La prise en charge suicidaire est ici traitée sous la forme de trois questions successives, ce qui pourrait entraîner quelques brèves répétitions. En raison de la nature de la question à traiter (les spécificités associées à lintervention en situation de crise), nous devons constater quil nexiste que très peu de preuves scientifiques fondées sur des études contrôlées bien conduites (evidence-based medicine, evidence-based psychology). Ainsi, les recommandations retenues sont le résultat dune convergence de points de vue (consensus non formalisé) des auteurs les plus reconnus et cités dans la littérature.
La première question aborde directement les moyens à mettre en uvre en vue de désamorcer une crise suicidaire. Cependant, cette question en suggère plusieurs autres et soulève des interrogations quant aux modèles dintervention qui ont démontré une efficacité dans le traitement : Qui peut désamorcer quel type de crise suicidaire? Comment évaluer le potentiel suicidaire de manière adéquate? Et, enfin, peut-on enseigner à désamorcer une crise suicidaire? Pour y répondre, nous discuterons, dans un premier temps, des concepts théoriques qui servent dappui à ce mode dintervention. Nous proposerons de faire une distinction entre lintervention pouvant être réalisée par des intervenants professionnels et paraprofessionnels (voir le Lexique en annexe) au moment dune crise psychosociale, et lintervention durgence psychiatrique qui devrait être du ressort dintervenants professionnels. Une juste évaluation de la crise est nécessaire pour réaliser une intervention efficace. Ainsi, chaque intervenant devrait être bien formé, pour un type dintervention particulier, afin de pouvoir agir avec assurance et efficacité. La formation, la supervision et le suivi des interventions constituent des conditions essentielles à la réussite de lintervention en situation de crise. Nous terminerons lexamen de cette question en discutant de la place de la prise en charge psychologique ainsi que des enjeux et des défis à relever en vue délaborer des interventions différentielles efficaces en fonction des sous-groupes de personnes suicidaires.
La deuxième question permettra daborder les modalités spécifiques à lintervention durgence en phase de crise. Nous discuterons aussi des actions à prendre en vue de réduire laccès aux moyens létaux pour la personne suicidaire. Cette question sera traitée dans une dimension dintervention clinique et non dans une perspective globale de santé communautaire.
La réponse à la troisième question sera sans doute la plus incomplète. Nous discuterons des pistes de réflexion dont il faut tenir compte dans lélaboration dinterventions spécifiques associées aux comportements suicidaires, en fonction de certains facteurs de risque dont lâge, les types de crise et les lieux dintervention.
Enfin, chaque question sera traitée en tenant compte de trois dimensions : une première en regard des données scientifiques dont nous disposons actuellement pour appuyer les modèles dintervention; une deuxième en fonction dune préoccupation clinique visant à diminuer la souffrance de la personne suicidaire; et, enfin, une dernière au sens dune préoccupation denseignement des techniques dintervention en situation de crise à des professionnels de la santé. Cette discussion tient compte des biais personnels de lauteure puisquelle est à la fois chercheure, psychologue clinicienne possédant une vaste expérience dintervention en situation de crise auprès de personnes suicidaires, et professeure.
Dernière mise à jour : dimanche 29 octobre 2000 19:36:11 Monique Thurin