tous ces témoignages viennent en quelque sorte répondre à une question essentielle implicite dans les gestes suicidaires, qui est celle du désir de l'entourage quant à la vie ou à la mort du sujet ("Veulent-ils que je vive ?" ou "Que leur ferait ma mort ?"). Etre ou ne pas avoir été désiré est une plainte qui revient fréquemment au cours des entretiens avec les suicidants (18).
La pratique clinique montre que la sémiologie des situations suicidantes est labile, trompeuse et présente des aspects assez particuliers : elle n'est pas forcément identique à celle qui a précédé l'acte et se montre extrêmement mobile, sensible à l'ambiance ainsi qu'aux relations interpersonnelles. Ainsi la perception du type de fonctionnement mental, par le même thérapeute peut être très différente à peu d'intervalle et on observe de notables divergences d'évaluation si plusieurs cliniciens interviennent successivement pendant le séjour hospitalier. Certes cela peut constituer un écueil dans l'appréciation de la sémiologie et inciter à se donner le temps d'une rencontre à distance de la crise 19). Il convient cependant de ne pas négliger ce que cette vision kaléidoscopique témoigne de mécanismes défensifs, des diverses parties du monde interne, de ses expressions archaïques et pulsionnelles. Les choses se compliquent lorsqu'on prend en compte l'effet abréactif mais non résolutif des tentatives de suicide : les symptômes présentés avant le geste suicidaire et qui ont participé à sa genèse peuvent disparaître après l'acte, surtout si "l'effet pragmatique" (20) du geste a entraîné la résolution apparente du problème manifeste. D'où une tentation de minorer l'état du suicidant et de se rassurer à bon compte, "l'effet cathartique" valant alors autant pour le patient que pour celui qui l'écoute.
Mais quand bien même le geste aurait un effet naturellement libératoire, il n'est en règle que transitoire. Une écoute attentive décèle le retour rapide d'affects dépressifs, anxieux ou autres qui signent la persistance de la souffrance initiale.
Ainsi peut-on observer, selon la disponibilité de l'interlocuteur, plusieurs manières d'évoquer un geste suicidaire : si l'on y cherche des raisons précises, des causes repérables, ou si la nécessité de "comprendre" se fait trop impérieuse, le sujet y répondra volontiers par un récit banalisé de faits ou de disputes auxquels il semble extérieur, où la gravité du risque létal est déniée derrière une volonté de dormir, où la "bêtise" confessée fait rapidement place à un repentir affiché... Par contre, lorsque l'interlocuteur n'est pas spécialement préoccupé par la seule recherche de signes objectivables ou de causes identifiables, lorsqu'il est personnellement formé à l'écoute (de ce qui se passe en lui ou de ce que dit l'autre), lorsqu'il peut laisser ouvert le champ de ce qui peut se dire, alors il devient possible d'accéder à une histoire personnelle, à une conflictualité où le geste suicidaire laisse fugitivement entrevoir son message plus ou moins déchiffrable (21).
De la même façon, il y a lieu de bien distinguer les temps du discours du suicidant (avant ou au moment du geste, par rapport à l'après-coup) dont les données évoluent très vite, notamment en ce qui concerne la place d'autrui : bon nombre de sujets se culpabilisent au réveil de n'avoir pas pensé à leurs enfants ou à leurs parents... L'envahissement du drame ou de la détresse qu'ils ont vécu a souvent été tel qu'ils ne s'y reconnaissent plus et s'obligent à des considérations moralisantes si l'interlocuteur s'y prête...
A titre d'exemple, une situation extrêmement courante, étiquetée "conjugopathie", permet d'appréhender les véritables enjeux d'un geste suicidaire (22).
