N° 15 Janvier/Février/Mars 1999



Sommaire


Le comité

SCIENTIFIQUE

H. Allain (Rennes)

J.-M. Azorin (Marseille)

M. Bourin (Nantes)

P. Boyer (Paris)

J.-P. Chabannes (Chambery)

J.-M. Danion (Strasbourg)

G. Darcourt (Nice)

M. Faruch (Toulouse)

M. Ferreri (Paris)

J. D. Guelfi (Villejuif)

J.-P. Kahn (Toul)

J.-P. Olié (Paris)

P.J. Parquet (Lille)

M.F. Poirier (Paris)

F.Rouillon (Créteil)

D. Sechter (Besançon)

J.-L. Terra (Lyon)

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Editorial

Le coût économique des troubles bipolaires et de la dépression (Marc Bourgeois)

Focus

Événements de vie et dépression : la "Havard Grant Study" (Françoise Radat)
Antidépresseurs et/ou ECT ? (Patrick Delbrouck)
Anesthésie et ECT : quel produit choisir ? (Patrick Delbrouck)
Importance de la continuité des soins chez les suicidants (Françoise Chastang)
Vers une prévention secondaire des conduites suicidaires chez les adolescents présentant des conduites addictives ?

Jalons

Facteurs de vulnérabilité génétique dans la maladie maniaco-dépressive (Franck Bellivier)

Le comité de

RÉDACTION



PUBLICATION :

Serge Friedman
Dominique Denninger

RÉDACTION :

Vincent Caillard
(Rédacteur en Chef)



Daniel Bailly (enfant et adolescent)
Thierry Baubet (ethnopsychiatrie)
Renaud de Beaurepaire (neurobiologie)
Franck Bellivier (génétique) Marc Bourgeois (deuil et dépression)
Françoise Chastang (épidémiologie)
Jean Michel Chignon (comorbidités)
Jean Cottraux (psychothérapie)
Quentin Debray (dépression et personnalités)
Patrick Delbrouck (ECT, imagerie)
Pierre Morel (histoire, humeurs)
Françoise Radat (événements stress)

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Revue des revues

adolescent
biologie
chronobiologie
clinique
comorbidité
culture
dépressions résistantes
échelles
effets secondaires
enfance
épidémiologie
essais thérapeutiques
événement
génétique
imagerie
lithium
long terme

médico-économie
messagers cellulaires
neuroendocrinologie
neuromédiateurs
neurophysiologie
neuropsychologie
personnalité
pharmacologie
pharmacocinétique
photothérapie
post-partum
prévention
psycho-immunologie
psychothérapie
récepteurs
sida
sismothérapie
sommeil
suicide
sujet âgé
thérapeutique
trouble bipolaire
trouble affectif saisonnier

Biologie

Dépression et cytokines

(Renaud de Beaurepaire)

Forum Pfizer

Formes cliniques et efficacité antidépressive de la sertraline : une étude ambulatoire

Humeur

Les voies du soigneur sont impraticables (Pierre Morel)


EDITO


Le coût économique des troubles bipolaires et de la dépression

Keck, McElroy, et Duwan (Journal of Bipolar Disorder, vol 2, n° 1, 1998) rendent compte d’un rapport conjoint de l’Université de Harvard et de l’O.M.S. (qui a déjà fait l’objet en partie des deux articles dans le Lancet en 1997, l’un par Jenkins et l’autre par Murray et al.). Pour l’année 1990, si l’on évalue le coût global des maladies, sur les 10 causes principales de handicap, 5 sont des troubles psychiatriques : troubles bipolaires, dépression, schizophrénie, alcool, trouble obsessionnel compulsif. Les projections pour les 20 années à venir prévoient une augmentation de 10 à 15 %. Outre le coût personnel, familial et social, il existe un aspect économique pour ces maladies psychiatriques qui représentent, comme on le répète dans notre idiome xylo-glossique médico-administratif, un « réel problème de santé publique».


Les facteurs de handicap dans les troubles bipolaires sont liés essentiellement au début précoce (15-20 ans) qui compromet les apprentissages scolaires, universitaires et professionnels; et à la récurrence de cette affection. Après un premier épisode, il y a un risque de 80 à 90 % de voir apparaître de nouveaux épisodes. C’est une maladie de toute la vie. D’autre part, la guérison symptomatique ne coïncide pas avec une complète guérison fonctionnelle et il restera souvent une certaine incapacité, avec même parfois une détérioration progressive si les épisodes se répètent. Or, le diagnostic est encore rarement fait dès le début des troubles.


Le dollar étant la mesure de toute chose, on a apprécié de façon quantitative le coût des troubles bipolaires. Greenberg et al. (1993) donnent, pour l’année 1990, les chiffres suivants : pour les patients bipolaires traités : perte de 152 millions de journées de travail; et pour les non traités : 137 millions de journées de travail (vaut-il mieux pour autant ne pas traiter?). La diminution de productivité due aux troubles bipolaires et à la dépression a coûté 6.5 milliards de dollars U.S. pour les hommes et 9 milliards de dollars pour les femmes (plus vulnérables que les hommes à la dépression, comme on sait). Kessler et Frank (1997) attribuent aux troubles bipolaires 12 jours de travail perdus par mois pour 100 travailleurs. Wyatt & Henter (1995) ont estimé à 45 milliards de dollars U.S. le coût des troubles bipolaires pour 1991 aux U.S.A. : 7 milliards de coût direct (soins) et 38 milliards de coût indirect (17 milliards de perte de productivité, 8 milliards pour les malades suicidés, 6 milliards pour les proches devant se consacrer aux malades...).


Il est démontré que le coût du traitement proprement dit est très inférieur à l’ensemble des dépenses liées directement ou indirectement à la maladie. Toute thérapeutique qui vient prévenir, guérir ou simplement atténuer la pathologie représentera donc un gain évident pour l’économie d’un pays. Ces études sont encore trop limitées.


Six études ont porté sur le lithium. Wyatt & Henter (1995) ont ainsi comparé une année avant lithium (1965) à une année après l’introduction du lithium (1969). Il est considéré que 40 % des patients ne tireront aucun bénéfice du lithium, et qu’un même pourcentage de patients ont été justiciables du lithium en 1969 et en 1983. L’économie liée à la lithiothérapie est estimée à 2.88 milliards de dollars (valeur 1980) pour les 10 années suivant l’introduction de la lithiothérapie, et de 1.28 milliards en gains de productivité, soit une économie totale de plus de 4 milliards U.S.. McCready (1989) estime qu’après l’introduction du lithium, les hospitalisations ont été raccourcies de 14 jours, ce qui a permis une économie de 23 millions livres sterling (valeur 1987).


Ces études sont très importantes car elles pourront peut-être convaincre les responsables de la Santé qu’il faut encore traiter les patients et que les traitements représentent aussi une économie.

Marc L. BOURGEOIS (Bordeaux)