La fréquence de cette situation l'élève quasiment au rang d'entité nosographique. Il s'agit de l'incrimination par un sujet suicidaire ou suicidant de l'attitude de son conjoint, dont il se dit victime. Très souvent, les soignants en restent là et se contentent de cette plainte qui fait l'objet d'échanges de vécus - qui ne s'y reconnaîtrait pas ? - plus que d'une analyse clinique sérieuse. Elle montrerait que le suicide représente souvent dans un couple la première revendication sérieuse d'altérité : la conjugopathie pose la question de l'altérité comme question de vie ou de mort.
Dans la tentative de suicide, l'histoire actuelle, quelle qu'elle soit, n'est pas la racine du dernier geste, elle en est la fleur. C'est ainsi qu'on retrouvera dans les antécédents par exemple un deuil récent ou traumatique, la perte d'un enfant ou d'un parent, ou encore un avortement parfois ancien : une rupture en cache souvent une autre. C'est même bien souvent dans les générations antérieures que l'on dévoilera ici une mort violente, là un manquement resté secret à l'honneur personnel, familial ou national. De nombreux travaux (23, 24) ont montré les enjeux d'un suicide par rapport aux générations passées ou à venir : ils dépassent très largement les conflits actuels mis en avant, parfois comme l'écran de souffrances plus secrètes (inceste, naissance illégitime).
Ainsi l'amour dont il est question dans les "conjugopathies" concerne-t-il un champ bien plus étendu et méconnu que celui dans lequel les conjoints et leurs interlocuteurs soignants le contiennent généralement.
La qualité des conditions de sortie est donc indissociable de la qualité de la rencontre telle qu'elle s'est déroulée depuis l'admission et comporte en outre la prise en compte de la réponse de l'entourage au message émis par le suicidant.
Le geste suicidaire de par son déterminisme essentiellement inconscient, ne peut que s'inscrire dans la répétition. Tant que le message reste méconnu, la perspective de la mort s'insinue dans les pensées du sujet. La répétition représente une manière de demande, pas toujours clairement adressée, souvent en souffrance, susceptible d'effondrement comme c'est le cas dans la situation mélancolique où la demande est effondrée et le sujet télescopé avec l'autre ; il n'y a pas plus de moi que d'autre ou comme l'écrivait Freud "l'ombre de l'objet est tombée sur le moi"..
La tentative de suicide névrotique essaie de mettre en scène le désir sans que le sujet ne l'articule réellement en son nom propre, ce qui est une façon de se faire connaître sans se faire reconnaître (c'est ainsi qu'il faut comprendre certaines réactions des sujets suicidants après leur geste : "c'était sur un coup de tête..." ; "je voulais juste dormir"). Le geste adresse à l'autre une question le plus souvent non formulée, non élaborée. Cette demande comporte un versant affectif essentiellement représenté par la dépression et l'anxiété. L'anxiété est la forme que prend l'appréhension, l'inquiétude devant l'avenir lorsque le sujet ne peut s'appuyer sur son désir. Quant à l'affect dépressif, il témoigne de l'écart qui sépare l'idéal de la personne de ses réalisations subjectives effectives. Enfin, certaines personnes décrites comme narcissiquement fragiles, ne supportent rien et font de tout événement, quelle qu'en soit l'importance apparente, des enjeux de vie ou de mort ; l'autre ne peut avoir de valeur en tant que sujet ; il n'existe que tant qu'il assure une fonction d'étayage. Ce fonctionnement est caractéristique des personnalités étiquetées "border line" dont les confins avec les états psychopathiques, névrotiques et psychotiques restent flous. Le concept de "co-morbidité" est d'ailleurs souvent invoqué. Toujours est-il que dans cette perspective psychopathologique, de nombreux travaux ont permis une meilleure compréhension de la problématique de la répétition. Ainsi P.C. Racamier (25) propose, pour rendre compte du multirécidivisme, le terme de "suicidose" : il repère sous ce concept une organisation de caractère plus ou moins durable dont le symptôme type est constitué par la tentative et la menace de suicide à répétition. Tout autrement que dans la mélancolie où le suicide est foncièrement sans objet et procède d'une logique délirante, dans la suicidose, "il prend la valeur d'une arme et l'air d'une manuvre. Il participe d'un combat et s'inscrit étroitement dans le rapport à autrui comme à soi-même". Un événement apparemment banal ayant valeur de frustration affective ou de blessure narcissique peut déclencher la tentative de suicide. Un double fait est alors remarquable : l'absence de tout vécu proprement dépressif et de toute émergence ou construction fantasmatique. La suicidose apparaît ainsi comme un système d'agissements puissamment défensif basé sur l'éviction des sentiments de deuil et, dans cette perspective, de toute dépendance affective structurante".
Une autre direction conceptuelle, d'intérêt clinique évident, repose sur la notion d'addiction ou de conduites addictives qui est de plus en plus utilisée dans la clinique comportementale et relationnelle pour mieux caractériser des sujets qui s'expriment par la recherche avide d'un objet, la répétition, l'apparente dépendance, l'utilisation risquée du corps, la recherche de satisfactions immédiates et la proximité de la mort et de la destruction. Certains comme Pedinielli (26) vont jusqu'à évoquer une "addiction suicidante". Cet auteur (27) a décrit un autre mécanisme de la répétition de l'agir suicidaire, lorsque 'l'événement suicide" constitue une forme d'initiation qui est parfois le prélude d'un rite. Quelque chose de la rencontre reste inscrit dans le sujet et l'événement exerce ultérieurement un pouvoir de sollicitation et de fascination sur le sujet. Le geste sera alors susceptible d'être répété soit lorsque d'identiques circonstances critiques se représenteront, soit le plus souvent à cause de ce qu'il a en lui-même procuré au sujet. L'événement suicide est générateur de répétition à la fois par les bénéfices momentanés, par la nécessité de renouveler une expérience qui ne peut permettre à elle seule une élaboration et par la satisfaction pulsionnelle obtenue. La répétition s'inscrit dans le schéma que Freud proposait pour la pulsion en ouvrant ainsi sur la répétition comme "retour" en liant mort, jouissance et mère toute puissante. D'autres auteurs (28) ont souligné comme facteur de répétition l'effet du traumatisme psychique et de l'agression (violences accidentelles, surtout volontaires, sexuelles en particulier, maltraitances etc) chez certains suicidants. En effet, l'auto-agression apparaît chez certains patients comme le dernier maillon d'une chaîne parfois longue d'agressions, qui peuvent devenir une source pulsionnelle prévalente. Elle sont alors plus ou moins consciemment recherchées. Elles installent une sorte de "traumatophilie interne" qui est attente mêlée d'angoisses et de désirs. La répétition se renforce, risque de devenir compulsive. Ce sont parfois les mêmes patients, bien connus des services d'urgence, qui expliquent avoir été tantôt renversés sur la voie publique, opérés en catastrophe, agressés par surprise. On peut penser dit-il que "sur cette chair traumatisée qui est la leur, le plus léger heurt suffit en effet à raviver d'anciennes lésions. Ils n'ont de cesse de retrouver l'excitation, la sur-excitation traumatique d'autrefois". Ces références n'ont d'autre but que de souligner encore si besoin était le lien profond entre tentative de suicide et répétition. Cette donnée psycho-dynamique de base s'exprime au plan clinique et épidémiologique par ce que l'on dénomme la récidive, dont le risque et la gestion préventive mobilisent de manière très active aussi bien les équipes soignantes que les chercheurs en santé publique.
Le risque de récidive représente en effet une véritable hantise régulièrement invoquée tant par les soignants, les familles, relayés parfois par les instances officielles (administration hospitalière, justice par exemple), le psychiatre se trouvant mandaté, mis en demeure d'assumer seul l'évaluation et la prévention de ce risque.
La tentative de suicide est souvent considérée comme le facteur de risque de suicide le plus significatif, et parfois le seul réellement prédictif. Environ 1% des suicidants se suicident dans l'année et Diekstra (29) fait état de 10% à 14% de risque de suicide vie-entière chez les suicidants. De 30% à 60% des suicidés sont des récidivistes. J. Guillet (30) dans un travail à partir de sujets suicidés a montré que les sujets ayant effectué plus de 5 tentatives de suicide sont sur-représentés dans la population suicidante à pronostic fatal.
Durant la première année de suivi le risque de suicide est 50 fois celui de la population. Granboulan (31) a retrouvé après une durée moyenne de plus de 11 ans 48% d'un groupe de 265 adolescents suicidants graves. Parmi les patients retrouvés 31 % ont récidivé et 12% se sont suicidés. Pour 74% d'entre eux des signes de difficultés psychologiques persistaient Parmi des suicidants hospitalisés en psychiatrie et suivis durant 5 ans, Johnson-Fridell (32) trouve 13% de suicide, la plupart dans les deux premières années. Les caractéristiques associées au suicide sont l'âge et les troubles de l'humeur. Les caractéristiques associées à la récidive sont la jeunesse, les troubles de la personnalité et le fait d'avoir des parents qui ont été traités en psychiatrie.
Des recherches épidémiologiques et psychodynamiques plus fines seraient nécessaires, pour mieux différencier par rapport à la continuité de l'histoire du sujet, les modalités de survenue des récidives : c'est ainsi que la clinique permet d'observer tantôt une succession de gestes suicidaires sur une courte période, véritable "état de mal", tantôt des gestes ponctuels à intervalles relativement éloignés sur une longue période (plusieurs décennies), tantôt enfin des gestes ponctuels ou répétés sur une
durée de quelques années (33).
Plus que la mort naturelle, la mort par suicide induit un stress sévère chez les survivants parce qu'elle laisse toujours penser qu'on y est plus ou moins impliqué. Les sentiments de culpabilité sont toujours présents et d'autant plus intenses qu'on a pu éprouver pour la personne suicidée des sentiments ambivalents. Le déni de la réalité, est une première réaction fréquente qui, avec le sentiment de culpabilité, fait partie du processus de deuil.
Au cours de ce processus, le médecin rencontré peut être le médecin légiste, lorsqu'une autopsie a été pratiquée : les familles l'interpellent comme "dernier témoin" à avoir vu la personne décédée. Elles recherchent auprès de lui l'existence d'une lésion cachée ou secrète, la révélation d'un dernier message que seule l'observation avisée du corps permettrait de décrypter. Ces familles ont besoin, pour continuer à vivre, de reconstruire imaginairement l'histoire vécue avec la personne suicidée et d'y trouver une logique qui leur évite de consacrer la faillite de liens interpersonnels qu'ils ont contribué à tisser.
Un risque assez fréquent réside dans le maintien d'un silence concerté à propos de cette mort par suicide, destiné à en "protéger" les membres estimés les plus fragiles (on pense naturellement d'abord aux enfants). Ce non-dit provoquera des dissonances bien plus dévastatrices que la reconnaissance du suicide : le suicide dans une génération, lorsqu'il reste non dit, devient parfois objet de transmission et ce type de situation pourrait avantageusement faire l'objet d'un travail d'élaboration psychique, pour en éviter la répétition.
Ce même type de dissonance dans les réseaux de communication sociale rend difficile l'appui, le soutien que les endeuillés pourraient recevoir de leur entourage. Il existe chez les endeuillés d'un suicide une particulière vulnérabilité aux affections physiques consécutives au stress et un taux de suicide qui pourrait être significativement supérieur à celui de la population générale. Les pays anglo-saxons organisent des thérapies brèves, familiales ou de groupe, pour y remédier.
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Dernière mise à jour : dimanche 29 octobre 2000 19:36:11 Monique Thurin